Juste une folle envie d'écrire quelque chose dans un métro. 《Les Chevaliers de Baphomet》appartient à ses créateurs et développeurs.
Il était assis en face d'elle, comme à son habitude, son regard rivé sur la vitre froide contre laquelle sa tête était posée. Parfois, du coin de l'oeil, il l'observait. Pour la retrouver à chaque fois plongée dans un livre, ou bien les yeux fermés. Il ignorait alors si elle dormait vraiment.
On ne voyait rien à travers les fenêtres, hormis le noir le plus absolu, le noir des tunnels de métro, les traces tenaces des doigts graisseux et la condensation de la respiration des voyageurs. Noir comme ses cheveux, qui battaient ses joues d'albâtre au rythme des secousses métronomiques du métro, parfois troublé par un sursaut un peu plus fort que les autres. Faute à une déformation quelconque du rail, mais qui s'en souciait ?
Il pouvait la voir par réflexion sur la vitre sale. Elle semblait s'être assoupie. Il se voyait, elle et lui, face à face, immobiles, elle la tête légèrement penchée vers l'arrière, les lèvres à peine entrouvertes, et lui... lui, faisant face à son reflet, ses mèches blondes, l'ombre d'une barbe naissante et ses yeux bleus se fixant eux-mêmes dès qu'ils tentaient de se surprendre.
Régulièrement, un éclair vert passait furtivement au dehors, la lumière verte des issues de secours disséminées le long du réseau souterrain. Le roulement hypnotique lui fit fermer les yeux lui aussi, interrompu au rythme régulier des arrêts et de leurs plateformes blanches et fantômatiques.
Ils avaient pourtant essayé. Il avait cru que cela marcherait. A vrai dire, il ne savait même pas de quoi il en retournait. Entre eux, nombre de non-dits et de silences implicites. Aucun des deux ne s'en était plaint. Du moins au début. Désormais, il avait la sale impression que cela était plus subi qu'autre chose, et sans jamais avoir l'occasion de dissiper les doutes.
Il n'en pouvait plus d'attendre. Dans quelques minutes, une voix synthétique annoncerait l'arrêt de Nico, et la jeune femme disparaîtrait de sa vie une fois encore, pour vivre la sienne dans le tumulte de la capitale, dévorée par la gueule démesurée du monstre parisien.
Ses paupières se rouvrirent.
Nico n'était plus là.
Puis vint le grésillement artificiel de l'annonce. Personne aux portes.
Nico n'avait jamais été là. Deux ans que George ne l'avait pas vue. Et même cela il l'avait oublié.
Le métro redémarra, et George referma les yeux. Voilà tout.
