C'est probablement une très mauvaise idée de poster sur un autre fandom alors que j'ai déjà du pain sur la planche avec La Neige du Grand Nord… mais j'assume !
J'ai commencé à écrire cette fiction cet été et j'ai une avance assez conséquente pour me permettre de publier :)
Alors non, ce n'est pas un Hannigram (même si j'apprécie énormément ce couple), mais bien un Hannibal/OC.
L'idée m'est tombée dessus un peu sur le tas, mais je sais où je vais et, surtout, comment j'y vais.
Pour ceux qui me connaisse un peu, vous savez que j'aime prendre mon temps pour mettre en place l'intrigue principale. Si, ici, la première partie de mon histoire sera plus incisive et moins centrée sur les descriptions, je vous rassure, le rythme de la narration ralentira à mesure que le décor sera planté. Les deux premiers chapitres vont constituer un genre d'introduction assez longue mais qui s'attarde peu sur les détails, d'autant que je pars du principe que vous connaissez un minimum la série et ce qui s'y passe.
ENORME WARNING : Omegaverse, donc -pour ceux qui connaisse- ça implique du lemon assez particulier (mais pas dès le départ, ce n'est pas un PWP). J'insiste là-dessus. Je tiens aussi à préciser que j'y ai ajouté ma petite patte personnelle avec une catégorisation de chaque dynamique (rien d'extravagant, genre y'a plusieurs types d'omégas, plusieurs types de bêta et plusieurs types d'alphas, mais pas 36 non-plus…). Je vous laisserai découvrir tout ça au fil de l'histoire.
Sinon, dans le cas où c'est une grande première pour vous, quelques explications sont de rigueur :
Dans un (une ?) omegaverse, la société est divisée en trois catégories : alpha, bêta et oméga. Grossièrement parlant, chaque dynamique a ses propres particularités, aussi bien physiques que caractérielles, mais surtout, sexuelles. Les odeurs et les phéromones y jouent un rôle prédominant, notamment dans les interactions sociales et dans l'identification d'un partenaire ou compagnon potentiel (équivalent d'une âme-sœur). Hommes comme femmes appartiennent nécessairement à l'une de ces catégories, donc on a aussi bien des alphas femelles que des omégas mâles, et inversement. Les alphas sont vus comme des dominants par excellence, généralement doté d'une force physique et d'un charisme plus élevé que la moyenne, ce sont les seuls (avec les bêtas mâles) qui ne peuvent pas porter d'enfant (dans le sens « tomber enceint(e) »). Les bêtas sont des gens comme vous et moi, qui possède tout de même un odorat capable d'identifier les autres dynamiques (comme chaque individu de ce monde). Les omégas sont dits « faibles » de nature, plutôt passifs et difficilement capables de violence, ils sont plus ou moins bien considérés par la société, généralement cantonnés au rôle de mère ou père au foyer, et accèdent difficilement à certains métiers (militaires, forces de l'ordre, postes de dirigeant…). Qu'il soit mâle ou femelle, tout oméga en bonne santé peut avoir des enfants, donc être enceint(e). Dans les « bonnes mœurs », il est de bon ton pour un(e) oméga d'être en couple avec un(e) alpha de même qu'un(e) bêta aille avec un(e) bêta, mais les couples oméga/bêta ou bêta/alpha sont assez bien tolérés, contrairement aux couples oméga/oméga ou alpha/alpha. La grosse spécificité de l'omegaverse porte sur le mode de reproduction des alphas et des omégas. Je n'ai pas spécialement envie de m'étendre sur le sujet, donc si certains veulent en apprendre plus, posez vos questions sans honte aucune.
Ne me reste plus qu'à vous souhaiter une bonne lecture !
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Chapitre I
L'affaire Bluebeard
...
Les bois de Wolf Trap étaient calmes ces derniers temps, suffisamment pour que Will s'autorise une petite balade avec ses chiens sur l'un des nombreux sentiers qui s'enfonçaient parmi les arbres jusque dans l'obscurité profonde de leurs feuillages denses. Un mois que le printemps était enfin revenu, mais l'air demeurait toujours aussi frais, particulièrement après la dernière tempête qu'ils avaient essuyée, laissant derrière elle une atmosphère chargée d'humidité. Will pouvait encore sentir l'odeur de l'orage.
Il s'était risqué dehors malgré la menace sous-jacente de gros nuages noirs s'amoncelant dans le ciel, à une centaine de kilomètres au Nord. Les intempéries ne s'étaient accordé qu'une brève pause avant de reprendre de plus bel, d'ici deux ou trois heures jugea Will, largement le temps de faire une balade avant que la pluie ne tombe à nouveau.
De toute façon, bon ou mauvais temps l'agent du FBI avait cruellement besoin de cette sortie. La dernière affaire sur laquelle il travaillait était loin d'être de tout repos, particulièrement pour son esprit agité. Une dizaine de jeunes femmes, toutes des omégas non-liées de différentes classes -sociales comme statuaires- et d'apparences distinctes, avaient été enlevées au cours du mois. Rien de très inhabituels dans le monde du crime où les omégas étaient les victimes les plus courantes lorsqu'il s'agissait de rapt, mais cette affaire-là allait bien au-delà du cas si tristement classique de l'alpha enlevant des omégas pour se constituer un harem. Will soupira. Aucune des victimes n'avait reparu -vivante tout du moins-, mais si le FBI l'avait dépêché sur l'affaire, c'était qu'il y avait bel et bien une histoire de meurtres derrière tout cela.
Le kidnappeur donc, était également un meurtrier.
Les jeunes femmes avaient toutes été enlevées sur des lieux qu'elles fréquentaient régulièrement : bibliothèque, cinéma, parc, chemin vers l'université ou le travail, maison… Et, dans chaque cas, peu importe où la fille avait été prise, l'homme revenait se charger de sa famille avec sa nouvelle proie. Autant dire que le résultat n'était jamais plaisant à voir. Le tueur ne s'embêtait pas avec une quelconque mise en scène, il faisait de la charpie et repartait avec sa dernière 'compagne' en date sous le bras. Il voulait susciter le désespoir chez ses victimes, leur faire vivre une transition éclair où il devenait la seule et unique personne à laquelle sa proie devait se rattacher, leur faire comprendre qui était le maître.
Ce tueur-là, Will l'avait ressenti comme un fou furieux qui n'avait pas l'air de savoir ce qu'il faisait, laissant son odeur d'alpha derrière lui sans s'en préoccuper, recherchant uniquement à prouver sa force auprès de celle qu'il venait de se choisir, l'obligeant à regarder alors qu'elle était attachée, incapable de faire quoique ce soit pour les siens, lui prouvant combien elle avait de la chance de tomber sur un futur compagnon aussi capable de la défendre corps et âme, redoublant de violence à chaque nouveau meurtre. L'agent du FBI ressentait son orgueil, mais aussi sa frustration, comme si chaque acte n'était pas assez et comme s'il savait d'avance que ce coup-ci ne serait pas le bon.
Au bout de la deuxième semaine, six filles avaient disparu et deux furent retrouvées, violées et présentées avec mauvais goût sur un autel de fortune, à l'orée d'un bois ou dans un parc, nues et sales, littéralement laissées en l'état après qu'il en eut retiré le plaisir qu'il recherchait. Son travail était presque grossier, surtout comparé aux précédentes affaires que l'agent avait suivies, cela n'avait rien à voir avec le soin méticuleux et le sens de la mise en scène du Chesapeake Ripper ou du Minnesota Shrike -qui pourtant présentait un niveau d'esthétisme moindre, comparé au premier-.
Là où l'affaire sortait d'autant plus des classiques du crime, c'est que le tueur n'attendait pas que ses victimes aient leur chaleur pour les prendre. Généralement, un alpha qui enlevait un ou une oméga en vue d'un accouplement, attendait que dame nature face son œuvre ou bien l'induisait par injection de drogue. Cela donnait à Will cette impression brouillonne, comme si l'homme ne savait pas exactement ce qu'il faisait, malgré que son objectif soit clair. Il voulait une oméga -et seulement une femelle- pour en faire sa compagne, mais ne trouvait pas la bonne. Jack avait supposé qu'il en prenait plusieurs pour augmenter ses chances de trouver celle qui lui conviendrait, mais Will n'y croyait pas. Il n'en voulait qu'une seule et il avait ce besoin urgent et vital de lui plaire, de s'en montrer digne. Il n'essayait pas les femelles omégas qu'il enlevait, il s'essayait sur elles. Il répétait inlassablement sa parade nuptiale -l'enlèvement, les meurtres puis l'accouplement- jusqu'à atteindre la perfection.
Avoir ce type-là dans la tête dégoûtait Will au plus haut point, salissant ses convictions et son propre statut d'alpha.
Les gouttes de pluie qui tombèrent sur son visage le sortirent de ses songes et il siffla pour rappeler ses chiens, prenant la direction de sa maison avant que l'orage n'arrive sur Wolf Trap.
Il arriva chez lui juste à temps et échappa au gros de l'averse, se retrouvant bien à l'abri et au chaud sous son propre toit. Il attrapa un linge pour se sécher bras et visage, et c'est à cet instant que son téléphone sonna.
Le nom de Jack apparut à l'écran. Un autre meurtre donc.
Il décrocha.
« Où ? » demanda-t-il, presque las.
« Le parc de Hopkins. » répondit son supérieur la voix rendue morne par le manque de sommeil.
Une fille retrouvée donc.
« J'y serai. » affirma Will.
...
« Qu'est-ce qu'on a ? » demanda Jack, observant le corps presque entièrement dévêtu de ce qui avait été une jeune femme, reposant sur un banc en bois. Il lui avait laissé sa jupe cette fois-ci, mais rien d'étonnant, cela lui était déjà arrivé de laisser un T-Shirt ou un soutien-gorge. Le tueur déposait juste les corps pour qu'ils soient 'ramassés', comme on laisse sa poubelle sur le trottoir avant que les éboueurs ne passent.
« Becky Carlson. 23 ans. Quatrième fille. Enlevée le 2 avril. » annonça aussitôt Price alors qu'il prenait des photos. « Violée et étranglée comme toutes les autres qu'il nous a laissé. »
« Will ? »
« Rien de plus que la dernière fois, Jack. » soupira-t-il. « Il s'essaye dessus et quand il l'abîme trop, il s'en débarrasse. Celle-là n'a pas plus de valeur à ses yeux que la précédente. »
« Y'a plus qu'à espérer qu'il nous ait laissé quelques indices sur elle… » souffla Price, prenant une dernière photo avant de héler la bande d'assistants pour qu'ils se chargent de récupérer le corps.
...
« Abby… » souffla une voix. « Hey, Abby… Tiens, prend-ça. »
Elle lui glissa sa gamelle remplie de purée et de vieux morceaux de pain.
« Mais tu n'as rien mangé… » murmura faiblement Abby, refusant la nourriture offerte.
« Ce n'est pas grave, tu en as plus besoin que moi. » lui assura l'autre, confiante, poussant le plat contre les barreaux de sa cage.
Abby se força à manger, peinant à avaler sans s'étouffer, se servant de ses doigts comme d'une cuillère. Elle se sentait si sale… Les larmes revinrent emplir ses yeux.
« Chloe… » geint-elle. « Je peux plus… Je… »
« Si. Tu peux. » assura l'autre fermement, cherchant par tous les moyens à lui redonner confiance. « Donne-moi encore deux jours, seulement deux jours. Tu vas y arriver Abby. On va y arriver. »
Elle frotta ses yeux pour en effacer les larmes, tendant ensuite sa main à travers les barreaux pour que Chloe s'en saisisse. Son contact ne lui apporta qu'un maigre réconfort.
« D'accord. » renifla-t-elle, s'accrochant désespérément à sa compagne d'infortune et à l'espoir qu'elle lui donnait.
Elle retint un gémissement de terreur quand le claquement de la porte du hangar principal se fit entendre.
Il était revenu.
...
« Comment avance l'enquête ? » demanda platement Hannibal.
Will était encore à une de ses énièmes séances avec son psychiatre 'non-officiel', assis dans ce même fauteuil en cuir, dans ce même bureau, à la même heure que tous les précédents jeudi soir. Une chance qu'il apprécie un minimum l'autre alpha, car ces séances hebdomadaires auraient été d'un ennui mortel dans le cas contraire.
« Elle n'avance pas. » répondit-t-il, amer. « Toujours plus de disparues et toujours plus de cadavres. »
« J'ai cru comprendre qu'une autre fille avait été retrouvée. » commenta l'autre homme, cherchant à le faire parler autant qu'à se renseigner sur l'enquête. Jack le tenait plus ou moins au courant, la presse faisait le reste.
« La quatrième qu'il a enlevée, oui. » confirma Will. « Il l'a abandonnée comme il a abandonné les précédentes. »
« Que de médiocrité… » se désola le psychiatre. « Cet alpha n'entretient pas de rapports communs avec ces omégas. Son propre instinct lui aurait dicté de les exposer davantage, pas de les laisser telles quelles dans la nature. »
« Il est fier de lui-même, pas de ce qu'il leur fait ou de ce qu'elle devienne. » justifia l'agent.
Le psychiatre joignit ses mains sous son menton pour s'y appuyer, entrecroisant ses doigts alors qu'il réfléchissait à la situation.
« Pourtant ce n'est pas à lui-même qu'il cherche à prouver quelque chose. » finit-il par dire.
« Il veut se présenter sous son meilleur profil pour celle qui sera la bonne. C'est à elle qu'il veut prouver quelque chose. »
« Dans ce cas, peut-être qu'il l'a déjà ? » proposa Hannibal. « Il a toujours avec lui les premières omégas qu'il a prises. »
« Il ne rend que celles qui sont trop épuisées. » fit remarquer Will. « Peut-être que celles-ci tiennent mieux le choc que les dernières… »
« Ce sont des omégas. Avec un stress aussi intense et en étant exposées à ce genre de violences intimes, cela semble peu probable. » démontra néanmoins le psy.
« Mais il ne les garde pas volontairement. » réfléchit Will à voix haute. « Il les enlève, mais ne s'occupe pas d'elle dans l'ordre où il les récupère… » Ça fit tilt dans sa tête. « Il attend qu'elles atteignent un stade particulier. Il ne veut pas d'elles tant qu'elles ne sont pas dans les conditions, dans l'état d'esprit, qu'il souhaite. » comprit-il alors.
Avant qu'il ne puisse ajouter quoique ce soit de plus, son téléphone vibra dans sa poche et il décrocha prestement après un regard d'excuse à l'autre homme.
« On le tient. » affirma Jack à l'autre bout de la ligne. « Si vous êtes toujours à son cabinet, prenez le Docteur Lecter avec vous, il ne sera pas de trop… Je vous envoie l'adresse. »
...
« 911, j'écoute. Quelle est votre urgence ? »
Un sanglot éclate à l'autre bout de la ligne.
« On est dans le vieux zoo… On est attachée, on peut pas… » La voix tremble et plusieurs gémissements effrayés lui échappe avant de déglutir douloureusement. « On peut pas s'échapper… » pleure-t-elle, puis elle supplie : « S'il-vous-plaît… S'il-vous-plaît… »
« Mademoiselle, j'ai besoin que vous restiez calme. Qui êtes-vous et combien êtes-vous ? » se renseigne l'opérateur des urgences.
« Abby… » elle renifle, avant de déclarer plus fermement : « Abigail Hollows. On est six. Ou cinq… Il a pris Chloe. » sanglote la jeune femme, cédant à l'hystérie. « Oh mon dieu, il a pris Chloe… S'il-vous-plaît, s'il-vous-plaît… Il a pris Chloe… »
« Les secours arrivent Abby, ne vous en faîtes pas. » tente de la rassurer l'opérateur. « Il faut impérativement que vous restiez calme, d'accord ? Restez en ligne le plus longtemps possible. La personne qui a pris Chloe, est-elle toujours là ? Est-ce que vous savez dans quel bâtiment vous vous trouvez ? »
Abigail pleure plus fort, s'étouffant avec ses propres sanglots.
« Non… Il est parti avec elle dans l'autre pièce… Il_ » Un cri l'interrompt et la panique saisit la jeune femme. « Chloe ?! Chloe ! »
Sa voix n'est plus qu'un hurlement dans le combiné, appelant désespérément son amie, elle n'écoute même plus ce que lui dit l'opérateur. Le téléphone lui échappe des mains alors qu'elle reste pétrifiée, se blottissant contre le mur froid en béton dans le vain espoir de s'y fondre.
...
« Ils ont reçu un appel d'une des filles. La quatorzième qu'il a enlevée, Abigail Hollows. L'appel a pu être tracé et elle a été localisée dans l'ancien zoo. Jack devrait arriver sur place en même temps que nous, ainsi que l'équipe d'intervention. » informa Will.
Hannibal acquiesça, ses yeux ne quittant pas la route alors qu'il conduisait.
« Le tueur est encore sur place ? »
« Du peu que Hollows ait pu en dire durant l'appel, oui. » affirma l'agent.
La voiture arriva en un temps record sur le site, les deux alphas en sortirent prestement pour rejoindre l'équipe d'intervention, se préparer et prendre les consignes.
« Ok, il va falloir la jouer serrée les gars ! » interpella Jack. « On a trois bâtiments à couvrir et le vent ne joue pas en notre faveur. Le suspect est un alpha d'une trentaine d'année et possiblement le seul élément mâle. Il détient six omégas donc mettez vos masques anti-phéromones, on ne sait pas dans quel état on va les trouver. Je veux quatre agents par bâtiment. Vous connaissez la procédure. » S'approchant d'eux, l'agent Crawford leur annonça : « Vous deux, avec moi. »
Ils pénétrèrent dans le dernier des bâtiments, un genre de grand hangar qui servait autrefois de dortoir pour les fauves, Beverly avec eux, progressant ensemble, pièce par pièce, armes à la main, le psychiatre avançant en dernier, derrière les deux alphas et la seule bêta du groupe. Rendus dans un genre de salle de stockage, ils inspectèrent les lieux minutieusement avant d'être interrompu par un raclement. Ils braquèrent leurs armes vers la source du bruit et trouvèrent, repliée sur elle-même et cachée sous une table, l'une des omégas. Son visage exprimait de la terreur à l'état pur, son corps tremblant par spasmes et seulement vêtue de ses sous-vêtements et d'une chemise sale qui avait un jour été blanche.
Ils baissèrent aussitôt leurs armes face à la jeune femme tétanisée par la peur.
« C'est Abigail Hollows. » la reconnut Will, le visage de chacune des omégas, gravé dans son esprit.
« Je m'en occupe. » assura l'agent Katz, s'approchant d'Abigail pour s'accroupir devant elle. Des quatre, elle était la seule à pouvoir parler à la jeune oméga, son statut de bêta la mettrait plus en confiance que si elle faisait face à un alpha. « Je suis l'agent spécial Katz. Tout va bien, Abigail. Est-ce que tu sais où sont les autres ? » lui demanda-t-elle doucement.
« Il… Il a pris Chloe… » bégaya la jeune femme, se recroquevillant un peu plus sur elle-même quand la bêta tenta un geste de réconfort vers elle. Elle sanglota. « Il a… pris… Chloe… Oh mon dieu… »
L'oméga était au bord de la crise de nerf, prête à exploser sous la force du stress et de la peur qui la terrassait.
« Chloe ? » tenta de comprendre l'agent Katz.
« La deuxième oméga qu'il a enlevée. » précisa Will dans son dos. « Chloe Morris. »
« D'accord. » acquiesça la bêta, avant d'essayer de récupérer l'attention de la jeune femme toujours prostrée. « Abigail ? Il faut que tu nous dises où il est. »
« Il a pris Chloe… » répéta inlassablement l'oméga, perdue dans sa propre terreur.
« Et où est Chloe ? » tenta Will, essayant une autre approche.
Elle sursauta à l'entente du nom de son amie et releva sa tête tremblante pour regarder l'alpha, du désespoir plein les yeux.
« Dans la pièce… au fond du couloir. » murmura-t-elle d'une voix blanche, avant de se murer dans un mutisme profond, ses yeux grands ouverts sur le vide alors que les spasmes reprenaient de plus bel.
Les quatre se consultèrent du regard et il fut décidé que l'agent Katz resterait avec elle, le temps que l'équipe médicale arrive.
« Je vous rejoins dès que possible. » assura la bêta.
Les trois alphas sortirent de la pièce et tombèrent effectivement sur un couloir, une forte odeur de sang imprégnant les murs. Ils longèrent les différentes salles, jetant un œil par le hublot des portes pour tomber sur des cages, tantôt vides, tantôt habitées.
« C'est là qu'il garde les omégas. » informa Will, tandis que Jack avançait toujours.
« De ce que je peux en voir, aucune ne semble gravement blessée. » rassura Hannibal à son côté, observant d'un œil vif les silhouettes prostrées et enchaînées. « L'odeur de sang n'appartient à aucune d'entre elles. »
Ils filèrent jusqu'au fond du couloir, se hâtant pour atteindre la dernière porte. L'odeur cuivrée était plus forte ici.
« Ça ne sent pas l'oméga. » releva Jack, surpris.
« Ni l'alpha. » ajouta Hannibal, son expression se fronçant. « C'est la fragrance d'un bêta. »
Ils se concertèrent une dernière fois du regard, puis les deux agents se placèrent face à la porte, Jack le premier. Il enfonça l'entrée d'un coup de pied, pénétrant aussitôt dans la pièce, Will et Hannibal à sa suite.
« FBI ! Plus un geste ! » somma l'agent Crawford, braquant son arme sur la silhouette qui se tenait debout, l'autre agent l'imitant aussitôt.
La stupeur les prit à la gorge face au tableau qui se dressait devant eux.
L'individu était une jeune femme se tenant dos à eux, seulement vêtue de ses sous-vêtements, des éclaboussures carmines piquetant ses bras et ses jambes, avec à ses pieds le cadavre encore frais d'un homme baignant dans une mare de sang. Elle se retourna, lentement, jaugeant les trois nouveaux arrivants d'un air farouche, resserrant son poing sur l'arme de fortune qu'elle tenait, un long fragment d'os qui avait été aiguisé, aussi maculé de sang que l'étaient ses cheveux, son visage ou sa poitrine. Sa respiration était haletante, son buste se soulevant par vague au rythme de l'air passant dans ses poumons. Elle semblait en transe, bien loin de la scène macabre à ses pieds et des trois alphas qui se tenaient devant elle. La pièce embaumait l'odeur de bêta et la jeune femme ne cilla pas quand Jack l'interpella, la tenant en joue avec son arme.
« Mains en l'air je vous prie. »
Il obtint pour seulement réponse, une vague de tension chez la jeune femme, qui prit une posture défensive, brandissant craintivement sa lame d'os devant elle avant de faire un pas en arrière, manquant de trébucher sur le cadavre, réhaussant son corps comme un félin le ferait pour se préparer à attaquer -ou à prendre la fuite-.
Ce qu'une bêta faisait ici, Will n'aurait pas su le dire. Le ras-de-cou en métal et les chaînes qui pendaient à ses bracelets en fer, indiquaient qu'il s'agissait bien de l'une des victimes. Pourtant, aucune n'avait été annoncée comme étant une bêta, de cela il en était certain.
« Chloe Morris ? » l'interpella prudemment Hannibal, faisant un pas en avant pour dépasser les deux autres alphas.
Son visage était si barbouillé par la crasse et le sang, ses cheveux rendus sombres et humides par le liquide pourpre qui y coagulait, que Will ne l'avait pas reconnue. Elle frissonna violemment, confirmant qu'il s'agissait bien d'elle. Hannibal avait vu juste.
« Il n'y a plus rien à craindre. » assura le psychiatre, faisant un pas de plus dans sa direction, tout l'attention de la jeune femme se reportant alors sur lui.
Elle n'abaissa pas sa lame pour autant, observant l'alpha s'approcher d'elle avec méfiance, ses narines frémirent alors qu'elle captait les phéromones qu'il dégageait, lourdes et puissantes, cherchant à appuyer sur son statut d'oméga pour qu'elle flanche.
L'odeur de bêta, quand bien-même elle l'enveloppait, ne venait pas d'elle, comprit Will, mais de l'homme à terre. Soit leur suspect n'était pas un réel alpha, soit celui-ci courrait toujours. Un regard pointu au corps et quelques secondes d'empathie lui suffirent pour attester que le tueur recherché était bien celui qui gisait-là, mort. Ce que l'agent spécial ne comprenait pas, en revanche, c'était comment une oméga avait pu commettre une telle boucherie. Le tuer, pourquoi pas, mais le niveau de violence qui avait eu lieu ici -Will pouvait le ressentir jusque dans les tréfonds de son âme- ne correspondait en rien au tempérament doux et prudent des omégas.
La jeune femme grogna, feulant presque contre le psychiatre, menaçant ouvertement l'alpha. Hannibal se stoppa à un mètre de sa lame, lui laissant sa zone de confort.
« C'est fini, Chloe. Vous l'avez tué, tout va bien. »
Il tendit prudemment une main vers elle, dans l'espoir qu'elle se raisonne et lui donne la lame, usant d'une plus forte dose encore de phéromones.
Elle fut sur lui en un éclair pour tenter de le poignarder, mais l'alpha avait de bon réflexe. Il attrapa son poignet et l'obligea à lâcher son arme de fortune, l'enfermant entre ses bras alors qu'il plaquait son dos contre son torse. Elle se débattit vigoureusement, griffant et mordant dès qu'elle le pouvait, maculant le costume impeccable de l'homme avec le sang poisseux dont elle était couverte, feulant de fureur. Le docteur resserra son emprise sur elle, vite aidé par les deux agents du FBI. Lorsqu'elle fut immobilisée pour de bon, l'alpha blond sortit une seringue de la poche intérieure de sa veste.
« Un sédatif. » prévint-il les deux autres, avant d'enfoncer l'aiguille dans le cou de la jeune femme et de presser le piston. Elle tenta une dernière fois de se dégager avant que ses muscles ne se détendent contre sa volonté et devint un poids mort contre les deux agents tandis que l'inconscience la gagnait.
Le psychiatre se pencha alors sur elle pour inspirer profondément, la reniflant jusqu'à trouver son odeur sous celle du sang. Ses yeux s'ouvrirent en grand lorsqu'il la trouva, une expression étonnée lui échappant avant qu'il ne se reprenne.
« Oméga agressive. » annonça-t-il aux deux autres alphas, dont les visages se firent graves.
...
« Calvin Shepeard. Bêta de catégorie téméraire. 37 ans. Un électricien sans histoire… jusqu'à aujourd'hui. Son dossier médical indique qu'il a eu quelques problèmes d'ordre psychologique et qu'il a même essayé de changer de genre il y a trois ans, pour devenir -je vous le donne en mille- un alpha. Son instabilité n'a pas joué en sa faveur et tous les chirurgiens qu'il a consulté ont refusé l'opération. » présenta Price, le corps de l'homme en question exposé sur la table d'autopsie. Des mèches de cheveux manquaient sur son crâne, ainsi qu'un peu de peau, son nez ne ressemblait plus à grand-chose et, outre les multiples contusions et plaies qui couvraient sa peau, une partie de sa gorge avait été arrachée. « Notre amie Chloe Morris… » reprit Price « …l'a poignardé à plusieurs reprises avec ceci. » Il leur présenta le fragment d'os qui lui avait servi de lame. « Treize fois pour être exact. Elle l'a aussi frappée, majoritairement au visage et à l'abdomen, lui a cassé le nez, la mâchoire… Elle a aussi essayé de l'étrangler avec ses chaînes et l'a finalement tué en lui déchirant la carotide avec ses dents, comme l'attestent les empreintes dentaires retrouvées sur Shepeard ainsi que les prélèvements buccaux réalisés sur elle. »
Chloe Morris était la deuxième oméga enlevée par Shepeard. C'était la seule des filles dont la famille n'avait pas été tuée, puisque déjà décédée. Son père était mort dans un accident de voiture il y a quelques années et sa mère avait succombé à un cancer lorsqu'elle était enfant. Pas de frère, ni de sœur. Shepeard avait néanmoins tué sa colocataire, mais pas devant elle. La jeune bêta l'avait surpris en train de rentrer par effraction chez elles, Shepeard l'avait tuée dans sa panique et Morris n'avait eu droit à aucune démonstration de force comme les autres filles. Après deux jours d'absence injustifiée, ses collègues de travail avaient fini par donner l'alerte, mais il était déjà trop tard.
L'oméga agressive exerçait en tant que garde-forestier dans le comté, un métier peu rencontré chez les membres de sa dynamique mais qui avait néanmoins permis de retrouver le dossier de la jeune femme assez aisément et de démontrer une fois de plus qu'elle savait faire preuve de débrouillardise.
« Dans quel ordre elle a fait tout ça, on ne le sait pas encore… » ajouta Zeller « …mais ce taré se filmait lorsqu'il s'occupait de chaque oméga donc si on arrive à récupérer la carte mémoire de la caméra on sera fixé. » précisa le bêta, agitant sous leurs nez l'un des sachets en plastique pour la collecte des preuves, dans lequel se trouvait une carte SD abîmée.
« Ils se sont battus. » comprit aisément Will.
« Et elle lui a mis une sacrée dérouillée. » commenta Zeller, regardant avec consternation le cadavre malmené. « Je n'arrive toujours pas croire qu'une oméga ait pu faire ça… »
« Pas n'importe quelle oméga, rappelons-le. » le détrompa Jack. « Docteur Lecter ? »
Le psychiatre opina du chef, s'approchant pour jeter à son tour un coup d'œil à ce qu'il restait de Shepeard, avant d'expliquer :
« Les omégas agressifs ne sont classés comme tels que depuis peu. On les a longtemps considérés comme une tare dans notre société, avant de commencer à les accepter parmi nous. Ils constituent la seule catégorie d'omégas capables de tenir tête à un alpha. Du moins, jusqu'à un certain point. »
« Ce qui explique pourquoi elle ne s'est pas soumise quand vous et moi le lui avons demandé. » releva Jack, regardant Price ranger le corps dans l'un des tiroirs de la morgue.
« C'est même -très probablement- ce qui l'a poussée à attaquer. » précisa Hannibal d'un air entendu. Il y avait désormais une belle griffure sur sa pommette droite, laissée par les ongles de la jeune femme.
« Les omégas agressifs ne reconnaissent pas facilement l'autorité d'un alpha, à moins d'être vaincus par celui-ci. » expliqua Will, se défaisant de ses lunettes pour se masser l'arête du nez, fatigué. « Et maintenant ? » demanda-t-il à Jack. « Qu'est-ce qui va se passer ? »
« La plupart des omégas sont dans un état déplorable, catatonique pour deux d'entre elles. » se désola son supérieur. « Morris ne s'est toujours pas réveillée. Il faudra toutes les interroger dès que les médecins donneront leur accord. Hollows est la plus en état du lot, avec un peu de chance on pourra l'auditionner dans l'après-midi. »
...
« Chloe va avoir des ennuis ? » demanda prudemment Abigail, pas sûre de comprendre où la psychiatre qui lui posait des questions voulaient en venir.
« Pas nécessairement. » la rassura le Docteur Bloom, s'installant sur le bord du lit de l'oméga, se montrant plus amicale, mais sans s'imposer à elle. La bêta avait été choisie afin de ne pas brusquer la jeune femme, l'agent Graham et le Docteur Lecter demeurant en retrait dans la chambre d'hôpital, le temps que l'oméga s'habitue à leur présence et soit mise en confiance. « On a juste besoin de savoir avec précision ce qu'il s'est passé là-bas. J'aimerais que tu nous dises ce que faisait Chloe avant que Shepeard ne l'emporte. » l'invita gentiment la psychiatre.
Abigail darda un regard prudent sur les deux alphas assis près de la porte avant de reporter son attention sur la bêta.
« Elle a pris soin de moi. » insista la jeune femme, répétant au Docteur Bloom ce qu'elle avait déjà dit par deux fois. « Je n'aurais jamais tenu le coup si elle n'avait pas été là. »
La bêta acquiesça devant le regard franc que lui rendit la jeune femme, lui offrant un sourire encourageant.
« Et qu'a-t-elle fait pour toi exactement ? »
« Elle m'obligeait à manger, à rester consciente et alerte, elle m'a même donné certain de ses repas. Elle me disait quoi faire et comment éviter que le… l'autre me choisisse. » balbutia la jeune oméga. « Et puis, elle… »
Son expression se fit très peinée et la psychiatre l'incita à poursuivre :
« Elle..? »
Abigail déglutit, mal à l'aise et honteuse, son visage se tordant alors qu'elle prononçait du bout des lèvres :
« Elle a pris ma place quand il est venu pour moi. »
« C'est là que tu t'es échappée. » compléta la psychiatre, sans se départir de son ton doux.
La jeune femme opina. Le Docteur Bloom s'avança un peu plus pour saisir délicatement la main de l'oméga.
« Est-ce que Chloe t'a dit de le faire ? » lui demanda-t-elle, cherchant à accrocher son regard.
Regardant droit dans les yeux de la bêta, Abigail souffla, catégorique :
« Non. »
...
« Elle ne nous dit pas tout. » soupira le Docteur Bloom, lorsqu'ils sortirent de la chambre pour rejoindre le couloir principal de l'étage.
« Elle ne nous fait pas confiance. » accorda Will. « Rien d'étonnant après ce qu'il s'est passé. Elle sait pertinemment que son amie risque de finir devant un juge si elle ne la présente pas comme une victime et un héros. »
« Indéniablement. » acquiesça Hannibal à son côté. « Elle se sent redevable envers Mademoiselle Morris, mais elle y est aussi très attachée. »
« Ne reste plus qu'à espérer que notre oméga aux tendances meurtrières se montre plus bavarde… » se désespéra la bêta, avant de saluer ses deux collègues pour ensuite prendre le chemin de la sortie.
Will la regarda s'éloigner, pensif.
« A quoi songez-vous, William ? » demanda Hannibal, sans quitter son habituel calme froid.
L'agent le regarda du coin de l'œil.
« Que je suis aussi désireux d'entendre ce qu'elle aura à nous dire, que de la savoir innocentée… » souffla le jeune alpha, perplexe.
Le psychiatre lui offrit un hochement de tête compréhensif.
« Calvin Shepeard n'a eu que ce qu'il méritait, mais vous ne vous autorisez pas à le penser. » souligna l'homme, sans paraître le moins du monde affecté.
« Déformation professionnelle peut-être. » agréa Will. « Je n'ai jamais été à l'aise sur les affaires de viol. »
« Notre part alpha trouve d'autant plus difficile l'acceptation d'un tel geste lorsque la victime est oméga de nature. » abonda le psychiatre, étudiant l'agent sans se cacher. « Vous êtes soulagé de ne plus avoir Shepeard occupant votre esprit, n'est-ce pas ? »
Will frissonna.
« C'est certain. »
L'agent s'en alla à son tour après un hochement de tête en guise d'aurevoir, laissant le psychiatre dans le silence du couloir. Hannibal regarda son patient disparaître derrière l'angle d'un mur avant de prendre le chemin opposé, passant le long des chambres occupées par les omégas retrouvées dans l'ancien zoo, atteignant la dernière pour se stopper devant. Il jeta un dernier coup d'œil aux alentours et entra dans la pièce silencieusement, faisant coulisser la porte en verre dans son dos pour la refermer.
Dans le lit d'hôpital, dormait à poings fermés Chloe Morris. Le bip lent et régulier de son rythme cardiaque indiquait qu'elle se trouvait dans un stade de sommeil profond, bien loin de ce monde et de sa réalité. Il s'approcha sans un bruit, jetant un œil à ses constantes avant d'observer la silhouette endormie au creux des draps, de ses mains fines aux phalanges abîmées jusqu'à ses mèches de cheveux châtains fraîchement lavées, auréole humide et ténébreuse autour de son visage pâle, soulignant les traces de coups sur sa tempe et sa joue droites, tuméfiées mais pas autant que la face ingrate de Shepeard. Ses blessures à elle n'étaient rien en comparaison de ce qu'elle avait fait au bêta. Il avait voulu la mater et c'était fait prendre à son propre piège, incapable de sentir à qui il avait à faire. Mais Hannibal, lui, le sentait…
Il se pencha au-dessus d'elle, s'immobilisant alors que les bips de son rythme cardiaque s'intensifiaient légèrement en réaction à l'envahissement soudain de l'espace vital de l'oméga. Même dans son sommeil, elle pouvait le sentir, inconsciemment. Il attendit que les bips reprennent un rythme plus lent avant de prendre une profonde inspiration, gorgeant ses poumons de son odeur.
Et quelle odeur…
Il n'en avait jamais senti de telle. Elle sentait la forêt, les feux de bois et le goût salé des marais, enveloppée dans la fragrance plus douce et sucrée si caractéristique des omégas, mais aussi dans l'odeur de mort et de sang, ceux de Shepeard. A la fois, la proie et le prédateur.
L'alpha avait hâte de faire à nouveau sa rencontre.
...
Trois jours furent nécessaires au réveil de l'oméga agressive, temps durant lequel l'ensemble des autres omégas furent auditionnées. Aucune n'apporta de témoignage concret et la première victime, captive depuis trop longtemps, demeurait dans un mutisme profond. Seules les conditions dans lesquelles les jeunes femmes avaient été 'stockées' furent plus amplement décrites. Shepeard les avait nourries au strict minimum et les avait droguées par le biais de l'eau pour qu'elles restent calmes et amorphes dans leur cage.
Lorsque les médecins le permirent, Chloe Morris fut conduite jusqu'aux locaux du FBI pour y être interrogée. Entre-temps, le pôle scientifique avait pu récupérer le contenu de la carte mémoire endommagée, disposant enfin des vidéos réalisées par Calvin Shepeard.
Will ne tint pas à les regarder -il avait dans son esprit suffisamment d'images de Shepeard s'abandonnant aux vices les plus horribles, pas besoin d'en rajouter-, à l'exception de la dernière, celle où figurait l'oméga agressive.
Toute l'équipe avait été réunie pour le visionnage du dernier enregistrement, celui-ci risquait de se montrer déterminant dans la manière dont l'oméga allait être abordée et interrogée. Une fois les lumières éteintes, Jack rappela, avant de lancer la vidéo :
« Avec toutes les autres, son mode opératoire a été le même. Il les attache, les déshabille, les prends puis les étrangle avant la fin de l'acte. De ce qu'on a pu en voir, certaines sont à peine conscientes lorsqu'il s'en occupe. J'émets quelques réserves quant à la manière dont il a traité Chloe Morris… »
Puis, il s'installa sur une chaise et lança la vidéo sans un mot de plus.
La pièce où Shepeard malmenait les omégas apparut sur l'écran du mur, sale et lugubre. Rien ne se passa durant les premières minutes, jusqu'à ce que Calvin Shepeard apparaisse, Chloe Morris à sa suite alors qu'il l'obligeait à avancer, tirant sur la chaîne qui reliait ses entraves -bracelets et ras-de-cou en métal-. A la surprise générale, l'oméga paraissait alanguie, frôlant volontairement le bêta et se tortillant contre lui, allant jusqu'à toucher son visage ou le renifler, visiblement pour le plus grand plaisir de ce dernier.
« Elle est..? » demanda l'agent Katz, sans réussir à réellement poser la question.
« Elle simule ses chaleurs. » la détrompa Will.
Morris murmura quelque chose à l'oreille de Shepeard, se pressant contre lui et minaudant, mais impossible de savoir quoi, la caméra n'avait pas une très bonne portée concernant le son. Le bêta sembla hésiter avant de s'éloigner d'elle pour récupérer quelque chose, caressant le cou de l'oméga avant de lui tourner le dos.
L'attitude de Chloe Morris changea alors drastiquement, en une poignée de seconde, la jeune femme enfonça l'une de ses mains dans sa propre bouche, se forçant pratiquement à vomir pour extirper le fameux fragment d'os du fond de sa gorge. Le reste se passa très vite, dès que Shepeard se retourna elle se jeta sur lui, le poignardant à cinq reprises à l'abdomen avant de lui arracher les clés des mains. Le bêta avait visiblement eu l'intention de la libérer avant de faire quoique ce soit avec elle. Il tituba, choqué et grondant sous la douleur, ses mains enserrant son estomac pour contenir le flot de sang. Morris lui asséna un coup de poing qui l'envoya au sol, avant de s'attaquer à ses chaînes, ouvrant le cadenas qui les reliait.
Elle ne vit que trop tard Shepeard se relever. L'homme la plaqua au sol, les faisant trébucher sur le fil qui reliait la caméra à la prise électrique, provoquant la chute de l'appareil, toujours en route malgré le choc. Il la frappa à plusieurs reprises avant que la jeune femme, sonnée par le choc de sa tête contre le sol bétonné, ne réagisse, griffant son visage en cherchant à atteindre ses yeux avant de finalement mordre sa main quand il tenta d'écraser sa bouche pour l'étouffer. Elle profita de la surprise de l'homme pour le repousser, inversant leur position alors qu'elle utilisait la chaîne pendant toujours à l'un de ses poignets pour écraser sa trachée. Ils entendirent distinctement les suffocations de Shepeard, de même que le bruit mat de ses poings rouant de coups les flancs de l'oméga. Sa prise faiblit et le bêta reprit le dessus, prenant une grande et difficile inspiration alors qu'il saisissait les poignets de Morris pour l'empêcher d'agir, se retournant avec elle pour qu'elle se retrouve coincée entre son corps et le béton du sol. L'oméga gronda, de la même manière qu'elle avait grondé contre Hannibal lorsque celui-ci avait tenté de l'approcher. Elle mordit à la gorge son adversaire pour se débarrasser de lui, lui assénant un autre coup de poing avant de se tendre en direction de sa lame d'os, à une poignée de centimètre de sa main, son visage à l'expression sauvage se tournant brusquement vers la caméra. L'arme de fortune était à mi-chemin entre elle et l'appareil, et Morris grogna de rage et de douleur avant de finalement réussir à atteindre l'objet, s'en saisissant alors que Shepeard revenait sur elle, elle le poignarda à nouveau, le sang de l'homme se mettant à dégouliner sur elle abondamment.
Il réussit à lui porter un autre coup au visage, qui la sonna suffisamment pour lui faire lâcher l'arme, la laissant plantée dans la chair de son flanc. S'effondrant un peu plus sur elle à cause de la perte de sang, ses mains se rejoignirent pour enserrer le cou de l'oméga. Mais, dès l'instant où ses paumes frôlèrent la peau de l'autre, la jeune femme se redressa brusquement, comme électrisée, et le mordit une seconde fois à la gorge, enfonçant cette fois-ci ses dents plus profondément, le sang maculant son visage par jets alors qu'elle secouait sa tête comme un chien enragé pour réussir à arracher la chair. Le bêta fut secoué de quelques derniers spasmes de vie durant de longues secondes, avant de s'affaisser sur la jeune femme, mort. Morris le repoussa aussitôt, s'accroupissant ensuite sur lui pour le renifler, le secouant vivement comme pour vérifier qu'il était bien mort, avant de récupérer sa lame du corps et de se redresser, fébrile, barbouillée d'un sang qui n'était pas le sien. Son visage arborait la même expression que lorsqu'ils l'avaient trouvée, farouche et presque hagarde, déconnectée de sa propre conscience.
Elle resta debout à observer le cadavre, jusqu'à ce que vingt minutes plus tard, les deux agents du FBI et le Docteur Lecter n'arrivent sur les lieux. Jack arrêta la vidéo là, figeant sur l'écran l'image d'une Chloe Morris ayant fraîchement commis un meurtre, et pas des moindres.
« Je ne sais pas si je dois être admirative ou choquée. » avoua l'agent Katz, ses yeux ne quittant pas la silhouette ensanglantée et trop peu vêtue de l'oméga.
« Will ? » se renseigna Jack, ne prêtant pas attention au commentaire de Price sur un quelconque aspect érotico-glauque de la vidéo.
Le jeune alpha prit son temps avant de répondre, quittant lentement l'image des yeux pour offrir un regard légèrement perturbé à son supérieur.
« Elle lui a laissé une chance de vivre après l'avoir poignardé une première fois. » fit-il remarquer, avant de déglutir. « Elle s'est défendue tout du long, mais je crois que ce n'est pas pour elle-même qu'elle se battait. »
Jack tiqua.
« Elle s'est battue pour Abigail Hollows. » abonda Hannibal, son œil vif mémorisant les moindres détails de l'oméga agressive. « C'est pour cela qu'elle a pris sa place. Ce n'était pas un sacrifice, mais un acte de bravoure. Elle a affronté Calvin Shepeard pour s'assurer qu'il ne poserait jamais la main sur sa protégée. »
...
...
Voilà, voilà pour ce début. Je ne garantis pas que les prochains chapitres seront aussi longs, tout dépendra de comment je vais réussir à gérer l'ensemble, entre les cours et l'écriture de mon autre fiction, c'est pas gagné-gagné… ^^ J'ai déjà 83 pages d'écrites sur cette fiction et je ne sais pas trop encore comment je vais découper le reste.
Et oui, ici Abigail n'est pas la fille de Garret Jacob Hobbs et est plus âgée que dans la série, et je lui ai volontairement donné un nom de famille assez similaire.
Ma fiction ne sera pas centrée sur une seule enquête (donc pas d'affolement si l'affaire Bluebeard n'est pas très approfondie, elle me sert seulement de trame de fond, pas de quoi en faire un thriller digne de ce nom), mais portera essentiellement sur le développement des différents personnages et des relations qu'ils entretiennent. Si bien que, d'un passage à un autre, on basculera sur les points de vue, mais aussi dans le style d'écriture suivant le personnage qui portera la narration. Concernant mon OC, qui fera aussi office de personnage principal, je pense que vous avez tou(te)s saisi qu'il s'agit de Chloe (et oui, pas d'accent sur le "e", puisque le prénom à l'américaine n'en porte pas). Ce premier chapitre me permet de l'introduire en douceur, mais on rentrera un peu plus dans le vif du sujet dès le chapitre suivant. J'en profite également pour vous signaler que ce premier chapitre peut être sujet à toute modification d'ici la publication du suivant. Donc, si quelques choses vous gênent, n'hésitez pas à m'en faire part pour que je puisse rectifier le tir avant de passer à la suite. Le début de cette fiction n'est clairement pas la partie que je préfère, j'ai plus l'impression de mettre forcée à planter le décor le plus vite possible pour pouvoir passer à la suite. Si vous aussi vous le ressentez comme ça durant votre lecture, faîtes m'en part, que je puisse essayer de réparer les pots cassés...
Pour ceux qui n'avaient jamais lu d'omegaverse auparavant, j'insiste, n'hésitez pas à me poser des questions si certaines choses ne sont pas assez claires sur le fonctionnement de ce type d'UA. Bien entendu, ma porte est aussi ouverte à ceux qui connaissaient déjà, chaque auteur y va de sa petite subtilité sur les dynamiques A/B/O, je ne suis pas contre vous fournir de plus amples explications. Et, si ça vous gêne de poser vos questions dans les commentaires, envoyez-moi des MP sans aucun scrupule (pas de chichi entre nous !).
Sur ce, je souhaite bien du courage à celles et ceux qui, comme moi, entrent dès demain en période de partiels ! ;)
