Dans un petit village de campagne, vivait une belle jeune femme âgée de 18 ans à peine, aux cheveux longs ondulant sur ses épaules et brillant au soleil. Ses yeux en amande couleur noisette pouvaient envoûter n'importe quel homme qui croiserait son regard. Son charme était qu'elle n'en avait pas conscience. La vie en France à cette époque n'était pas faite que de strasses, de fêtes et d'insouciance comme à Versailles. Ici, en tant que fille de paysan ce n'était que misère, et lutte quotidienne pour ne pas se laisser mourir de faim. Alors qu'Olympe venait de finir une dure journée de labeur. Tout en remontant l'axe principal pour retourner à sa modeste demeure où elle vivait là seule avec son père, un grand bruit de tambours résonnait alors dans les rues. Se laissant guider par les percutions, elle arriva sur la place du village. Pratiquement tous les villageois étaient rassemblés et formaient un cercle autour d'une troupe française qu'elle reconnut à leur uniforme comme celle de la garde royale. Une voix tonna au loin, Olympe battant des coudes tenta de s'approcher un peu plus. Se mettant sur la pointe des pieds, elle reconnu alors son père au centre entouré de deux autres hommes. La garde royale tenait leur fusil en joue, ce qui se présageait n'annonçait rien de bon. La jeune femme entendit alors des cris de révoltes s'élevaient ici et là. Olympe tenta une nouvelle fois de se rapprocher, non sans mal.

- Messieurs Pujet, Quevert et Manirant, vous êtes accusés de fraude et d'escroquerie envers la cour de France. Au nom de la cour, moi le Général en chef, je vous informe que vos terres vous sont confisquées, et vos dettes sont à régler sur le champ !

- Nous n'avons plus un sou, même pas de quoi assez pour nourrir nos enfants et nous habiller, comment voulez vous que l'on paye quoique ce soit ?

- Vos récoltes, nous prendrons alors sur vos récoltes !

- Vous savez très bien que nous avons essuyé trop de sécheresse pour que nos terres aient produit assez...

- Ce sont les ordres du Roi, coupa l'officier, Messire Lazare, mettes-les aux fers !

Plusieurs hommes protestèrent, leur colère grondait. Ils furent aussitôt ramener à l'ordre au son d'un coup de feu. Celui qui venait de tirer était un homme d'une trentaine d'années, brun au regard froid et aussi sombre que la nuit. Il inspirait trouble, méfiance et peur même. On pouvait y lire toute la cruauté qu'il dégageait, tous les muscles de son corps étaient tendus, et certainement recelait une grande force par les heures d'entrainement imposé par son poste au sein de la garde royale. Mais ce que seule lui inspirait cet homme à Olympe, était la méfiance, la défiance et le mépris. Elle le connaissait, ce Lazare de Peyrol avait la réputation de n'épargner personne et d'être aussi impulsif qu'imprévisible. Il tira à nouveau un coup de feu en l'air pour être sûr que la foule ne réagisse plus et menaça le prochain de l'abattre sur le champ s'il entendait un quelconque raclement de gorge. L'officier de Peyrol s'avança d'un pas lourd vers les trois hommes serrant à chacun les bracelets de fer. Olympe pouvait tenir son tempérament fier de son père. Ce dernier garda le regard droit devant, ce qui lui valut une torsion du poignet par les bons soins de ce maudit Lazare. La violence de ce supplice trop forte, sous les yeux d'Olympe, son père laissa échapper un cri de douleur tout en s'agenouillant.

- Personne ne me défit ! Et tous se mettent à genou face à moi. Rugit alors Lazare, serrant sa prise sur Pujet.

- Peyrol ! ça suffit ! Emmenez-les à la Bastille !

Olympe reprit conscience soudainement, la peur de voir son père maltraité l'avait figée sur place. Elle réussit cette fois à fendre la foule, elle s'y dégagea et hurla faisant stopper le Comte de Peyrol dans sa marche. Il se retourna vivement, Olympe ne bougea plus et ancra son regard au sien. Son cœur battait à tout rompre, elle ne savait pas pourquoi elle l'avait fait, ce n'était que s'attirer encore plus d'ennuis. Mais elle ne pouvait pas rester là sans rien faire, et laisser l'injustice emmener son père.

- Je... Mon père n'a rien fait, laissez-le partir !

Lazare repoussa alors son père sans ménagement vers ses soldats, puis il avança vers la jeune femme. Olympe retenait son souffle et tendit son corps pour que rien ne flanche. Il prit une mèche de ses cheveux qu'il fit glissa entre ses doigts pour l'humer ensuite. Il la scrutait du regard, la dévisageait sous toutes les coutures en tournant autour d'elle. Un sourire malsain se forma sur ses lèvres, Olympe recula d'un pas, la proximité de cet officier la rendait nauséeuse. Lazare se posta à nouveau face à elle, puis sans prévenir il leva la main et la frappa d'une force qu'Olympe vacilla sous le choc. Au sol, sa main posée sur sa joue rougit par le coup, Olympe entendit la voix de son père crier son nom qui fut aussitôt étouffé d'un coup de poing dans le ventre par Lazare qui avait rejoint les prisonniers.

- Prenez-moi à sa place ! Je vous en prie... mon père ne survivra pas.

- Non Olympe... non... - Assez !

Lazare asséna à nouveau un coup au visage à Pujet. Il revint vers Olympe, pris son menton entre ses doigts gantés de cuir et lui souffla à l'oreille :

- Ne t'inquiète pas ma jolie, nous nous retrouverons je t'en fais la promesse.

Il maintint le visage de la jeune fille et avec violence lui embrassa son front. Olympe encore sonnée, son père emmené les poignées menottés vers la plus terrible des prisons, ne fit plus aucun geste. Elle vit les soldats entourer à nouveau les prisonniers et les pousser vers une carriole tirée par deux chevaux. Son regard dévira quelque peu et rencontra deux iris vertes noyées dans des cheveux noirs de jais.

Contrairement aux autres, et surtout à ce rustre de Lazare de Peyrol, ce jeune soldat avait une sorte de mélancolie peinte sur son visage juvénile recouvrant d'une légère barbe brune ses joues. Etrangement il lui inspirait une curiosité à le connaître et peut-être lui faire confiance.
Au loin, Ronan de Mazurier, soldat et homme de Lazare de Peyrol assistait impuissant à cette scène menée d'une certaine folie par ce Lazare qui parfois ne retenait plus sa haine envers le bas peuple. Bien qu'il n'approuvait aucunement ses méthodes, il ne pouvait malheureusement rien faire. Il s'était engagé dans l'armée, pensant rendre service à son pays et se battre pour ses couleurs. Au lieu de ça, il menottait et emmenait de pauvres hommes rongés par la famine et la misère. Il emprisonnait et punissait ceux qui ne payaient pas leurs dettes et ne se soumettaient pas à l'autorité. Si seulement il pouvait réussir à faire taire ces injustices, arrêter ces bêtises pour faire descendre Lazare de son piédestal. Ronan aimerait le faire tomber lui et sa folie, ainsi que son obsession d'éradiquer les miséreux de son chemin pour rendre les rues plus propres comme il se plaisait souvent à le dire.

Le sentiment de faire régner une justice égale pour tous cognait de plus en plus souvent dans sa poitrine. Et cette fois-ci quelque chose l'avait touché plus qu'il n'aurait su le dire. Était-ce cette jeune femme qui avait défié Lazare sous les yeux de tous, son acharnement de ne pas laisser ses hommes emmener son pere et les supplier de la prendre à sa place, comme lui l'aurait certainement fait si il avait été à sa place ? Ou bien était-ce peut-être ses yeux, d'une couleur indéfinissable mordorée légèrement, qui fonçaient selon son humeur, passant de la noire colère, à la sombre peur et au clair désarroi. Ronan se surpris à se demander de quelle couleur ses yeux seraient sous la supplique d'un sourire.

Si sa raison ne lui avait pas crié de ne rien faire, Ronan se serait précipité sur la jeune paysanne quand celle-ci tomba sous le coup de son supérieur. Il eut l'impression de recevoir comme un coup de couteau en plein cœur. Inexplicable sentiment, son poing s'était resserré faisant blanchir ses phalanges.
Alors qu'il venait de monter en dernier dans la carriole, Ronan se sentit happé en arrière, des paysans venaient de se ruer vers eux, et d'un coup, ce fut un bain de foule qui se souleva contre eux. Les villageois leur avaient foncés dessus en criant toute leur hargne qu'ils éprouvaient pour la cour de France. Ronan réussit à se défaire des mains de trois hommes qui l'avaient rué de multiples coups au visage. Sans sortir son arme, le jeune homme évita les coups et esquivait les assauts.
Soudain, un coup de feu retentit laissant place à un silence qui fut déchiré par un hurlement. La bataille engagée cessa aussi vite que la balle qui avait sifflé dans l'air. Tous profitèrent de cette accalmie pour se dissiper à travers les rues, les soldats avaient embarqué les prisonniers, sans se soucier du sort d'un des leurs. La poussière s'étiola, et fit entrevoir un corps inerte, Ronan planqué à l'angle d'une bâtisse vit alors la jeune femme prénommée Olympe se jeter sur cet homme qui ne se relèverait plus. Elle le suppliait de rouvrir les yeux, de se réveiller. Mais après quelques lourdes minutes de silence, il vit alors la jeune femme s'étendre aux côtés de son père, reposant sa tête sur son torse et laissant alors ses sanglots recouvrir la place vide. Ronan ne put tenir une minute de plus et s'enfuit alors, bien qu'il aurait voulu rester à ses côtés et jeter son uniforme au feu.

Après deux jours de marches intensives, il franchit enfin l'entrée de sa demeure, referma violemment la porte, et fila dans sa chambre sans demander son reste laissant pantois les deux occupants de la maison. Fou de rage, Ronan laissa aller sa colère contre tout ce qui se trouvait en travers de son chemin, les documents placés sur le bureau volèrent dans toute la pièce, il renversa le secrétaire, les livres bien rangés de la bibliothèque valsèrent au sol puis le meuble les rejoignit l'instant d'après. Ronan ne s'aperçut même pas que sa fureur eut un public. Lorsqu'il releva la tête se tenaient dans l'entrebâillement sa sœur et son père. Tous deux le regardaient étonnés et passablement effrayés. Lui qui d'ordinaire était plutôt calme se laissait rarement emporté de la sorte. Solène fut la première à rompre la distance, elle prit sa main dans la sienne lui faisant remarquer qu'il s'était blessé. Elle partit aussitôt chercher de quoi bander sa main entaillée et désinfecter ses plaies.

- Ronan, mon fils que t'arrive-t-il ? Et regarde toi... Ces bleus aux visage, qu'est-ce-qu'il s'est passé ?

Ronan pour la première fois vit son reflet dans le miroir épargné par la tempête de ses émotions. Sa lèvre fendue avait encore la marque du sang séché et sa joue était violacée.

- Père, je ne le supporte plus, il est si vil et injuste et...

- Peyrol ?

Ronan hocha simplement de la tête, soudain prenant conscience de la tornade qu'il avait provoqué dans sa chambre, le jeune homme dépité s'assit sur le lit comme épuisé.

- Tu ne peux rien faire qui pourrait te mettre en danger, qui plus est tu fais partie de la garde royale, tu as un devoir implacable à fournir. Dit son père d'une voix sage et ferme.

- Je le sais, père. Mais toute cette injustice de noyer ces hommes et ces femmes dans leur misère m'est de moins en moins tolérable.

- Peut-être que ce poste de simple soldat ne t'accorde pas assez de crédit pour tenter de faire entendre raison.

- Que veux-tu dire ? Ce n'est pas demain que j'aurai ce fou de Peyrol sous mes ordres.

- Non, certes, mais je commence à me sentir las de ces murs de pierres qui me donnent de plus en plus souvent des rhumatismes, je crois qu'il est tant que je rende les clés de la Bastille.

Ronan, sous la surprise de cette révélation se redressa. Il ne voulu pas en croire ses oreilles. Son père venait de lui dire qu'il raccrochait le poste de lieutenant de la Bastille qu'il occupait depuis des décennies.

- Et je crois, avoir trouvé mon parfait successeur, poursuivis le patriarche d'un ton enjoué.

- Père... - Toi !

- Je ne sais pas...

- Allons Ronan, je ne connais personne d'autre qui peut remplir parfaitement cette tâche. Tu as fait tes premiers pas en ces murs, tes plus grandes parties de cache-cache se trouvaient là-bas. Je n'aurai rien à t'apprendre si ce n'est le côté administratif. Tu seras au cœur du peuple, et tes prises de décisions pourront peut-être faire changer ce monde qui coule sous les vanités et les privilèges.

Ronan d'un regard accepta alors l'offre de son père, à cet instant Solène réapparut bande et alcool pour soigner ses blessures.

- Ca me fait plaisir que tu sois revenu Ronan, on te voit si peu souvent depuis que tu es dans l'armée.

- Je suis désolé ma cher sœur, si je me bats pour notre pays. Mais bientôt tu pourras venir me rendre visite plus souvent. Car je cesse de parcourir les chemins de France pour arrêter de pauvres hommes qui n'ont rien demandé.

- Je ne comprends pas, tu as déserté ! Ronan tu sais ce qu'ils font aux hommes qui...

- Calme-toi ! je n'ai pas déserté. Mais tu as devant-toi le futur lieutenant de la Bastille.

Solène sonda alors son père qui affichait un large sourire de tendresse, puis Ronan qui avait retrouvé son énergie. Quand elle comprit qu'il ne s'agissait pas d'une plaisanterie, elle sauta au cou de son jeune frère qui la fit tournoyer à travers le fracas de la pièce.

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Voilà pour ce tout premier chapitre de cette toute nouvelle mini-fiction !

J'espère qu'il vous aura plu et que cette entrée la matière vous donnera l'envie de découvrir la suite de cette histoire "inversée".

N'hésitez-pas à nous tenir au courant de vos ressentis !

Bises à vous les Sky-volutionnaires :)