Un « non » qui ne vient pas, un mariage proclamé, une amitié ruinée et un amour mort-né. Ce n'est pas de sa faute, il n'a jamais su dire non.
« – Dis-lui de fermer sa gueule, il est entrain de nous foutre la honte ! Fulmina Emma, la jolie blonde, dans sa ravissante robe de mariée.
– Ah, parce que vous avez la honte là ? Non parce que si tout allait bien, y'aurait pas de problème à ce niveau là. Alors vas-y Tom, dis moi que j'ai tort, dis moi que t'es prêt à rester le reste de ta vie avec cette femme.
Pendant sa tirade, Mitch était resté impassible, volontairement dure dans ses paroles. À l'intérieur, c'était une autre histoire. Il s'efforçait de ne pas avoir trop d'espoir pour lui. De toute façon ce n'était pas pour lui-même qu'il le faisait, mais pour Tom... qui avait de grandes chances d'être malheureux dans ce mariage foireux.
Il ne détestait pas Emma. Emma était… Emma. Elle avait aimé Tom, à n'en point douté, mais cette époque était révolue, c'était flagrant. Il fallait être stupide pour ne pas le voir, ou alors ne pas le vouloir. Pour une raison qu'il ne parvenait pas à saisir, elle voulait à tout prix faire vivre cette union. Certains diraient que tous ses efforts étaient fait pour sauver les apparences, mais ce n'était pas logique. Il y avait de bien meilleurs partis dans ce foutu pays pour lui plaire. C'était plus profond que ça, mais malsain.
Ou alors le problème venait de lui. Il n'arrivait pas à voir le mal chez Emma et elle n'était effectivement rien d'autre qu'une gamine capricieuse dans le corps d'une femme. Du plus profond de son cœur, il espérait que ce ne soit pas le cas et qu'elle était juste… paumée, comme Tom.
– Bébé, dit Emma du bout des lèvres, le visage marqué par l'inquiétude.
– Pense à tous ce qu'on a vécu, rajouta-t-elle, en le regardant dans les yeux.
Tom y pensait, à tous ce qu'ils avaient vécus. Ça avait été long, chiant, douloureux. Emma était pénible, capricieuse, dirigeait presque tout dans sa vie, mais il l'aimait comme la prunelle de ses yeux. Enfin… il n'en était plus bien sûr depuis quelques temps mais les bons souvenirs le tenait encore enchaîné près d'elle. Il ne pouvait pas se tromper sur ce qu'ils avaient vécus tous les deux. Ça avait été beau, explosif parfois brûlant, mais tellement beau. Du moins, il essayait de s'en persuader. Il aimerait que tout redevienne comme avant.
Pensant un instant, il se dit qu'il avait la même mentalité qu'une personne victime de violences conjugales qui restait en espérant retrouver la lune de miel des débuts. Puis il effaça rapidement cette pensée de son esprit. Évidemment que non, ce n'était pas son cas.
– Tom, arrête d'être sage. Ecoutes-toi un peu ! L'apostropha Héloïse, la visage ravagé par des croûtes de sang et les cheveux en l'air.
– Bébé, répéta Emma.
Justement, Tom s'écoutait. Il voulait de la stabilité, que sa vie suive son cours et, dans un même temps, redevienne comme avant. Mitch lui manquait, ses blagues vaseuses lui manquaient, ses théories farfelues lui manquaient, tout lui manquait en fait. Tom le regarda rapidement dans les yeux. Ce qu'il y vit lui serra le ventre, mais il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas laisser Emma.
Ses yeux se posèrent rapidement sur Hélo, qui le regardait d'un air implorant. Il sentit une vague de colère, semblable à celle qu'il avait ressentie la veille, alors qu'elle lui avouait que c'était de sa faute si Mitch était parti 3 semaines, et qu'elle avait tenté de le dissuader d'épouser Emma.
– Je suis désolé. Je suis désolé mais vous n'êtes vraiment pas des modèles ! C'est pas parce que vous avez foiré votre mariage qu'on doit faire pareil.
Tom se tourna vers le maire, occupé à compter les bouteilles de champagne sur la table du buffet, les yeux brillants. Il se faisait chier et il avait faim.
– Allez-y.
– Putain, la lourdeur du truc… Bon Tom, voulez-vous prendre Emma pour épouse ?
Un moment de flottement. Tom et Emma se regardaient dans les yeux, le sourire aux lèvres. Puis un bruit de porte qu'on enfonce avec la délicatesse d'un rhinocéros qui essaye de féconder une grenouille
– J'ai baisé la mariée ! Hurla le père d'Héloïse.
– Grosse Teub ?! Hurla Emma.
Il y eu des cris d'indignations, mêlée à une certaine admiration malsaine, dans la foule.
– Je suis désolé, j'avais que ça, répondit le dénommé Grosse Teub.
Emma avait jeté son bouquet de fleur au sol, persuadée que c'était fini et que Tom ne voudrait plus de ce mariage.
Mitch quant à lui, entrevue une petite lueur d'espoir suite à l'intervention du père d'Hélo. Il étouffa le sentiment de culpabilité qu'il ressentait. Culpabilité, car il était content que les frasques d'Emma soient révélées au public. Culpabilité qu'il avait en espérant que cette annonce fasse assez mal à Tom pour qu'il renonce.
– Bon Tom, voulez prendre Emma pour épouse ? Et là je signale que j'en ait officiellement plein le cul.
Le visage de Tom se ferma. Elle l'avait trompée. Soit. Lui aussi. Ce n'était qu'une juste revanche. Les compteurs étaient remis à zéro. Et puis Merde. Plus envie de réfléchir. Juste envie que cette situation inutilement dramatique et douloureuse prenne fin.
Emma avait maintenant les larmes aux yeux.
– Oui.
Une partie de la salle applaudit, tandis que l'autre resta silencieuse comme la mort. Hélo serra les dents et fusilla Emma du regard.
Mitch ne dit rien. Il avait le cœur en miette. Son ventre lui faisait mal et sa gorge était tellement serrée que respirer en était devenu gênant. Puis, soudain, il repris conscience de ce qui l'entourait. Des gens qui le regardaient étrangement, mal rasé, mal coiffé, dans des habits de clodos vieux de trois semaines.
Les larmes lui montèrent, malgré lui, aux yeux. Bordel qu'il avait mal. Les regards qui le fixaient le blessait, le gênait. Soudainement il eu honte. Pour la première fois, ces regards le touchèrent vraiment.
Envahi par la peine et l'envie de casser quelque chose, il s'enfuit de la salle alors que Tom et Emma s'embrassaient pour sceller leur union.
