Cette histoire compte originellement 6 chapitres que j'ai divisés en 2 pour faciliter la traduction.

Elle est merveilleuse, lisez-la. Même si vous n'aimez pas le pairing. Même si vous n'aimez pas le fandom.

Le lien de l'histoire originale est ici : /works/13179045/chapters/30143751

Les citations en début de chapitre sont du traducteur. Toutes les notes en fin de chapitre sont de l'auteur. Pour la lire, munissez-vous d'une bonne playlist et de pas mal de patience.

C'est un UA, ce qui signifie que la plupart des personnages du film/livre ne s'y trouvent pas. Mais ça vaut vraiment le coup. Je publierai un chapitre par semaine si tout se passe comme prévu. Enjoy!


''Surtout il fallait, coûte que coûte, revenir à cette réalité de l'enfance, réalité grave, héroïque, mystérieuse, que d'humbles détails alimentent et dont l'interrogatoire des grandes personnes dérange brutalement la féérie.'' Jean Cocteau, Die Geschwister

''Ils se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment. Tout naturellement, ils devinrent des héros.'' Leia Organa, sénateur d'Alderaan


Eddie n'a, à proprement parler, jamais eu de meilleur ami.

Ni même d'ami tout court.

Quand il avait six ans, il avait une voisine qui avait aussi six ans, comme lui. Leurs mères, l'après-midi, les envoyaient dans la chambre d'Eddie pour y jouer. Eddie aimait beaucoup sa voisine-de-six-ans.

Un jour, elle lui dit qu'il l'ennuyait et tenta de se sauver par la fenêtre de sa chambre.

Quand il avait dix ans, pendant un de ses longs samedis au parc, une bande de garçons de son âge l'appelèrent et lui demandèrent s'il voulait être leur gardien le temps d'une partie. Eddie, bien sûr, accepta avec joie. Mais il laissa passer tous les buts, et les garçons le laissèrent tomber quand il leur avoua qu'il était allergique à l'herbe.

A ses douze ans le manège commença : les garçons de l'école commençaient à parler des filles, et les filles gloussaient en prétendant qu'elles n'en avaient rien à faire. Eddie ne s'intégra à aucun de ces groupes –il n'était pas très intéressé par les filles, et ce n'était pas comme si les garçons auraient pu parler de lui.

Quand il eut quatorze ans, à peu près tout le monde commença à fumer, à boire et à peloter tout ce qui passait à sa portée. Eddie prit l'habitude de s'asseoir avec les habituels exclus du club échec au déjeuner. Aucun d'entre eux ne parlait – ou du moins, aucun d'entre eux ne lui parlait, et il pouvait tout à loisir écouter les autres conversations, habituellement à base de qui a vomi et qui s'est cassé la gueule et qui est sorti avec qui chez Emily samedi dernier.

Il lui aurait suffi d'aller à une fête, ou d'accepter une cigarette, ou d'embrasser une fille, et il aurait été accepté parmi eux, reconnu capable de rire, d'être drôle et d'avoir des amis, lui aussi. Mais sa mère lui avait appris à ne pas faire ce genre de choses.

Maintenant, c'est-à-dire au moment ou commence cette histoire, Eddie à seize ans et il déménage dans une nouvelle maison. Dans une nouvelle ville. Un nouveau lycée. Un nouveau lycée où il sera le nouveau.

S'il n'a jamais eu d'ami avant, se dit-il, ce n'est certainement pas maintenant qu'il va s'en faire.

Quand il la rencontre, c'est son deuxième jour au lycée

Il est assis dans le fond de la classe, près de la fenêtre, et le soleil lui réchauffe le dos et les mains. Hier était plein de regards curieux et de présentations hasardeuses, quand il était encore pour les autres le nouvel élève dont on se moque et qu'on dévisage. Aujourd'hui, l'attention générale s'est déjà détournée, à l'exception de quelques regards furtifs et d'un ou deux murmures de conspirateurs. Il doit tout de même se présenter devant la classe à chaque fois qu'il entre dans une nouvelle salle, cependant – ce n'est pas exactement comme si le deuxième jour était spécialement meilleur.

Mais aujourd'hui, en cours d'histoire ancienne, il s'assied à côté d'une fille, et la fille se penche près de lui pour lui parler au moment même ou leur professeur tourne la tête.

Ça ne sort pas particulièrement de l'ordinaire, puisque les autres ont fait la même chose depuis le moment où il est arrivé en cours le lundi matin : ''Salut, moi c'est Stacy ! Comment tu t'appelles ?'', ''Salut mec, t'es nouveau, non ? '', ''Yo, tu viens d'où, d'Australie ? T'es vraiment bronzé''. Mais les présentations sont fugaces, parce qu'au moment où il se présente lui-même – en bégayant et bafouillant parce que, eh bien, il ne sait pas vraiment faire ce genre de choses - ils remarquent ses chaussettes de foot remontées jusqu'aux genoux, ses shorts trop grands et son sac banane, et perdent subitement toute envie de le connaître.

Mais la fille, étrangement, ne suit pas la routine habituelle. Elle le regarde, lui sourit et lui lance d'une voix claire :

''Salut. J'aime bien tes chaussettes.''

Et de là, à partir de là, tout change.

''Elles sont assez sporty'', continue la fille. La classe est encore brouillée de couleurs et de bruits et de bavardages, mais elle parle d'une voix basse, comme pour ne pas être entendue. ''Et franchement, la banane est assez pratique. Je me déçois moi-même de ne jamais avoir pensé à en porter avant.''

Il y a quelque chose à savoir sur la plupart des garçons : ils sont absolument affreux quand il s'agit de parler à une fille. Il y a quelque chose à savoir à propos d'Eddie : il n'est pas du tout comme la plupart des garçons, mais il est tout de même affreux quand il s'agit de parler à une fille.

C'est en grande partie parce qu'il n'est pas très doué pour parler en général, mais dans le cas de cette fille, le problème est étrangement similaire à celui que pourrait rencontrer n'importe quel adolescent de seize ans : Elle est belle. Singulièrement belle.

D'une beauté éthérée – c'est le mot exact qui lui vient à l'esprit quand il la regarde. Elle a quelque chose de royal et de presque classique (mais c'est sans doute parce qu'il est en cours d'histoire ancienne). Ses cheveux sont d'un noir corbeau, longs et raides et noués en une haute queue de cheval. Sa peau est pâle, presque trop, et contraste avec la noirceur de ses cheveux. Ses cils sont longs et sombres. Ses yeux sont d'un gris d'orage.

Elle a la mâchoire aigue, le nez droit, les pommettes hautes des princes pour lesquels on pourrait aisément mourir. Tout, en elle, respire la beauté.

Et elle babille, très à l'aise, à propos de la banane d'Eddie.

''Où l'as-tu eue ?'' demande-t-elle, en jetant à Eddie des coups d'œil envieux. ''Ils en ont en plusieurs couleurs ? J'aime bien le bleu de la tienne, mais ce serait bizarre qu'on ait exactement la même, non ?''

''Elle te plaît vraiment ?'' lâche Eddie, un peu surpris. D'habitude, quand quelqu'un commente d'une quelconque manière son style vestimentaire, c'est pour s'en moquer. Spécialement quand il s'agit de quelqu'un d'aussi beau que cette fille. (Non pas, d'ailleurs, qu'Eddie ait rencontré grand-monde qui remplisse ce critère).

Elle semble surprise par sa question. ''Bien sûr. Tout le monde devrait aimer les bananes, tu ne crois pas ?''

''Eh bien… oui. Elles sont vraiment utiles pour transporter des trucs. Comme de la nourriture, de l'argent, des médicaments, n'importe quoi. Mieux que les sacs. Tu ne la remarques pas quand tu en portes une, et les sacs sont encombrants. Ils peuvent être lourds. Faire mal au dos. En plus, ça ne sert à rien d'avoir un sac à dos quand on à juste besoin de quelques affaires, donc…'' Il se tait, soudainement conscient de ce qu'il est entrain de dire. Ses phrases sont houleuses – des mots boiteux précipités hors de sa bouche. Il ne se rappelle plus la dernière fois qu'il a parlé à quelqu'un aussi longtemps.

''C'est vrai''. Dit pourtant la fille. Elle acquiesce comme si l'exposé d'Eddie l'avait sincèrement intéressée – intéressée suffisamment pour la faire réfléchir. ''Je déteste porter des sacs à dos. Ils sont définitivement encombrants''. Une seconde et demie plus tard, elle donne sur la table un coup de poing et tout le troisième rang se retourne. Quelques élèves la regardent, mais ses yeux sont fixés sur Eddie. ''C'est ça. On va fonder le mouvement des Porteurs de Bananes. Toi et moi. On va conquérir le monde.''

Eddie est à la fois troublé et un peu ravi – un sentiment étrange.

''Okay'', dit-il avec un sourire timide. L'idée, sans qu'il l'avoue, lui réchauffe la poitrine.

La fille lui sourit en retour. Le sourire est fin, mais parfait, comme si elle avait étudié pendant des années l'art d'éblouir avec un sourire. ''Moi, c'est Violet, au fait. Violet Tozier.''

"Eddie Kaspbrak."

''Eh bien, Eddie Kaspbrak'', dit-elle en lui tendant la main. ''A partir de maintenant, nous sommes partenaires dans le crime. Dévoués à faire du monde un endroit meilleur.''

Sur l'estrade, leur professeur appelle au silence. La bulle de murmures autour d'eux se dégonfle. Les yeux de Violet ne décollent pas du visage d'Eddie – un petit orage étudiant scrupuleusement chaque trait, chaque tic, chaque début de sourire.

Eddie lui serre solennellement la main.

Violet Tozier devient la toute première meilleure amie d'Eddie Kraspbak.


Deux semaines plus tard

''Franchement, tu devrais vendre tes blouses, Violet. Elles sont parfaites.''

''Je te l'ai déjà dit. Je n'aime pas vendre ce que je fais.''

''Oui, je sais. Mais bon. Tu devrais vraiment.''

Le regard de Violet croise celui d'Eddie, en face d'elle, et elle lève les yeux au ciel.

Il est midi et ils sont dans la cafétéria, assis à leur table habituelle. Les pieds de Violet reposent sur le banc, et elle a incliné son dos contre celui d'Elizabeth. Elizabeth est l'amie de Violet. L'amie d'Eddie, aussi, techniquement. Comme Macie, qui ne remarque pas les yeux au ciel que Violet lève. Comme Abigail, qui est assise à quelques pas d'Eddie.

Eddie ne s'intéresse pas vraiment à elles. Macie l'a une fois appelé ''le nouveau joujou de Violet'' dans son incessant bavardage habituel, et Abigail a pris l'habitude de lui parler d'une voix bizarre, chantante, comme une institutrice qui s'adresserait à un élève de maternelle. Elizabeth est gentille, mais c'est principalement parce qu'elle ne lui parle presque pas du tout.

Violet, cependant, est la fille la plus intéressante qu'Eddie a jamais rencontré. Une fonceuse – elle paraît fendre le monde sans que rien ne la touche. Et pour ne rien gâcher, elle est intelligente : elle pourrait être tout ce qu'elle veut, docteur, avocate, la prochaine présidente mais ce qui lui plaît le plus, c'est la couture – tous les vêtements qu'elle porte sont de sa main, et à peu près tous ceux que portent ses amies le sont aussi.

Eddie est certain qu'il est amoureux d'elle, s'il est possible d'être amoureux de quelqu'un sans vouloir l'embrasser.

Quand ils quittent la cafétéria, elle glisse à Eddie ''Viens chez moi après les cours, vendredi. Je veux te coudre quelque chose.''

''Je n'en ai pas besoin'' dit Eddie.

''Mais j'en ai envie'', répond Violet en lui prenant le bras. ''En plus, on pourra faire d'autres trucs. Tu peux dormir chez moi, si tu veux.''

Eddie n'a jamais de sa vie été invité à dormir. Il est surpris, excité, nerveux – comme toutes les fois, tous les jours anecdotiques où il a réalisé que Violet Tozier voulait passer du temps avec lui.

''Oui'', dit-il avec un sourire. ''D'accord''.

''Magnifique. Mon frère peut venir nous chercher vendredi.'' Elle s'approche d'Eddie avec un air de conspiratrice et murmure : ''Ne dit pas aux autres que tu viens. Je les adore, mais elles ne sont pas venues chez moi depuis des mois. Elles seraient jalouses, je pense.''

Eddie acquiesce et la salue de la main, quand ils se séparent pour rejoindre leurs places. Peut-être aurait-il dû se demander pourquoi, exactement, Violet ne veut-elle pas inviter les filles chez elle – mais ça n'a pas d'importance, et il est trop nerveux et trop flatté pour s'y intéresser réellement.

Bien sûr, il ment à sa mère sur la raison pour laquelle il sort, ce vendredi-là. Parce qu'elle deviendrait probablement rouge de colère si elle apprenait qu'il passait la nuit chez une fille. Parfois, elle lui raconte encore des histoires sur les femmes, qui mentent et manipulent les hommes, les trompent jusqu'à en faire des moins-que-rien corvéables à merci. ''N'aie jamais de petite amie, chéri.'' Disait-elle quand il était plus jeune. ''Elle t'éloignerait de ta maman.'' A l'époque, il était horrifié à cette pensée – il aimait sa mère elle prenait soin de lui, mieux que la plupart des autres parents. Elle le gardait sain et sauf.

Aujourd'hui, il est à peu près sûr que tout ça, c'est des conneries.

C'est pour ça que, plus doué dans la duplicité qu'il ne le pensait, il invente un Joe (garçon très calme, très gentil, très propre) et sa mère est si heureuse qu'il se soit fait un ami qu'elle le laisse sortir sans poser de questions. Et ce vendredi-là, comme prévu, Eddie reste avec Violet sur le parking de l'école, l'estomac plein d'excitation et un sac de vêtements sur le dos.

''Bon Dieu.'' Violet tapote sa montre avec nervosité. ''Il est toujours en retard, ce trouduc.'' Elle se tourne vers Eddie avec un air accusateur. ''Pour ton propre bien, n'aie jamais de frère.''

''Je vais essayer'' dit Eddie avec un sourire.

Violet le regarde plaisamment, mais ne sourit pas – à la place, elle prend l'air le plus sérieux du monde ''Et n'écoute surtout pas mon frère. Sérieusement. Il ne dit que des conneries, je te préviens. C'est cent fois mieux de ne pas lui parler.''

La réponse d'Eddie est couverte par le bruit grinçant, crépitant d'un moteur très vieux – un crépitement qui lui évoque vaguement le crachat d'un cinquantenaire fumeur de cigares. Violet sursaute au surgissement du bruit, sa queue de cheval frappant presque Eddie au visage, et s'avance avec détermination vers la vieille Ford blanche

La Ford klaxonne et rugit. Violet recule, hérissée et manifestement en colère. Eddie craint déjà celui qui conduit cette voiture.

''Taxi Tozier, comment puis-je vous aider, madame ?'' dit-on d'une voix gaie quand Violet ouvre brutalement la portière du passager.

''On t'a attendu pendant vingt minutes, trouduc'' rétorque-t-elle. Eddie se glisse derrière elle et attend son signal, une main sur la portière de derrière. Il voudrait monter, mais il hésite à laisser Violet tuer son frère d'abord.

''Toute plainte doit nous être adressée en bonne et due forme, madame. Et je peux refuser de vous conduire si vous continuez de vous comporter de la so-''

''Bon dieu, ferme-la, Richie.'' Violet adresse à Eddie un coup de menton coléreux. ''Grimpe.'' Dit-elle. ''Je vais mettre les sacs dans le coffre. Non pas que ce soit facile. Cette caisse est un tas de merde !'' Elle prononce les derniers mots d'une voix distincte et claire, pour que son frère puisse l'entendre.

''C'est la voiture que vous avez demandé, Madame !'' lui répond Richie. Violet lève les yeux au ciel, se saisit du sac à dos d'Eddie – qu'il lui laisse à contrecoeur – et se dirige vers l'arrière de la voiture. Eddie est crispé sur la poignée, hésitant. Violet lui a dit i peine cinq minutes de ne pas parler à son frère – et maintenant, il semble qu'il soit obligé de rester seul dans la voiture avec lui. La perspective ne l'enchante pas.

Il s'apprête à proposer à Violet son aide, quand Richie lance un grand ''Montez, m'sieur !'' avec un terrible, mais très enthousiaste accent cockney, et Eddie pense qu'il serait impoli de ne pas monter, et s'asseoir sur la banquette douteuse.

Une fois à l'intérieur, trois choses.

D'abord, la voiture sent la fumée de cigarette.

Ensuite, Richie est tourné dans sa direction et le regarde avec un sourire franc.

Enfin (la troisième chose qu'il remarque, et la plus importante) : Richie a la même complexion que Violet : mâchoire stricte, pommettes hautes, nez droit, cheveux sombres – même si les siens entourent son visage en une couronne de boucles souples. Le même teint pâle, le même contraste. Des yeux d'un brun chaud, magnifiés par des verres en cul de bouteille, et un sourire large, tout en dents droites et lèvres pleines.

Il est beau.

Eddie est sûr que s'il avait vu Richie et Violet l'un à côté de l'autre sans les connaître, il les aurait pris pour deux jumeaux. Deux jumeaux particulièrement célèbres et intimidants. Richie, cependant, a deux ans de plus que Violet, et son sourire n'a pas grand-chose d'intimidant.

N'empêche, Eddie se sent quand même gêné dans la petite Ford blanche, avec les yeux de Richie braqués sur lui – il tend le tissu de son short sans y penser, pour cacher ses genoux cagneux.

'C'est fabuleux'' dit Richie en le dévisageant de haut en bas (Eddie, à ce moment-là, masque de ses mains ses épaules cagneuses), ''Je pensais juste que Vi invitait une amie à dormir. Je ne pensais pas que j'allais rencontrer son petit copain.''

''Je ne suis pas son petit copain'', articule Eddie en rougissant. ''Elle invite juste un ami à dormir. Un ami. Moi. Je suis son ami.'' Il décroise les bras et se désigne du doigt pour marquer son affirmation. ''On est juste amis.''

Richie lève un sourcil, et son rire moqueur s'affine – il sourit timidement.

''Donc, tu dis que Violet n'a pas saisi l'opportunité de sortir avec une chose aussi mignonne que toi ?'' demande-t-il, très sérieux. Il secoue la tête en signe de désapprobation. ''Sincèrement, je pensais que ma sœur était plus maligne que ça.''

Eddie ouvre la bouche pour répliquer mais les mots lui échappent. Il transpire, et il est absolument sûr que tout son corps est rouge de gêne, mais ce n'est pas l'embarras qui est en est la cause. Il est en colère.

Petit. Mignon. Les mots sont chargés de condescendance. Comme si, à cause de sa taille et de son visage rond – et parce qu'il n'a pas ce genre de mâchoire carrée – on pouvait le traiter comme s'il avait dix ans.

''Violet m'a dit de ne pas te parler.'' Dit-il finalement, après un instant de silence, parce qu'il ne sait pas quoi répondre d'autre. C'est un peu contre-productif, parce que ces mots sont exactement ceux d'un enfant en colère, bras croisés et sourcils capricieusement froncés.

Le visage de Richie se soulève – yeux écarquillés, sourcils levés très haut, bouche ouverte l'idée semble beaucoup l'amuser. ''Ah ? Vraiment ?''

Eddie évite son regard avec embarras et prie pour que la conversation s'arrête et pour que Violet -bon sang, pourquoi met-elle aussi longtemps ? – revienne le plus vite possible.

Juste à ce moment, comme une intervention divine, Violet se laisse tomber sur le siège du passager avec un soupir. La voiture swingue et grogne sous le choc.

''Tu veux le garder pour toi toute seule, Vi ?'' demande Richie avec amusement tandis que Violet ferme la porte avec un clac sonore. Des cheveux volettent sur son front et elle les écarte avec impatience.

''Qui?'' demande-t-elle. ''Eddie ?'' Richie a à peine le temps d'ouvrir la bouche qu'elle réplique. ''Ne. Lui. Parle. Pas.''

''Trop tard'', dit Richie avec un sourire paresseux. Eddie n'est pas sûr de ce qu'il peut répondre. Il évite encore de les regarder.

Violet se retourne pour attraper son regard et incline sa tête entre les deux sièges de devant ''Je suis désolée pour lui s'il t'a vexé.'' Dit-elle d'une voix franche.

''Ce n'est pas grave'' dit Eddie, reprenant confiance à la vue de Violet. ''Je l'ai fait taire.''

Violet le regarde avec fierté. Richie s'esclaffe – et sans surprise, son rire est aussi lumineux que sa voix.