Découvrons ensemble le monde merveilleux de FF-net... évidemment, quand on ne parle pas un mot d'anglais, ce n'est pas vraiment de la tarte. Je prie par conséquent mes bien-aimés lecteurs (éventuels... potentiels ?...) d'accepter mes plus humbles excuses dans le cas où ils verraient s'afficher sous leurs yeux ébahis un texte écrit en cyrillique, une police apocalyptique, voire une troupe de lapins bleus partis à la conquête de l'espace. Il ne s'agirait que d'une erreur technique totalement indépendante de la volonté de l'auteuse, mais qu'il serait sage de signaler par une review...
Bonne lecture, cela dit.
Hermione courait à perdre haleine dans le couloir du septième étage. Elle dépassa en coup de vent une ouverture qui donnait sur un escalier en colimaçon et, jurant à mi-voix, freina brutalement et revint sur ses pas, un peu intriguée. Harry avait pourtant bien cité une gargouille... mais selon toute vraisemblance, la gargouille en question avait pris la poudre d'escampette. Sans doute pour participer au combat qui faisait rage au rez-de-chaussée ; après tout, c'était une gargouille sérieuse.
Etrangement, du haut du septième étage, on ne percevait aucun bruit. Hermione frissonna dans le silence qui l'abritait du danger - du moins pour un court moment. En fait, ce qui l'inquiétait, c'était l'idée que si quelque chose se passait, elle ne le saurait pas. Se sentant soudain un peu perdue, elle hésita un instant devant l'escalier, puis sa détermination revint en même temps qu'une vive douleur dans le creux de sa gorge. Elle y porta machinalement la main, se demandant vaguement si le fait que ses propres compétences magiques n'étaient pas venues à bout de la blessure était le signe qu'elle était impossible à guérir, puis gravit quatre à quatre l'escalier.
Bingo. Le bureau directorial était ouvert.
Hermione n'y avait jamais pénétré. En fait, elle était plutôt surprise. Elle ne s'était pas attendu à tant de chaleur, à cette impression de profond réconfort qui émanait des étagères chargées d'objets étranges, des nombreux cadres montrant des décors agréables, immobiles, intemporels... et vides de leurs occupants. A vrai dire, Hermione était persuadée que Rogue aurait davantage imposé sa personnalité à la pièce, mais... non. On aurait presque pu s'attendre à voir Dumbledore apparaître entre deux tables, tout sourire. (On peut toujours rêver.)
Secouant la tête, Hermione se mit au travail avec empressement. Non qu'elle eût peur de perdre un temps précieux pour Harry, Ron et Ginny - au stade où ils en étaient, la question ne se posait même plus, ils étaient probablement déjà morts -, mais elle n'était sûre de rien. Un mangemort pouvait très bien décider de venir jeter un coup d'oeil dans les étages du château, auquel cas tout serait définitivement perdu.
Avec minutie, elle inspecta chaque étagère, chaque tiroir. Heureusement pour elle, Rogue n'avait pas jugé indispensable de sceller son bureau. Avec la conscience absolue que ce qu'elle faisait était sans doute parfaitement inutile, Hermione poursuivait ses recherches, sans même se préoccuper du bruit de cavalcade qui résonnait dans le couloir du septième étage. Lorsqu'enfin elle daigna y prêter attention, ce fut à cause du hurlement de joie qu'elle avait poussé mais qu'elle n'était même pas parvenue à entendre car couvert par le son de la course.
Hermione aurait pu être terrifiée en voyant débarquer Bellatrix Lestrange dans le bureau, mais avec un sourire moqueur, elle se contenta de faire tourner le petit sablier qu'elle tenait victorieusement entre ses doigts. Bellatrix poussa un feulement de rage, vite perdu dans le flou du voyage temporel.
Prise dans un brouillard presque enivrant, Hermione tournait comme une torpille. Au sec !
Au bout de quelques heures de voyage cependant, elle dut admettre qu'elle était partie un peu vite. De temps à autre, elle s'arrêtait un instant, histoire de vérifier l'époque à laquelle elle se trouvait. 1980. 1973. 1967. 1953...
Entre deux escales, elle réfléchissait à ce qui allait lui arriver, lorsqu'elle s'arrêterait pour de bon. L'étonnement indescriptible qu'elle avait ressenti en mettant la main sur le Retourneur de Temps - après tout, le stock du ministère avait été entièrement détruit, et si Dumbledore n'en avait pas miraculeusement conservé un dans son bureau, alors tout aurait été perdu - faisait place à une certaine désillusion. Elle se jetait en effet dans le noir complet. D'abord, il y avait ce fichu sablier qui ne lui permettait de reculer qu'heure par heure, donc avec une lenteur proprement insupportable. Ensuite, en admettant qu'elle parvienne à reculer suffisamment dans le temps pour atterrir juste avant la naissance de Tom Jedusor, comment allait-elle s'y prendre pour mettre son plan à exécution ? Il lui faudrait trouver la mère, qui se prénommait, selon Harry, Mérope. La convaincre de se laisser aider. Puis l'aider. Financièrement, psychologiquement. Ce qui ne serait pas une mince affaire, dans un cas comme dans l'autre : Hermione n'avait pas d'argent, et objectivement, elle ignorait si elle serait capable de surmonter la haine que lui inspirait la mère de Lord Voldemort pour avoir mis au monde un enfant pareil.
Enfin, il lui fallait dès à présent se faire l'idée que les chances de revoir un jour Harry, Ron et Ginny étaient quasiment inexistantes, même si elle parvenait à modifier suffisamment le passé - leur passé, son présent - pour les sauver, ce qui serait déjà assez difficile.
Blinder son coeur aussi, du reste.
Hermione fit encore une escale. Elle se hissa sur la pointe des pieds pour jeter un oeil au calendrier posé sur le plus au rayon de la bibliothèque. 12 septembre 1943.
- Jeune fille ? tonna une voix.
Ah tiens, le bureau du directeur n'était pas vide.
Hermione sursauta si haut qu'elle lâcha le sablier.
Qui décrivit une longue, longue courbe...
... avant de tomber à terre...
... et de se fracasser sur le sol.
Ben voyons.
- Jeune fille ! reprit la voix, pleine de reproches.
Hermione fit volte-face, s'attendant à se confronter au directeur de l'époque.
Ah non, c'était le professeur Dumbledore, version plus jeune. Curieux. N'était-il pas alors professeur de métamorphoses ?
- Professeur Dumbledore ? demanda-t-elle d'une voix timide.
Elle s'en voulut un peu de ne pas avoir reconnu la voix de celui-ci.
- C'est bien moi, mais vous ne m'apprenez rien, dit-il avec une douceur empreinte d'humour (tu parles !). En revanche, j'aimerais beaucoup connaître votre identité.
Hermione devina qu'il parlait avec cette voix calme depuis qu'il l'avait vue se matérialiser dans le bureau. C'était elle qui, dans sa terreur, avait cru l'entendre gronder.
Après une seconde d'hébétude, durant laquelle elle prit conscience de ce qui lui arrivait - coincée de manière irrémédiable dans une époque qui n'était ni la sienne, ni celle dans laquelle elle avait désiré se rendre, elle sentit une grosse boule de larmes monter dans sa gorge, qu'elle tenta vainement de refouler.
Les visages de Harry, Ron, Ginny apparurent. [Séquence nostalgie]
La scène de la bataille qu'elle avait fuie. Les corps de Lupin, de Tonks, chutant lentement par la fenêtre du premier étage, jusqu'à la pelouse du parc. Le rire de Voldemort, lorsqu'il avait tué Mrs Weasley. Son rire encore plus aigu lorsqu'il avait négligemment brisé l'épée de Gryffondor avec laquelle Neville avait tenté vainement de décapiter le serpent. Enfin le diadème se balançant au coup du mage, tout simplement inaccessible. Deux horcruxes encore en service qui rendaient évidente l'issue du combat.
L'air stupéfait de Bellatrix lorsque celle-ci avait jailli dans le bureau directorial.
Ce même bureau directorial, où un professeur Dumbledore plus jeune et encore vivant attendait patiemment, la tête inclinée sur le côté, que la jeune fille brune aux cheveux ébouriffés, le visage tout égratigné et la gorge noire de sang coagulé qui venait d'apparaître sans s'être fait annoncer daigne lui expliquer d'où elle venait.
Manifestement, elle était dans un état de profond choc. Il l'invita à s'assoir.
Hermione le remercia d'un signe de tête reconnaissant, et entreprit de lui faire le récit des dernières heures de pure horreur qu'elle avait vécues.
Lorsqu'elle en arriva au sablier brisé, une expression de profonde compassion se montra sur le visage du vieil homme - pas si vieux que ça, en fait. Mais quand même assez.
- Vous vous doutez...
- ... qu'il est impossible de faire marche arrière... ou avant ? poursuivit Hermione d'une voix tremblante.
- Exact.
- Les sabliers sont intemporels, n'est-ce pas ?
- Oui. Disséminés à travers les époques. Si l'un est brisé dans l'une, alors il disparaît définitivement. Seuls ceux qui pratiquent la divination peuvent nous dire où et quand ils se trouvent, et en l'occurrence, tous sauf un ont disparu... ou plutôt disparaîtront…
- ... l'année de ma cinquième année. Et le dernier vient de rendre l'âme sous mes yeux, compléta Hermione.
Elle leva les yeux vers Dumbledore.
- Qu'est-ce que je vais faire, maintenant ? murmura-t-elle, franchement désespérée.
Il y a avait de quoi, du reste.
Dumbledore, à sa grande surprise, sourit.
- Je vais commencer par vous introduire auprès du professeur Dippet. Vous venez de Beauxbatons, et désirez accomplir votre septième année à Poudlard. Je ne me trompe pas ? demanda-t-il avec malice.
Bien que profondément étonnée, Hermione lui rendit son sourire, timidement.
- Je venais justement l'attendre, il ne devrait pas tarder.
- Et au sujet de Jedusor ?
Les mots avaient jailli de la bouche d'Hermione sans qu'elle pût les retenir.
- Je crains... qu'il me soit impossible de faire quoi que ce soit, éluda Dumbledore avec circonspection. Il faudra laisser les choses aller...
- Mais c'est impensable ! se révolta Hermione, les yeux brillants.
Elle ne pourrait pas voir le futur mage noir évoluer vers les ténèbres sans agir... c'était hors de question, absolument pas envisageable !
- Nous ne pouvons rien faire, répondit fermement Dumbledore. Le raisonner ? Vous savez comme moi qu'une pareille tentative serait vouée à l'échec. L'empêcher d'accomplir sa destinée ? Je ne vois pas comment. Le tuer... mais il est bien trop puissant pour cela. Moi-même, je suis persuadé que j'en serais incapable.
De dépit, Hermione se prit la tête entre les mains.
- Courage, Miss Granger. Après tout, nous verrons bien.
Hermione fut scandalisée par son ton presque optimiste - il avait du culot ! - , mais s'efforça de n'en rien laisser paraître ; c'était inutile, après tout.
A cet instant, la porte du bureau s'ouvrit, et un vieil homme petit et courbé entra. Hermione devina qu'il s'agissait du professeur Dippet.
Dumbledore résuma rapidement l'histoire factice qu'il avait imaginée pour expliquer la présence d'Hermione à ses côtés. Dippet hocha la tête, tout à fait compréhensif.
- Eh bien, Miss... Granger, il ne me reste qu'à vous souhaiter la bienvenue et à vous donner une maison.
- Euh... b... je veux dire, merci.
Une maison ? Ben alors ?
A l'aide d'un sortilège d'attraction, il s'empara du Choixpeau magique et le posa sur la tête de Hermione, laquelle n'osa pas dire qu'elle était une Gryffondor convaincue et fière de l'être.
Le Choixpeau murmura :
- Tu te souviens de notre première rencontre ? J'avais envisagé de t'envoyer à Serdaigle...
De nouveau surprise, Hermione acquiesça. Sans doute le Choixpeau, tout comme les sabliers, pouvait-il également se vanter d'être intemporel. Le temps était décidément une chose bien étrange.
- ... et je t'ai finalement placée à Gryffondor. Cependant, il me semble que cette fois-ci, compte tenu de la raison de ta venue...
Hermione se raidit.
- ... il ne serait pas absurde que je t'envoie à Serpentard. Qu'en penses-tu ?
- Non ! songea Hermione, férocement.
Serpentard ? Non mais et puis quoi encore ?
- Ah, soupira le Choixpeau, cette rivalité éternelle... mais à Serpentard, il te serait possible... d'agir.
Gné ?
- D'agir comment ? pensa Hermione, sincèrement déconcertée.
- Tout n'est peut-être pas perdu, fit le Choixpeau, dans un murmure presque imperceptible.
L'étonnement d'Hermione grandit encore.
- Fais-moi confiance...
Hermione soupira. Après tout, au point où elle en était...
- J'accepte, pensa-t-elle, sans grande conviction.
- Sage décision, fit le Choixpeau avec malice. SERPENTARD ! cria-t-il soudain, faisant sursauter Hermione, comme le jour de la rentrée de sa première année.
Les yeux de Dumbledore pétillèrent.
