Chapitre 1 – Le deuil

Les jours s'égrainaient douloureusement dans cette petite maison du square Grimmaurd à Londres. Les lumières étaient éteintes, les rideaux tirés et l'âtre vide. Dans le canapé face à la cheminée, la propriétaire des lieux s'était assoupie au milieu des photos de sorciers. Les scènes se jouaient en boucle : sur l'une était un homme à lunettes avec un balai à la main la seconde représentait trois amis riant sur une autre encore, une femme fixait l'objectif en tenant un nourrisson dans ses bras, elle évitait le photographe pour ne pas être le sujet du cliché. La respiration profonde de la sorcière endormie faisait monter et descendre ses boucles blanches sur sa poitrine dans un rythme régulier. Elle était en pyjama, une tenue qu'elle ne quittait plus depuis son retour de Poudlard. Amalia supportait mal la présence de gens chez elle car ils s'efforçaient de la distraire pour chasser son ennui. La seule personne qu'elle aurait vraiment souhaité voir ne pouvait plus apparaître et son don pour parler aux morts ne lui était d'aucune utilité, de ce fait elle rejeta pour un temps l'usage de la magie.

Dehors un orage grondait, bientôt de grosses gouttes de pluie s'abattraient sur les vitres et pousseraient les passants à déserter la rue. Un éclair tomba tout près, faisant vibrer les fenêtres et réveilla en sursaut la jeune femme. Pendant un instant, elle ne comprit pas pourquoi elle était en dehors de son lit. Puis, les images du coffre dans son grenier et des photographies qu'elle y avait récupéré lui revinrent en mémoire. Sans grande conviction, Amalia se leva afin de se préparer une collation bien qu'elle fut certaine de ne pas réussir à la garder. Sur le dossier du fauteuil avait été jetée une robe de chambre en velours rouge, elle s'y emmitoufla et respira le parfum d'eucalyptus, de citronnelle et de menthe poivrée[1]. C'était l'unique chose que Dumbledore lui avait rapporté de chez Sirius, ce vêtement sentait encore son odeur. Il avait également pris le testament du défunt avec mille précautions car rien n'indiquait pour le moment, que ses dernières volontés seraient respectées.

En effet, le fugitif avait légué à son filleul sa maison. Pourtant la responsable de sa mort - Bellatrix Lestrange - pouvait de droit, au même titre que sa sœur, prétendre aux propriétés des Black en qualité de cousines de Sirius et de dernières descendantes de la famille. Dumbledore devait se charger de ce détail prochainement. Cette profonde injustice éveillait en Amalia un sentiment de haine et une envie de vengeance qui était accentuée à chaque fois qu'elle ouvrait la dernière édition de la Gazette du Sorcier. Ça et là, les pages des journaux étaient éparpillées dans le salon et relataient la chasse aux Mangemorts qui avait suivi l'intrusion de Voldemort au ministère, l'affirmation de son retour et les nombreuses attaques contre des Moldus qui avaient jalonné l'été. Le portrait de Bellatrix était partout avec ses paupières lourdes, son air dément détaillait le lecteur puis elle éclatait de rire avant de se figer.

Après avoir nié l'évidence pendant des jours entiers en essayant de se convaincre que son ami allait réapparaître d'un instant à l'autre, innocenté du meurtre de Lily et James, Amalia avait accepté de laisser place à la colère. Dans ces moments-là, elle préférait ne pas être vue car elle terminait fatalement par s'effondrer en sanglots. D'ailleurs, elle n'invoquait plus son père dans le cadre du salon car elle était devenue obsessive et consultait tous les livres de sa bibliothèque dans l'espoir de rassembler des éléments pour faire revenir les morts à la vie, marchandant des informations en échange de grandes promesses sur ses choix de vie. La jeune femme se sentait responsable car si elle avait accepté de convaincre Severus de reprendre l'Occlumancie avec Harry, ce dernier n'aurait pas pu rêver de Sirius se faisant torturer dans la salle des Prophéties et ne se serait pas lancé à corps perdu dans son sauvetage imaginaire. A son tour, son parrain n'aurait pas mis sa vie en danger. Pourtant, plus elle y repensait, plus la sorcière reconnaissait que la seule responsable de ce meurtre était Bellatrix.

Les photographies lui avaient apporté un peu de réconfort, se remémorer les bons souvenirs chassait les plus mauvais et permettait d'accepter ce qui s'était produit, ils étaient une forme d'apaisement.

L'orage tonnait de plus en plus fort à l'extérieur ce qui n'empêcha pas un visiteur de sonner à la porte. Amalia ouvrit le loquet pour laisser le vieux sorcier entrer. La pluie tombait maintenant à torrent mais il n'était pas mouillé.

- Vas-y entre, je vais ranger un peu... prononça-t-elle d'une voix las.

- Il serait peut-être temps que tu laisses Tonks t'aider à faire le ménage, tu ne crois pas ? demanda Dumbledore en prenant place dans le canapé.

- Je n'ai pas envie de l'embêter avec cela. Il me semble que d'autres soucis l'accaparent actuellement. J'aurais bien le temps d'ici la fin de l'été de tout ranger pour la rentrée... C'est bien pour t'assurer que je ne quittais pas Poudlard que tu es venu, n'est-ce pas ?

Dumbledore se mit à rire dans sa barbe.

- Je n'ai aucun doute à ce sujet. Non, ma visite concerne Harry.

Ses yeux pétillants fixaient attentivement son interlocutrice pour capter son attention.

- Je t'écoute…

- Le testament de Sirius stipulait que le manoir des Black lui revenait de droit. Après vérification, c'est bien le cas.

Elle poussa un soupir de soulagement, au moins les dernières volontés de son ami seraient honorées.

- Et je suppose que Kreattur a dû être ravi de la situation…

- Surtout lorsqu'il s'est rendu compte qu'il avait servi à valider le contrat !

- Comment va Harry ? s'inquiéta la jeune femme.

- Il remonte la pente mais je t'ai déjà demandé de ne pas te préoccuper de son état. Il est bien entouré et je l'ai conduit au Terrier. Molly veillera à ce qu'il mange à sa faim et son ami Ron, qu'il ait une épaule solide sur qui compter.

- Je suis rassurée alors…

Elle enfouit son visage dans la manche de la robe de chambre.

- Il faut aussi que je t'avertisse du retour d'un de tes anciens professeurs à Poudlard…

- Ah, tu as trouvé un remplaçant à Ombrage je présume.

- C'est en effet suite au départ de Dolorès que j'ai dû faire appel à ses services, Horace Slughorn fera partie des nôtres dès le 1er septembre.

- Slughorn ? Depuis quand est-il un candidat au poste de Défense Contre les Forces du Mal ? s'étonna Amalia en relevant ses yeux humides de sa cachette.

- Il ne l'a jamais été. Horace revient pour enseigner les potions. Dumbledore garda cette expression imperturbable aux lèvres qui cachait ce qu'il ressentait intérieurement en annonçant une telle nouvelle.

- Tu veux dire… Que tu acceptes enfin de confier ce cours à Severus ?

Le vieux sorcier acquiesça avant de reprendre.

- Il a largement démontré l'an dernier ses talents dans cette matière lorsqu'il t'a aidé avec tes dons.

- Albus, c'était déjà le cas avant… râla la jeune femme sur un ton de reproche.

- Soit. Rappelle-toi cependant, que je n'ai pas eu l'occasion de faire ce que je voulais à ce sujet. Il a accepté la proposition et j'ai pu démarcher Horace.

- J'ai l'impression que Slughorn était ta véritable priorité dans ce changement…

- Hum, je vois que tu as toujours l'esprit aiguisé. Effectivement, ton ancien maître de potions est un atout non négligeable pour nous dans bien des domaines.

Dumbledore se leva et entama un va-et-vient entre les fenêtres du salon. Amalia savait que lorsqu'il débutait ce manège, elle n'appréciait pas la suite de la conversation.

- Albus ? demanda-t-elle pour le pousser à poursuivre.

- Oui… Horace possède de nombreux souvenirs qui nous seront utiles. Il a aussi beaucoup d'amis… Dans l'Est de l'Europe.

- Oh non…

- Il les connaît bien et rien n'indique que d'une part, ils répondront favorablement à son invitation et que d'autre part lui sera là. Son père le laisse généralement sur ses terres pour qu'il surveille les nobles et évite une rébellion.

- Albus…

- Allons, ne mettons pas la charrue avant les bœufs. Tu verras bien ce qu'il adviendra.

La jeune femme marqua sa désapprobation par une moue renfrognée.

- J'ai un dernier service à te demander…

- Quel était le premier ? De ne pas quitter mon poste après ces excellentes nouvelles ? répondit-elle ironiquement.

Il ne releva pas et continua à sourire paisiblement.

- J'aimerais que tu fasses ta rentrée un peu plus tôt cette année.

- Comme tu voudras, rien ne me retient ici…

- C'est ce qu'il me semblait. L'air frais te fera le plus grand bien et à ce sujet, n'as-tu pas reçu une invitation pour l'inauguration de la boutique de farces et attrapes, chemin de Traverse ?

L'enveloppe orange criard dépassait d'une pile de journaux et vint se poser sur les genoux d'Amalia.

- D'accord, je vais remettre la maison en ordre et sortir un peu… ronchonna-t-elle.

Un détail attira son attention sur son tuteur. De sa manche de sorcier dépassait une main noire et fripée comme un chiffon que l'on aurait trempé dans un seau d'encre et essoré trop fort.

- Qu'est-ce qui est arrivé à ta main ?! s'exclama-t-elle, horrifiée. C'est la raison pour laquelle que tu veux que je rentre à Poudlard plus tôt ?

- Oh, un simple incident dû à mon inattention, ne t'en fais pas, répondit-il d'un ton calme sans pour autant rassurer sa pupille. Je préfère te savoir à l'abri dans le château qu'ici à la merci de ses serviteurs. Ils se rassemblent, ils n'ont plus peur et ne se cachent pas pour commettre des crimes affreux.

Le directeur fit un geste vers l'un des journaux qui jonchaient le sol, c'était une publication moldue relatant l'effondrement d'un pont au centre de Londres. L'édifice était récent ce qui rendit l'événement d'autant plus étonnant et douloureux par le nombre de victimes. Côté sorcier, les nouvelles d'enlèvements par les partisans de Voldemort ne cessaient de faire la une de la Gazette du Sorcier. Amalia avait eu un pincement au cœur en découvrant que le marchand de baguette Ollivander faisait partie des portés disparus.

- Je viendrai après l'inauguration Albus, je te le promets et je ne m'y rendrai pas seule. En attendant, vas-tu me répondre au sujet de ta blessure ? Je devine qu'elle est liée à de la magie noire. Entre son aspect et l'aura qu'elle dégage, je n'ai pas de doute sur sa provenance.

- Tu as bien raison. Quelqu'un m'a aidé à endigué le sortilège mais je ne peux t'en dire plus car elle demeure un mystère pour moi actuellement.

- Tu vas me faire croire que tu ne sais pas comment tu te l'es faite ?

- Oh, je pourrais te raconter cette merveilleuse histoire cependant elle soulèverait bien plus d'interrogations que de réponses alors je vais prendre congés. Je pense que tu as déjà assez de choses qui t'empêchent de dormir la nuit pour ne pas en ajouter. De plus, ce que dégage cette meurtrissure n'est pas bon pour toi dans ton état.

Dumbledore passa sa main valide dans le dos d'Amalia en signe de tendresse quand elle le raccompagna vers la sortie. Juste avant qu'elle ne referme la porte, la jeune femme lui posa une dernière question à laquelle le sorcier sourit.

- Et toi Albus, qui prend soin de toi ?

oOo

Avec un départ plus tôt que prévu, Amalia dut vider entièrement sa malle. Au milieu du fouillis de sa valise, elle retrouva le petit livre rouge que Rogue avait ensorcelé pour leur permettre d'échanger à distance sous le règne d'Ombrage. Elle se souvint que l'enchantement ne fonctionnait que si les deux livres étaient ensemble hors ou dans Poudlard, l'une de ces conditions étaient actuellement remplie alors elle se dirigea vers le grenier, ouvrit la couverture par curiosité et donna un coup de baguette sur la première page. L'écriture pointue de son correspondant noircit de nombreuses pages du carnet, les premiers mots dataient du lendemain de la mort de Sirius.

« 18 juin 1996

Je ne sais pas si tu liras ces quelques lignes. Je n'ai pas trouvé d'autre moyen pour te dire que je compatis à ta peine puisque je n'entretenais pas de relations chaleureuses avec Black. Cependant, il était un de tes amis les plus proches et sa perte t'a plongée dans un profond désarroi dont j'ai été le témoin impuissant. J'aurais voulu faire plus mais ma présence aurait été inappropriée. J'espère seulement que chaque jour qui s'écoulera reprendra un peu de saveur. »

« 27 juin 1996

Je ne sais toujours pas si tu as lu mon précédent message. Je m'endors en me demandant si je dois te rendre visite ou pas. Les autres membres de l'Ordre sont certainement là et je mettrais mal à l'aise Lupin… Si tu as envie de me voir, fais-le-moi savoir. »

Les mots suivants parlaient de la pluie et du beau temps, ponctués par des banalités pour reprendre sur un avis d'un livre qu'il venait de terminer. Les mots étaient à la fois maladroits, attentionnés et tendres ce qui toucha particulièrement Amalia. Ces tentatives pour lui remonter le moral étaient bien plus efficaces que ce qu'avaient pu lui dire ses nombreux visiteurs, car elles lui témoignaient de la sincérité et ne cherchaient pas à nier la souffrance qui parcourait chacune de ses veines. Au contraire, c'était dans la normalité qu'elle trouvait du soulagement au travers l'affirmation, presque honteuse que le monde continuait et continuerait de tourner en se moquant de ce qu'elle pouvait éprouver. Perdu au milieu d'un paragraphe datant du 2 juillet, la jeune femme lut :

« Dumbledore est venu me rendre visite, les nouvelles te concernant ne sont pas bonnes.»

Puis brusquement, les écrits s'arrêtent laissant les pages blanches libres pour de nouveaux mots. Enfin, Amalia consentit que la magie avait parfois du bon, qu'elle n'était pas là pour corriger les erreurs des sorciers mais pour améliorer leur quotidien dans l'intérêt général et surtout pas au détriment d'un individu. Les lois de l'Univers qui régissaient également celles de la Magie, existaient pour d'excellentes raisons et elle finit par comprendre que la mort de Sirius était un fait violent néanmoins réel qu'aucun sortilège ne pourrait combattre. Amalia se devait de relever la tête et d'avancer pour défendre les idéaux pour lesquels ses amis s'étaient sacrifiés. Elle prit une plume et de l'encre pour répondre à Rogue dans le carnet rouge. Là-haut, dans le sanctuaire créé par son père, elle trempa la pointe de sa plume.

« Bonjour mon Prince,

Je découvre tes mots et j'ai soudain l'impression de ne plus être seule dans la pénombre. Les membres de l'Ordre viennent évidemment me rendre visite mais ce n'est pas comme si c'était toi. J'ai hâte de te voir à Poudlard. Tu me manques. »

Une larme accompagna le point final de sa phrase et dilua l'encre dans une tâche grise pleines de volutes foncées, formant des nuages dans la goutte sur le papier. Amalia tamponna de la manche sa joue et tapota le livre pour le refermer. La sonnette retentit dans l'entrée. C'était l'heure à laquelle venait généralement Tonks après son service, la maîtresse de maison ne fut donc pas surprise de voir ses cheveux gris souris en bataille lorsqu'elle ouvrit la porte d'entrée.

- Toujours la grande forme à ce que je vois, lui lança l'Auror en traversant le hall pour se laisser tomber sur le fauteuil.

- Je te retourne le compliment. Thé ou Brandy ?

- Les deux, comme d'habitude.

Le service à thé était devenu un shaker et des verres à pied, plus le temps passait et plus le dosage thé/alcool penchait en faveur de la liqueur ambrée.

- Quoi de neuf ? demanda-t-elle à son invitée.

- Maugrey me dit de laisser tomber, il est très fataliste quand il est question d'amour…

- C'est vrai que c'est un grand spécialiste des relations humaines ce cher Fol Œil, déclara Amalia en levant son verre pour porter un toast.

- Malheureusement Remus campe toujours sur ses positions. Il m'évite ou lorsqu'il m'adresse enfin la parole, c'est pour me venter les qualités de Bill Weasley ! Comme s'il essayait de me pousser dans ses bras !

- Molly serait contente de t'avoir comme belle-fille. Il me semble que tu passes beaucoup de temps avec elle en ce moment en plus !

Tonks adressa à son hôte un regard de réprobation.

- Oui. Elle arrive à faire venir Remus pour lui parler et puis elle me transmet les comptes rendus des réunions de l'Ordre. Tu sais… Tu devrais venir un peu, pour te changer les idées…

La sorcière jeta un coup d'œil autour d'elle, la pièce n'était plus le reflet de sa propriétaire. Tout était négligé et l'odeur de renfermé dénotait avec la maison chaleureuse où elle avait été reçue quelques mois auparavant.

- Non, pas pour le moment, répondit Amalia en terminant d'un trait son verre de Brandy.

- Bon… Ah ! J'ai une bonne nouvelle à t'annoncer ! Tonks trépignait sur son fauteuil. Le Ministère a renforcé la surveillance de Poudlard !

- Ils ne vont quand même pas nous mettre des Détraqueurs… s'inquiéta la jeune femme.

- Oh certainement pas ! Non, la bonne nouvelle c'est que des Aurors vont être postés à toutes les entrées et dans Pré-au-Lard pour surveiller les passages, vous serez fouillés à la rentrée d'ailleurs. Bref, tout ça pour te dire que j'ai été envoyée là-bas pour l'année !

Le visage d'Amalia s'illumina. Après des semaines à broyer du noir la reprise des cours annonçait une agréable perspective et la présence d'une alliée avec qui partager de longues soirées aux Trois Balais.

- Ah ! Il va falloir trinquer alors ! s'exclama-t-elle en resservant à chacune une bonne lampée d'alcool. Au fait, tu m'accompagnerais à l'inauguration de la boutique de George et Fred ? C'est dans une semaine.

- Tiens, pourquoi pas ? Ça pourrait être drôle.

oOo

En arrivant chemin de Traverse ce soir-là, drôle n'était pas le mot qui qualifiait le mieux ce à quoi pensait Tonks en découvrant que Lupin aussi avait été invité et qu'il tentait de se soustraire dès son entrée. La boutique miteuse qu'Amalia avait vu il y a un an était à présent colorée et pétillante de vie, les présentoirs débordaient de confiseries, farces et boites aux slogans évocateurs. Elle reconnut une multitude d'objets qui n'étaient que des prototypes lorsque les jumeaux les lui avaient montrés. Bien que le magasin soit ouvert depuis quelques mois, Fred et George avaient préféré attendre les vacances pour organiser ce moment de convivialité avec tous leurs amis, leurs fans et surtout leur famille. Pourtant, l'absence de Molly et d'Arthur sauta immédiatement aux yeux de la visiteuse, bien plus que le comportement fuyant de Lupin en apercevant les deux femmes. Fred vint les accueillir.

- Bonsoir ! Bienvenue dans notre humble échoppe ! C'est vraiment un plaisir que vous soyez là !

- Oh félicitations ! C'est une réussite !

Ses yeux brillaient d'émerveillement, chaque élément du décor était couvert de détails.

- Et c'est grâce à vous Amalia ! Si vous ne nous aviez pas présenté au propriétaire, jamais il n'aurait accepté de nous faire signer le bail !

- C'est votre acharnement au travail qu'il faut célébrer, uniquement cela ! En attendant, où sont vos parents que je les salue ?

- Ils n'ont pas pu venir ce soir, ils sont passés cet après-midi avec Ginny, Hermione, Ron et Harry Hagrid les accompagnait.

- Quel dommage, j'aurais aimé les voir.

- Ils vont être contents d'apprendre que vous êtes sortie de chez vous…

Le jeune homme lui adressa un regard compatissant, c'était sa façon de présenter ses condoléances et son soutien à son ancien professeur. Derrière elle, une personne essayait de se faufiler jusqu'à la sortie, elle rattrapa sa manche pour l'arrêter.

- C'est très gentil de votre part. Pensez à leur présenter mes respects quand vous les verrez. Veuillez m'excuser, j'ai une chose importante à faire.

Tonks était déjà partie à l'opposé du magasin pour observer un étrange présentoir qui libérait des bulles de savon par un trou et soutenait une pile de tour de magie moldue. Amalia pivota pour parler à sa proie.

- Bonsoir Remus, m'évites-tu ?

L'homme détourna les yeux vers les mezzanines où des sorciers s'agglutinaient pour accéder aux dernières nouveautés. Face à ce comportement, la jeune femme ne lâcha pas sa veste et le tira vers l'extérieur du magasin dans le Chemin de Traverse vide.

- Hé, tu vas m'ignorer combien de temps encore ?

Lupin la dévisagea enfin. Avec délicatesse, il posa une main sur son visage et un sourire triste se dessina au coin de ses lèvres.

- Je suis désolé…

- Mais de quoi ? Tu n'as pas l'air dans ton assiette. C'est parce que je suis venue avec Tonks ?

- Oh non, pas du tout. C'est un peu délicat entre nous mais ce n'est pas si terrible.

- Alors pourquoi je ne te vois plus à la maison ?

Amalia avait un ton et une moue de reproche, elle le regardait inquiète alors qu'il continuait de lui frôler la joue.

- Je ne voulais pas que tu penses que je ne venais plus à cause de Dora. Te voir dans cet état me rappelait sans arrêt que Sirius ne serait plus là.

- Là c'est moi qui suis vraiment désolée… répondit-elle. Je n'ai pensé qu'à moi, c'était très égoïste de ma part.

Il la serra dans ses bras et l'embrassa sur le front.

- Non, tu étais de loin la plus proche de Sirius, c'est normal que ton chagrin passe avant tout le reste. Je n'ai simplement pas été assez courageux pour l'affronter. J'ai l'impression que tu vas mieux...

- On peut dire cela. La douleur est toujours là mais j'arrive à me lever, à faire un peu de ménage et à manger. Je commence à m'organiser pour la rentrée… Et pour toi ?

- Je n'ai pas trop à me plaindre. Une femme me court après, ça n'était pas arrivé depuis des lustres…

- Attends, c'est déjà arrivé ? taquina Amalia.

- Hé ! rougit-il en guise de réponse. Je reste quand même réticent à débuter cette relation, tu en connais les raisons.

- Tu sais déjà ce que j'en pense. D'autres couples mixtes s'en sortent, pourquoi pas vous ?

- Ce qui m'inquiète c'est qu'elle est jeune, en bonne santé et voudra certainement des enfants. Qu'adviendra-t-il s'ils sont comme moi ?

Amalia savait au fond d'elle qu'il disait vrai, les grossesses inter-espèces pouvaient mal se dérouler sans compter le regard des autres. Son ami aurait le poids de cette responsabilité sur les épaules toute sa vie et pour l'avoir enduré, qui souhaiterait un tel malheur à son propre enfant ? Pourtant, son côté romantique l'emporta.

- Remus, craindre qu'un drame se produise c'est souffrir deux fois. Tu peux tout imaginer, le bon comme le mauvais. Cependant, tant que tu ne l'auras pas vécu comment peux-tu savoir si l'histoire aura une fin triste ou heureuse ?

- Si tu étais à ma place, qu'est-ce que tu ferais ?

- Je partirais à l'aventure pour ne pas avoir de regret.

- C'est vrai, cette réaction correspond à ton caractère… Il esquissa un sourire. Merci, c'est sympa de parler avec toi…

Et il la serra à nouveau dans ses bras sauf que cette fois-ci, son étreinte était plus forte.

[1] Savon Outback Mate – Lush


Prochain chapitre : Une séparation difficile

Note : Et voilà la suite ! J'ai eu l'impression de vous trahir en ne postant pas samedi mais ça me laisse le temps d'avancer à la fois le tome 4 et les illustrations ! J'espère que vous apprécierez autant que moi ce volume plein de révélations, de maturité (de scènes de fesses quoi) avec un style qui me correspond plus *fierté* A mardi prochain !