Un. Deux. Trois.
Mes pieds résonnent contre le sol métallique, et chaque pas que je fais me fait progresser en direction de nulle part en particulier.
Sept. Huit. Neuf.
Chaque pas est plus lourd que le précédent, et je ressens le besoin de compter plus vite, je pourrai donc en quelque sorte atteindre ma destination plus tôt.
Seize. Dix-sept. Dix-huit.
Ce n'est pas ma première procession du train. En fait, c'est devenu une routine de nuit depuis le district 11. Je ne pourrais pas vous dire dans quel district nous sommes là maintenant – et franchement, ça n'a plus vraiment d'importance.
Trente-deux. Trente-trois. Trente-quatre.
Depuis que j'ai entendu le coup canon pour ces personnes innocentes, les rêves me hantent. Marcher dans le train semble m'aider, bien que je revoie la tête de ce pauvre homme, ratatinée, explosée.
Quarante. Quarante-et-un. Quarante-deux.
Respire profondément.
Tu ne peux pas penser comme ça, Peeta, je me gronde intérieurement. Alors, je continue à compter. Cela semble être la seule chose qui fonctionne.
Cinquante-sept. Cinquante-huit. Cinquante-neuf.
Ce n'est pas avant d'être aux alentours de cent que j'entends des cris. D'abord, je pense que ce sont ceux que j'entends dans ma tête, ceux des cauchemars qui me hantent, mais les cris deviennent plus forts, comme mes pas, et je sais qu'ils viennent d'une source différente.
Cent-vingt-quatre. Cent-vingt-cinq. Cent-vingt-six.
Je cours vers l'endroit d'où viennent les cris, et je trouve le même chemin où mes pieds m'ont déjà emmené un nombre incalculable de fois, jusqu'à sa porte. Je l'ouvre, ne m'arrêtant pas pour frapper, les cris m'assaillent et je ne peux lutter contre mon instinct protecteur. Je me précipite dans son lit et prend Katniss dans mes bras.
« Chut, tout va bien, » je lui dis, mais c'est inutile d'espérer une réaction, avec ses yeux verrouillés, son corps hyper ventilé. « Katniss ? » je compte les secondes pendant lesquelles ses yeux sont fermés.
Un. Deux. Trois.
Quatre. Cinq. Six.
Onze. Douze. Treize.
Ses yeux s'ouvrent finalement, cherchant du réconfort dans mon regard. Elle respire profondément.
Cinq. Six. Sept.
Je continue de la serrer pendant qu'elle se calme.
Neuf. Dix. Onze.
« Peeta ? », la vulnérabilité dans sa voix fait s'arrêter mon cœur de battre, et pendant un moment, je ne peux compter ses battements.
« Oui ? », je réponds, toutes les émotions se sentant dans ma voix. Les secondes passent avant qu'elle ne réponde.
Cinq. Six. Sept.
« Vas-tu rester avec moi ? »
Je regarde Katniss, voyant cette fille avec une expression que je n'ai vue qu'une seule fois auparavant. Quand nous étions plus jeunes, et qu'elle était assise derrière moi, mourant lentement de faim, elle avait la même expression que maintenant. Désespérée. Dans le besoin. Vulnérable. Et je réalise, en ce moment, que je n'ai jamais été aussi amoureux de Katniss Everdeen.
Je ne réponds pas à sa question, il n'y en a pas la nécessité, et l'attire doucement dans mes bras. Elle se penche contre ma poitrine, me donnant immédiatement du confort, de la sécurité, une tranquillité d'esprit. Ce n'est pas avant d'entendre sa respiration qui me berce que je remarque que quelque chose ne va pas. Quelque chose s'est arrêté. Mais quoi ? Katniss est là, endormie dans mes bras, à l'abri des dangers. Alors, quoi ?
C'est à ce moment que je réalise. C'est le calme. Le calme à l'intérieur de mon esprit. Ça prend son sens maintenant. Katniss repousse mes cauchemars. Et, couchés là dans l'obscurité, avec sa poitrine qui monte et qui descend à chaque respiration, je réalise autre chose.
Avec Katniss ici, je n'ai plus besoin de compter.
