Sensei,

Je vais devenir folle. C'est bête, mais tellement évident. Les voix des autres me disent que c'est faux, que je ne pourrais pas sombrer dans la folie tant qu'ils seront là. Etrangement, si. Parce que c'est à cause d'eux que je deviens folle. A cause d'eux et de ces souterrains où je me terre depuis si longtemps. Privée de soleil, de vent, de liberté. De vie aussi, parce qu'il y a déjà un moment que je ne vis plus. Je me contente d'exister et d'attendre. D'attendre quoi d'ailleurs ? L'arrivée de la mort, le retour à la liberté, le retour à la vie ? Moi-même je n'en sais rien.

Parce que dans le fond, peut-être que le plus terrible ne serait pas la mort mais la liberté. La vie n'est qu'à peine envisageable, elle s'efface bien trop vite pour pouvoir être autre chose qu'un petit plaisir occasionnel, elle n'a d'ailleurs jamais été plus que ça.

Pour savoir ce qu'il valait mieux entre la liberté et la mort, il aurait déjà fallut savoir en quoi consistait vraiment la mort. Un moment, une durée, une personne, un lieu ? Quoi qu'il en soit, la mort vaut peut-être mieux. Elle au moins, contrairement à la liberté, ne pourra pas m'être retirée une fois que je l'aurais acquise. La mort a cet avantage d'être une valeur sûre. Des valeurs sûres, c'est justement ce dont j'ai manqué jusque là.

« Quand tu crois que tout est fini, c'est là que ça devient intéressant, car c'est justement à ce moment que tout devient envisageable et que les possibilités se multiplient. »

Vous vous trompiez sensei. Rien ne se multiplie à l'heure actuelle, tout passe simplement. Le temps, la vie et même la mort. Ce n'est pas grave. Tout le monde peut se tromper. Il me semble d'ailleurs que c'est ça qui a provoqué votre mort. Une simple erreur. Enfin simple, non, parce que rien n'est jamais simple avec vous. Il y a les sous-entendus, les codes, les faux-semblants et les arrières pensées. Je n'ai jamais compris la différence entre le premier et le dernier. Ça vous faisait toujours rire, vous trouviez que ne pas comprendre me faisait ressembler à une enfant. Moi je n'ai jamais aimé cette comparaison, mon but ayant toujours été de prouver que je n'étais plus la stupide gamine inutile qu'il fallait protéger. J'ai réussit d'ailleurs. Pas pour mon père ou pour la majorité des ninjas, mais lui il le savait, alors ça me suffisait.

Je sens la fin venir. Pour ne pas tout perdre, j'essaie de me rappeler. Ma mère, dont le visage et le nom ont disparus de ma mémoire depuis longtemps, le village d'où je viens, les premières années de ma vie, mes pouvoirs, mon père, la liberté, la vie. La mort aussi, parce que s'il y a bien quelque chose que j'ai fait ces dernières années, c'est la donner. Mais ça c'est normal, c'était mon travail. Etrangement, après l'avoir côtoyée tant d'années, ce n'est que maintenant que je me rends compte à quel point elle est terrifiante. Je la sens s'insinuer en moi, un peu plus chaque jour. Elle va me finir. Mais avant il y a une dernière chose dont je veux me souvenir. Quelque chose de lointain, qui reste pourtant accroché à moi sans que je puisse y faire quoi que ce soit.

Un nom. Le mien.

Hinata Hyuga-Uzumaki.