Harry Potter et la Marionnette                   

Prologue : Lauréline Vostrop

_ Vous pensez que son niveau est suffisant pour rentrer en cinquième année ?

_ Assurément ma chère, assurément, j'ai rarement vu quelqu'un qui apprenait aussi vite.

La femme fronça les sourcils sans cesser de regarder l'homme qui marchait à ses cotés. Elle était plutôt grande, avec un visage dont la sévérité des traits était renforcée par une paire de lunettes carrées, posées sur son nez aigu, et par ses cheveux noirs tiré en un chignon très serré. Elle portait un tailleur strict et marchait d'un pas énergique. Lui était grand, maigre, avec une longue barbe et de longs cheveux argentés, des lunettes en demi-lune surmontaient son nez aquilin et il avait un bouquet de fleurs à la main. Son vieux visage resplendissait de bienveillance et de bonhomie vêtu d'une redingote rouge bordeaux d'un autre âge, qui s'accordait fort mal avec ses tennis jaunes, il marchait en léchant une glace au citron.

_ Etions-nous obligés d'y aller déguiser ainsi ? demanda la femme d'une voix sèche

_ Allons Minerva, pour eux ce sont nos frusques habituelles qui sont des déguisements.

La femme s'appelait Minerva McGonagall, professeur de métamorphose du collège de sorcellerie Poudlard, l'homme était Albus Dumbledore, directeur de Poudlard.

_ Tout de même vous avouerez que ce n'est pas courant.

Le vieil homme hocha la tête en souriant.

_ En effet, cela n'est arrivé que deux fois depuis la création de l'Ecole, mais à chaque fois cela a donné des élèves brillants, très brillants même.

Le couple s'arrêta devant une maison construite en brique rouge, sur la porte était accroché un 12 en cuivre. L'homme appuya sur la sonnette. Peu après la porte de la maison s'ouvrit laissant apparaître un petit homme malingre aux cheveux frisés et aux sourcils presque inexistants.

_  Bonjour, dit Albus Dumbledore, je suis le directeur de Poudlard. Vous avez demandé à me voir il y a deux jours !

Le visage du petit homme s'éclaira prestement, il alla au portail, l'ouvrit et invita les visiteurs à entrer.

_ Venez, leur dit-il d'un ton surexcité, venez… vous avez fait vite ! Il y a à peine trois jours que j'ai renvoyé le hibou à Lauréline… c'est drôlement efficace comme postier !

Ils étaient maintenant dans la petite entrée de la maison.

_ Chérie, cria l'homme, les professeurs de Lauréline sont là !

Les visiteurs étaient arrivés dans un salon décoré par d'édifiantes aquarelles quand une femme descendit les escaliers. Elle devait être âgée de près de quarante ans, son visage était fin, presque maigre, et sans couleur et ses yeux gris paraissaient tristes. Ses cheveux noirs descendaient en cascade sur ses épaules. Elle semblait aussi indifférente et nonchalante que son mari était prévenant et empressé. Elle serra mollement la main des nouveaux venus et les invita à s'asseoir dans des fauteuils disposés autours d'une table basse.

_ Je vais préparer du thé, dit le petit homme d'une voix aigue, à moins que vous préfériez autre chose

_ Non, du thé sera parfait. Dit le professeur McGonagall

_ Très bien, et vous Monsieur le directeur ?

_ On m'a parlé de quelque chose que j'aimerai bien goûter. Si vous en avez bien sûr. On m'a dit que ça s'appelait du Coca Cola.

Le professeur McGonagall semblait mal à l'aise au milieu de cette salle où les tableaux et les photos accrochés sur les murs ne bougeaient pas, où l'horloge se contentait d'indiquer l'heure et où le miroir ne faisait aucune réflexion. Le professeur Dumbledore, quant à lui, paraissait tout à fait à l'aise.

D'une voix traînante, la femme s'adressa au professeur McGonagall.

_ Notre petite Lauréline ne vous pose pas trop de problèmes j'espère.

_ Au contraire, Mrs Vostrop, c'est une élève remarquable, elle est très attentive et apprend très vite. En continuant à ce rythme, elle pourra rentrer en cinquième année sans réel retard… C'est du moins l'avis du professeur Dumbledore.

Mr Vostrop rentra dans la pièce avec un plateau sur lequel étaient posées trois tasses, une théière encore fumante, un verre, une petite bouteille de Coca et un sucrier.

_ Veuillez nous excuser, nous ne vous attendions pas si tôt. Nous n'avons même pas eu le temps d'aller acheter quelques biscuits.

_ Ce n'est pas grave du tout, Mr Vostrop, Mrs McGonagall et moi vous remercions de votre accueil chaleureux.

L'homme paru ravi du compliment et s'assit avec un sourire de bienheureux. Le professeur Dumbledore versa le coca dans son verre et en bu quelques gorgées puis, après s'être léché les babines, il demanda à Mr et Mrs Vostrop pourquoi ils avaient voulu le voir.

Le regardant fixement, Mrs Vostrop répondit.

_ Vous savez monsieur…

_ Dumbledore.

_ Oui, c'est cela, excusez nous Mr Dumbledore. Vous comprenez, nous ne connaissons rien à la magie et au monde qui lui est lié et, comme notre fille vient d'y rentrer, je pense qu'il serait bon que nous sachions, nous aussi, de quoi il retourne.

_ Vous voyez, enchaîna Mr Vostrop, notre fille, comme toute adolescente de quinze ans est dans une période de…mutation. Le dialogue entre elle et nous n'est pas toujours évident et, si lorsqu'elle rentrera à la maison pour les vacances, Lauréline nous parle sans que nous comprenions ce qu'elle cherche à nous dire et sans que nous sachions répondre à quoi que soit je crains que les relations entre notre fille et nous ne se dégradent encore.

Le professeur Dumbledore fixa son verre durant quelques secondes puis, après l'avoir reposée il dit d'une voix calme.

_ Je comprend vos inquiétudes et je crois que le mieux serait que vous soyez au courant de ce que va étudier votre fille à Poudlard…

Lorsque le professeur Dumbledore et le professeur McGonagall furent de retour à Poudlard, la nuit était tombée depuis déjà quelques heures. La lourde et haute porte de bronze du château leur fut ouverte par Argus Rusard, le concierge de l'école. Argus Rusard était un grand homme au teint livide avec des joues tombantes, des yeux rougis et de longs cheveux bruns qui lui tombaient sur la nuque. Il était irascible, connaissait le château pratiquement comme sa poche et était une véritable terreur pour les nouveaux élèves les autres s'étant habitués tant bien que mal à sa mauvaise humeur et à ses accès de colère. Rusard avait une chatte nommée Miss Teigne celle-ci passait tout son temps à rôder dans les couloirs du château et, chaque fois qu'elle surprenait un élève en infraction, en raison d'un curieux lien qui l'unissait à son maître, Rusard apparaissait quelques secondes plus tard, les bajoues frémissantes et la mine revêche.

_ Vous avez fait bon voyage ?

_ Fort bon, Argus, je vous remercie. Répondit Dumbledore.

_ Mademoiselle Vostrop est-elle couchée ? S'enquit le professeur McGonagall.

_ Non, elle tenait absolument à vous attendre. Elle est dans la Grande Salle, elle…elle joue avec Miss Teigne.

Rusard avait prononcé cette dernière phrase la gorge serrée. Lui, mieux que quiconque savait à quel point sa chatte était détestée de tous les élèves. Voir quelqu'un d'autre que lui  s'occuper d'elle l'avait bouleversé.

Rusard, suivi des professeurs McGonagall et Dumbledore se rendirent dans la Grande Salle. Cette pièce était la salle centrale du château c'est là que les élèves et les professeurs mangeaient, qu'avaient lieux les bals et les fêtes, et c'est ici que l'on réunissait les élèves quand une annonce importante avait lieu. Le plafond de la Grande Salle était enchanté afin de refléter le ciel au dessus du château. Ainsi on pouvait avoir l'illusion de manger à ciel ouvert.

En temps normal, cinq tables étaient dressées au centre de la Grande Salle mais, durant les vacances, quatre d'entre elles avaient été poussées contre les murs et seul la table des professeurs accueillait ceux qui venaient dévorer l'excellente nourriture préparée par les elfes de maison.

Assise sur une chaise, une jeune fille, à la peau très pâle et aux cheveux bruns lui tombant sur le bas du cou, tenait dans ses bras Miss Teigne. Lorsque les trois adultes entrèrent dans la salle, la jeune fille leva la tête, découvrant un visage presque parfaitement ovale où brillaient deux yeux vairons et où une bouche d'un rouge sanguin contrastait avec la blancheur de sa peau. Apercevant son maître, la chatte sauta des bras de Lauréline et accourue vers lui. Rusard quitta la salle après avoir adressé un franc sourire à la jeune fille.

_ Tu as déjà mangé Lauréline ? Demanda Dumbledore en se mettant à table

_Oui, professeur.

Baissant la tête elle demanda à voix basse s'ils avaient vu ses parent

_ Oui, répondit le professeur Dumbledore, ce sont des gens charmants et vous aviez raison, c'est excellent le coca… Il faudra que j'en parle aux cuisines. Ajouta-t-il avec un sourire.

_ Qu'avez-vous fait aujourd'hui mademoiselle ? demanda le professeur McGonagall

_Le professeur Trelawney a voulu m'initier à la divination mais je crains que mon troisième œil ne soit pas très développé. Dit-elle avec un sourire moqueur.

Le professeur McGonagall le lui rendit, alors que le professeur Dumbledore étouffait un éclat de rire. La méfiance du professeur de métamorphose à l'encontre de la divination était bien connue à Poudlard.

_ Avez-vous dit à mes parents que je rentrais dans deux semaines ?

_ Bien sûr, dit le professeur Dumbledore en mâchant une pomme de terre, ils sont d'ailleurs pressés de te voir.

Lauréline se leva la mine radieuse.

_ Je vous remercie, permettez moi de me retirer j'aimerai réviser un peu pour mes examens avant d'aller me coucher.

Une fois qu'elle fut sortie, le professeur Dumbledore regarda sa collègue.

_ Elle est charmante n'est-ce pas ?

_ Charmante et sérieuse, Albus. Rectifia le professeur McGonagall.

Dans le salon d'un vieux manoir, Lucius Malefoy s'affala au fond de son fauteuil. Il passa une main sur son visage.

_ Queudver ! Appela-t-il

Queudver, un petit homme rondouillard entra dans la pièce. La tête rentrée dans les épaules, les mains dans les poches de sa robe s'il ne disait mot, on le sentait ruminer de mauvaises pensées à l'encontre de son compagnon.

_ Apporte-moi à manger et tâche que cela soit meilleur que la dernière fois.

Queudver sorti en grommelant. Tâche que cela soit meilleur, et comment je fais moi ? pensa-t-il. On n'a plus que quelques œufs, de la farine, des biscuits et des fruits confits… vivement qu'Avery revienne.

Malefoy se leva et fit quelques pas sur le tapis rongé aux mites qui couvrait le mauvais parquet de la salle. Cela faisait plus de seize heures qu'il était réveillé et lui aussi aurait bien aimé se reposer un peu. Mais Malefoy, ne se plaignait pas, le maître l'avait choisi et il savait que le maître récompense bien ceux qui le servent avec dévouement. Et Lucius Malefoy ne voyait quel dévouement pouvait être plus grand que celui qui revenait à annihiler son identité jour après jours, dans un château au milieu de nulle part avec pour seule compagnie ce maladroit de Queudver.

Malefoy s'arrêta de faire les cents pas et regarda d'un œil mauvais le globe de verre rempli d'étincelles multicolores qui était posé sur une table à droite du fauteuil.

Il bailla bruyamment. Pourquoi Queudver était-il si lent ?

_ Alors ? Cria-t-il

Quelques secondes plus tard, Queudver entra avec un gâteau posé sur un plateau en étain.

_ Qu'est-ce que c'est ? Grogna Malefoy

_ Avec ce qu'il restait, je n'ai pu faire qu'un cake. Gémit Queudvert en regardant son compère avec crainte.

_Un cake… soupira Malefoy en passant une main dans ses cheveux blonds pâles.

Queudver coupa le gâteau en tranches et passa le plateau à Malefoy qui s'était rassit dans le fauteuil. Puis, il alla s'asseoir sur une petite chaise dans un coin de la salle pour y grignoter ses biscuits.

Lucius examina la tranche de cake avant de mordre dedans.

_ Pas mauvais. Finalement il semblerait que tu disposes d'au moins un talent.

Queudver se renfrogna. Devant sa mine bougonne, Malefoy éclata d'un rire froid.

_ Allons, Queudver, ce n'est pas parce que tes pouvoirs sont ridicules que tu ne sers à rien. Tu m'es très utile. Sans ta modeste contribution le plan du maître ne pourrait se réaliser.

Lucius Malefoy mangea encore quelques parts de gâteau puis se leva.

_ Il est temps pour moi aussi d'aller me reposer.

Juste avant de sortir, il se retourna et balaya la pièce de son regard gris et froid.

_ Essaye de faire un peu de ménage d'ici demain matin. Dit-il à Queudver.