Prologue

De la buée se formait à la moindre respiration, le soleil froid brillait dans le ciel bleuâtre du petit matin. Harry embrassa d'une accolade son parrain puis s'extirpa de la luxueuse voiture noire. Seul sur le trottoir, il le regarda démarrer puis disparaître dans le flot de la circulation, rajusta son sac de cours sur son épaule et, après avoir vérifié que la voie était libre, traversa. Le lycée avait vomi devant ses portes tout ce qu'il comportait d'élèves fumeurs, seul lieu où ils n'étaient pas encore traqués. Harry se faufila parmi la foule anonyme massée là le temps d'une récréation jusqu'au hall d'entrée. Il cogna à la vitre du bocal du concierge pour attirer l'attention de celui-ci et se fit orienter vers le service administratif. Le directeur l'accueillit en personne, cela ne le surprit pas. Harry l'acceptait comme s'il s'agissait de quelqu'un d'autre. En un sens, c'était le cas.

Le tour du propriétaire fait à l'aide d'un prospectus qu'il avait déjà eu en main lorsque son parrain lui avait lui-même présenté l'établissement qu'il pensait lui avoir choisi, un ancien couvent dans le quartier le plus huppé de la capitale, Harry fut invité à rejoindre sa classe pour sa première heure de cours de la journée avec, l'apprit-il, celle qui serait sa professeur principale pour l'année. Le cours avait commencé depuis près d'une demi-heure déjà quand il frappa à la porte. Il n'aurait pu rêver soigner meilleure entrée.

Madame McGonagall avait été avertie de sa venue et ne lui tint pas rigueur de son retard bien compréhensible. Intérieurement, Harry ne put s'empêcher de se demander si l'accueil aurait été moins indulgent s'il n'avait pas été qui il était devenu. Il se savait mauvais élève, son bulletin de notes bénéficierait-il du même traitement de faveur ? L'argent, découvrait-il, ne faisait pas que vous acheter une nouvelle vie. Il transformait les gens qui vous entouraient. Il ne voulait pas l'oublier.

Harry n'avait pas la fibre littéraire. Il avait choisi cette filière pour l'unique raison qu'il avait pensé pouvoir davantage y faire illusion que dans une autre. Après tout, il devrait passer les épreuves anticipées du bac d'ici quelques mois. Son parrain semblait sincèrement penser qu'il les réussirait. Pour se faire, il déboursait sans compter. Harry était ravi de savoir que son héritage était si judicieusement dépensé.

Aux regards que lui adressèrent ses désormais camarades de classe, Harry sut que la présentation traditionnelle sur l'estrade était inutile. Madame McGonagall la lui infligea malgré tout. Il la maintint au plus stricte nécessaire : son nom (il s'était suffisamment entraîné dans un miroir pour ne plus s'emmêler la langue). Harry Potter. Le reste, ils l'auraient lu dans les journaux (ou, plutôt, entendu à la télévision).

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