Unworthy
Disclaimer : Les personnages et l'univers appartiennent à J.K. Rowling.
Tête baissée, je me fais le récipient de leurs mots vindicatifs.
Une poupée juste bonne à hocher la tête, c'est ça qu'ils veulent.
Indigne !
C'est ce mot-là qui revient le plus souvent. J'ai envie de me révolter face aux adjectifs tous plus horribles les uns que les autres qui sortent de leur bouche.
C'est si plein de haine et de rage. Pourtant, c'est leur fierté blessée qui parle. Pas leur amour.
Non, jamais leur amour.
Je fixe, trop fort peut-être, une tache sur la table. Kreacher ne l'a pas encore nettoyée. Une tache d'huile, jaunâtre, qui tranche tellement avec le bois précieux de la table de banquet des Black. Une lueur d'imperfection dans leur monde si organisé et rangé.
J'essaie de bloquer leurs voix. Concentre toute mon attention sur cette foutue tache.
Parce que c'est ce qu'il est.
Ma vue commence à brouiller, j'ai mal à la tête. Mais je ne veux pas détourner les yeux. Je ne veux pas les écouter.
Honte de ma chair et de mon sang !
J'ai envie de fermer les yeux, de m'en aller, de leur claquer la porte au visage. Mais je sais que je ne peux pas. Je n'ai pas son courage. Je n'ai pas son cran.
Une révolte du mouton. Quelle idée.
Ma concentration s'égare, s'évapore. Leurs cris forcent mes barrières. Le ton s'est calmé et du coin de l'œil, je devine ma mère, les traits rougis par la colère. Et mon père, avec cet air de déception si fort que j'ai envie d'hurler.
Il est plus fort que vous ! Vous n'avez pas le droit de le traiter ainsi !
J'ai le sentiment que je devrais prendre sa défense. Que je ne devrais pas laisser son nom traîner dans la boue ainsi, que je devrais me rebeller. Les contredire, comme lorsque lui, me défendait.
Son absence se fait ressentir un peu plus fort à mes côtés.
Je n'avais jamais pris conscience à quel point il avait été important. Même comme figure à haïr, même comme contre-modèle. Malgré les mots acerbes et la tension qui sous-tendait nos relations à Poudlard, il avait toujours été là. Il avait toujours été mon frère.
Je n'ai pas encore conscience de ce que son départ veut dire pour moi. Pas vraiment. Bientôt, je l'apprendrais et peut-être alors me mettrais-je à le haïr. Peut-être.
Mais pas maintenant.
La tempête s'est calmée. Kreacher a nettoyé la tache d'huile. La table resplendit à nouveau de tout son éclat.
Effacé.
« Heureusement que nous t'avons, Regulus. »
Et, tandis qu'une main froide touche mon visage, en une parodie de caresse tendre et qu'un sourire impersonnel étire mes lèvres, comme un aveu de ma faiblesse, je ne peux m'empêcher de me dire que de nous deux, c'est moi l'indigne.
We Are – Ana Johnson, 30 décembre 2010
Ce n'est pas un drabble, ce n'est pas un OS. Comme Le silence, c'est un un-jet, sans prétention, sans relecture, sans retravail. Simplement parce que j'ai lu dans une fic en anglais le mot "unworthy" ("indigne" en français) et que, sans raison, j'ai pensé à Regulus. Je suis en plein blocus (dans le sens belge, donc "période de vacances mise à contribution pour réviser en vue des examens"), je suis exténuée et j'ai le cerveau en bouillie. Alors considérez cet écrit comme un exutoire ou un moyen de garder une santé mentale plus ou moins stable.
En espérant néanmoins qu'il vous aura plu et d'avance, bonne année !
PS : à tous mes lecteurs en général : étant, comme dit plus haut, en blocus et très bientôt en examens...ne vous attendez pas à des updates avant minimum fin janvier.
Sorn
