Prologue
« Laisse moi partir, supplia-t-il. S'il te plaît. »
Les deux poignets liés par une chaîne de fer qui frottait sur sa peau, le prisonnier, dans sa chambre noire et glacée criait à l'agonie. Retenu par des liens de métal sur l'ensemble de son corps, il était incapable de bouger et ses menottes bloquaient la circulation de son sang. Il semblait en piteux état ; des cernes maladives sous ses yeux, un teint pâle et morbide, et même ses cheveux d'or avaient perdu leur éclat. Il ne paraissait pas le même qu'avant, seulement, c'était bien lui. Il possédait toujours ce même regard empli de détermination, et cette endurance qui le protégeait de la mort depuis des mois. Seul et attaché dans sa prison, avec son geôlier qui savourait sa souffrance en regardant la vie de son frère se consumer petit à petit. Au fil des jours et des semaines, celui-ci mangeait de moins en moins et commençait à réclamer de la pitié de la part de son gardien, qui continuait à contempler ce désastreux spectacle avec un sadisme déconcertant.
« S'il te plaît, je veux partir, implora une nouvelle fois le détenu. Je n'en peux plus. »
Quelle jouissance pour le grand blond de voir son petit frère ainsi, dépourvu de toute liberté! Il le fixait derrière les barreaux, affichant son éternel sourire respirant son âme pervertie, comparable à celle d'un démon sanguinaire. Il ne se lassait jamais de cette vue. Depuis deux mois déjà qu'il avait entamé ce spectacle perpétuel, et il ressentait toujours un plaisir fou à voir son cadet hurler de douleur. Doflamingo avait cette habitude de se comporter en véritable tortionnaire avec les traîtres comme son petit frère. D'ailleurs, Rosinante, qui savait sa fin proche, regrettait amèrement d'avoir mentit à son aîné. Mais il le fallait. Law n'aurait pas pu être sauvé, sans lui et ce mensonge.
« C'est hors de question, Corazon, rétorqua son frère. Tu pourriras dans cette cellule, quoi qu'il arrive. »
Le traître grinça des dents et serra des poings pour contenir toute la rage qu'il avait en lui. Il se retenait d'insulter son ancien chef de tous les noms, pour éviter d'écourter son espérance de vie. Le simple fait de provoquer la colère de son frère aîné le terrifiait, car il était conscient à quel point la frénésie de celui-ci pouvait être poussée à son paroxysme. De nature violente et perfide, Doflamingo ne cessait de songer à des idées destructrices qui pourraient sans doute transformer le monde tel que nous le connaissons en un véritable enfer à lui seul. "J'ai sauvé Law de cet enfer, se disait-il alors qu'il s'imaginait mourrir dans la neige, deux mois auparavant. Il est libre à présent.". Étendu sur la neige, et le sang coulant le long de son corps, il s'apprêtait à rendre son dernier souffle. Mais les choses s'étaient passées autrement.
« Je sais que, à tes yeux, je t'ai trahi dit-il avec une once de regret dans sa voix. Mais que cela te coûtera-t-il de me laisser partir? »
L'aîné esquissa un sourire des plus inhumains avant de jeter un regard hautain à son jeune frère. Ce dernier fronça les sourcils de frustration ; en cet instant, il ne désirait qu'une seule chose : que Doflamingo cesse de le provoquer ainsi. L'état de colère et de désarroi dans lequel il était se mêlaient à cette insatisfaction de ne pas pouvoir se mouvoir à cause de ses liens de fer. Et à chaque fois qu'il tentait un quelconque geste pour se débarrasser de ses chaînes, il sentait ses menottes se resserrer contre ses poignets et ses muscles se crisper.
«À ce que je vois, tu es toujours aussi borné, petit frère, soupira Doflamingo. Tu ne comprends rien. »
Doflamingo toucha du bout de ses doigts une des barres de métal qui entouraient la cellule de son prisonnier. Il pouvait discerner l'expression invaincue mais pitoyable de ce dernier à travers l'ombre de la pièce. Le séjour dans cette prison, qui semblait interminable, semblait laisser indifférent le plus jeune et ne pas abîmer son éternelle ténacité. Il n'abandonnerait pas de sitôt, et le plus vieux savait comment Corazon pouvait être opiniâtre et entêté. Rien ne lui fera changer d'avis, que ce soit la torture ou la menace de mort ; il refusera de baisser les bras et continuera à lutter pour sa vie.
« Que devrais-je comprendre? interrogea le cadet. Qu'est-ce que tu veux de moi à la fin?
Le plus vieux eut un petit rire dédaigneux, qui avait le don d'énerver son jeune frère. Ce rire insolent et méprisant qui caractérisait tant Doflamingo ne laissait personne inaperçu, outre le fait de porter son habituel manteau à plumes roses. D'ailleurs, cet accoutrement excentrique avait valu au blond le surnom de "flamant rose", qui ne faisait qu'agacer le chef de la Family. Alors que ce dernier s'apprêtait à partir de la prison où se trouvait son détenu, il répondit à la question de celui-ci.
« Juste...que tu restes ici. Laisse-moi te garder dans cette prison. »
