Killian, la tête pressée contre la fenêtre de l'avion dans lequel il se trouvait, regardait le paysage défiler sous ses yeux l'air rêveur.
Il était en chemin vers Storybrooke, la ville qui l'avait vu grandir, après trois années passées en Angleterre. Il n'avait pas prévu d'y revenir de sitôt, pas avant d'avoir obtenu toutes les réponses qu'il était parti chercher, mais un appel l'avait fait changer d'avis.
En effet, son frère d'adoption l'avait prévenu quelques semaines auparavant d'un anniversaire surprise organisé en l'honneur des vingt-cinq ans de sa meilleure amie, et il lui avait été impossible de refuser son invitation. Ils ne s'étaient pourtant pas reparlés depuis la veille de son départ…
– Tu vas me manquer, Jones, avaient été les derniers mots de la jeune femme à son égard, la voix un peu rouillée par l'alcool ingurgité durant la soirée, et les prunelles remplies de larmes qu'elle tentait de contenir du mieux qu'elle le pouvait.
Pendant que plus bas, dans l'appartement qu'Emma partageait avec deux de leurs camarades, la fête battait son plein, cette dernière s'était isolée sur la terrasse de toit de l'immeuble, incapable de prendre part à l'amusement général. Elle allait perdre quelqu'un à qui elle tenait – encore. Et même si elle comprenait les motivations de Killian (il voulait en savoir plus sur ses origines, et s'il lui restait de la famille qu'il ne connaissait pas dans son pays), elle avait du mal à accepter qu'il s'en aille si loin, pour une durée indéterminée, qui plus est.
(Pour toujours, peut-être, même.)
Il l'avait rejointe peu de temps après, dans ce lieu qui était rapidement devenu leur havre de paix à tous les deux, et s'était contenté de s'asseoir à ses côtés, passant un bras autour de ses épaules pour qu'elle puisse laisser reposer sa tête contre lui. Il savait bien qu'il était inutile de lui parler tant qu'elle n'aurait pas pris la parole en première.
C'est pourquoi il n'avait pas ouvert la bouche avant de lui répondre en l'obligeant à le regarder, et caressant tendrement sa joue du bout des doigts :
– Tu vas me manquer aussi, Swan. Énormément.
Il aurait eu tant d'autres choses à lui dire, tant de confessions à lui faire sur la façon dont il avait fini par tomber amoureux d'elle au fil des années, mais à quoi bon ? Ç'aurait été inutile – et surtout égoïste – que de le lui avouer à quelques heures de son départ.
(Et puis, s'il ne lui en avait jamais fait part auparavant, c'était bien pour une raison, qui n'allait pas changer en une nuit : la crainte qu'elle ne prenne peur et s'enfuie, comme elle savait si bien le faire, après toutes les déceptions qu'elle avait pu surmonter.)
Il s'était alors contenté de ce simple aveu, puis ils étaient restés assis l'un contre l'autre dans le silence le plus complet à regarder le ciel étoilé jusqu'à ce que Ruby, l'une des colocataires de la jeune femme, ne vienne les déranger dans leur quiétude, les priant de revenir sur-le-champ profiter de cette dernière soirée tous ensemble. Elle avait ensuite disparu aussi vite qu'elle était arrivée, laissant ses amis à nouveau seuls sur le toit.
Ils savaient cependant qu'elle allait revenir s'ils ne se dépêchaient pas de retourner dans l'appartement, c'est pourquoi le brun avait aidé la blonde à se relever et que, main dans la main, ils s'étaient dirigés vers la sortie de la terrasse.
– Attends, s'était tout de même stoppé dans sa marche l'anglais, qui avait quelque chose à offrir Emma mais qui ne voulait pas le faire devant tout le monde.
Elle l'avait regardé, intriguée, avant de commencer à paniquer lorsqu'il avait enlevé la bague qu'il portait toujours d'autour de son cou.
– Calme-toi, Swan, s'était-il exclamé d'un ton amusé devant son air de détresse. Je ne vais pas te demander en mariage !
Il avait cru déceler dans l'expression de son visage presque un semblant de déception, rapidement remplacée par l'interrogation.
– C'était la bague porte-bonheur de Liam, qu'il m'a donnée le jour où je me suis installé chez lui, s'était-il expliqué. C'est la raison pour laquelle les choses vont à présent mieux pour moi… ou ça pourrait l'être. Quoi qu'il en soit, j'aimerais que tu l'aies… Pour être sûr que les choses iront bien pour toi même si je ne serai pas là pour le voir.
Elle n'avait pas su quoi répondre à cette touchante déclaration. Alors, poussée par son état légèrement éméché et, surtout, sa détresse de le voir partir, elle s'était contentée de mettre fin aux quelques centimètres qui les séparaient l'un de l'autre, et l'avait attiré à elle pour l'embrasser sans qu'il ne voie rien venir. Elle avait tenté de faire passer à travers son baiser tout ce qu'elle n'avait su lui dire, et qu'elle pensait ne plus avoir l'occasion de faire plus tard – elle l'aimait, elle aussi.
(Au fond, elle espérait secrètement que cet aveu muet qu'elle était en train de lui faire le ferait changer d'avis, et le ferait rester. Elle avait tant besoin de lui.)
Toutefois, quand ils s'étaient séparés, et qu'elle s'était rendu compte de la pulsion qu'elle venait d'avoir, c'était elle qui était partie rejoindre les autres, laissant Killian seul derrière, sans lui laisser la possibilté de réagir de quelque façon que ce soit.
Et elle ne lui avait plus adressé un seul mot de la soirée, l'évitant autant qu'elle le pouvait, et n'était pas non plus apparue le lendemain à l'aéroport comme ils l'avaient prévu. Il l'avait attendue jusqu'à la dernière minute pour un ultime au revoir, et avoir la possibilité de s'expliquer sur cette proximité qu'ils avaient partagée la veille, à présent sobres, mais ce fut en vain.
(Il aurait annulé son voyage, pourtant, si elle le lui avait demandé, et si elle lui avait fait part de son envie de construire un futur avec lui, si elle aussi voulait plus que son amitié.)
A la place, il se retrouva à des milliers de kilomètres des États-Unis, sans plus aucune nouvelle d'Emma malgré le nombre incalculables de messages qu'il avait pu lui envoyer.
Et qui restèrent tous sans la moindre réponse.
Il lui en aurait voulu s'il ne la connaissait pas aussi bien – ils s'étaient rencontrés lorsque lui n'avait que sept ans, à l'orphelinat qu'il venait d'intégrer suite à l'abandon de son lâche de père. Mais justement, il la connaissait parfaitement ; elle était comme un livre ouvert pour lui.
Il savait alors que si elle faisait tout ceci, c'était seulement pour se protéger. Elle avait tant été laissée de côté par les personnes à qui elle tenait par le passé tandis qu'ils lui promettaient le contraire qu'elle préférait maintenant être celle qui laissait les gens derrière.
Car c'était moins douloureux, d'être celle qui coupe les ponts, plutôt qu'être celle qu'on finit par oublier.
(C'était en fait tout aussi douloureux, cette envie constante de revenir en arrière, mais se l'interdire pour éviter de futures souffrances inévitables.)
C'est pourquoi, même s'il n'avait pas hésité une seule seconde à réserver son billet pour les États-Unis quand il avait appris la nouvelle, Killian redoutait la réaction que pourrait avoir son amie en l'apercevant au vu de la manière dont ils s'étaient quittés, mais aussi comment il allait réagir, lui.
Parce que même après ces années de séparation, il en était toujours autant amoureux… Et il n'avait aucune idée de ce qu'elle pouvait ressentir de son côté.
– Nous allons atterrir, merci de bien attacher vos ceintures, le sortit une voix de son introspection.
Il fallait croire qu'il le découvrirait bientôt.
Quand il sortit de l'aéroport, Killian fut accueilli par une masse brune qui appela son nom avant de se jeter dans ses bras sans plus jamais le lâcher – il lui avait bien trop manqué pour cela.
– Ruby… tu m'étouffes, réussit-il tout de même à l'éloigner légèrement de lui en riant joyeusement.
– Oh pardon, s'excusa cette dernière. Mais je suis tellement contente de te revoir !
– Moi aussi, chérie, répliqua-t-il sincèrement.
Alors que Ruby commençait à lui poser de nombreuses questions sur sa vie dans son pays, un raclement de gorge dans son dos fit prendre conscience à l'anglais que son amie n'était pas la seule à être venue le chercher. En effet, quand il se tourna dans la direction d'où provenait le son, il put se rendre compte que deux autres personnes étaient présentes pour lui : son meilleur ami, David, et son frère, Liam. Il s'approcha d'eux d'un pas rapide, sa camarade le suivant de près, et les étreignit à leur tour, serrant un peu plus fort et longtemps que nécessaire le bouclé contre lui.
C'était lui qui l'avait pris sous son aile quand il avait enfin quitté l'orphelinat, lui offrant un travail dans son bar, mais aussi et surtout, pour la première fois, un véritable chez-lui. Il était rapidement devenu plus qu'un simple ami pour lui ; une figure fraternelle, sa propre famille, et ces trois années passées à rechercher d'où il venait sans grands résultats n'avaient fait que renforcer ce sentiment qu'il ressentait à l'égard du jeune homme. Il était donc plus qu'heureux de le retrouver, même s'ils n'avaient cessé de se donner des nouvelles régulièrement.
– Mary-Margaret m'a dit de te prévenir qu'elle aurait vraiment aimé venir elle aussi, mais elle est chargée d'occuper Emma toute la journée avec Elsa pour s'assurer qu'elle ne se doute de rien, l'informa David une fois l'euphorie des retrouvailles quelque peu passée.
A l'entente du prénom de la blonde, Killian ne put s'empêcher de questionner, sa voix se brisant légèrement sur le dernier mot :
– Est-ce qu'elle va… bien ?
Ses amis étaient tellement habitués à ce qu'il leur pose cette question – le seul moyen pour lui de savoir ce qu'elle devenait puisqu'elle ne lui répondait pas d'elle-même – que le châtain n'eut besoin d'aucune précision pour comprendre à laquelle des deux femmes il faisait référence.
– Elle va très bien, oui, ne t'inquiète pas. Il y a juste quelque chose dont on ne t'a jamais parlé, parce qu'on ne savait pas bien si on le devait ou pas, mais puisque tu vas le voir ce soir, de toute façon, autant que tu sois mis au courant… Elle a rencontré quelqu'un, il y a près d'un an maintenant. On ne le connaît pas bien, mais tout à l'air de bien se passer entre eux, de ce qu'on en sait. Il s'appelle Walsh.
David, Liam et Ruby étaient les trois seules personnes au courant des véritables sentiments qu'éprouvait le brun à l'égard d'Emma – du moins, les seules à qui il l'avait confirmé, puisque la plupart des gens qui les connaissaient étaient persuadés qu'ils étaient faits l'un pour l'autre. C'est pourquoi ils avaient tant hésité à lui parler de la vie amoureuse de la blonde.
Et, au vu de la mine triste que le brun ne parvint pas à cacher en apprenant la nouvelle, ils purent se rendre compte qu'ils avaient eu raison de se taire. Bien sûr, il était vraiment content pour elle, mais il ne pouvait pas non plus s'empêcher de se sentir déçu, même s'il savait qu'il n'en avait aucun droit – c'était lui qui avait décidé de partir, après tout.
Et ils n'avaient partagé qu'un seul baiser, alcoolisé, qui plus est, il y avait trois ans de cela.
Rien de significatif, donc. Aucune promesse d'avenir.
– C'est génial pour elle, finit-il par réagir, sans grand conviction pour autant. J'ai hâte de le rencontrer, alors.
– Et toi, tu ne nous as ramené personne d'Angleterre ? décida de changer de sujet Ruby pour ne pas rendre le malaise qui s'était installé entre eux encore plus gênant.
– Non, personne. Tu sais, je ne suis pas vraiment là-bas pour m'amuser, et je ne reste jamais assez longtemps dans une ville pour me poser, de toute façon. Quoiqu'il y avait bien cette fille, Tink, avec qui j'ai eu quelques rendez-vous… ce n'est jamais allé plus loin. Mais parlons de vous, plutôt. J'ai beaucoup de choses à rattraper si je ne veux pas me sentir perdu tout à l'heure !
Les trois autres lui racontèrent donc la vie à Storybrooke depuis son départ tandis qu'ils se rendaient ensemble au bar de Liam, là où aurait lieu la fête, pour mettre en place les derniers préparatifs. Puis Killian finit par rentrer à l'appartement de son frère, afin de se reposer avant le début de la soirée à cause du décalage horaire.
Il voulait être en parfaite condition pour ce qui allait suivre.
Elsa, Mary-Margaret et Emma se trouvaient dans l'appartement des deux jeunes femmes à regarder le film préféré de cette dernière à sa demande, Princess Bride. C'était une habitude qu'elle avait prise depuis son plus jeune âge, le petit plaisir qu'elle se faisait pour son anniversaire. Une habitude qu'elle partageait habituellement avec Killian, un fan inconditionnel de Wesley.
(Au point même de lui voler certaines répliques, comme le fameux « comme tu voudras » qu'il répétait dès qu'il en avait l'occasion, bien trop souvent au goût de la blonde, surtout lorsqu'elle en connaissait la véritable signification – un « je t'aime » caché.)
– Il ne m'a pas envoyé de message, cette année, laissa-t-elle s'échapper alors qu'elle ne prêtait plus attention à ce qui se passait à l'écran depuis longtemps, trop perdue dans ses pensées pour cela, et son regard penché sur son téléphone, comme si elle attendait quelque chose.
Ses amies, qui comprirent immédiatement de quoi il était question, se lancèrent un regard entendu avant que l'une d'entre elles ne réponde faussement :
– On n'est peut-être pas encore le vingt-deux octobre, en Angleterre ?
– Ils ont de l'avance sur nous, pas du retard, rétorqua Emma. Et puis même, il a toujours été le premier à me le souhaiter à minuit pile – l'année dernière, et celle d'avant, comprises. Non, c'est juste que… il a sûrement dû en avoir marre de persister à m'envoyer des messages alors que je ne lui réponds jamais, c'est tout. Je ne peux pas lui en vouloir, c'est de ma faute.
– Il te manque ? voulut savoir Mary-Margaret, même si la réponse pouvait se lire avec facilité sur le visage de l'intéressée.
Elle ne répliqua tout de même pas tout de suite, les yeux perdus dans le vide, pensive. Puis elle posa ses irises mouillées sur celles de la brune, et avoua :
– Bien sûr qu'il me manque. Il était… il est mon meilleur ami, on a grandi ensemble, on a toujours été là l'un pour l'autre. Et même si on a été séparés plusieurs fois et que je suis donc habituée à son absence, ça fait toujours aussi mal de le savoir loin de moi. Je pensais vraiment ne plus jamais avoir à subir une telle situation quand on a enfin pu quitter l'orphelinat.
– Et tu aimerais le revoir ?
– Sincèrement ? Je ne sais même pas. Une partie de moi rêverait de pouvoir le prendre dans mes bras… Mais en même temps, à quoi bon me faire du mal si c'est pour qu'il reparte ensuite, et que je ne sache pas quand je le reverrai ? Je ne suis pas sûre que je pourrais le supporter cette fois.
Les jeunes femmes perdirent alors tout sourire à l'entente de cet aveu. Elles n'avaient pas pensé une seule seconde à l'éventualité qu'Emma puisse mal prendre un retour temporaire de l'anglais.
Il était cependant trop tard pour faire marche arrière. Il était déjà là, à Storybrooke, pour elle.
Elles espérèrent donc que vivre ces retrouvailles lui ferait changer d'opinion ; elles ne souhaitaient pas gâcher sa fête, même si cela partait d'une bonne intention.
Pour ne pas se mettre à douter davantage, elles se concentrèrent à nouveau sur leur film, qui touchait à présent à sa fin. Elles n'évoquèrent plus le nom de Killian de toute l'après-midi, profitant simplement de la tranquillité du moment et de discussions plus légères, jusqu'à ce qu'Elsa ne propose :
– Bon, on ne va pas rester enfermées ici pour ton anniversaire, quand même ! Il est presque vingt heures… Habille-toi, on t'emmène boire un verre pour fêter ça. On paye notre tournée.
– Je ne sais pas si j'ai très envie de sortir… protesta Emma.
– C'est non négociable, ajouta sa colocataire. Allez, viens, je suis certaine que tu ne le regretteras pas.
L'intéressée, devant l'insistance de ses camarades, se vit obligée d'accepter, et se leva donc du canapé pour se préparer.
– Tu crois qu'on a fait une connerie d'inviter Killian ? posa la question qui lui troublait l'esprit depuis qu'elles avaient parlé de lui Mary-Margaret lorsqu'elle se retrouva seule avec la blonde.
– On va bientôt le savoir… rétorqua celle-ci, pas plus avancée qu'elle sur la question.
Très bientôt, même, puisqu'une demi-heure plus tard, toutes trois furent fin prêtes, et en route vers le bar du Jolly Roger où tous les convives les attendaient avec impatience.
– Joyeux anniversaire !
Quand Emma et ses amies passèrent la porte du bar, qui était étrangement vide et sombre, toutes les lumières s'allumèrent en même temps, et un groupe de personnes sortit de sa cachette pour saluer la jeune femme. Cette dernière resta un moment interdite, sans bouger ni prononcer le moindre mot, des larmes de joie venant perler au coin de ses prunelles émeraude. Elle avait du mal à réaliser que tout ceci était bel et bien organisé pour elle.
Souvent, plus jeune, elle avait rêvé d'une telle surprise. Mais jamais elle n'avait pensé y avoir droit un jour ni compter aux yeux d'assez de monde pour cela. Elle était plutôt habituée aux anniversaires en compagnie de Killian, qui faisait tout pour que sa journée se démarque des autres malgré les peu de moyens qu'il avait.
Killian…
Tout à coup, elle repensa à la conversation qu'elle avait eue avec Elsa et Mary-Margaret plus tôt, les étranges regards qu'elles s'étaient lancées, et une idée lui traversa l'esprit : se pouvait-il qu'il soit revenu pour elle, et que ses amies cherchaient donc à savoir comment elle allait réagir devant un tel cadeau ?
Une vague d'adrénaline s'empara de son corps alors qu'elle scrutait l'assemblée devant elle dans l'espoir de rencontrer une paire d'yeux océan, mais elle dut malheureusement bien vite se rendre à l'évidence : il n'était nulle part.
Elle sentit son cœur se serrer à cette constatation mais préféra l'ignorer. A la place, elle partit saluer tous ceux qui étaient là, et les remercier.
Elle n'allait tout de même pas gâcher cette soirée qui avait dû leur prendre tant de temps et d'énergie à préparer à cause de ce manque grandissant que provoquait l'absence du brun chez elle…
Elle gâcha définitivement sa soirée.
A chaque nouvelle entrée dans le bar, à chaque nouveau message ou appel sur son téléphone, Emma ne pouvait s'empêcher d'attraper la bague que Killian lui avait offerte avant son départ et qu'elle ne quittait plus depuis et prier pour que ce soit lui – en vain. Elle se sentait tellement désespérée qu'elle ne parvenait même plus à le cacher. Malgré tous les efforts mis en œuvre pour que son anniversaire soit parfait, ses sourires sonnaient faux, et tous ses amis le voyaient bien.
– Emma ? Qu'est-ce qui ne va pas ? finit par la questionner Elsa, n'y tenant plus, alors qu'elle se trouvait au comptoir en train de consommer un verre de rhum – la boisson préférée de l'anglais.
– Je… je suis désolée, s'excusa l'intéressée. Vous avez fait tout ça pour moi, et en retour je n'en profite même pas, mais… avec vos questions sur Killian tout à l'heure, quand j'ai compris que vous m'aviez organisé une fête, j'ai cru pendant deux minutes que vous l'aviez invité et qu'il serait là ce soir. C'est bête, hein ? Surtout quand on sait qu'il ne m'a même pas souhaité mon anniversaire. Mais j'ai espéré pour rien et… maintenant je ne peux plus me sortir cette idée de la tête et me sentir déçue qu'il ne soit pas présent… Il me manque, Elsa. Bien plus que ce que je ne veux l'avouer, à moi ou aux autres.
Cette dernière, malgré la tristesse apparente de sa camarade sur son visage, ne put se retenir de sourire, et de se sentir soulagée. Finalement, leur idée avait été la bonne.
Elle se reprit tout de même rapidement pour ne pas qu'Emma se doute de quoi que ce soit, ni ne se sente pas soutenue, et répliqua :
– Tu sais quoi ? Je pense qu'il est l'heure d'ouvrir tes cadeaux, ça va te remonter le moral.
En effet, il avait été décidé d'un commun accord plus tôt dans la journée que le brun n'apparaîtrait qu'au moment d'offrir les présents, pour marquer d'autant plus sa présence que s'il était arrivé en même temps que tout le monde. C'est pourquoi, alors qu'elle réunissait les autres convives au centre de la salle, la blonde en profita pour prévenir le jeune homme de se préparer à faire son apparition d'ici peu.
Tour à tour les amis d'Emma lui donnèrent ce qu'ils lui avaient apporté, des cadeaux qui, comme Elsa l'avait prédit, lui redonnèrent chacun un peu plus le sourire devant tant d'attentions de leur part, jusqu'à ce que soit au tour de Walsh de lui offrir le sien. Avant toute chose, il attrapa la jeune femme par la main et déposa un tendre baiser sur ses lèvres, lui répétant pour la énième fois un joyeux anniversaire, puis il chercha quelque chose dans la poche de sa veste, et posa un genou à terre sans jamais la lâcher du regard.
– Emma… Je sais que l'on ne se connaît pas depuis si longtemps que cela, on ne vit même pas encore ensemble, mais je n'en pouvais plus de me retenir de te le demander alors que je sais que tu es la femme de ma vie. Est-ce que… est-ce que tu veux m'épouser ?
Quelques murmures d'excitation se firent entendre, avant qu'un silence religieux ne s'installe dans la pièce. Le cœur de l'intéressée s'emballait dans sa poitrine, paniquée.
Elle ne s'attendait clairement pas à une tellement demande, et elle n'avait aucune idée de quoi répondre. Bien sûr qu'elle l'aimait, elle aussi, mais… était-ce suffisant ?
Souhaitait-elle réellement passer le restant de sa vie avec cet homme ? Et comment pouvait-elle en être certaine, de toute manière ?
Pendant que tout le monde attendait qu'elle ne prenne la parole en retenant son souffle, un bruit de porte vint interrompre le sérieux du moment. Emma détourna son regard de la bague qu'elle fixait avec insistance depuis de longues secondes déjà, et ce fut alors qu'elle le vit entrer dans le bar.
Son visage blêmit en un instant, et elle s'écria :
– Killian ?!
