Note de l'auteur: Cette histoire fait partie de la révision complète automne 2003 de la trilogie « Obscurité et Lumière » originelle, modifiée à partir de la forme sous laquelle elle était tout d'abord apparue sur le web au cours du printemps et de l'automne 2001. Pour s'adapter au 'canon' de Harry Potter jusqu'à l'Ordre du Phénix inclus, de nouvelles scènes ont été ajoutées, d'autres ont été transportées à d'autres périodes et dans d'autres lieux, et d'autres ont été retaillées ou coupées. J'ai aussi relissé ce que je trouvais être de niveau inégal,ou ne convenant pas aux personnages, j'ai corrigé des erreurs d'emplois et de style, et j'ai arrangé deux ou trois défauts mineurs mais ennuyeux.

Je suis pronfondément reconnaissante envers tous ceux qui m'ont aidé au cours du processus de révision, en traquant et identifiant les écarts entre O&L et l'OdP, et en faisant des suggestions utiles d'amélioration: tout d'abord, mes béta-lecteurs depuis longtems et très chers amis Teri Krenek,Alec Dossetor, Liz Barr,et Erica H.Smith; et deuxièmement, les membres de la liste de diffusion « O&L Revisions », tout particulièrment Christy/Sabrina, Sarah Izhilzha, Kim Krajci, Sannali alias Morwen, Emily Bytheway, Carole alias Snape's Witch, Laura Page, Elaine Lahey, Liz E., Julia Steinberg, Manda, et Zebee Johnstone. Mes remerciements sincères à vous tous.

Les commentaires et les critiques sont toujours les bienvenus, et peuvent être envoyés à: rja (arobase) pobox (point) com.

Titre: L'élève du professeur de potions- version corrigée, 10/2003 Chapitre 1: Inferno (1/3) Auteur: R. J. Anderson Email: rebeccaj@pobox.com Traduit de l'anglais par dark_rogue@caramail.com Categorie: Drama/Angst Mots clefs: Rogue, Maugrey, cinquième année, après la coupe de feu (Accord parental souhaitable) La lune et feu et la voix d'un homme. Ces trois choses étaient imprimées de manière indélébile dans sa mémoire, plus clairement que le kneazle en peluche sans laquelle elle ne pouvait pas dormir lorsqu'elle avait quatre ans, ou que l'expression sur le visage de son père lorsqu'il l'avait embrassée pour la dernière fois.

Elle avait attendu quatorze ans, passés à écouter, que cette voix parle à nouveau. Et quand elle l'entendrait, elle la reconnaîtrait immédiatement.

Ce qu' elle ferait quand cela arriverait, cependant, elle n'en avait jamais été entièrement sûre.

***

"D'où ça ?" Le garçon aux cheveux noirs se figea au milieu de son mouvement, ses lunettes rondes étincelant dans la lumière lorsqu' il se tourna pour regarder fixement la fille à ses côtés. En hâte, ne voulant pas qu'ils la voient, Maud recula jusque derrière une armure au pied de l'escalier. Indécis, le petit hibou bougea sur l'épaule de Maud, mais celle- ci murmura "Regarde ," et Athéna obéit, suivant les trois autres élèves de ses imperturbables yeux jaunes .

"Je viens de vous le dire," dit la jeune fille, changeant de position la pile de livres dans ses bras. "Durmstrang".

"Oh, super," grogna le dernier membre du trio, un garçon dégingandé aux cheveux roux. "Juste ce dont nous avions besoin, en plus de tout le reste. Un Serpentard qui a passé les six dernières années à étudier les Arts Sombres."

La fille lui lança un regard sévère. "Nous n'en sommes pas sûrs! Viktor m'a dit-"

Bien sûr, pensa Maud. J'aurais dû la reconnaître tout de suite. La photographie de la jeune femme avait accompagné Victor Krum à son retour du Tournoi des Trois Sorciers, et bien qu'il ait eu peu de choses à dire du reste de son séjour à Poudlard, il avait presque été éloquent au sujet de Hermione Granger. "Attendez." Le garçon à lunettes repoussa sans cérémonie ses cheveux loin de ses yeux, révélant une horrible cicatrice sur son front et subitement Maud sut son nom aussi sûrement que s'il le lui avait crié : Harry Potter. "Comment savez-vous qu'elle est à Serpentard ? Elle était pas la cérémonie de la Répartition avec les autres hier soir."

"Bien sûr que non. Elle est seulement arrivée ici ce matin. Et de toute façon, seules les première années portent le chapeau."

"Bon, ils la mettront bien dans une des Maisons," l'interrompit Ron, "alors je ne vois pas pourquoi elle ne serait pas répartie comme tout le monde."

"Nous pourrions le demander au Professeur McGonagall-" dit Hermione, mais elle semblait dubitative.

Harry fit une grimace amère. "Toi, tu pourrais. J'en ai assez qu'on me dise de m'occuper de mes affaires, merci bien...."

De sa place dans les ombres, Maud écouta les trois étudiants se disputer le long du le couloir et fit un sourire ironique. Les nouvelles voyageaient vite ici à Poudlard : pas comme à Durmstrang, où l'air était épais de secrets et où la vérité ne s'aventurait nulle part sans un cortège de mensonges. Il lui faudrait du temps pour s'habituer.

Athéna émit un hululement interrogateur et Maud leva une main pour la rassurer, faisant couler les douces plumes tachetées de blanc du hibou entre ses doigts. "Oui", dit-elle. "Nous partons à présent."

Après tout, Dumbledore lui avait dit d'aller immédiatement voir le directeur de sa nouvelle Maison et il ne ferait pas bon être en retard.

***

Quand elle s'était préparée à se mettre au lit cette nuit-là, ses parents étaient assis à la table de cuisine, buvant du thé et conversant à voix basse. Un journal était ouvert entre eux deux. "Je ne peux pas y croire," dit sa mère. "D'abord ils ont menacé les Maberleys, puis ils ont torturé Betty Tibbits. Où cela s'arrêtera-t-il ?"

"Shhh, Margo," dit son père, avec un avertissement inexprimé dans sa voix : Pas devant l'enfant.

Debout sur la pointe des pieds elle embrassa sa mère et tira sur la main de son père, le priant de lui lire son histoire du soir. C'était une histoire spéciale, inventée spécialement pour elle, et, bien qu'elle ait dû l' avoir entendue déjà cent fois, elle n'en était jamais lassée.

Quand il eut fini l'histoire, il la coucha, embrassa son front et quitta la pièce, fermant la porte doucement derrière lui. Toujours éveillée, elle était couchée et regardait la lune, ses petits yeux en scrutaient la face, s'efforçant de la lire et l'interpréter comme son père le faisait pour les artefacts magiques confiés à son soin. Son visage indifférent ne lui révélait rien, mais sa présence la réconfortait. Elle l' imaginait comme un grand bouclier d'argent, protégeant sa maison et la famille qui y était, les gardant de Vous-Savez-QUi, le terrible Seigneur des Ténèbres qu'elle apprenait tout juste à craindre.

Ses yeux se fermaient tout juste lorsque soudainement, terriblement elle se rendit compte d'une présence dans la pièce, une grande forme maigre se dessinant dans l'obscurité au pied de son lit. Elle se redressa en un éclair, la bouche ouverte pour pousser un cri d'alarme, mais une voix prononça un unique commandement :

"Silentio!"

Et elle ne put sortir aucun son.

Rapidement, l'étranger fit le tour du lit et l'attrapa par les poignets, l'immobilisant sans peine malgré ses mouvements de lutte. La regardant dans les yeux, il parla à nouveau, sa voix à peine plus sonore qu'un chuchotement :

"Écoute-moi et ne fait pas l'idiote. Ta vie est en danger."

Elle arrêta de se débattre et se figea, lui rendant un regard d'incrédulité choquée.

1 "Les Mangemorts sont là. Il te tueront si-"

Au loin dans le couloir, elle entendit le son d'un bris de bois et le cri perçant et rauque de sa mère. "Avada Kedavra!" aboya une voix peu familière et le cri fut interrompu, finissant dans un coup assourdi.

L'homme la tenant s'immobilisa, écoutant, ses traits anguleux blancs dans le clair de lune. Subitement il eut l'air très jeune. Puis il se tourna vers elle et poursuivit de façon encore plus pressante :

"Nous n'avons pas le temps. Si tu veux vivre, tu dois me faire confiance, maintenant, et faire ce que je dis. Exactement ce que je dis, fillette. Quoi qu'il arrive, quoi que tu voies. Tu comprends ?"

Papa, articula-t-elle silencieusement, des larmes montant à ses yeux. Maman.

L'étranger hésita, la regardant. Puis, prenant une rapide décision, il tira une baguette de ses robes et prononça les mots qui changeraient sa vie pour toujours :

« Abrumpo visum. »

***

"À l'heure, je vois. Vous pouvez vous asseoir."

Un instant, Maud hésita, sa voix pétrifiée dans sa gorge; puis elle se força à bouger et obéit, prenant la chaise devant le bureau. Elle pouvait sentir les serres d'Athéna s'enfoncer dans son épaule à travers son nouvel uniforme de Poudlard, beaucoup plus léger que les fourrures et les cuirs qu'elle avait portés dans son école précédente, et elle réprima tout juste une grimace.

"Je viens juste d'être informé-" dit-il avec un léger retroussement des lèvres - "que vous avez été transférée ici de Durmstrang pour achever votre éducation magique. Puis-je demander pourquoi ?"

Cette réponse, au moins, vint facilement. "Le précédent directeur de Durmstrang entretenait un enseignement de qualité pour ses étudiants. Je n'ai pas la même confiance dans le nouveau Directeur. De plus, mon oncle voulait m'avoir plus près de lui et puisqu'il est mon tuteur, j'ai pensé que ce serait montrer peu de reconnaissance que de désobéir." Elle parlait calmement, le visage inexpressif, mais son c?ur battait la chamade.

"Et vous avez choisi cette Maison." Il semblait sceptique.

"Cela semblait approprié."

"Approprié pour quoi ?"

"Pour mes futures... ambitions." Et vous pouvez en penser ce que vous voulez, ajouta-elle mentalement.

Les sourcils du directeur se haussèrent, mais il ne semblait pas mécontent. "Je vois. Bien, alors, bienvenue à Serpentard, Mademoiselle Maugrey." I

Elle serra sa main dans les siennes, en sentant la forme, les callosités et les os.

"Merci, professeur Rogue."

***

Elle ne se souvient pas vraiment de ce qui s'est passé après cela. Enveloppée dans une obscurité étrangère, incapable de parler, elle n'avait été que vaguement consciente du fait que l'étranger l'ait portée jusqu'à la cuisine, dans une tempête de menaces et d'arguments et des supplications déspérées et étranglées de larmes de son père. Mais à travers la trame dure de ces sons, la voix de l'étranger courrait comme un fil de soie et elle s'y accrocha désespérément tandis qu'il négociait sa vie :

"La fille a à peine quatre ans, est elle est aveugle en plus de cela. Qu'avez-vous peur qu'elle vous fasse?" Ses mots étaient remplis de dédain. "En tout cas, c'est une sang-pur: la tuer serait un gâchi inutile."

"Mais si elle raconte-"

"Raconte quoi ? Que trois hommes dont elle n'a jamais vu les visages sont venus chez elle et ont fait quelque chose que chacun saura demain matin de toute façon ?"

"Maudie," haleta son père. "Ne lui faites pas de mal, s'il vous plaît-"

Sa mère était morte, mais elle ne le savait pas. Son père était impuissant, ses lunettes cassées et sa baguette en miettes à ses pieds, mais elle ne pouvait pas non plus voir cela. Elle essaya de tendre ses bras vers lui, mais l'étranger les lui tint dans une poigne d'acier et elle comprit soudainement qu'il ne voulait pas qu'elle réagisse à ce qu'elle entendait, qu'elle devait feindre d'être sourde aussi bien qu'aveugle et muette.

"Les Aurors seront là d'une minute à l'autre," gronda une voix profonde. "Sortez ici, alors, et prenez cette morveuse avec vous. Laissez-la quelque part où elle ne sera pas trouvée pour un bon moment, ça les occupera de la chercher."

"Efface sa mémoire," dit un autre homme. "Nous ne pouvons pas prendre de risques."

"Ne me dites pas ce que je dois faire." La voix de l'étranger était un grognement. "Je m'en occuperai." Ses bras se serrèrent autour d'elle, elle sentit ses muscles bouger et lorsque la brise fraîche de la nuit frappa son visage elle se rendit compte qu'il la portait hors de la maison, loin de ses parents et de la seule sécurité qu'elle ait jamais connue.

Papa, cria-t-elle, papa !

Mais personne ne pouvait l'entendre.

***

"Comment t'appelles-tu ?" La question lui était lancée, comme un défi à un duel. Maud resta debout immobile à côté de son coffre à demi déballé, résignée devant une autre bataille verbale.

"Maud Maugrey. Et avant que tu ne le demandes, oui, je suis de la famille de Fol Oeil. C'est mon oncle."

L'autre fille fit une pause, évidemment secouée, puis se remit à marcher à pas mesurés. Maud ne bougea pas et ne se donna même pas la peine de donner l'illusion de se tourner : le regard fixe d'Athéna pouvait suivre la Serpentard peu importe où elle allait.

"Alors pourquoi tu n'as pas 'de fol oeil', toi aussi?" railla la fille. Elle était grande, quoique pas tout à fait aussi grande que Maud, et aussi sombre que Maud était claire. Ses yeux étaient petits et porcins, sa bouche tordue dans une forme ironique. "Tu as l'air d'en avoir plus besoin que lui."

« Sans doute » dit calmement Maud. "Mais as-tu une idée de combien cette chose coûte ? S'il n'avait pas été un Auror ils ne le lui auraient jamais donné. Et de toute façon, mon oncle a perdu son oeil. J'ai toujours les deux miens et je ne savoure pas la pensée qu'on me les arrache. Tu le ferais toi ?"

Elle avait mis un accent délibéré sur le mot « arrache » et l'autre fille tressaillit. "Non", lança-t-elle dans une nouvelle tentative de bravade, "mais au moins mes yeux fonctionnent. Ils n'ont pas l'air effrayant comme les tiens."

"Tu sais," dit Maud, "je ne peux pas me rappeler avoir vu une annonce dans la Gazette du Sorcier genre ' Cherche voyou mesquin, se présenter soi-même '. On recommence ? Je suis ta nouvelle camarade. Et tu es... ?"

"Tu quoi ?" La fille était bouche bée. "Ils m'ont dit que tu étais une Gryffondor."

"Et tu les as crus ? Comment un Gryffondor entrerait-il ici ?"

" Eh bien, je veux dire, ton oncle..."

"Est le frère de mon père. Et alors ?" Maud s'assit vers le pied de son lit et continua à déballer ses affaires. "Demande au Professeur Rogue si tu ne me crois pas. Il te dira que je suis une Serpentard."

La fille resta en arrière un moment, la mesurant du regard. Puis elle marmonna, "Muriel Groggins," et tendit sa main.

Elle n'avait pas fait d'excuses, mais Maud savait qu'il ne fallait pas en attendre. "Heureuse de te rencontrer. C'est Athéna," et elle montra le petit hibou assis sur son épaule.

"C'est comme cela que tu te débrouilles ? Un sort te fait voir par ses yeux ?"

"La plupart du temps, oui. Mais elle ne peut pas être avec moi tout le temps, donc j'ai aussi... quelques autres trucs." En fait, sans Athèna, elle trouverait très difficile de se diriger dans les couloirs de Poudlard-- - quoique aigus ses autres sens puissent être, même eux ne pouvaient pas compenser une perte totale de vision. Mais au milieu d'un nid de serpents comme celui-là, ce serait folie que de l'admettre.

"Oh," dit Muriel, sonnant impressionnée à contre c?ur. "Bon... tu as déjà ton emploi du temps ?"

Et avec cela, il semblait qu'une trêve ait été déclarée. En quelques minutes deux autres filles de septième année de Serpentard comme elles, entrèrent dans la pièce et rejoignirent la conversation. L'une était une fille jolie, au visage rond avec des frisettes brunes ébouriffées, l'autre blonde aux yeux verts, comme Maud, quoique ses traits soient légèrement chevalins et qu'il y ait un vide considérable entre ses dents. Elles se présentèrent respectivement comme Annie Barfoot et Lucinda Swann et en quelques minutes la pièce était remplie de commérages.

"Avez-vous entendu ce que les jumeaux Weasley ont fait au Bain des Enseignants ?"

"Si j'ai entendu ça ? J'étais juste derrière la porte! Vous auriez dû entendre le hurlement de Madame Bibine quand elle a ouvert le robinet!"

"Ils ont de la chance de ne pas avoir été renvoyés. Mais les Gryffondors sont comme ca, on leur laisse tout passer..."

"Pas tout. Rogue a attrapé les Weasleys en train de distribuer des Gouttes Vertigineuses aux premières années et a enlevé dix points à Gryffondor -chacun."

"Vingt points avant même que les cours commencent ? Ooh, cela ne va pas les rendre populaires..."

"En parlant de cours ,de Rogue et de Gryffondors," dit Muriel, "Nous avons cours de Potions en première heure ce matin. Toi aussi, Maud?"

Maud acquiesça.

« Lucinda aussi. Allons y. »

***

L'étranger la déposa sur la colline au-dessus de sa maison et s' accroupit à côté d'elle, en tenant fermement ses épaules.

"Écoute," dit-il, sa voix tranchante d'urgence. "Les Mangemorts qui étaient là ce soir - ils cherchaient un artéfact. Une amulette que ton père était sensé avoir étudié. Mais ils ne l'ont pas trouvée; c'est pour cela qu'ils l'ont emmené à la place. Je vais faire ce que je peux, mais tu dois-- " Un éclatement sourd résonna dans la nuit et une vague de chaleur frappa son visage. Subitement l'air était plein du gémissement des poutres en bois et de l'odeur de cendre chaude. Feu. Sa maison brûlait et avec cela toutes les choses qu'elle avait aimées. Maman, gémit-elle.

"Est-ce que tu m'écoutes, fillette?" L'homme la secoua sauvagement. "Je vais essayer d'aider ton père. Mais je ne peux pas faire cela si je suis mort, ou enfermé à Azkaban. Quand les Aurors te trouveront, raconte leur ce qui s'est passé ici ce soir, mais ne leur dit rien-- rien-- à mon sujet. Si ton oncle demande comment tu t'es échappée, dis lui que tu es sortie par la fenêtre et que tu as courru. Est-ce que tu comprends?"

Malgré ses larmes et la terreur du feu, elle inclina la tête. Sa voix était belle et elle lui faisait confiance, comme elle avait eu confiance en la Lune - et peut-être non moins sottement.

"Abrogo silentium," murmura l'étranger et elle put parler de nouveau, bien qu'elle n'ait rien à dire. Elle attendit simplement, attendant qu'il lui redonne sa vue et elle ne fut pas déçue :

"Reddo visum!"

Elle cligna des yeux.

Mais rien ne se passa

***.

"Mlle Maugrey."

La tête de Maud se souleva en sursaut au son de la voix du Professeur, mais elle ne pouvait rien voir : Athéna s'était endormie sur son épaule. Ce n'était pas une surprise, sachant que la matinée avait été longue et occupée, et que l'une comme l'autre avaient très peu dormi la nuit précédente. Dans la chaleur de la classe de Potions, avec le bouillonnement des chaudrons autour d'elle , Maud s'était presque endormie elle-même.

"Oui, Professeur Rogue ?" dit-elle.

"Si vous avez fini votre petit somme-" sa voix traînant sardoniquement sur le dernier mot - "cela vous ennuierait-il d'informer la classe des propriétés de l'ellébore combinée à de l'?il de triton ?"

Fatiguée comme elle l'était, la réponse vint automatiquement: les Potions avaient toujours été sa meilleure matière. "Ces deux ingrédients ne devraient jamais être combinés, car leurs effets s'annulent mutuellement."

Elle ne pouvait pas voir ou même deviner son expression, mais quand il parla de nouveau, le sarcasme avait disparu. "Excellent. Ecrivez donc tous cela. Comme une équation, si vous préférez : ellébore plus ?il de triton égal une perte de votre temps si précieux. Mlle Maugrey-" les mots devinrent bas, doux comme une caresse - "je suis heureux de voir que l'Académie de Durmstrang est à la hauteur de sa réputation."

Sa gorge était sèche. D'une voix rauque elle dit, "Merci."

Si Rogue l'avait entendue, il ne le montra pas. Il se tourna et s'éloigna, disant d'un ton cassant : "Maintenant. Nommez deux autres ingrédients qui ne doivent pas être combinés et expliquez pourquoi : Fred Weasley."

"Le Gruau d'avoine et des fientes de hibou," vint la réponse prompte, "parce que si cela arrive de nouveau ma mère me tuera"

Il y eut un éclat de rire général, brusquement interrompu par le son de la main de Rogue frappant le bureau. "Silence!"

Maud ne put réprimer un frisson : même après quatorze ans, le parallèle était trop proche pour être confortable. Rogue continua avec une douceur mortelle, "Si au cours de vos expériences infâmes, M. Weasley, vous deviez un jour vous faire exploser accidentellement, je n'en serai pas même légèrement étonné."

"Oh, ne vous inquiétez pas," dit une autre voix, presque identique à celle de Fred, "lui non plus ."

À ce moment, comme sur un signe, il y eut un bruit perçant de métal déchiré et un des chaudrons éclata. Instinctivement Maud souleva ses pieds du plancher et s'abrita derrière son bureau pendant que le liquide chaud éclaboussait la salle de classe et que des cris perçants emplissaient l'air. Cette potion était juste supposée être un Élixir Éreintant, mais pour obtenir une réaction comme celle là, quelqu'un devait avoir sérieusement mal respecté les proportions.

Il fallut cinq bonnes minutes avant que le chaos ne soit sous contrôle et plusieurs étudiants avec des blessures légères durent être envoyés voir Madame Pomfresh. Rogue tança vertement le Gryffondor responsable de l'explosion - non pas, étonnamment, un des jumeaux Weasley, mais une fille en pleurs qui avait accidentellement renversé sa bouteille de queues de scorpion séchées dans son chaudron - et congédia la classe.

Athéna avait été éveillée par la commotion, donc Maud pouvait voir à nouveau. Elle commença à rassembler ses livres, prête à partir, mais la voix de Rogue l'arrêta.

"Mlle Maugrey. Vous resterez un instant."

"Mieux vaudrait que tu fasses attention," chuchota George Weasley en passant devant elle pour sortir. "Je pense qu'il t'aime bien."

"S'il essaye d'en profiter," ajouta Fred gravement, juste derrière lui, "Fie toi à nous. Nous te promettons que nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir-"

"-pour ne pas vomir-"

"-ou mourir de rire."

"Dehors !" tonna Rogue, et les jumeaux disparurent avec un dernier sourire mauvais .

Dans un tourbillon de robes noires, le professeur s'avança à grands pas jusqu'à la porte et la ferma fermement. Puis il se tourna et la regarda, ses yeux sombres scrutant son visage. Ce qu'il voyait, ou s'attendait à voir, elle ne le savait pas : mais finalement il parut satisfait et s'assit à son bureau, poussant de côté une pile de devoirs et prenant un parchemin du fond de la pile.

"Il est évident, Mlle Maugrey," dit-il, "que vos excellentes notes en Potions à Durmstrang n'étaient pas injustifiées. Votre connaissance du sujet est considérablement supérieure à celle de vos camarades de classe-- même en prenant en compte le talent considérable, bien qu'idiotement gaspillé, des jumeaux Weasley-- et je peux voir que vous allez probablement trouver le programme de cette année ennuyeux ,à moins d'y ajouter quelque défi complémentaire."

Elle ne répondit rien, se bornant à l'observer à travers les yeux d'Athéna. Sa tête était penchée sur le parchemin qu'il tenait, des cheveux grêles et noirs tombant de son visage. Il avait l'air, pensa-t-elle, d'un homme épuisé, et non simplement par les exigences de l'enseignement.

"Comme vous voyez ici," dit-il, tournant le papier et le poussant vers elle, "j'ai fait une liste de plusieurs projets d'étude indépendants qui pourraient vous intéresser. Si vous avez besoin d'aide, je serai bien sûr disponible aussi souvent que mon emploi du temps me le permettra. Mais je suppose que vous en êtes ... tout à fait capable."

Elle le regarda encore quelque instant avant de se pencher sur la liste, Athéna suivit immédiatement son geste afin qu'elle puisse le lire. Veritaserum, lit-elle. Potion Wolfsbane. Potion de Régénération des nerfs--

Son souffle se gela dans sa gorge.

"Et pendant que vous vous décidez, Mlle Maugrey," dit tranquillement Rogue, "pourriez vous me répéter pourquoi vous avez choisi d'être à Serpentard ?"

Elle ferma sa main autour du parchemin, le chiffonnant entre ses doigts. Savait-il ce qu'elle avait à l'esprit, ou l'avait il seulement deviné? Eh bien, elle devrait prendre le risque. S'il n'avait pas changé, il comprendrait. "Parce que je veux être Auror," dit-elle. "Et la première règle de survie est : connaissez votre ennemi."

Pendant un long moment il lui rendit son regard fixe, ou celui d' Athéna, sans bouger. Quand il parla enfin sa belle voix était rauque : "Tous les Serpentards ne sont pas des ennemis, Mlle Maugrey."

"Je sais," dit-elle. "L'un d'entre eux a sauvé ma vie autrefois."

"Et coupé vos nerfs optiques en même temps," s'irrita-il, avec une sauvagerie qu'elle savait être adressée à lui, non à elle. "Un instant de hâte, un mauvais verbe latin - et penser j'avais l'habitude de me vanter des bénéfices d'une éducation classique."

***

Il essaya de nouveau, employant la même expression et d'autres, mais sa vue ne revint pas. Elle était abasourdie par son échec et quoiqu'elle ne puisse pas voir son visage elle savait que lui aussi était déconcerté. À maintes reprises il répéta cet ordre, sa voix pleine de frustration et finalement de colère, mais enfin il dut renoncer.

"J'arrangerai cela," dit-il d'un ton plat. " Un jour. Mais je ne peux rien faire pour toi en ce moment."

Elle avait essayé, jusque-là ,d' être courageuse. Mais cette déception, s'ajoutant à son épuisement et à sa crainte, était trop. Elle éclata en énormes sanglots et enfouit son visage dans les robes de l'étranger. Il sentait les racines et les herbes séchées, comme le placard de sa mère et pendant qu'elle pleurait, elle sentait sa main hésitante, légère comme une plume, toucher ses cheveux.

***

"Pensez-vous vraiment qu'une potion marche ?" lui demanda-t-elle.

Ses yeux noirs se rétrécirent. "Êtes-vous prête à essayer ?"

"Si vous m'aidez."

Pour la deuxième fois de la matinée, il lui tendit la main et pour la deuxième fois, elle la prit, la tint comme si c'était un objet précieux.

"Mademoiselle Maugrey," dit-il. "Je le ferai."

*** Fin du premier chapitre