Première partie

Cela faisait seulement cinq minutes que Jane attendait dans la salle d'attente mais il en avait déjà marre. Impatient, il frappa à la porte du cabinet. Au même instant, la porte s'ouvrit et un homme d'une quarantaine d'année aux cheveux poivre et sel et une femme d'une cinquantaine d'année au visage fatigué apparurent.

- On se revoit la semaine prochaine, je suis content de voir qu'il y a eu autant de progrès en une semaine, dormez bien.

- Merci docteur, au revoir.

Le médecin se tourna vers Jane.

- Bonjour, vous aviez pris rendez-vous ? Parce que je n'ai rien d'autre normalement.

- Bonjour, je me présente, je m'appelle Patrick Jane. Je n'ai pas pris rendez-vous je voulais juste vous rencontrer.

- Ah bon ?

- Oui, voilà, je… , commença Jane d'un air fatigué. Je fais peu confiance aux médecins, disons que je ne suis pas très à l'aise avec eux. Malheureusement, j'ai besoin de vous.

- Vous avez des troubles du sommeil ?

- Oui.

- Très bien, vous voulez entrer un instant ? Juste pour parler et faire connaissance, je ne vous force en rien, proposa le médecin comme s'il parlait à un enfant.

- D'accord, accepta Jane.

Dès que le médecin se fut retourné pour entrer dans son bureau, un sourire vainqueur s'afficha sur le visage de Jane, qu'il fit aussitôt disparaitre.

- Installez-vous sur ce fauteuil si vous le souhaitez, dit le médecin en désignant un petit fauteuil bleu pâle.

- Merci.

- Depuis combien de temps avez-vous des difficultés pour dormir ? demanda-t-il.

- Une semaine et demie. Serait-il possible que je vous pose quelques questions avant que vous ne m'interrogiez ? Je me sentirais vraiment plus à l'aise…

Comme le docteur acquiesçait, Jane commença.

- Vous êtes, il me semble un médecin réputé et vous êtes quelqu'un de très calme. D'ailleurs, je suis sûr que vous ressentez ce calme en permanence, il entre par vos pieds et recouvre petit à petit tout votre corps. Vous sentez cette odeur de fleurs ? C'est une odeur tellement agréable qu'elle va vous faire tomber dans une transe dès que je claquerai des doigts.

Sur ces mots, Jane claqua des doigts et le regard du médecin se perdit.

- Vous allez maintenant répondre à mes questions et lorsque je claquerai des doigts de nouveau, vous aurez oublié ma venue, d'accord ? Répondez par oui ou par non.

- Oui, répondit l'homme.

- Très bien. Est-ce que vous avez une patiente du nom de Teresa Lisbon ?

- Oui.

C'était la seule information que Jane possédait. Depuis une semaine qu'il voyait que Lisbon se comportait étrangement et semblait être fatiguée et la seule chose qu'il avait réussit à obtenir en fouillant son bureau était le numéro de téléphone et l'adresse de ce médecin.

- Depuis combien de temps vient-elle vous voir ?

- Deux semaines.

La réponse provoqua un choc sur Jane. Deux semaines que Lisbon dormait mal et il n'avait rien vu. « Quelle cachotière », pensa-t-il sans même un sourire.

- Elle a des difficultés à dormir ?

- Oui

- Depuis combien de temps Teresa Lisbon dort mal ? demanda-t-il au docteur.

- Depuis 20 jours.

« Absurde » pense Jane, c'est impossible, il l'aurait vu. Le médecin ne pouvait pas mentir donc Lisbon avait mentit à son médecin. « Absurde aussi » se dit-il, pour quelles raisons aurait-elle mentit. Il dit finalement admettre qu'il n'avait pas du être assez attentif pour se rendre compte que sa patronne allait mal.

- Est-elle sous traitement ?

- Non.

- Elle l'a refusé ? devina Jane.

- Oui.

- Je vous remercie même si vous ne vous en souviendrez plus.

Jane se leva, ouvrit la porte et se retourna vers le médecin. Il claque des doigts, vérifia qu'il revenait à lui et s'enfuit avant qu'il ne l'aperçoive.

Jane était assis sur son canapé, observant le visage épuisée de Lisbon qui travaillait dans son bureau, la porte ouverte. Elle semblait si fragile et ne laissait rien paraître. Pourquoi ne lui en avait-elle pas parlé ? Il se sentait triste et honteux d n'avoir pas pu l'aider. Mais il allait remédier à cela.

Le soir même, il salua tout le monde, salua Lisbon en lui disant « à demain » et quitta les bureaux du CBI. Il passa chez lui prendre quelques affaires qui lui seraient nécessaires et revint sur ses pas, en direction de chez Lisbon. Il gara sa voiture un peu plus loin de sa maison et marcha jusqu'à chez elle.

Assise devant son ordinateur, Lisbon voyait les heures défiler mais n'avait pas vraiment envie de rentrer chez elle. Le moment de la journée qu'elle préférait était le matin, lorsque tout le monde arrivait au travail de bonne humeur et bien réveillé. Finalement, elle éteint son ordinateur, la lumière de son bureau et se dirigea vers le parking tel un zombie. Elle marcha jusqu'à sa voiture et s'assit au volant. Elle se rendit alors compte qu'au lieu de garder les clefs en main après avoir ouvert la portière, elle les avait rangées dans son sac. Les larmes lui vinrent aux yeux.

- Arrête de pleurer pour rien, ça suffit, se dit-elle à elle-même. Je voudrais simplement dormir quelques heures, mon Dieu, faites quelque chose…

Elle s'empara de son sac, retrouva ses clefs et démarra sa voiture. A peine sortie du parking, elle fondit en larmes.

Elle arriva chez elle sans savoir comment, descendit de la voiture toujours en larmes et n'aperçut même pas Jane, assit sur un des murets de sa propriété. Elle sortit ses clefs qu'elle avait de nouveau rangées dans son sac et lorsqu'elle eut atteint sa porte d'entrée, elle tenta d'enfoncer la clef dans la serrure. A cause de cette fatigue accumulée, ses mains tremblantes lui firent lâcher les clefs qui résonnèrent en tombant sur le sol. Elle se mit alors à pleurer de plus belle, ferma les yeux et appuya sa tête sur la porte, épuisée de tous ses efforts pour paraître bien toute la journée.

Décontenancé, Jane traversa les quelques mètres de pelouse et s'approcha d'elle. Il eut mal au cœur en la voyant pleurer avec tellement de désespoir et elle ne l'entendit même pas arriver. Tout ce qu'elle vit, c'est qu'une main s'était posée sur ses clefs et les ramassa. Elle leva les yeux et découvrit que cette main avait un corps, une tête, des yeux bleus et des cheveux blonds. Continuant de pleurer, exténuée, elle observa Jane insérer sa clef dans la serrure et ouvrir la porte.

- Venez, lui dit-il tout doucement en l'aidant à entrer chez elle.

Il ne l'avait jamais vu comme ça et s'en voulait de plus en plus de n'avoir rien vu plus tôt. Il la fit asseoir sur son canapé sans lui laisser le choix et disparut dans sa cuisine.

Depuis qu'elle était en compagnie de Jane, Lisbon essayait d'arrêter ses pleurs mais elle n'y parvenait pas et elle était sûre qu'il l'entendait pleurer depuis là où il était. Elle avait les coudes sur ses genoux, la tête dans ses mains et ses cheveux pendaient devant elle. Ses sanglots commençaient à l'empêcher de respirer convenablement et elle avait l'impression d'étouffer. Soudain, elle le vit arriver, s'asseoir à côté d'elle et poser une tasse fumante sur sa table basse. Il écarta les cheveux de son visage et à l'aide d'une serviette humide et fraiche, il lui essuya légèrement le visage. Qu'aurait-elle donné pour que sa mère soit là et agisse ainsi… Ces pensées la firent pleurer de plus belle.

- Lisbon, chhhhhut, écoutez-moi, dit Jane à voix basse. Je vais rester et vous allez dormir. Vous allez commencer par vous calmer, je vais vous aider.

Il passa son bras autour de ses épaules et l'obligea ainsi à poser sa tête sur son épaule. Il appliqua la serviette humide sur son visage une encore et encore, attendant que ses pleurs cessent. Au bout d'une dizaine de minutes, il la sentit se calmer et respirer plus régulièrement.

- Vous avez du mal de dormir ? lui demanda-t-il presque à voix basse.

- Non…

Lisbon sentit la poitrine de Jane se soulever et devina qu'il avait trouvé sa réponse drôle.

- Arrêtez de faire l'idiote, ça va vous épuiser encore plus.

Le silence s'installa de nouveau quelques minutes puis, saisissant la tasse encore fumante, Jane reprit la parole.

- Vous allez boire ça. C'est une tisane relaxante, j'en prends tous les soirs, vous allez voir, c'est très bon.

- Non merci.

- Mais ça vous aiderait à dormir de boire une boisson chaude, essaya-t-il de la persuader.

- Je ne veux pas dormir.

Jane ne comprit pas sa réaction mais avant qu'il puisse répondre quelque chose, elle ajouta :

- Je fais des cauchemars, Jane. Et si je ne dors pas, ce n'est pas parce que je ne peux pas mais parce que je ne veux pas…

- Alors ce sera encore plus simple, répondit Jane. Vous allez vous endormir et dès que vous entrerez dans votre cauchemar, je vous réveillerai.

Lisbon se dégagea de ses bras et s'écarta de lui.

- Pas question.

- Mais pourquoi ? l'interrogea-t-il.

- Parce que je ne veux plus jamais revivre… retomber dans ce cauchemar.

- Mais puisque je vous dis que je vous réveillerai.

- Ah bon ? Et comment vous pourriez deviner que je fais un mauvais rêve ?

- C'est mon métier, Lisbon. Il faut que vous dormiez, faites-moi confiance, je vous promets que vous n'aurez pas le temps de paniquer, je vous réveillerai immédiatement.

- Non ! Fichez-moi la paix ! Paniqua Lisbon en se remettant à pleurer.

- Lisbon, non, calmez-vous… S'il vous plait…

Malgré ses peurs, cette dernière se calma et s'appuya sur le dossier du canapé. Jane attendit un peu qu'elle reprenne une respiration normale et lui tourna délicatement la tête afin qu'elle le regarde dans les yeux.

- Lisbon, vous pouvez me faire confiance, reprit Jane d'une voix douce pour l'apaiser. En entrant dans votre cauchemar, vous aurez un sursaut, vos doigts se resserreront et vous allez avoir une inspiration brève. Je connais ça par cœur, c'est mon métier. Je serai capable de le repérer.

Lisbon détourna la tête.

- Regardez-moi.

Elle fit ce qu'il lui demandait

- Je vous le promets. Je ne fais pas de promesses que je ne tiens pas. Je serai là. Vous avez besoin de sommeil ou vous allez perdre la raison.

- Je la perds déjà, Jane, lui dit Lisbon la gorge nouée, je ne sais plus quoi faire…

- Ayez confiance en moi.

Elle soupira un grand coup.

- D'accord.

Jane cru qu'il allait exploser de joie tellement il avait eu peur qu'elle n'accepte jamais sa proposition. Il la força à boire le reste de la tisane et passa son bras autour de ses épaules comme il l'avait fait un peu plus tôt.

- Venez, ça va aller. Dormez.

Il lui fallu plus d'une heure et demie pour s'endormir et lorsqu'enfin elle trouva le sommeil aux alentours de vingt-deux heures, Jane sentit son corps se détendre et sa respiration devenir régulière. Il n'avait aucun mal à se tenir éveillé il lui suffisait de penser à RedJohn et la colère et la vengeance s'emparait de lui. Le calme régnait dans la maison et seul l'halogène diffusait une douce lumière dans le salon. Vers minuit, il entendit une brève inspiration et lorsqu'il regarda la main de Lisbon, il s'aperçu qu'elle venait d'entrer dans un cauchemar. Comme promis, il l'a réveilla immédiatement.

- Lisbon, réveillez-vous. Ouvrez les yeux, vous êtes chez vous sur votre canapé, lui dit-il alors qu'elle sortait de son sommeil. Tout va bien, je suis là et il n'y a personne d'autre.

Lisbon compris que rien ne pouvait lui arriver. Elle resta éveillée une petite demi-heure sans rien dire puis se rendormit. Jane dut la réveiller une nouvelle fois à trois heures puis à sept heures pour la sortir des ses mauvais rêves puis une dernière fois pour aller travailler.

- Allez prendre une douche, lui ordonna-t-il quand elle sembla mieux réveillée. Je vous prépare un petit déjeuner.

Elle acquiesça puis se dirigea vers sa salle de bain sans un mot. Lorsqu'elle en ressortit, elle sembla tout à coup en pleine forme.

- Je vous ai fait un café, lui dit Jane en lui tendant une tasse remplit d'un liquide noir. Vous en prendrez un autre à midi pour tenir le coup la journée mais après, stop.

- Je ne pourrai jamais tenir avec seulement deux cafés ! s'indigna Lisbon.

- Ce n'est pas comme si je vous laissais le choix. Je rentre chez moi dormir deux ou trois heures, je serai en retard mais vous me trouverez bien une excuse valable pour la grande chef, non ? lui demanda Jane tout sourire. A tout à l'heure !

Elle lui sourit en retour et trempa ses lèvres dans son café brûlant. Alors qu'il enfila sa veste et saisissait la poignée de la porte, elle l'arrêta.

- Jane !

- Oui ?

- Je…

- Il faut vraiment que j'y aille, Lisbon. Souhaitez-moi bonne nuit !

Jane claqua la porte et elle se retrouva seule sans même avoir eu le temps de le remercier pour s'être imposé une nuit blanche rien que pour qu'elle puisse dormir quelques heures.

- Bonne nuit, Jane…, murmura-t-elle bien trop tard.

- Bonjour tout le monde ! s'exclama Jane en arrivant dans les bureaux du CBI vers onze heures. Désolé pour ce petit retard, ajouta-t-il à l'intention de Lisbon.

- Petit retard ? Vous avez vu l'heure ? S'insurgea cette dernière. On vous attend depuis plus de deux heures !

Sous le choc, Jane regarda sa patronne d'un air surpris. Les autres membres de l'équipe baissèrent la tête, se passionnant tout à coup pour leur travail.

- Je suis… désolé.

- Dans mon bureau, ordonna Lisbon.

Sans se faire prier et souhaitant comprendre la situation, Jane s'empressa de la suivre.

- Mais qu'est-ce qui vous prend ? lui demanda-t-il dès qu'il eut refermé la porte.

- Désolée. J'ai essayé de vous parler ce matin mais vous vous êtes enfui comme un voleur alors il fallait que je trouve un moyen de vous convoquer dans mon bureau, s'expliqua Lisbon. Je voulais… vous dire…

- Oh je sais ce que vous voulez me dire mais ça attendra, l'interrompit Jane. J'ai beaucoup de travail à rattraper vu que je suis en retard, vous comprenez ?

Il lui sourit d'un air moqueur et se dirigea vers la sortie.

- Et comme je serai sûrement encore en retard les jours qui viennent, je vais avoir un monceau de travail hallucinant ! ajouta-t-il avant qu'elle ait eu le temps de répliquer quoi que ce soit.

- Mais vous n'avez jamais…, commença-t-elle alors que la porte se refermait et qu'elle se retrouvait seule dans son bureau. … de travail à rattraper.

Soudain, elle réalisa la signification de ses paroles. S'il avait l'intention d'être en retard tous les matins, c'est qu'il comptait venir tous les soirs chez elle. Elle sentit comme un soulagement dans tout son corps.

En effet, Jane veilla sur elle les cinq jours qui suivirent. Il avait réussit à lui faire accepter qu'ils aillent dans sa chambre. Elle dormait dans son lit, et lui restait à côté d'elle, lisant un livre. Il avait proposé de s'installer sur un fauteuil mais elle avait tout de même accepté qu'il s'assoie dans le lit aussi. « De toute façon, avait dit Jane pour la rassurer, ce n'est pas comme si on dormait ensemble puisque je ne dors pas. » Elle pu ainsi récupérer le sommeil perdu, même si Jane devait la réveiller plusieurs fois pour lui éviter d'entrer dans son cauchemar. Cette cinquième nuit, Jane du la réveiller pour la troisième fois à quatre heures.

- Tout va bien ? la questionna-t-il comme à chaque fois.

- Oui, je crois que ça va aller.

- Lisbon ?

- Quoi ?

- Vous devriez peut-être raconter votre cauchemar. Il est possible que ça vous aide à ne plus le faire, expliqua Jane.

- Non, ça va aller.

- Si vous le dites…

Il cru qu'elle allait se rendormir mais elle se leva et partit dans sa salle de bain. Jane attendit dix bonnes minutes puis inquiet, il alla frapper à la porte.

- Lisbon ? Lisbon, tout va bien ?

Sans qu'il s'y attende, la porte s'ouvrit et Lisbon apparut en pleurs. Il ne réfléchit pas longtemps et la prit dans ses bras.

- Racontez-moi.

Il n'en fallu pas plus à la jeune femme pour parler de ses cauchemars.

- Mon père… Il est ivre et…

Jane comprit alors ce qui avait déclenché tout ça. Un peu moins d'un mois plus tôt, l'affaire qu'ils avaient traitée accusait un père d'avoir tué son fils à force de l'avoir maltraité. Le père avait été reconnu coupable et condamné à plusieurs années de prison.

- Il ne vous fera pas de mal, Lisbon, ne vous inquiétez pas, tenta de la rassurer Jane.

- Mais ce n'est pas à moi qu'il s'en prend ! s'exclama alors Lisbon en se dégageant de son étreinte. Il ne me voit même pas ! Il… Mon frère essaie… Je ne peux pas le protéger, je ne peux pas bouger dans ce putain de cauchemar !

Après qu'elle eut crié, le silence retomba. Il dura quelques minutes pendant lesquelles Jane réfléchissait. Il ne savait plus vraiment comment réagir. Ce n'était donc pas d'être protégée qu'elle avait besoin mais de protéger. Finalement, il lui conseilla de retourner dormir.

- Non, je vais aller au bureau.

- Mais…

- Jane, tout ce que vous faites pour moi, c'est… je…

- Une autre fois, la coupa Jane. Je vais aller dormir maintenant comme ça je pourrai être à l'heure ce matin. Ne vous en faites pas, on trouvera une solution pour que vous retrouviez le sommeil, Lisbon. Et n'oubliez pas : deux cafés, pas un de plus.

Il sortit de la chambre sans un mot de plus. A chaque fois qu'elle faisait une tentative pour le remercier, il s'enfuyait. Elle savait que Jane n'aimait pas les remerciements mais tout de même, elle était sa patronne et il faudrait bien qu'il l'écoute ce qu'elle avait à lui dire un jour ou l'autre.