Bonjour à tous !
Voici une petite histoire qui me trottait dans le crâne pendant un moment, et même si je suis déjà sur deux histoires en parallèle, j'avais envie de profiter de ma semaine de vacances pour la mettre en place ! Je ne pense pas que ce sera une fic très longue, mais c'est un bon moyen pour moi de décompresser !
En espérant que la lecture vous plaira !
« Bon, on récapitule ». Comme toujours, Kidd surplombait la pièce de toute sa stature. Il avait les bras croisés sur son torse, comme s'il s'apprêtait à réprimander le premier qui oserait l'interrompre et observait d'un regard courroucé ses deux amis. À la phrase, le premier, un jeune homme aux cheveux vert, soupira bruyamment, ce qui eut pour effet de faire apparaître une veine proéminente sur la tempe du rouge. « DIS LE TOUT DE SUITE SI JE TE FAIS CHIER ! »
« Nan mais c'est au delà de ça, Eustass-ya ». Le brun, resté silencieux depuis le début, avait jeté ça sur un ton qui exprimait une lassitude profonde.
« Les quinze premières fois, on peut dire que tu nous faisais chier. Mais là, à la centième fois, j'avoue que je trouve plus mes mots ».
« Mais je vous emmerde tous les deux ! Et puis si vous étiez pas des crétins pareils, j'aurais peut-être pas à me répéter comme un débile ! »
Cela faisait un peu plus de deux ans maintenant que les trois compères étaient en collocation, et aussi loin qu'ils se souvenaient, ça avait toujours été plus ou moins sur le même ton. Kidd et Law étaient des amis de longue date et avaient rencontré Zoro lors de leur dernière année de lycée. Mais c'est quand ils avaient émis le projet commun d'aller tous les trois à la fac à Tokyo que l'idée d'une cohabitation leur avait effleuré l'esprit. Après tout, vivre en ville était cher, et ils auraient eu bien du mal à vivre seul, aucun d'eux n'étant né au sein d'un foyer aisé. Zoro était le fils du prêtre d'un temple qui vivait principalement grâce aux offrandes et les donations des habitués. Law n'avait jamais connu sa mère et avait été élevé par son père qui tentait de joindre les deux bouts en cumulant pas moins de trois petits boulots. Quant à Kidd, il avait très tôt été foutu à la porte par ses parents, principalement à cause des larcins mineurs qu'il avait accumulé depuis le collège. De fait, leur situation précaire avait beaucoup joué dans le rapprochement des trois jeunes hommes, et même si les tensions entre eux étaient omniprésentes _ principalement dû à leur caractère explosif_, on peut dire qu'une amitié solide s'était forgée en peu de temps. Aussitôt qu'ils en avaient eu l'occasion, ils avaient quitté leur domicile instable pour s'installer ensembles. Même si la situation n'était pas amenée à durer, ce serait au moins l'occasion de passer leurs années d'études confortablement.
Mais comme à chaque fois qu'une amitié dure, un élément perturbateur venait foutre le bordel. Ici, l'élément en question était une fille du nom de Jewelry Bonney. Ils n'étaient en effet pas installé à Tokyo depuis six mois que cette fille était arrivée dans leur cercle comme un boulet de canon. C'était une étudiante en art, tout comme Kidd, et très vite, les deux avaient constaté qu'ils avaient plus de chose en commun que leurs simples cours de peinture acrylique. Le rouge aurait alors pu présenter les choses en douceur, seulement ce n'était définitivement pas son genre. Il avait donc attendu le jour où ses deux colocataires rentrèrent plus tôt et le surprennent en pleine action pour leur annoncer nonchalamment qu'il était en couple, le pantalon toujours baissé au niveau de ses chevilles. La légende veut même que ce soit cet événement qui ait convaincu le brun et le vert qu'ils étaient définitivement gay. Après cela, les choses n'avaient pas vraiment évolué. Bonney venait de temps en temps voir Kidd, et inversement, sans vraiment chambouler la vie des garçons. Il fallait dire que sur certain points, elle égalait facilement leur virilité, et même si Zoro gagnait toujours les concours de boisson, personne n'avait réussi à battre son record de hamburgers mangés en cinq minutes.
Les choses s'étaient un peu dégradées à la fin de leur première année d'étude. Alors que tout trois avaient passé de justesse leurs examens de fin de cession, Bonney avait appris qu'elle était acceptée dans la prestigieuse école des Beaux-Arts de Paris. Elle avait tenté le concours d'entrée dans grande conviction et ne s'attendait absolument pas à devoir faire ses valises du jour au lendemain pour aller intégrer l'une des plus grandes écoles d'art du monde. Et Kidd non plus. Cela avait un sujet de dispute monstre entre les deux amoureux, et tout le monde pensait alors que leur relation allait se terminer naturellement. Pourtant, le rouge avait surpris tout le monde, Law et Zoro les premiers, en décidant malgré tout de rester avec la jeune fille, même une fois que celle-ci était partie. C'était étonnant, quand on connaissait le passé volage du jeune homme et les relations chaotiques par lesquelles il était passé. Mais au bout de deux mois de séparation, Kidd avait bien dû se rendre à l'évidence qu'il ne pouvait pas de passer de celle qui avait radicalement changé sa vision des relations.
C'est alors qu'il avait entendu parler du programme d'échange. Comme son nom l'indiquait, c'était un programme international qui avait pour but premier d'offrir la possibilité aux étudiants de partir quelques mois à l'étranger pour parfaire leur langue et connaître des expériences différentes. Kidd avait bien entendu sauté sur l'occasion. Avec ses deux amis, il avait passé son semestre entier à apprendre des bases de français et à travailler ses cours du mieux qu'il pouvait, de façon à être sûr que son dossier scolaire serait assez bon. Plusieurs fois, il dû aller défendre son cas du mieux qu'il pouvait au service de la scolarité, mais cela avait finit par porter ses fruits : il avait été accepté dans une école d'art de la capitale française, certes pas aussi prestigieuse que celle de Bonney, mais cela lui permettrait au moins de revoir sa petite amie.
Dans un premier temps, Law et Zoro avaient été heureux pour leur ami...jusqu'à ce que ce dernier ne se décide à leur avouer la « contrepartie ». En effet, toujours comme son nom l'indiquait, Kidd participait à un programme d' « échange », et ce n'est qu'à un mois de son départ qu'il leur avoua donc naturellement que durant son absence, un étudiant français prendrait sa place au sein de leur colocation. « Vous comprenez, c'est sensé se faire pour faciliter l'insertion, donc on peut pas lui demander de débarquer et de se trouver tout seul un logement ». Cela avait créé une première tension auprès du brun et du vert, pas vraiment ravi de devoir ouvrir leurs portes à un étranger bouffeur d'escargots.
Mais c'est peu de temps après que les choses avaient empirées. Kidd leur avait à peine laissé le temps de digérer l'information qu'il était passé au stade de moralisateur. En effet, aux vues de son casier judiciaire, la fac lui avait clairement fait comprendre qu'au moindre problème, de son côté, comme de l'autre, le programme cesserait net et il serait rapatrié dans l'heure. Mais bien entendu, le rouge n'y avait décelé aucune attaque personnelle. En revanche, il s'était mis en tête que si un accident arriverait, ce serait forcément par la faute des énergumènes qui partageait son logement. Il s'était donc efforcé à leur rendre la vie impossible depuis deux semaines, bien décidé à les mettre au pas.
Et on en arrivait donc à la situation initiale.
« Bien, Zoro, rappelle-moi la règle N°1 de la coloc d'échange ? » Le rouge pointait le jeune homme d'un double décimètre qu'il avait déniché sur la table.
«Il est interdit de parler de la coloc d'échange ? »
« PUTAIN MAIS SOIS SÉRIEUX ! »
« Tu m'emmerdes. »
Sans se décourager, Kidd se tourna vers Law qui somnolait à moitié sur le divan. « Law, la règle N°1 ? »
« Je refuse de répondre à une question concernant une politique dictatoriale dont je ne reconnaît pas la légitimité ».
« À la prochaine référence à la con je vous casse la gueule ! Mais bon, puisque vous voulez faire durer la chose, je me ferai un plaisir de vous répéter les règles pour la vingtième fois, histoire de bien vous faire perdre votre temps ».
Pour toute réponse, Zoro sortit son téléphone pour répondre à un texto qu'il venait de recevoir alors que Law gardait les yeux fermés, la tête appuyée contre le dossier du canapé.
«Règle n°1 : Vous vous comportez en individus civilisés pour la venue du français. Cela implique donc de pas se balader à poil dans l'appartement, d'utiliser un verre pour boire, de pas chercher la merde auprès de lui pour vous amuser, de pas faire des allusions débiles ou des jeux de mots pourris sur le fait qu'il vienne d'un pays qui a perdu toutes les guerres de ces deux derniers siècles et où on bouffe du fromage qui pue ».
Law et Zoro se jetèrent un regard entendu avec un sourire narquois, mais Kidd décida d'ignorer cela, ne se laissant pas démonter.
« Règle N°2 : vous l'aider à s'intégrer, à découvrir la culture locale et la beauté de nos paysages, comme le veut le programme. Donc vous oubliez un peu vos week-end console et vous vous bouger un peu le cul pour lui faire visiter les lieux. Et par là, j'entends pas l'emmener dans les bars craignos ».
« Lâche-nous punaise... c'est bon on n'est pas des monstres »
« ET ENFIN, règle N°3, et la plus importante » Kidd avait monté le ton, bien décidé à ignorer la remarque du vert. « Pas touche à son cul ! J'ai eu confirmation que c'était bien un mec qui venait, et il est hors de question que vous le harceliez comme de gros porcs ! »
« C'est pas parce qu'on est gay qu'on saute sur tous les mecs hein ».
« J'en ai rien à foutre ! Si vous êtes en manque, vous baisez l'un avec l'autre mais vous lui foutez la paix ! »
Les deux garçons échangèrent un regard de dégoût.
« Je préfère m'abstenir complètement je crois ».
« C'est ça Law ! Bon état d'esprit »
« J'ai pas dit ça pour te faire plaisir ducon ».
« Et si c'est lui qui demande ? » Zoro avait lancé ça sur un ton qui se voulait innocent.
« Ah tu vas pas commencer ! Si c'est le cas, tu vas prendre une douche bien froide, tu lis un livre ou ce que tu veux mais tu respecte mes foutues règles ! »
Zoro ricana. Il ne fallait pas oublier que si Eustass Kidd était un personnage haut en couleur qui faisait trembler ses ennemis, il n'était rien de plus qu'un grand ado immature. Mais bon, ils avaient tous leur défauts et évitaient donc de se jeter la pierre. Zoro par exemple arrivait toujours à confondre leur appartement avec celui de leur voisins, et Law était d'une fainéantise dantesque, au point qu'il ne devait ses résultats scolaires tout juste passables qu'à ses facilités. À côté de ça, ils traînaient peu ensembles en dehors de leur vie commune, chacun s'étant trouvé une « bande ».
Zoro bailla pour la énième fois de la matinée. À cette heure là, il avait pour habitude de faire une sieste, mais il ne voyait tout bonnement pas comment il pourrait fermer un œil avec son ami qui beuglait comme un porc. Alors qu'il évaluait la distance entre sa place et sa chambre avec envie, il vit le brun de lever l'air de rien et se diriger vers la porte.
« Je peux savoir où tu vas Trafalgar ? »
« ...Voir Sachi, Penguin et Bepo ? »
« T'as de l'espoir ouais ! J'en ai pas finit avec vous ! Je vais imprimer le règlement et le placarder partout dans la baraque jusqu'à ce que ça finisse par rentrer dans vos crânes ! »
« Et t'as pas peur que ça foute les boules au français quand il va débarquer ? »
Il profita du moment de réflexion que sa remarque causa au rouge pour déguerpir aussi vite, suivit de près par Zoro. Ce n'est qu'une fois arrivés au quartier voisin qu'ils se permirent de ralentir le rythme. Kidd était taré, mais pas encore au point de les courser dans la rue avec le pyjama que lui avait offert Bonney à la Saint Valentin. Quoique le vert regrettait presque de ne pas avoir pu assister à ça.
« Pas trop tôt ! Tu dois les retrouver où tes potes ? Nul part, je vais juste à la bibliothèque. J'ai une dissert' à rendre demain, mais je voulais pas que l'autre malade sache où me trouver ».
« Ah, bonne idée, je t'accompagne. Je devrais pouvoir y pioncer en silence ».
Law se contenta d'hausser les épaules avant de se mettre en route, le vert sur ses talons. Si aujourd'hui, les deux se considéraient comme des amis, cela n'avait pas toujours été le cas. Leur caractère étaient plutôt différents, et si le brun était un glandeur, il avait quand même de l'ambition, celle de devenir chirurgien, alors que Zoro profitait bien plus de sa vie étudiante. En somme, l'un était fêtard quand l'autre était plutôt casanier. Malgré tout, ils se complétaient plutôt bien, et surtout, ils savaient former une coalition contre la tyrannie de Kidd. Ce dernier aimait d'ailleurs répéter à bout de champ qu'ils se montaient contre lui « parce qu'il était le seul hétéro ». Cette formule avait d'ailleurs tendance à agacer fortement le brun. En effet, si cela lui faisait un point commun avec le vert, ça s'arrêtait là. Zoro était très volage, et cela faisait des mois qu'il accumulait les rendez-vous d'un soir. Law lui était beaucoup plus pudique, et n'avait d'ailleurs connu qu'une relation ou deux depuis qu'il s'était accordé sur sa sexualité. Aujourd'hui, il se sentait plus asexué qu'autre chose. Mais il prenait un malin plaisir à faire croire au rouge qu'il était aussi pervers qu'il le pensait.
La bibliothèque était pratiquement vide à cette heure de la journée, ce qui rassura Law. Il ne se sentait pas à l'aise quand il était entouré de dizaines de personnes silencieuses : il avait toujours l'impression d'être observé et n'osait même pas se lever pour reposer un livre. Il se sentit néanmoins tout de suite plus à l'aise quand il vit le vert d'affaler sur le table et commencer à ronfler doucement. Il pris soin de s'installer à plusieurs mètres de lui et se mit au travail en soupirant. Ce n'était pas qu'il n'aimait pas travailler. Quand il commençait à s'y mettre, il savait vraiment se montrer assidu. Le problème, c'est justement qu'il n'arrivait jamais à s'y prendre à l'avance. Il était donc habitué à devoir travailler à l'arrache, dans la panique, et donc souvent de manière assez superficielle. Les deux autres n'arrêtaient d'ailleurs pas de lui répéter qu'en y mettant du sien, il pourrait facilement faire parti des meilleurs de sa faculté. Mais Law se fichait bien d'une chose aussi quelconque qu'un classement. Il n'avait jamais été le meilleur pour quoique ce soit, et il ne voulait pas finir comme ce genre de personne qui se rendent malade quand elles n'arrivent pas à se classer au sommet des podiums.
De son côté, Zoro était loin du genre de philosophie dont s'encombrait Law. Il n'avait jamais été spécialement bon dans ses études et n'avait décidé d'aller à la fac que dans l'espoir de pouvoir profiter quelques années encore d'une vie sans aucun soucis. Il savait bien que quand le moment serait venu pour lui de travailler, il n'aurait pas beaucoup de choix intéressants, et dans le meilleur des cas, il pourrait reprendre les rennes du temple de son père. Mais il doutait fort que ce dernier ait encore assez d'estime de lui pour lui accorder cela. Pour le moment, il était encore logé, nourri, et ça lui suffisait bien. Et si parfois il lui arrivait d'appréhender son avenir, il chassait bien souvent ses doutes à travers des sorties avec des amis ou des amants. Après tout, il n'avait que vingt ans, c'était normal à son âge de rester encore un peu insouciant. Pour le moment, il était surtout curieux de voir quel genre de personne allait venir prendre la place de Kidd dans leur petite vie tranquille. De sûr, ils auraient en tout cas bien plus la paix qu'avec l'étudiant en art. Le jeune homme aimait à penser que ça serait une expérience sociale en plus, toujours bonne à prendre. Et puis, malgré tout ce que le rouge pouvait dire, il voyait mal comment les choses pourraient mal tourner. Dans le pire des cas, ils ne s'entendront pas du tout avec la personne et se contenteront de l'ignorer (pendant les premières semaines après leur rencontre, c'était comme ça qu'ils avaient agit, Law et lui).
« Au fait ». Il interpella le brun, visiblement pas gêné par la distance qui les séparait. « Tu crois qu'il saura parler japonais ? ».
Law releva le tête, parut réfléchir un instant, mais se contenta une fois de plus de hausser les épaules _ sa mimique favorite qui lui évitait d'avoir à parler_.
« Parce que moi je sais pas parler français ».
« T'auras qu'à lui parler anglais et puis voilà ».
« J'ai une tête à avoir suivit les cours d'anglais ? ».
«Et bah en langue des signes ou par pictionary, qu'est-ce que tu veux que je te dise ? ». Il avait cette fois délaissé son ouvrage d'anatomie. De toute façon, ça faisait une demi-heure qu'il lisait le même paragraphe sans en comprendre le sens.
« Ça te préoccupe même pas un peu toi ? »
« Non puisque pour ma part je sais me faire comprendre en anglais, et j'ai retenu des notions de français de Kidd ».
« Bon bah tu me servira d'interprète alors, c'est réglé ».
« Crève ».
Il fut coupé par une vieille femme assise non loin d'eux qui lui jeta un regard courroucé, plaçant son indexe devant sa bouche pour lui intimer le silence.
« Putain. Mais pourquoi c'est encore moi qui me fait engueuler comme un môme alors que c'est toi qui parle le plus fort ? »
« C'est tes tatouages qui font ça. Je me demande d'ailleurs comment réagiront tes futurs patients quand ils découvriront que leur médecin à le mot « mort » que les phalanges ».
« C'est quand même plus discret que tes cheveux vert ! »
« Peut être, mais moi je me destine à terminer ma vie dans une chaîne de fast food ou veilleur de nuit dans un entrepôt. Du coup je collerai plus facilement au cadre ! Alors que toi, t'es complètement hors sujet avec tes lunettes et ton bouquin de science à la main ».
Law gratifia son ami d'un majestueux doigt d'honneur avant de se presser de retirer ses lunettes de lecture, sujet de moquerie permanent pour le jeune homme. Bien sûr, il ne pouvait pas donner entièrement tort au vert. Il avait surtout fait ses tatouages dans son époque « rebelle », en premier lieu pour choquer son père qui l'avait toujours couvé. Mais pour autant, il ne regrettait jamais ses actions, et ce même si cela devait lui porter préjudice pour la suite. Au pire des cas, il irait exercer sa profession aux États-Unis, ou en Europe où ce genre de chose était mieux toléré que dans le Japon si traditionnel. Ici, il ne pouvait pas se balader en ville sans être pris pour un Yakuza, et la plupart du temps, on lui refusait même l'entrée aux bains publics. Le plus pesant était certainement d'ailleurs le regard de ses congénères à la faculté de médecine qui se résumait à du dédain de la part des garçons et de la crainte des femmes. Malgré tout, il avait réussi à se faire deux amis, mais cela restait assez solennel.
« J'ai faim. Tu nous fais un curry ce soir ? »
Law avait haussé un sourcil. Il n'était pas vraiment un cordon bleu, mais il était le seul du trio à savoir utiliser les plaques à gaz sans risquer de mettre le feu au domicile. Il n'était donc pas rare qu'il soit sollicité par les deux autres lorsque ceux-ci voulait un plat en particulier. « On n'a plus de viande, et j'ai pas un rond. ».
« T'inquiète, j'ai le portefeuille de Kidd ».
« Super, donc en plus de me farcir la tambouille, je vais devoir supporter ses hurlements quand il aura réalisé que tu lui a piqué son fric ? ».
« Bah...il aime le curry aussi non ? Puis il se barre dans une semaine, c'est pas comme s'il allait avoir besoin de ses yens encore longtemps ».
Le brun n'insista pas. Après tout, il avait faim, lui aussi.
La semaine suivante paru interminable pour Zoro et Law. Leur colocataire n'ayant absolument rien préparé depuis des mois, il avait donc dû s'occuper de toutes les formalités de son voyage à la dernière minutes, non sans en faire baver aux deux jeunes hommes. Ils avaient donc passé leurs journées à courir à droite et à gauche pour acheter toutes les affaires dont il aurait besoin, à commander les billets d'avion au prix le plus abordable ou encore à s'assurer auprès de l'université que le visa était bien en ordre. Si on ajoutait à cela le fait que le rouge était encore plus excité qu'à l'ordinaire, cela donnait une bonne idée du taux de stress dans lequel ils étaient tous.
C'est donc plutôt soulagé qu'ils accompagnèrent finalement leur ami à l'aéroport ce jour-là, non sans avoir évidemment passé les heures précédentes à s'assurer qu'il n'avait rien oublié.
« Bon, on répète une dernière fois les règles avant de partir ? »
Il eut pour seule réponse un regard assassin d'un Zoro en manque de sommeil, faute d'avoir réussi à accumuler son quotas de sieste nécessaire.
« Au fait, comment ça se passe pour le français ? Il arrive quand ? »
« Ah oui, c'est vrai que j'ai oublié de vous dire ! Il arrive ce soir à 17 heure, donc soyez bien là pour l'accueillir ! » Il avait dit ça d'un ton dégagé, tout en regardant d'un air intéressé le panneau d'horaire des départs.
« Tu déconnes j'espère ? Comment t'as pu passer les derniers jours à nous bassiner avec des conneries et omettre de nous dire quelque chose d'aussi important ? »
« Bah, ça change quoi ? »
« Ce que ça change ? Oh rien, simplement qu'il faut une heure de trajet rien que pour venir de l'appart' à l'aéroport, qu'on a donc pas le temps de rentrer avant de repasser et qu'on a six putains d'heures à attendre ici comme des cons ! » Zoro s'était dressé devant Kidd, comme s'il allait le frapper, mais cela ne provoqua qu'un rire dément chez le jeune homme, prêt à répliquer immédiatement.
« Tu vas rater ton vol Eustass-ya ».
Kidd sembla hésiter un instant, comme s'il pesait le pour du contre, puis il se contenta finalement de cracher avec dédain avant de saisir sa valise et se diriger vers le guichet pour faire enregistrer ses bagages. Il ne manqua pas de gratifier ses amis d'un dernier bras d'honneur avant de disparaître complètement au milieu des autres voyageurs.
« Bon. Et du coup on fait quoi nous maintenant ? » Grogna Zoro.
« Se chercher une boisson et attendre, je suppose. ».
« Super. Je lui revaudrai ça à cet abruti ».
Ils attendirent une dizaine de minutes que le hall se désengorge avant de se diriger vers le petit café de l'aéroport. Ils réussirent tant bien que mal à trouver une petite table libre, mais regrettèrent bien vite de s'être assis en découvrant les prix exorbitants de la carte. Finalement, Law se contenta d'un café serré, alors qu'il regardait avec désespoir le vert commander une chope de bière. Pourtant, il pu constater que ce fut encore à lui que la vieille serveuse jeta un regard mauvais après avoir observé les mains du brun, ce qui ne manqua pas de faire rire Zoro à gorge déployée. Il grogna, mais décida d'ignorer cela. Heureusement pour lui, il avait prévu le coup en prenant son ordinateur portable avec lui, et l'aéroport était munit de wifi gratuit. Au moins, ça le forcerait à bosser quelques heures ses cours, puisqu'il n'avait rien d'autre à faire.
Zoro de son côté ruminait en buvant sa boisson. Il ne supportait pas l'idée de passer sa journée entière à attendre sans rien faire, et pendant un instant, la tentation fut forte pour lui de laisser Law tout seul et de rentrer chez lui piquer un somme. Il essaya tant bien que mal de se rappeler d'un quelconque centre commercial ou commerce qu'ils auraient pu croiser non loin de là sur le chemin de l'aller, mais à part un vieux restaurant miteux, rien ne lui revenait à l'esprit. Le seul magasin était la petite boutique de l'aéroport, mais à part des accessoires de voyages, des sucreries et quelques magazines, il n'avait rien repéré d'intéressant qui pourrait l'occuper un temps nécessaire. Et de toute façon, c'était inutile puisqu'il n'avait plus de monnaie et avait laissé sa carte à l'appartement. S'il ajoutait à cela le fait que le brun était la personne la moins passionnante pour débuter une conversation, il était au bord du désespoir émotionnel.
« Au fait. On devrait peut-être fabriquer un panneau. Ou un truc du genre, non ? » Il avait dit ça sans trop réfléchir, plus pour briser le silence qu'autre chose.
« De quoi tu parles ? »
« Bah pour l'accueillir. Il sait pas à quoi on ressemble, et nous non plus ».
« Alors déjà, il est hors de question que je porte un de ces trucs en carton à la con. Et ensuite, tu veux bien me dire ce que t'écrirais dessus ? Tu connais même pas son nom ».
« Le français ? »
« L'avion vient de Paris crétin ».
« Bah j'en sais rien moi ! Tu proposes quoi ? »
« On attend de voir lequel reste tout seul à la fin et on procède par élimination ».
« C'est naze. On va pas attendre une heure qu'y ai plus personne ? »
« Fais ce que tu veux, mais je servirai pas d'homme panneau. ». Il avait retourné son attention sur l'écran de son pc, signe que la conversation était terminée.
« Tch, laisse tomber. Je te laisse si ça t'amuse de glander, moi je vais faire un tour ». Ce n'était pas comme s'il avait grand chose à voir, mais il préférait définitivement faire le tour de cet aéroport en boucle plutôt que de rester un instant de plus avec le jeune homme taciturne.
Ce n'était pas qu'il n'appréciait pas spécialement Law. Il le considérait même comme un véritable ami, mais pour autant, ils était rare que les deux discutent ensembles plus de vingt minutes. Ils n'avaient jamais vraiment eu grand chose à se dire, et d'ordinaire, c'était plutôt Kidd qui servait de fil conducteur entre eux-deux. C'était d'ailleurs grâce à lui qu'ils s'étaient rencontrés, à la base. C'était au lycée, et il s'était pris la tête avec le rouge pour une raison qu'il avait oublié _ certainement que l'un avait dû marcher sur les pieds de l'autre ou mal le regarder_ et Law était intervenu pour calmer le jeu avant qu'ils n'en viennent au poings. Après ça, ils avaient finit la soirée à boire joyeusement dans un bar, et ils ne s'étaient plus quittés. C'est ça. Le brun avait toujours joué un rôle de médiateur dans leur trio. Bien sûr, il lui arrivait aussi de s'énerver, et il était au moins autant provocateur que lui et Kidd réuni, mais pour autant, il savait toujours garder son calme en toutes circonstances. Et puis il n'y avait pas meilleur que lui pour négocier les tarifs du livreur de pizza. Il faut dire que Law savait se montrer très convaincant quand il le voulait, et sans jamais l'avouer, Zoro était heureux de ne pas figurer parmi la liste de ses ennemis.
Il regarda l'heure sur son portable, et constata avec désespoir qu'il ne s'était écoulé que deux heures depuis que leur ami était parti. Il avait l'impression de se trouver dans une foutue boucle où le temps passait au ralenti. Pendant un instant, il hésita à envoyer un SMS à Luffy, histoire de passer le temps, mais il doutait fort que le brun réponde. C'était l'heure de son quatrième repas de la journée, et puis, même s'il disait qu'il ne lui en voulait plus, le vert avait remarqué que son ami était un peu plus distant ces dernières semaines. Il y a peu de temps de ça, Zoro était sorti brièvement avec Sabo, son grand frère, et ça s'était terminé de manière plutôt chaotique. Et même si Luffy ne semblait pas se mêler de ce genre d'histoire, il n'en avait pas été de même pour Ace qui était beaucoup plus protecteur avec sa famille. Il en faisait aucun doute que l'aîné avait dû en toucher u mot au plus jeune. Ça n'embêtait pas spécialement Zoro, il savait bien que les tensions ne dureraient pas. Mais du coup, il s'était trouvé un peu plus isolé récemment, et le ressentait encore plus dans des moments comme celui-ci.
Un peu plus loin, Law s'était trouvé une chaise de libre, le pc posé sur ses genoux. Après avoir terminé son café, on lui avait vite fait comprendre qu'il avait le choix entre commander une autre consommation ou laisser la place au client suivant. Ce n'était pas comme s'il n'était pas habitué, mais il commençait à trouver ça pesant. Il n'avait pas pour habitude de passer autant de temps hors de chez lui, et il devait reconnaître que sa petite chambre lui manquait horriblement. Une fois, un étudiant en psychologie, ami de Zoro, s'était amusé à l'analyser et à lui coller l'étiquette d'agoraphobe, mais lui était persuadé que misanthrope était le mot exact. Ou peut être paranoïaque sur certains points. Son téléphone vibra, et il soupira en voyant « Cora-san » apparaître sur l'écran. Il n'aimait déjà pas parler au téléphone de manière générale, mais c'était encore pire quand il s'agissait de son père. Le blond avait passé la quasi totalité de sa vie à le couver, et c'était encore pire depuis qu'il avait quitté le domicile familial. Il avait beau être fier de savoir son fils en fac de médecine, il craignait toujours pour son avenir quant à ses fréquentations, et il avait d'ailleurs été le premier à s'opposer à la colocation avec les deux autres jeunes hommes. Bien sûr, il n'avait jamais eu assez d'autorité pour faire accepter la moindre de ses décisions au brun, mais il compensait donc en prenant de ses nouvelles jusqu'à trois ou quatre fois par jour. Et si par malheur un accident quelconque arrivait dans la capitale, Law était sûr de voir son père arriver à al hâte dans les heures suivantes.
Il hésita un instant, puis appuya finalement sur sur la touche.
« Law ? Je suis content que tu répondes ! Comment vas-tu ? »
« Aussi bien que ce matin quand tu me l'a demandé par SMS. Et via Facebook. »
« Comment veux-tu que je le sache, t'as même pas répondu ! Et c'est quoi ce bruit derrière toi, t'es où là ? »
« A l'aéroport ».
« De quoi ? Mais tu vas où ? Bon sang, je sais qu'on communique pas beaucoup mais tu pourrais quand même me dire ce genre de chose ! Et puis t'as pas cours en ce moment ? ».
Le brun avait éloigné le téléphone d'une dizaine de centimètre de ses oreilles, passablement énervé. De toute façon, il ne pouvait pas rester au téléphone avec Corazon plus de cinq minutes sans en avoir mal. Mais là, c'était allé particulièrement vite.
« Déjà tu vas commencer par te calmer si tu veux bien. Premièrement, si j'ai envie de partir, ça me regarde.. »
« Je te rappelle que je suis ton père » Il avait voulu dire ça avec autorité, mais sa voix était plus larmoyante qu'autre chose.
« DEUXIÈMEMENT, si tu me laissais parler un peu avant de me couper, t'aurais sût qu'on est ici avec Zoro pour accompagner Kidd et accueillir l'étudiant français qui doit arriver tout à l'heure. Tu te rappelle, je t'en avais parlé quand même ».
« Ah oui, c'est vrai. Et Zoro est avec toi du coup ? »
« Il traîne dans le coin j'imagine ».
« Tu sais, c'est peut-être l'occasion pour toi de voir que tu vivrais mieux sans eux et.. »
« Recommences pas je te préviens. De toute façon c'est pas comme si on avait les moyens de prendre un appart' pour moi tout seul non ? ». Il savait que la phrase blesserait le blond, mais c'était parfois la seule manière de lui faire entendre raison.
« Mais tu pourrais peut-être trouver d'autres colocataires, non ? » Sa voix était plus douce. « Je m'inquiète pour toi, c'est tout. Enfin, j'espère au moins que le nouveau sera gentil avec toi ! Il paraît que les français sont tous très bien élevés ».
« C'est marrant que tu critiques autant Kidd alors que t'es autant cliché que lui. Enfin bref, je dois te devrait bientôt arriver et je dois retrouver Zoro avant ça ».
« D'accord... On se rappelle dans la semaine, d'accord ? » Il avait dit ça avec beaucoup d'espoir, et Law ne se sentit pas d'être encore de mauvaise foi. Il maugréa une réponse positive et raccrocha alors que le blond l'inondait sous des « bisous à distance ».
Il avait un peu menti en disant qu'il devait se dépêcher de raccrocher. Il restait encore une heure avant que l'avion de Paris n'atterrisse, mais connaissant Zoro, il savait qu'il était capable de se perde n'importe où dans cet endroit. Il se frotta le crâne en soupirant. 'Dans le doute, j'ai intérêt à m'y mettre tout de suite'.
« Tu vois quelque chose toi ? »
« Des gens. Beaucoup. Sinon, qu'est-ce que tu veux que je vois ? Je sais pas plus que tout à l'heure à quoi il ressemble hein ? »
« Nan mais arrête de jouer les cons. Je veux dire, t'en vois pas un qui à l'air...j'en sais rien moi, d'un étudiant paumé ? »
« Si, toi. De toute façon ce sera toujours plus simple que quand j'ai dû carapater pour te retrouver dans le Duty Free tout à l'heure »
« Ah la ferme va. »
Cela faisait presque vingt minutes que l'avion avait atterri, et ils n'étaient toujours pas plus fixés sur leur mystérieux nouveau colocataire. Les passager défilaient devant eux, mais c'était principalement des familles en vacances ou des couples de retraités. Les seuls voyageurs « solitaires » ressemblaient davantage à des hommes d'affaire que des étudiants d'art.
« On l'a loupé je te dis ».
« Il va pas quitter l'aéroport de toute façon ! On va bien finir par le voir, alors calme toi un peu ». Law commençait à ressentir une certaine appréhension. Il devait bien reconnaître que Zoro avait réussi à introduire le doute en lui.
« Eh, mate le blond là bas ! »
Law ne fit aucune réflexion sur la discrétion du vert et tourna la tête vers la direction qu'il lui indiquait. Effectivement, il aurait été difficile de passer à côté de lui. À quelques mètres d'eux, un jeune homme qui ne semblait pas avoir plus de vingt ans venait tout juste d'apparaître, une valise à la main. Il était grand, bien qu'un peu moins qu'eux, et était vêtu d'un costume trois pièces, comme ceux que portaient les maîtres d'hôtel. Mais surtout, comme l'avait si bien mentionné Zoro, il avait des cheveux d'un blond qui tirait presque sur le doré, et qui cachaient partiellement l'un de ses deux yeux bleus. C'était une couleur de cheveux pratiquement introuvable dans le pays, et autour de lui, de nombreuses personnes se retournaient sur sa route, filles comme garçons.
Angélique. C'était le premier mot qui était venu à l'esprit de Law pour le décrire, même s'il devait reconnaître que le jeune homme dégageait une certaine assurance. Il tenait par le bras une vieille femme et s'adressait à elle en souriant.
« Pas mal ». Reconnut Law sobrement. Il ne voulait surtout pas parler de ce genre de sujet avec le vert, et préférait donc garder ses opinions pour lui la plupart du temps.
« C'est sa grand-mère tu crois ? »
« Mais qu'est-ce que j'en sais ? Ett qu'est-ce que ça peut te foutre ? »
« Bah, savoir si je peux lui demander son numéro ou si ça craint ».
« Dans tous les cas t'auras l'air d'un guignol ».
« Pfeu ! »
Ils avaient échangé sans détourner leur regard du jeune étranger, ce qui d'un point de vue extérieur aurait fait peur à n'importe qui. Ils allaient repartir à la recherche de leur invité, quand l'instant d'après, le blond lâcha le bras de la vieille dame après lui avoir indiqué une direction en souriant. Ils échangèrent quelques mots avant qu'elle ne parte dans une direction, le laissant seul dans le hall.
'Un gentleman ? Il lui portait simplement ses affaire '. Law se surpris à s'intéresser autant à la contemplation du jeune homme. Mais bon, ce n'était pas comme si le rustre à côté de lui se gênait pour le faire.
Bientôt, le hall commença à se vider et il resta pratiquement plus qu'eux trois dans l'immense pièce. Le blond regarda un moment autour de lui, comme s'il était perdu, avant que son regard ne tombe sur Zoro et Law, resté un peu à l'écart de la foule. Il sembla les reconnaître, afficha un grand sourire et se dirigea naturellement vers eux, tirant difficilement ses bagages derrière lui.
« Salut, je m'appelle Sanji ! Je suis là pour l'échange ! »
Il avait dit ça dans un japonais maladroit, mais le duo était trop surpris pour remarquer quoique ce soit. Zoro afficha un sourire satisfait et se pencha lentement pour murmurer à l'oreille de Law.
« Je te propose qu'on annule la règle N°3 ».
Voilà le premier chapitre de cette histoire est terminé ! J'avais besoin d'écrire une histoire un peu légère, mais jusque là je n'avais pas eu le temps de le mettre en place.
Je vais essayer de publier dans la foulée le chapitre suivant de « Cook for me » cette semaine, sinon ça sera en début de semaine prochaine, comme d'habitude !
En espérant que vous ayez aimé ce début !
À Bientôt !
