C'était inhabituel. Oui, inhabituel, c'est le mot. On se sent rarement vivant lorsque l'on est mort. Quand James Norrington ouvrit les yeux, il sentait bien que quelque chose avait changé. Il devrait être mort et pas se réveiller sur une plage. Impossible de bouger. Il avait le sentiment d'avoir été écrasé par une masse de plusieurs tonnes. Ses muscles, incapables de se mouvoir, étaient endoloris. Seules ses paupières parvenaient à se soulever pour qu'il puisse apercevoir une scène floue. A mesure que celui-ci s'estompait, il remarqua qu'il n'était pas seul. Un peu plus loin, il discernait une silhouette en continuel mouvement. Il se rendit compte qu'il flottait dans l'air une odeur de fumée. Du feu. Avec un peu de chance la silhouette serait celle d'un être humain. Pas celle d'un monstre marin ou autre horreur fantastique. Mais James Norrington ne croyait plus en sa chance.

Rassemblant ses forces et faisant fi de la douleur lancinante qui se répandait dans tout son corps, il se releva. Ses yeux voyaient désormais clairs et il pu donc parfaitement observer l'ombre de toute à l'heure. Une jeune femme, d'environ 25 ans. Un détail retint son attention. Elle portait un uniforme de la Royal Navy. Peut-être était-il arrivé au paradis des soldats ? La jeune femme tourna la tête dans sa direction et un large sourire illumina son visage. Elle s'approcha de Norrington d'une démarche souple.

« Dieu soit loué! Vous voilà enfin réveillé !

Sa voix résonna comme un gong aux oreilles de l'ex-commodore.

- Parlez moins fort, je vous en supplie… lui dit-il d'une voie éraillée.

- Pardon. Excusez-moi. Je m'appelle Emy Walter. Je suis contente de vous revoir Commodore et désolée que vous soyez ici.

James tiqua à l'appellation de son grade. Après tout, lorsqu'il était mort sous l'arme du Bottier, il avait son uniforme d'amiral.

- Comment m'avez-vous appelé ?

- Commodore. Vous êtes bien le Commodore James Norrington, non ? En tout cas, vous en portez l'uniforme.

Il baissa le regard et vit en effet l'uniforme qu'il portait avant de ne devenir un alcoolique habitué des bars de Tortuga. Il n'avait apparemment plus de métal en travers du ventre. Il retourna son attention sur son interlocutrice et la dévisagea. De longs cheveux bruns aux reflets flamboyants encadrés un visage aux traits fins. Mais ce qui l'attira le plus fut sans nul doute ses yeux. Des yeux verts, intenses et lumineux. Des yeux captivants, bordés de long cils parfaitement noirs. Elle portait effectivement un uniforme de la Royal Navy, au grade de lieutenant. Fait étonnant puisqu'il n'avait jamais eu vent du fait qu'une femme travaillait sous les drapeaux. Il lui poserai la question plus tard.

- Comment se fait-il que je suis arrivé ici ? N'étais-je pas sur le Hollandais Volant, en route pour trouver le repos éternel ?

- Sûrement. Mais Calypso vous a rendu visite, n'est-ce-pas ?

- Oui, c'est vrai… mais… comment le savez-vous ?

- Je vous raconterez mais j'aimerais d'abord entendre votre histoire, si cela ne vous dérange pas. Et autour d'un repas. »

Emy lui sourit. Il avait faim, c'est vrai. Mais tant de questions se bousculait dans sa tête qu'il ne s'en était pas rendu compte. La jeune femme lui tendit la main et l'invitait ainsi à la suivre. Il s'en saisit et la remercia. Mais à peine avait-il fait quelque pas, que ses jambes flageolèrent. Il se rattrapa in extremis au lieutenant qui sourit intérieurement. Elle le soutint donc jusqu'à ce qu'il se rassoit devant le feu. Emy se présenta rapidement. Elle avait 28 ans (bien qu'elle ne les faisaient pas, de l'avis du commodore) et était lieutenant à bord de l'Invincible. Elle lui tendit ensuite un bol plein d'une mixture peu ragoûtante.

« Bouillie de poisson. Ne vous fiez pas à l'apparence, c'est très bon.

Le commodore s'empara du récipient, la remercia et commença à manger. Emy n'avait pas menti, c'était plutôt bon.

- De quoi vous souvenez-vous ? lui demanda-t-elle.

- Je ne sais pas. Mon souvenir le plus proche est lorsqu'Elizabeth Swann à finalement refusé nos fiançailles pour rejoindre William Turner. Tout ce qui s'est déroulé après ressemble à un rêve. Mes mois à boire pour noyer ma haine et ma tristesse, la traque du cœur de Davy Jones, lorsque je l'ai donné à Beckett, quand je suis devenu Amiral et puis ma mort après que j'ai aidé Elizabeth à fuir… ca ne me semble pas réel mais en même temps j'ai le sentiment étrange que ce n'était pas qu'une illusion, que j'ai pris l'expérience de ces aventures… Tout est si confus…

Il s'aperçut alors qu'il avait parlé comme s'il était seul mais le lieutenant l'écoutait avec attention. Il ravala la gêne qui montait en lui et attendit la réponse de la jeune femme. Comme elle ne disait rien, il comprit qu'elle l'incitait à poursuivre.

- Après que la lame du Bottier m'ait transpercer et que j'ai refusé l'offre de Davy Jones, je me suis retrouvé en plein océan. Je savais pourtant que cette mer était celle de l'autre monde, celui que les vivants n'explorent pas en étant… vivant. Lorsque j'ai regardé plus attentivement le bateau sur lequel j'était arrivé, j'ai reconnu le Hollandais Volant.