Titre : M comme…
Disclaimer : Akira Amano, vous vous en doutez.
Pairing : sûrement un peu de 6918
Rating : M préventif
Genre : Angoisse
Note : Se passe après la bataille du futur, mais toujours dans ce dernier (en clair, tous les personnages ont à peu près vingt ans) RISQUE D'OOC.
Prologue
Dans la pièce, la semi-pénombre camouflait les corps mutilés des ennemis de la Famille. Une odeur écœurante flottait dans l'air, mélange de sueur froide acre, de peur glacée, de sang cuivré, d'organes, extraits de leur corps d'origine, moites et pestilentiels. Ce cocktail olfactif suffocant laissait sur la langue et dans le fond de la gorge un goût de bile. Contre un mur, prostrée, une silhouette. Tout son corps osseux était recroquevillé dans des angles bizarres, lui donnant un aspect étrange. Les longs et fins cheveux sombres dégoulinaient sur les épaules et dans le dos en toiles d'araignées, emmêlés, épais, filasses. Seul un épi défiait les lois de la pesanteur, hérissé au sommet du crâne. Le corps resta inerte pendant un long moment avant de se déplier, grand squelette osseux aux mouvements saccadés. Sa peau cadavérique semblait trop fine pour les os de l'homme trop maigre, maccabéen, presque, qui paraissait trop grand, difforme, ses yeux mangeant son visage de manière surnaturelle, ses yeux vairons qui accentuaient son étrangeté, le bleu paraissant noir et le rouge hurlant au sang, à la tuerie, comme réclamant un tribut morbide quand son frère jumeau n'implorait que le calme et la paix… la fin ? Mukuro fit quelques pas, souillant la semelle de ses chaussures du sang de ses victimes. Il envoya dans le même temps un message télépathique à Chrome, la priant d'annoncer que la mission était une réussite. Il jeta un rapide coup d'œil à la montre d'un des corps sans vie, et se hâta vers l'entrée. Il avait un avion à prendre d'ici une demi-heure. Avant de sortir, il créa une illusion, se camouflant sous l'apparence d'un citoyen lambda qu'il avait dû croiser quelque part. Il sortit de la maison et se força à compter chaque pas qu'il faisait jusqu'à l'aéroport, où il arriva juste à temps pour prendre son vol. Il truqua les détecteurs de métaux et berna les chiens grâce à de belles illusions. Il s'installa sur son siège, côté fenêtre, et multiplia le nombre d'étoiles qu'il voyait par le nombre de pas qu'il avait relevé. L'aube arriva bien vite, et l'avion amorça sa descente. Il sortit et prit sa correspondance. Il divisa le produit qu'il avait obtenu précédemment par le nombre de personnes brunes dans l'avion, puis additionna celui des gens aux yeux marron, retira celui des gens avec des chaussures noires et ajouta zéro virgule trois cents cinquante-sept pour chaque personne ayant pris un sandwich au jambon pour le déjeuner. Enfin, il arriva à Namimori. Toujours sous son apparence factice, il se rendit à son appartement. Il ferma à clef derrière lui, son illusion tomba, révélant sa véritable apparence. Il se traina jusqu'à la salle de bains où il se glissa encore habillé dans la douche. Au moment où il ouvrit l'eau glacée, il se recroquevilla sous le jet polaire, agité de convulsions irrépressibles. Ses yeux grands ouverts semblaient hallucinés. Il avait réussi ! Il avait tenu ! Le manque se faisait cruellement ressentir, mais il n'avait pas succombé à la pression. Il avait tenu trois jours. Et c'était trop. Il ne pouvait plus. D'autant plus qu'il avait dû… A cette pensée, il commença à se frotter frénétiquement, déchirant ses vêtements, parfois sa peau, se griffant jusqu'au sang. Il saisit, pris d'un empressement maladif, la solution hydro alcoolique avec laquelle il se lavait habituellement, et se nettoya bien plus d'une fois. Il sortit enfin de la cabine de douche et se sécha avec une serviette rêche. Il enfila ensuite un yukata bleu nuit et alla dans sa chambre, se recroquevillant sous les draps froids de son lit. Immobile, il écoutait le silence de la chambre, l'obscurité qui régnait, le vide de son cœur, le vacarme de ses pensées. Hurlantes, elles le harcelaient jour et nuit, et les artifices pour s'y soustraire devenaient toujours plus durs à trouver au fur et à mesure qu'il s'y habituait. Ses pensées… Une véritable cacophonie, un maelström d'idées, un bordel d'émotions, de bourdonnements, de chuchotements, de murmures, de cris, de hurlements, de soupirs, de souvenirs, de visions, de supputations, de plans… Tout. Mukuro pensait à tout. En même temps. Il pensait à tout et surtout à ce qu'il voulait oublier. Un rire nerveux le prit, dérivant rapidement en hurlement hystérique. Il essaya, en vain, d'étouffer le son dans son oreiller. Ses mains, comme d'elles-mêmes, commencèrent à labourer la fine peau fragile du cou, faisant jaillir le sang des sillons profonds. Il se leva précipitamment et se rua dans la salle de bains, où il recracha de la bile dans le lavabo, bien qu'il lui semblait que c'était la totalité de son intérieur qui s'en allait. Il tomba en position fœtale sur le sol, se berçant doucement, des larmes brûlantes desséchant ses yeux irrités. Il n'en pouvait plus. Il se leva péniblement, se traîna lamentablement jusqu'à un petit tiroir en dessous de la vasque. Il l'ouvrit, en sortit des lames de rasoir. Il ne pouvait pas en créer grâce à des illusions, dans ces cas-là, ne sachant pas quand elles pourraient flancher. Il fit courir une lame sur l'un des côtés de ses bras, regardant avec soulagement et presque fascination la trainée sanglante suinter. Il traça sa parallèle, puis sa perpendiculaire, et commença à se calmer. Il avait envie de continuer, mais il se força à arrêter. Le moins possible, se rappela-t-il. Le moins possible. Il se fit violence et reposa la lame qu'il avait en main, peinant à faire obéir son corps. Quand il eut réussi à se contrôler, il leva les yeux, et croisa son reflet. Il avait l'air d'un fou. Son teint cadavérique, ses cernes immenses, noirs autour de ses yeux rouges, brûlés d'avoir pleuré. Son image pathétique le remplit d'amertume et de rancœur. Il balança son poing dans le miroir, l'explosant et se lacérant la peau du poing, se brisant quelques phalanges. Des larmes de rage impuissante coulaient à nouveau sur ses joues déjà poisseuses de perles salées. Il avait envie de hurler à ce portrait misérable d'aller se faire foutre, de disparaître, mais il ne pouvait pas : une boule lui obstruait la gorge, l'empêchant même de respirer correctement. Il bascula en arrière, sa tête heurtant le sol en un choc sourd. Il ahanait et geignait pitoyablement, et, d'une main, saisit l'un des multiples éclats de miroir tombé au sol, s'entaillant profondément la main. Il se planta la lame de verre violemment, dans l'abdomen, le torse, le haut des cuisses, le visage…
Au matin, il se réveilla fiévreux, endolori, lourd. Ses membres étaient gourds et il n'arrivait plus à penser correctement. Il resta dans un état catatonique toute la journée, alternant entre pertes de consciences fiévreuses et maux de têtes lancinants. Son esprit brumeux flottait à des années-lumière de là.
A l'autre bout de la ville, quelqu'un soupira. Il avait interrogé Chrome qui lui avait rapporté que la connexion avec son sauveur était momentanément coupée, par lui-même, puisqu'il lui avait préalablement envoyé un message. Il soupira sous le regard inquiet de la gardienne de la Brume. Il se rendit à sa voiture, et, sans se soucier des limites de vitesse, arriva en un temps record à l'appartement de Mukuro. Il déverrouilla la porte et referma à clef derrière lui. A peine avait-il posé une chaussure vernie dans l'entrée qu'il sentit l'odeur de cuivre légèrement poivré du sang. Allons bon, il avait encore craqué. Il se dirigea droit vers la salle de bain ou il découvrit sans surprise aucune le corps mutilé. Il souleva la carcasse inerte, récoltant un gémissement de douleur. Plaçant son fardeau sur son lit, il entreprit de nettoyer les blessures et de les panser. Il changea l'inconscient et a literie. Enfin, il s'agit au chevet de l'autre et commença à remplir des dossiers en attendant le réveil de l'autre. Aux alentours de deux heures du matin, Mukuro ouvrit les yeux. De ses pupilles à l'air mort, il jeta un vague regard à son veilleur, et de dire d'une voix rauque et basse, abimée :
« Tsuna… Yoshi… »
