« beauty and the beast »
I ; « take me back to the night we met »

Un silence presque macabre régnait dans les couloirs, un silence entrecoupé par le bruit de la pluie martelant contre les vitres ; un soupir s'échappa de ses lèvres et elle posa son regard noisette sur sa camarade, assoupie sur une table de la cafétéria. Un léger sourire naquit au coin de ses lèvres et elle déposa le bout de ses doigts sur le petit nez rebondi de la demoiselle, lui arrachant un gémissement. Les dernières heures avaient été particulièrement éprouvantes, particulièrement longues ; si bien, que l'une comme l'autre, elles ne rêvaient que d'une chose, un bon lit. Leurs regards s'entrechoquèrent un instant, très court, et elles s'accordèrent un sourire.

« ça fait longtemps ? » demanda - t - elle, étouffant un bâillement
« que tu ronfles ? à peine une heure, Lucy »

Encore légèrement endormie, la demoiselle jeta quelques coups d'oeils, à droite, à gauche et déposa de nouveau sa tête, au creux de ses bras ; sans un mot, elle tenta de retrouver les bras de Morphée.

« ne t'endors pas, eh » souffla - t - elle « je m'ennuie, là »

D'un geste las, la dite Lucy posa son regard brun sur sa camarade, les yeux légèrement plissés. Les deux jeunes femmes se côtoyaient depuis quelques années, elles avaient partagés les bancs de l'université et s'étaient retrouvés dans les vestiaires de cet hôpital ; un lien les unissait l'une à l'autre, bien qu'elles soient différentes. Là où Lucy était une magnifique jeune femme, aux formes délicieuses, aux mèches blondes et à la silhouette élancée, elle, elle possédait ce physique d'une adolescente, une poitrine plate et des mèches bleues.

« est - ce que d'autres patients sont arrivés, entre temps ? » lui demanda la blonde
« pas vraiment, à part un couple enrhumé »

Certaines nuits, elles n'avaient pas une minute de libre, tentant maladroitement de sauver la vie de toutes ces personnes qui s'amassaient entre ces murs ; pourtant, ce soir, un silence pesant régnait dans les lieux.
Et alors, que la douce Lucy semblait sur le point de rejoindre les bras de Morphée une nouvelle fois, des éclats de voix s'élevèrent ; elles se regardèrent un instant. Ces bruits, ces voix, elles les connaissaient par coeur ; ça voulait dire, qu'un cas critique, avait passé les portes de l'établissement.
La bleue réagit automatiquement, attachant ces mèches en une couette haute et relevant les manches de sa blouse blanche ; Lucy suivait, silencieusement. Maladroitement, elles s'avancèrent dans les couloirs, tombant nez à nez avec ce qui semblait être un carnage.

« Lucy, Levy, vous êtes là, parfait ! » entendirent - elles « séparez - vous, tâchez de vous rendre utile »

Levy lança un sourire en biais à son amie et attrapa une paire de gants ; ces iris noisettes cherchant tant bien que mal où elle pourrait être utile mais toutes les personnes présentes semblaient avoir besoin de bras supplémentaire. Elle s'approcha d'une femme de grande taille, des mèches rouges attachés en un chignon désordonné et jaugea les blessures du patient, devant elle.

« mais qu'est - ce qu'il s'est passé ? » souffla la bleue, les mains tremblantes
« visiblement, une dispute qui aurait mal tournée ils sont tous dans un état critique »
« qu'est ce que tu veux que je fasse, Ezra ? »
« occupe - toi de celui - ci, s'il te plaît » lança Ezra, en jetant un rapide coup d'oeil à un patient « fais ce que tu peux, mais ne t'attardes pas trop, je ne pense pas qu'il passera la nuit »

Ces iris noisettes effleurèrent avec précaution le dit patient ; couvert de sang, il semblait presque que chaque inspiration qu'il prenait l'achevait, lentement, douloureusement. Et ces blessures qui recouvraient son corps n'étaient pas si profondes, sûrement qu'il s'était bien débattu ; mais son visage reflétait la mort, une vilaine cicatrice barrait sa peau, traversant entre ces deux yeux. Un haut de coeur la prit, assez violent mais elle tenta tant bien que mal de ne pas laisser ces quelques émotions prendre le dessus sur la situation ; acquiesçant faiblement à sa supérieur, elle tira doucement la civière.


Le claquement de la porte lui arracha un léger sursaut et un petit grognement s'échappa de ses lèvres ; elle se maudissait, elle et sa fausse délicatesse. Ses doigts fins passèrent dans ses mèches bleues et son sac trouva sa place, sur le parquet en bois ; les murs de l'endroit étaient couverts d'un tas de photographies, d'un tas de sourires, de baisers, d'amour, d'amitié. Un sourire se glissa contre ses lèvres et elle s'avança d'un pas un peu plus léger malgré la fatigue, en sentant la bonne odeur dans l'air ; elle ne fût pas surprise de trouver un grand brun, derrière les fourneaux. Maladroitement, elle se glissa contre son dos, passant ses bras frêles autour de sa taille robuste ; elle était si petite, près de lui et elle se sentait en sécurité. D'aussi loin que remontait leur histoire, elle s'était senti bien, vraiment bien. Un petit soupir de bien - être s'échappa de ses lèvres alors qu'elle humait cette odeur de lavande qui s'échappait des vêtements de son bien - aimé.

« dure journée, mon ange ? » entendit - elle

Elle acquiesça vivement contre son dos et s'éloigna de son corps, s'installant sur le comptoir de la cuisine. Le grand brun se tourna vers elle, ce sourire si craquant sur les lèvres et elle esquissa un sourire, tapotant du bout des doigts ses lèvres.

« j'attends mon baiser, Gray » souffla - t - elle, une lueur de malice dans les yeux

Et le dit Gray ne se fit pas prier, attrapant la taille de la bleue, pour kidnapper ses lèvres dans un baiser tendre. Cette allure de mauvais garçon qu'il avait, n'était rien lorsqu'elle était dans les parages. Elle passa ses mains le long de ses bras musclés et déposa un chaste baiser sur le bout de son nez.

« tu m'as terriblement manqué » lâcha la bleue
« ça a été si dur que ça ? »
« tu n'imagines même pas, il y a eu énormément de décès »

Un brin de tristesse passa dans les iris ébènes du jeune homme et il déposa un baiser long, tendre, sur le front de la jeune femme, caressant du bout des doigts sa taille ; ce métier qu'elle exerçait la détruisait, lentement et il le sentait, chaque fois qu'elle perdait un patient, elle semblait se perdre un peu plus au passage.
Gray retourna aux fourneaux, éteignant le feu sous les casseroles.


Un dernier gémissement de plaisir s'échappa de ses lèvres et soudain, elle sentit ce poids si familier contre son corps frêle ; esquissant un sourire, elle passa ses doigts dans les mèches brunes de son amant, déposant ses lèvres sur son front. Leurs deux respirations s'entrechoquaient, dans leurs draps teintés de miel. Puis, ils retrouvèrent leurs places habituels, une étreinte douce ; son dos s'heurta au torse musclé de son petit - ami et ces bras musclés se glissèrent autour de sa taille frêle. Elle sentait le souffle du brun contre son oreille, ça la berçait la nuit, ça éloignait les cauchemars.

« j'ai envie d'un bébé, Levy » souffla - t - il, au creux de son oreille

Ces mots résonnaient tendrement entre les murs de la chambre et elle, elle tentait tant bien que mal de ne pas faire un seul mouvement, de faire croire à son sommeil après une longue journée ; pourquoi faisait - elle ça? Le souffle court, les battements effrénés de son coeur, elle ferma les yeux ; espérant qu'il ne tenterait pas maladroitement d'avoir une réponse ce soir. Était - elle surprise? Pas vraiment ; ils étaient ensemble depuis tant d'années, depuis si longtemps, ils s'aimaient et Gray était tout simplement parfait, un amant doux, un petit - ami adorable et bienveillant. Alors pourquoi la simple idée d'avoir un bébé avec cet homme si bon la mettait à genoux ?
Dans ce bordel de pensées contradictoires, elle trouva tant bien que mal le sommeil.


Étouffant un bâillement à l'aide de sa main, elle referma la porte de son casier brutalement, arrachant un sursaut à ses quelques collègues présents ; dans un élan sympathique, Lucy déposa sa main sur l'épaule de son amie, les sourcils froncés.

« t'as une sale tête, dis moi » lança - t - elle, soucieuse avant que ces lèvres ne s'étirent en un sourire à l'allure bien trop perverse « ou alors, il y a une certaine personne qui n'a pas cessée de te tenir éveillée cette nuit, chanceuse »

Ces simples mots suffirent à faire remonter les souvenirs de cette nuit au creux de ses entrailles et un grognement s'échappa de ses lèvres ; sa nuit avait été épouvantable et le pire dans tout ça, c'est qu'elle ne comprenait pas vraiment pourquoi. Elle adressa un petit sourire à son amie d'enfance, évitant tout inquiétude de sa part, persuadée que personne ne comprendrait son comportement ; après tout, elle ne se comprenait pas elle - même, dans tout ça.
Elle salua chaleureusement sa supérieure et attendit patiemment ces ordres ; elle n'était pas encore apte à bosser seule, mais bosser aux ordres d'Ezra était quelque chose de géniale. Bien qu'elle possédait cette allure si stricte, elle lui apprenait tant de choses. Ces iris noisettes se posèrent sur son entourage, ces collègues qui entouraient doucement leur supérieure et elle glissa ses mains dans ses poches.

« bien, nous allons faire le tour des chambres » souffla la demoiselle, aux cheveux rouges


Un sourcil arqué, elle observait silencieusement la scène devant elle, étouffant un sourire amusé ; à peine son équipe avait - elle passée le pas de la porte de la première chambre qu'un cri avait résonné dans le long du couloir. Elle jeta un rapide coup d'oeil à son amie d'enfance, les fesses sur le sol, et lui lança un grand sourire moqueur ; Ezra leva les yeux au ciel, visiblement agaçé par le comportement de son patient.

« vraiment jeune homme ? » s'exclama - t - elle « avez - vous l'intention d'agresser toutes mes employées ? »

Le garçon posa son regard sur elle, un regard brûlant ; n'importe quelle femme aurait sûrement fondu face à cette bouille mais elle n'était pas n'importe qui. Un soupir s'échappa de ses lèvres alors qu'un grand sourire se glissait sur le visage du dit patient. Les mèches roses en bordel, il se releva tant bien que mal et s'installa au bord de son lit.

« j'ai faim » dit - il
« ce n'est pas l'heure du repas, vous devez attendre »
« je n'ai pas envie d'attendre »
« et bien, vous y penserez la prochaine fois que vous finirez ici »
« je sors quand ? »
« pas maintenant, vos blessures sont sérieuses ; Lucy, nous t'écoutons »

La grande blonde étouffa un grognement et en s'appuyant sur ces paumes se releva du sol, ramassant ces quelques feuilles.

« Natsu ; vingt - cinq ans, il est arrivé hier avec les autres, couvert de graves brûlures sur les bras » lit - elle, attentivement « il s'est réveillé ce matin et malgré ces blessures, il semble en parfaite forme, il ne cesse de réclamer de la nourriture et de bouger dans tous les sens »

Elle jeta un rapide coup d'oeil au dit Natsu et lui tira la langue, telle une enfant ; son geste ne passa pas vraiment inaperçue et quelques rires s'élevèrent dans la pièce. La supérieure acquiesça, déclarant que Lucy serait l'infirmière en charge de ce dossier, puisqu'ils semblaient si bien s'entendre.


Cette porte, elle n'eût aucune mal à la reconnaître. Le souffle court, elle s'engouffra dans la pièce, cherchant du regard le patient dont elle s'était occupée la nuit dernière ; elle avait passée des heures à panser ces blessures. Et tous les professionnels s'étaient dits qu'il ne passerait pas la nuit, après tout qui survivrait à une telle blessure ? Mais il était là, assis sur ce lit, couverts par des bandages blancs, le regard dans le vide.
Ezra lui fit un signe, annonçant que c'était à elle que revenait la lecture du dossier et sans un mot, elle chercha la page du patient.

« nom inconnu » souffla - t – elle « âge inconnu, il est arrivé hier avec les autres, couvert de plusieurs blessures mais la plus grave reste celle sur son visage ; il s'est réveillé ce matin »
« rien d'autre, Levy ? »
« non, le dossier est vide »

La bleue vit sa supérieure, les sourcils froncés, lui prendre le dossier des mains, cherchant une quelconque autre information mais il n'y avait rien, rien du tout de plus ; tous les regards se posèrent sur cet homme, qui regardait silencieusement par la fenêtre. Il semblait en proie à un tas d'interrogations et elle laissa ces iris noisettes effleurer son corps, son visage ; imposant, fut le premier mot qui lui vint. Cet homme était imposant.
Ezra s'approcha du garçon, les mains sur les hanches.

« ton nom, s'il te plaît » souffla - t - elle
« je ne sais pas »

Il ne prit même pas la peine de tourner la tête, continuant de contempler quelque chose par la fenêtre.

« comment ça tu ne sais pas ? » répéta la rouge
« je ne sais pas, je ne me souviens pas »

Un soupir s'échappa de ses lèvres et à l'instant où ces iris rouges effleurèrent les siennes, son coeur rata un battement ; la lèvre inférieure coincée entre ses dents, elle écouta la suite de la conversation, étouffant les battements de son coeur maladroit.

« pas du tout ? » demanda la supérieure
« je ne sais pas qui je suis »

Sa voix rauque résonna un instant dans l'air ; puis, il détourna son attention d'eux, pour scruter par la fenêtre.