Plus que des amis 1/2
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- Goooood…
Ichigo ouvrit les yeux.
- …mornIIING…
Il se tourna sur le dos.
- …ICHIGOOOO !
Et se redressa en position assise.
- Bordel, tu ne pourrais pas me laisser me réveiller au son du réveil pour une fois !
- Désolé, fiston, mais tu me demandes l'impossible ! répliqua Isshin dans son pyjama jaune canari en extirpant sa tête du placard où il avait atterri. Si je t'écoute, tu finiras comme une pauvre loque. Tu sais que les filles préfèrent les gars qui en ont, si tu vois ce que je veux dire…
- La ferme !
Exaspéré, il jeta son oreiller au visage de son vieux et chercha son uniforme.
- Oh, tu es déjà debout, onii chan ! remarqua Yuzu en entrant dans la chambre. Bon ben, je n'ai plus qu'à réveiller Karin chan et Orihime chan, déclara-t-elle en repartant comme si il n'y avait rien de plus naturel que de voir son père servant de tapis.
- Fils, c'est l'occasion de te cacher dans un coin le temps qu'elle sorte de la salle de bain le corps dégoulinant d'eau et de jouer le rôle de l'homme qui…
- TA GUEULE !
- OMPF !
Cette fois, il appuya fortement l'oreiller sur la tête de son géniteur qui agitait ses bras pour se délivrer.
- T'es vraiment un obsédé, putain !
- Je vois que vous vous amusez bien encore une fois, pouffa de rire une petite voix familière.
Ichigo releva la tête.
- Inoue…
En pyjama gris et blanc, elle se tenait debout dans l'encadrement de la porte. Se sentant soudain bien bête, il shoota son père qui roula sous le lit et vint faire face à son amie.
- Ohayo, Kurosaki kun ~ !
- Bonjour, désolé que tu aies dû assister à ça… encore, soupira-t-il en se grattant la tête.
- Oh, ce n'est rien ! assura-t-elle sans perdre son sourire. Um, Karin chan occupe la salle de bain du bas alors je me demandais si je pouvais prendre celle de l'étage ou si tu en avais besoin ?
- Ah, non. J'irai après toi.
- Tu en es sûr ?
- Ouais vas-y, je te dis, appuya le roux en agitant la main comme si ça n'avait pas d'importance.
- D'accord, se décida la belle. Ah, et bonjour à vous aussi, Kurosaki san ~
Celui-ci bondit de sous le sommier pour foncer comme un missile sur la jeune fille.
- Bonjûûûûr ma douce Orihime ch… argh !
On entendit nettement des os craquer quand le coude d'Ichigo entra en connexion avec son visage. Si la princesse n'avait pas été habituée, elle se serait inquiétée.
- Bon ben à tout à l'heure !
Elle fila dans le couloir.
- Tu ne la toucheras jamais, t'imprimes vraiment pas vieux fou !
- Je ne me souviens pas t'avoir élevé si radin, fils.
Ledit fils préféra ne pas répondre et descendre voir sa sœur dans la cuisine.
Voilà six mois qu'Orihime vivait avec eux. Tout avait commencé quand elle avait reçu une lettre de sa tante lui disant qu'elle ne pouvait plus lui envoyer de l'argent tous les mois. La guérisseuse s'était alors retrouvée dans une situation délicate puisque ce n'était pas avec son travail à temps partiel qu'elle pourrait payer son loyer et les factures sans oublier la nourriture. Elle opta alors pour dormir à l'hôtel même si ça lui fendait le cœur d'abandonner tous les souvenirs qu'elle s'était fait dans son appartement.
Il était hors de question qu'elle s'impose chez Tatsuki chan ou n'importe lequel de ses amis. C'était sans compter Ichigo qui l'avait croisée avec ses deux valises dans la rue menant à l'hôtel en question. Dès qu'elle avait commencé à lui expliquer sa situation -puisqu'il avait évidemment cherché à piger ce qui se tramait- il ne l'avait pas laissée finir, avait empoigné ses valises et les avait posées à la clinique en ignorant ses protestations et ses joues rouges.
C'était déjà difficile d'échapper à Ichigo mais encore plus à Isshin qui approuva totalement son aîné et ouvrit grand sa porte à sa « quatrième fille » après Rukia. Ce qu'Ichigo et Orihime ignoraient cependant, c'est que le père Kurosaki s'était arrangé avec le propriétaire pour payer le loyer de la sœur de Sora (qui pensait ses affaires au garde-meubles) afin de lui permettre d'y retourner dès que sa situation financière s'arrangerait.
Lorsque tout le monde fut passé dans la salle de bain, ils s'installèrent tous à table pour le petit-déjeuner.
- Où est-ce qu'on va partir en vacances cet été, papa ? se renseigna Yuzu en remuant le contenu de son bol.
- Oh, vous partez en vacances ? se joint à la conversation Orihime qui étalait consciencieusement de la mayonnaise sur son petit pain brioché.
Ses goûts étranges avaient vite été rangés dans la case « routine » pour les membres de la famille.
- Comment ça « vous » ? ne saisit pas le chef de famille en clignant des yeux, la cuillère levée. Mais tu pars avec nous, voyons !
- Eh ? Mais enfin…
- Ne cherche pas à discuter avec le vieux bouc, Orihime chan, la dissuada Karin de sa voix traînante en avalant ses céréales. Tu es comprise dans le voyage depuis le début.
- B-Bon, très bien, bafouilla-t-elle, les joues roses. Je vous remercie mais je ne sais pas quoi dire…
- Contente-toi de dire « je viens ! », explosa joyeusement le médecin. On partira au chalet après l'anniversaire d'Ichigo ! J'ai déjà loué une salle, dix-huit ans ça se fête ! Il ne reste plus qu'à dresser la liste de vos amis, le choix de la musique, du repas…
Le roux qui jusque-là n'écoutait pas un traitre mot -car à son grand étonnement il avait le regard perdu sur les cheveux d'Inoue qui scintillaient au soleil comme saupoudrés de paillettes- tilta dès qu'il entendit les projets de son père.
- Qu'est-ce que tu racontes, papa ? s'énerva-t-il. Je t'ai déjà dit que je ne voulais pas de fête !
- Que penses-tu de strip-teaseuses ? questionna le paternel en se grattant le menton comme s'il n'avait pas ouvert la bouche.
Orihime s'étouffa dans son chocolat, Yuzu lui tapota le dos.
- Oi, tu m'écoutes au lieu de débiter des conneries !?
- Nan, ça pourrait réveiller ou attiser la jalousie des filles que tu attires sans le savoir. Tu es un bel homme mon fils même si tu ne sembles pas t'en rendre compte comme bien d'autres choses...
Une certaine jeune fille rougit davantage et s'essuya la bouche dans sa serviette. Ichigo, lui, bouillonnait sur place : son père serait bien capable de programmer une fête contre sa volonté. Aujourd'hui c'était le dernier jour des cours avant les vacances d'été et il voulait au moins bien commencer la journée. Il soupira donc pour détendre ses nerfs.
- Viens Inoue, on y va, décida-t-il en se levant de sa chaise.
- Capitulerais-tu, Ichigo ? sourit ce qui lui servait de père en le fixant par-dessus le bord de sa tasse. Ton coeur se retrouverait-il affaiblit pour quelque raison que ce soit ?
- Qu'est-ce que mon coeur a à voir là-dedans ? grogna-t-il. Je veux pas de fête, c'est tout.
- C'est vrai que faire la fiesta ce n'est pas ton truc mais tu sembles faire abstraction des cadeaux que l'on peut recevoir à cette occasion, continua mystérieusement le père Kurosaki.
- Je me fiche des cadeaux, je n'ai rien demandé, trancha Ichigo. Et au passage, tu n'en es vraiment pas un !
- Oooh, c'est méchant ça, fiston ! pleura-t-il tragiquement. Je te rappelle que c'est en partie grâce à moi si tu existes en ce monde. Peut-être souhaites-tu que je te remontre la vidéo de l'accouchement de ta maman ? Ta petite tête orange était déjà si craquante que je...
- Ah non, ça suffit ! rosit le concerné, traumatisé par la vidéo en question. Je refuse que tu en reparles !
- Vous avez une vidéo de Kurosaki kun bébé ? gazouilla Orihime, les yeux pétillants et frappant dans ses mains. J'aimerais beaucoup la regarder, il doit être tellement mignon ~ !
Celui qu'elle aimait se frappa le front, les joues encore plus colorées. C'était précisément le genre d'infos à ne pas laisser échapper devant Orihime qui aimait les choses mignonnes, un peu comme Chad. Sauf qu'il ne voyait rien de mignon dans les images que son père avait conservées de lui.
- Bien sûr que j'accepte de te montrer le film de sa naissance, Orihime chan ! s'extasia Isshin, le regard rêveur. J'en ai des tas comme celui où il fait ses premiers pas, mange tout seul, va au pot comme un grand avec ses petites fesses bien rondes à l'air...
- Papa ! cria l'intéressé sur le point de mourir de honte. Stop, le sujet est clos !
- Pour en revenir à sa naissance, l'ignora le docteur, il n'avait pas hâte de sortir du ventre de sa maman mais il était si adorable ! Lorsque la sage-femme a soulevé la couverture pour que je puisse voir entre ses jambes et constater que c'était bien un garçon -parce que son poussin était si petit qu'on en n'était pas sûrs mais rassure-toi, Orihime chan, je suis certain qu'il a bien grandi depuis pour devenir un aigle royal-, ajouta-t-il avec un clin d'oeil, Ichigo a tout simplement...
- PAPA ! s'égosilla ce dernier, les oreilles chaudes. Arrête, putain ! T'as pas capté qu'on mangeait ! Et puis ça s'est passé il y a dix-huit ans alors lâche-nous un peu !
- I-Il a raison, papa, bégaya Yuzu dont le teint rappelait le soleil couchant. Ce n'est pas un sujet à aborder à table et encore moins devant une amie, le gronda-t-elle du mieux qu'elle le pouvait en jetant un oeil à la beauté auburn.
Orihime avait avalé son jus d'orange de travers, la forçant donc à se tapoter l'estomac, le visage en éruption. Elle regrettait de ne pas avoir fermé sa bouche car parler de Kurosaki kun était déjà gênant en général à cause de ses sentiments pour lui, mais alors évoquer sa chose quand il était bébé passe encore sauf que discuter sur sa taille de maintenant... Elle se fit violence pour ne pas regarder curieusement sous la ceinture de son Shinigami debout juste à côté d'elle en plus.
- Cette fois, on s'arrache Inoue, répéta le jeune homme qui ne voulait pas en entendre davantage sous peine de se liquéfier dans une mare de mortification.
A peine reposa-t-elle son verre qu'il l'attrapa par le bras pour l'entraîner à l'entrée avec lui.
- Vos déjeuners sont sur le comptoir, leur cria Yuzu. Et je t'ai mis un supplément de wasabi, Orihime chan !
- Arigato, Yuzu chan ! s'exclama-t-elle, hors de vue. A ce soir ~
- Oui, bonne journée à vous deux ! répondit la petite maman avant que la porte ne claque.
- Pff… c'est malin, vieux bouc, expira Karin, le coude sur la table et la paume sur la joue. En glissant sur tes débilités sur la naissance d'Ichi nii, ça fait des semaines qu'il nous répète ne rien vouloir pour son anniversaire et voilà que tu remets ça sur le tapis. Tu cherches quoi au juste ?
Isshin avala sa dernière gorgée de café avant de se lever.
- Ichigo ne veut rien parce que ce qu'il désire, il l'a déjà sans le voir. Je veux juste qu'il le réalise, répondit-il avec un sourire mystérieux avant de se détourner pour aller travailler.
Les jumelles échangèrent un regard perplexe avant de lâcher l'affaire : le cerveau de leur père était un vrai labyrinthe.
(…)
Cette dernière journée au lycée se passa comme d'habitude même si on sentait une grande hâte d'entendre l'ultime sonnerie.
Ichigo pour sa part ne se mêlait pas à l'enthousiasme général, les vacances pour lui ne signifiaient pas grand-chose. C'est pas comme si il était un adepte des grasses matinées ou des sorties entre potes jusqu'à pas d'heure ou même que les Hollows seraient moins nombreux en cette période pour lui permettre d'en profiter.
Aussi sa matinée se résuma à Keigo lui sautant dessus comme à l'accoutumée, le nouvel élève le faisant chier, des cours soporifiques entrecoupés par des Hollows emmerdant le monde et encore le nouvel élève le faisant grave chier. La raison pour laquelle ce type le faisait chier ? Orihime.
Nobura Yamato fut transféré dans leur classe il y a deux mois et depuis son arrivée, ce mec n'avait des vues que sur Inoue ce qui agaçait particulièrement Ichigo. Il connaissait la bande de garçons avec laquelle il traînait, tous des pervers qui parlaient de son amie d'une telle façon qu'il préférait ne pas répéter, et prenaient des photos d'elle à son insu notamment en cours de sport. Ichigo avait bien sûr fracturé la mâchoire de quelques uns d'entre eux, seulement Kagine sensei le vit et le menaça d'exclusion définitive s'il recommençait.
Inoue était de nature naïve et douce, elle se liait d'amitié facilement et n'avait pas de préjugés sur les gens en général. Elle s'entendait bien avec Yamato et ne comprenait pas l'inquiétude de son Shinigami qui voyait cette relation d'un très mauvais œil. Il n'avait vraiment pas confiance en ce sale type.
Partager le même toit avait naturellement eu pour effet de rapprocher Ichigo et Orihime qui se parlaient plus facilement et passaient évidemment plus de temps ensemble en dehors des cours. Par exemple, il lui arrivait de venir la chercher à son travail ou bien ils se rendaient à l'épicerie tous les deux.
- …et c'est ainsi qu'au cours de cette aventure digne d'un film que Dieu en personne m'a mis sur la route de la plus sexy créature que j'ai jamais vue après Orihime chan ! Si belle, gentille et douce…
Ichigo sursauta et s'étouffa presque avec son jus en brique en entendant la conclusion de l'histoire que Keigo venait de raconter à grand renfort de gestes et cris hystériques. Les yeux jusque-là rivés dans la cour, il se leva brusquement, une certaine aura émanant de lui. Chad le fixa à travers sa frange touffue sans expression, Ishida continua à déjeuner très proprement sans lui accorder le moindre regard, Mizuiro cessa momentanément de taper son énième sms et Keigo recula le plus loin possible en agitant le bras si vite qu'il devint flou.
- J-J-Je plaisantais Ichigo mon vieux ! assura-t-il en commençant à transpirer.
Ce n'était un secret pour personne que le roux était devenu encore plus protecteur avec Inoue, surtout que Tatsuki le lui avait demandé. Beaucoup pensaient donc qu'il ne faisait qu'accomplir ce que la karatéka lui avait dit de faire, en revanche d'autres supposaient que son attitude presque possessive avait une raison bien plus profonde…
- Je n'avais pas l'intention de faire quoi que ce soit à Orihime chan ! se répandit encore en excuses Asano tombé à genoux, les mains au-dessus de la tête comme s'il priait. Je l'ai juste mentionnée pour illustrer ma rencontre avec… Ichigo ?!
Avant même qu'il ne puisse ajouter quoi que ce soit d'autre, la porte du toit se referma derrière ce dernier. Nul ne savait si il avait même écouté les jérémiades de Keigo. Uryuu et Sado échangèrent un certain regard avant de poursuivre leur repas de nouveau ponctué par les histoires rocambolesques de l'extraverti de la classe.
A peine arrivé au bas des marches menant au toit, Ichigo parcourut les couloirs pour se rendre dehors. Une sombre colère circulait en lui depuis des semaines. Elle était d'abord de très bas niveau au point qu'il la perçoive à peine, ne comprenant pas bien ce qu'il ressentait. Au fil du temps, il y parvint plus ou moins et il pouvait dire qu'il n'était pas loin d'exploser.
Parvenu au rez-de-chaussée, il poussa la porte donnant accès à l'extérieur et marcha d'un pas résolu vers un endroit précis, la mâchoire serrée à l'image de ses poings dans ses poches. La colère devait être inscrite sur chaque trait de son visage car tous les élèves qu'il croisa s'écartèrent de son chemin en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire.
Pendant ce temps, Orihime mangeait avec appétit le succulent repas préparé par Yuzu avec un supplément de wasabi.
- Dis, Orihime, ce n'est pas… gênant de vivre avec un garçon ? questionna Michiru, les joues roses.
L'interrogée prit le temps de mâcher et avaler sa bouchée avant de répondre avec un énorme sourire.
- Pas du tout ! Kurosaki san est un homme très gentil, respectueux et joyeux ! Il me considère comme sa fille ! Il n'a pas hésité à me prendre sous son toit, il m'a presque forcée en fait.
- Orihime, soupira Tatsuki.
- Um ? Qu'est-ce qu'il y a, Tatsuki chan ? demanda-t-elle en mordant dans son pain.
- Michiru parlait de vivre avec un garçon de notre âge, précisa Mahana qui s'impatientait comme si c'était elle qui avait posé la question. Kurosaki le fils si tu préfères !
La belle s'étouffa avec son pain. Bon sang, ça faisait bien au moins trois fois depuis ce matin qu'elle manqua de s'étouffer à l'évocation d'Ichigo. Sa meilleure amie lui tapota machinalement le dos en roulant les yeux.
- O-Oh ! K-Kurosaki kun vous voulez dire !
- Ouais. Voir tous les jours le mec dont on est amoureuse au lycée, c'est une chose mais vivre avec lui…
- T-Tatsuki chan ! rougit-elle en reposant sa nourriture et se frottant les mains dans un geste nerveux. Il ne se passe rien entre nous et tu le sais.
- Peut-être mais il est comment ? insista Mahana qui refusait de lâcher l'affaire. Il est aussi rustre chez lui qu'ici ? Il te parle différemment ? Tu es déjà entrée dans sa chambre ? Tu l'as déjà vu torse nu ?! Ou même…
- S-Stop Mahana chan ! l'implora la princesse, les joues en feu. Kurosaki kun est Kurosaki kun, c'est tout.
- Heiiiiin ? s'exclama-t-elle, déçue. Tu dois bien avoir des infos croustillantes à partager surtout qu'il est sacrément bien taillé !
- Ku-Kurosaki kun bien taillé ? réitéra-t-elle en s'essuyant la bouche et repensant à un souvenir précis. Eh bien... euh... c-comment dire... c'est vrai qu'il... enfin, il a...
- Pfeuh ! Ce n'est qu'un mâle comme les autres, cracha Chizuru qui revenait des toilettes et reprenait sa place au sein du groupe. Au fait, Hime, Nobura te cherchait, ajouta-t-elle en remontant ses lunettes d'un mouvement agacé. Tu passes trop de temps avec lui si tu veux mon avis.
- C'est plutôt ce type qui ne rate jamais une occasion de lui parler, rectifia Tatsuki. Je peux lui en parler si tu veux, Orihime.
- Non, non, ce n'est pas la peine ! refusa celle-ci avec un sourire. Nobura kun est vraiment très gentil et…
- Inoue.
Une ombre imposante engloutit la lycéenne à la chevelure flamboyante. Elle n'eut pas à se retourner pour le reconnaître, rien que sa voix lui envoya un frisson dans tout le corps et picota ses joues.
- Kurosaki kun, dit-elle enfin en se relevant pour lui faire face. Je peux faire quelque chose pour toi ?
Il avait l'air fâché et c'était sans doute un euphémisme. Elle ignorait en revanche que c'était en partie parce qu'il avait entendu la fin de la conversation notamment sa dernière réplique.
- Viens avec moi un instant, répondit-il, sa main se refermant sur son bras fin.
Dans ces conditions, Orihime n'avait d'autre choix que de le suivre. Ses amies les regardèrent s'éloigner et disparaître à la vue avec des yeux ronds.
- Aargh ! Il l'emmène avec lui dans un coin désert où ils ne seront que tous les deux ! Il va sans doute la… !
- Rah, ferme-la un peu, Chizuru ! s'exaspéra la championne d'arts martiaux en laissant son poing s'abattre sur sa tête rouge. On parle d'Ichigo, là ! Que ce soit un mâle ou non comme tu le dis, il n'est pas comme les autres garçons à ce niveau. Je veux dire, le connaissant, prendre Hime par le bras c'est déjà beaucoup. Il ne va pas lui sauter dessus, ce n'est vraiment pas son genre.
- Que lui veut-il dans ce cas ? lança Ryo derrière son bouquin.
- J'aimerais bien le savoir…, répliqua-t-elle, perplexe.
La colère d'Ichigo ne lui avait évidemment pas échappée, il était son ami d'enfance après tout. Toutefois, Tatsuki ne put ignorer le sentiment d'appréhension grignotant son estomac. Les yeux dans la direction que ses deux amis avaient prise, elle espérait qu'Ichigo saurait contrôler son humeur ou à défaut, qu'Orihime parviendrait à la gérer.
- Je t'écoute, Kurosaki kun.
Ils se trouvaient dans un coin de la cour, près de l'un des angles du bâtiment principal. Planté devant elle, il la regardait sans ciller depuis une bonne minute, divers sentiments traversant ses iris ambre foncé. Mal à l'aise, la soeur de Sora attendit qu'il se décide enfin à ouvrir la bouche, ses petites mains jouant nerveusement avec l'ourlet de sa jupe.
- Vous parliez de Nobura tout à l'heure, amorça-t-il.
- Oui, Chizuru chan trouve que je passe trop de temps avec lui...
- Je ne pensais pas dire ça un jour, mais je crois que Honsho a raison.
- Mais non ! Il est juste gentil et aime bien discuter avec moi, il n'y a rien de mal là-dedans ! lui sourit-elle.
Mauvaise réponse. Ce qu'elle ne soupçonnait pas.
- Tu le trouves gentil ? répéta celui qu'elle aimait, la voix moins calme.
- Uhum ! J'aime bien sa compagnie et on a des goûts en commun, livra la guérisseuse avec entrain. Ça ne me dérange pas de passer du temps avec lui et l'aider à s'intégrer davantage !
- Tu crois sérieusement qu'il souhaite passer du temps avec toi pour s'intégrer davantage ? souffla-t-il.
- Bien sûr puisqu'il a entendu dire que je me fais facilement des amis et que je mets les gens à l'aise. Alors pour quelle autre raison voudrait-il rester avec moi ?
- A mon avis, il s'est simplement renseigné sur tes goûts et fait semblant de les partager avec toi, tenta de lui faire comprendre le lycéen. Cela dans le but de...
- Allons, Kurosaki kun, c'est ridicule, rit-elle. Je sais comment tu es, tu n'accordes pas ta confiance facilement mais tu devrais essayer de cesser de voir le mal partout.
- Et toi de voir le bien partout, Inoue. Yamato n'est pas le saint qu'il veut faire croire, il a un but précis en tête et...
- Et rien du tout, le coupa son amie, un noeud à l'estomac. Honnêtement, ça me peine de te voir réagir ainsi, tu devrais lui laisser sa chance et accepter de reconnaître quelle personne adorable il est vraiment.
Les muscles du cou du fils d'Isshin se tendirent et son regard devint plus dur sans qu'il n'en ait conscience. Elle paraissait vraiment apprécier ce mec.
- Comment tu le vois ? demanda-t-il sèchement.
- Eh ? lâcha-t-elle en clignant des yeux. Comment je… ?
- Comment tu le vois, oui, réitéra le jeune homme dont les nerfs chauffaient sous le soleil cuisant. Le genre de relation que vous entretenez, ce que tu penses de lui.
Une brise soudaine souleva les longs cheveux de la déesse qui les retint sans cesser de fixer son ami, bouche bée.
- Nobura kun est… je le considère comme… enfin, nous…, bafouilla-t-elle, surprise par la tournure étrange de cette conversation.
Ses délicats sourcils se froncèrent.
- Tu es sûr que ça va ? se renseigna-t-elle, la main tendue vers lui. Tu sembles très…
- Réponds-moi, Inoue, insista-t-il en reculant légèrement.
De sa voix et ses yeux marron filtrait un sentiment précis qui contracta le coeur d'Orihime, qui se décida enfin à lui répondre.
- Je...
- Ah te voilà ! intervint une voix qui menaça de faire sauter le self-control d'Ichigo.
- N-Nobura kun ! reconnut Inoue en fouettant l'air avec sa tête. Tu me cherchais ?
- Oui, ton amie ne te l'a pas dit ? répliqua-t-il, à sa hauteur, ses yeux clairs la scannant. Tu faisais quoi ?
- Oh, je parlais avec Kurosaki… kun ?
Les yeux écarquillés, elle faisait maintenant face à l'emplacement vide qu'il occupait. Orihime regarda de tous les côtés mais aucune trace de lui. Elle se mordit la lèvre, très inquiète à son sujet.
J'ai senti qu'il était troublé mais qu'est-ce qui peut le contrarier à ce point ? pensa-t-elle tristement. J'ai l'impression que ce n'est pas uniquement lié à Nobura kun.
Elle soupira en s'entourant de ses bras. Savoir l'homme qu'elle aimait dans cet état n'était vraiment pas facile surtout quand elle avait le sentiment de ne rien pouvoir faire pour l'aider un tant soit peu. Un bras entoura ses épaules.
- Tu viens ? l'invita Nobura. J'aimerais te présenter certains de mes potes.
Le cœur serré à cause de la situation entre elle et Ichigo, la jeune femme le suivit malgré tout en souriant du mieux qu'elle le pouvait.
(…)
L'ultime journée de cours toucha à sa fin. Debout près de la grille, le frère de Yuzu et Karin attendait patiemment qu'Orihime revienne du gymnase où elle tenait absolument à se rendre pour dire quelque chose à Tatsuki. Ils ne s'étaient pas reparlés depuis le déjeuner et il était toujours irrité par leur discussion, mais ça ne l'empêchait pas de faire la route avec elle comme presque tous les soirs. Quelle ne fut pas la (mauvaise) surprise d'Ichigo de la voir ressortir avec Yamato en éclatant de rire à une connerie qu'il venait sans doute de sortir.
Lorsque la lycéenne croisa son regard ambré, elle lui fit un grand geste de la main accompagné d'un immense sourire.
- Kurosaki kuuun, merci de m'avoir attendue ~ ! Je vais aux toilettes, je reviens tout de suite !
Sur quoi, elle courut dans la direction indiquée en laissant Yamato planté au milieu de la cour. Il n'y avait pas de plus belle occasion pour le Shinigami remplaçant qui s'en saisit immédiatement en marchant rapidement vers lui.
- Ah Kurosaki, salut, dit-il simplement en passant une main dans ses cheveux châtains.
Aux yeux du fils Kurosaki, il ressemblait désagréablement à Aizen ce qui ne faisait que renforcer son antipathie à son égard.
- Tu as quelque chose à me dire ?
Posté devant lui, le roux le fusilla du regard, ses sourcils très froncés.
- Reste loin d'Inoue.
L'autre se figea, surpris.
- Pardon ?
- Reste loin d'elle, lui ordonna-t-il, les dents serrées. Je sais à quoi tu joues et tu ferais mieux d'abandonner.
- Je ne joue à aucun jeu, répliqua calmement Yamato qui laissa retomber sa main. Je tiens sincèrement à Orihime chan…
- Orihime chan ? se bloqua Ichigo.
- Tu n'étais pas au courant ? lança le nouveau avec un sourire en coin. Elle était gênée au début mais elle m'a autorisé à l'appeler par son prénom.
- Tu ne la connais que depuis deux mois !
- Et alors ? Tu n'as pas à te sentir menacé par moi, Kurosaki. Je n'ai pas l'intention de la détourner de ses amis, ce qui serait de toute façon impossible vu comment elle tient à vous.
- Je ne me sens pas menacé par toi ! rétorqua le garçon en pétard. Je te considère plus comme une menace envers Inoue ! Jusqu'où tu comptes aller avec elle, hein ?!
- Voilà une question très ouverte, continua à sourire Yamato, la tête penchée.
Le poing de l'autre lycéen trembla fortement.
- Inoue n'a pas besoin de toi, laisse-la tranquille, souffla-t-il, la mâchoire contractée.
- Oh, s'est-elle plainte de moi ?
- Non, mais…
- M'as-tu vu la toucher de manière irrespectueuse ? enchaîna Nobura, toujours aussi calme mais visiblement ravi de contrer les propos l'accusant.
- Non plus… !
- Alors nous sommes d'accord. Ce n'est pas à toi de décider ce qui est bon ou non pour elle, vivre avec elle ne te donne pas plus d'autorité. C'est une grande fille, une femme même.
- Nous ne sommes pas « d'accord » ! craqua l'impulsif en s'avançant d'un pas, la colère inscrite sur chaque trait de son visage. Je me préoccupe de ce qu'il peut arriver à Inoue parce qu'elle est mon amie !
- Cela ne te donne pas le droit de…
- La ferme ! Je sais avec quels gars tu traînes alors ne joue pas les innocents ! Vous ne voyez que le physique d'Inoue sans vous soucier de qui elle est à l'intérieur ! Je suis prêt à parier que tu cherches à endormir sa méfiance pour… pour…
- Pour quoi ? l'encouragea celui pouvant prétendre au titre de son ennemi juré désormais.
Ichigo s'enflammait à vue d'oeil, ayant visiblement du mal à sortir sa prochaine phrase tant elle le dégoûtait.
- Pour mieux l'attirer dans ton lit et te vanter ensuite auprès de tes enfoirés de copains ! cracha-t-il presque.
Yamato cligna des yeux avant que son sourire ne s'élargisse.
- Je ne vais pas nier que son corps est vraiment attirant, confessa-t-il en haussant les épaules, les mains dans les poches de son pantalon. Je regarde Orihime chan avec le regard d'homme qu'elle mérite mais tu devrais faire attention à ce que tu paries, Kurosaki, simple conseil d'ami.
Le concerné grogna fortement, le chopa par le col et se rapprocha à quelques centimètres de son visage.
- Je te préviens, Yamato, siffla le roux. Inoue ne me croit pas quand je la mets en garde contre toi mais ça ne signifie pas que je laisse tomber pour autant. Si jamais j'entends qu'elle a versé ne serait-ce qu'une larme par ta faute, que tu l'as blessée de quelque manière que ce soit ou même que tu lui as manqué de respect...
Il serra sa poigne et Nobura jura voir une lueur dorée au fond de ses iris bruns.
- ...mon poing te cognera si fort que même ton miroir ne te reconnaîtra plus, acheva-t-il à voix basse.
Le menacé ne parut pas vraiment impressionné.
- Sacré ami que tu es, Kurosaki, dit-il en applaudissant. Toutefois ne crois-tu pas que tu devrais la regarder comme un homme toi aussi ? Ne me sors pas de discours sur la beauté intérieure, tu veux, continua-t-il plus sérieusement. On ne se balade pas dans la rue en craquant pour cette beauté invisible mais bel et bien l'apparence extérieure. Ensuite, on décide si on veut chercher plus loin ou bien s'en contenter et en profiter au maximum.
C'en fut trop pour Ichigo. Il leva son autre poing qui aurait sans aucun doute fait sauter au moins trois dents à Nobura si il n'y avait pas eu…
- Me revoilà, Kurosaki kun ! Gomen, j'ai été longue mais j'ai dû attendre que le sol sèche avant d'entrer car la dame de l'entretien nettoyait quand je suis arri…
Elle s'immobilisa devant la scène s'offrant à elle.
- Um, j'ai raté quelque chose ? demanda-t-elle timidement en sentant parfaitement les ondes néfastes émises par l'un d'eux.
- Il n'y a rien, Inoue, jura-t-il en libérant Yamato tout en le mitraillant des yeux. On rentre maintenant ou Yuzu va encore s'inquiéter.
Sans lui laisser le temps de répliquer, il attrapa doucement son poignet et la dirigea vers la sortie. La belle n'était pas idiote, elle était consciente qu'un truc mauvais se passait. Elle se retourna néanmoins pour saluer son ami resté derrière.
- Au revoir, Nobura kun !
- Oui, à bientôt Orihime chan !
En entendant cela, Ichigo serra les dents et marcha deux fois plus vite obligeant Orihime à courir pour se maintenir à sa hauteur.
(…)
La première partie du chemin jusqu'à la clinique se passa dans le plus grand des silences. Ichigo portait toujours ce masque de colère extrême, ses deux mains aux poings très serrés dans ses poches, sans remarquer les regards inquiets que son amie lui jetait.
- T-Tatsuki chan a été sélectionnée pour participer à un tournoi d'arts martiaux qui aura lieu en août à Tokyo, essaya-t-elle courageusement de lancer la conversation.
- …
- J'ai pensé qu'on pourrait faire une sortie tous les trois pour fêter ça, tu en dis quoi ? continua-t-elle sans se laisser démonter par sa non-réaction.
Toujours aucune réponse. Orihime ne saurait dire si Kurosaki kun l'avait même entendue tant il semblait plongé dans ses pensées qui n'avaient visiblement rien de joyeux.
La lycéenne grignota sa lèvre et baissa la tête. Lorsque Ichigo l'avait invitée (forcée) à vivre chez lui, la gêne plus que tout autre chose s'était insinuée en elle. Partager la vie quotidienne de Kurosaki kun et sa famille l'intimidait beaucoup mais elle avait fini par s'y faire au bout de quelques semaines (même si elle ne s'était toujours pas remise du moment où elle était tombée nez à nez avec l'élu de son cœur sortant de la salle de bain en jean, les cheveux dégoulinant d'eau et torse nu au bout du troisième jour d'où son bégaiement lorsque Mahana avait justement dit qu'il était bien taillé).
La guérisseuse avait espéré au fond d'elle que cette « cohabitation » les rapprocherait et que peut-être, peut-être, elle aurait enfin le courage de se déclarer. Si le premier point s'était réalisé, le second n'était pas d'actualité. Orihime avait suivi les conseils de Tatsuki pour attirer l'attention d'Ichigo en portant des vêtements un peu plus courts ou moulants que d'habitude, en attachant plus souvent ses cheveux ou en lui proposant des sorties en ville. Eh ben, rien à faire, il la voyait toujours comme une amie et rien d'autre même s'il lui avait pratiquement ordonné de ne plus se vêtir « avec des jupes aussi courtes que celle du lycée ». Elle n'avait pas compris pourquoi avant de se dire qu'il trouvait sans doute que ce style ne lui allait pas ou qu'il n'aimait tout simplement pas voir ses jambes.
Son sac cognant contre ses genoux au rythme de sa marche, la jeune fille poussa un soupir tandis qu'ils tournaient l'angle d'une ruelle. Elle était éperdument amoureuse d'Ichigo et ça ne changerait jamais. Seulement, elle s'était fait à l'idée que cet amour était à sens unique et qu'elle devait aller de l'avant au lieu de se lamenter sur son sort. C'était évidemment plus facile à dire qu'à faire, pas simple de se détacher d'un amour vieux de presque trois ans.
Pour couronner le tout, depuis quelque temps, même si il tentait de le cacher, Kurosaki kun paraissait lui en vouloir pour une raison qui lui échappait. Orihime avait beau se creuser la tête, elle ne voyait pas bien ce qu'il lui reprochait. Elle ne pourrait jamais lui faire du mal, impossible. Et puis bien s'entendre avec Nobura kun n'était pas un crime. Pourtant, cette légère tension entre eux la peinait énormément.
Arrivés à la clinique, Ichigo esquiva l'habituel coup de pied propulseur de son père et monta direct dans sa chambre. Pour la première fois depuis six mois, il ne s'opposa pas au « câlin de bienvenue » qu'Isshin offrit à Orihime. Tous deux trouvèrent cela très étonnant.
- Tout va bien ? s'informa-t-il, les sourcils levés.
L'adolescente se dégagea doucement de sa prise.
- Uhum, tout va très bien ! affirma-t-elle en frottant le dos de sa tête avec un rire nerveux.
- Ichigo est énervé, dit-il pensivement, les yeux sur le haut des marches où son fils avait disparu.
- C'est… um… vous savez comment il est, ses humeurs sont souvent instables…, improvisa la meilleure amie de Tatsuki, gênée et nerveuse.
- Mais…
- Excusez-moi, Kurosaki san, j'ai beaucoup de devoirs ! se défila-t-elle après s'être brièvement inclinée.
Le paternel croisa les bras, désormais seul.
- C'est les vacances, elle ne s'est donc pas enfuie à cause des devoirs.
Ses yeux se plissèrent sur l'étage du dessus.
- Est-ce qu'il t'arriverait ce que je soupçonne, Ichigo ?
(…)
Allongé sur le dos sur son lit, les bras sous l'oreiller, Ichigo fixait le plafond sans le voir. Son expression ferait fuir n'importe quel étranger qui n'oserait même pas lui demander l'heure s'il le croisait dans la rue. Il se savait couché là depuis des heures à en juger par le ciel de plus en plus sombre. Les nerfs toujours enflammés, il repensait à ce qu'il s'était passé dans la cour avec ce Nobura. Cet enfoiré lui avait pratiquement craché au visage se rapprocher d'Orihime juste pour coucher avec elle ! Et bien sûr, elle n'y voyait que du feu !
Il se tourna sur le côté dans un grognement à cause de son corps endolorit à force de rester dans la même position. Était-ce les propos tenus par ce salaud qui l'irritaient au fond ? Pas vraiment puisqu'il s'y attendait. Alors le fait qu'Inoue soit complètement aveugle à cette situation ? Oui, mais pas seulement. Ichigo savait qu'il y avait quelque chose de plus profond, quelque chose qui avait provoqué sa réaction impulsive après les cours, mais là, tout de suite, il ne parvenait pas à mettre le doigt dessus et c'est ça qui l'emmerdait plus que tout le reste.
Il n'était assurément pas doué pour comprendre ou décrypter les sentiments des autres, sauf qu'il n'était pas meilleur pour comprendre et décrypter les siens.
(…)
Le lendemain, le jeune Shinigami se sentait bien moins contrarié. Le fait que son cinglé de père ne le réveille pas de la manière sauvage habituelle devait y être pour quelque chose mais pas uniquement. Aujourd'hui, Renji et Rukia venaient leur rendre visite et passer la journée avec Inoue, Chad, Ishida et lui-même. Un aquarium avait récemment ouvert ses portes en ville et la petite Kuchiki avait plus qu'insisté pour s'y rendre dès qu'elle en avait entendu parler.
Actuellement, Orihime et Ichigo marchaient vers la boutique d'Urahara qui était le lieu de rendez-vous puisque les deux Shinigamis arriveraient ici-même par le Senkaimon. La princesse aussi était de meilleure humeur à croire que ses soucis de la veille s'étaient envolés. La perspective de revoir Rukia et Renji, puis passer la journée avec ses amis la remplissait tout simplement de joie.
- Patron, l'idiot orange enragé et son amie sont arrivés !
Tel fut l'accueil que leur réserva Jinta qui pratiquait avec sa batte à l'extérieur. « L'idiot orange enragé » en question était sur le point de lui enfoncer dans la gorge quand Urahara se pointa dans un tourbillon vert dans l'encadrement de la porte de sa boutique douteuse.
- Kurosaki san, Inoue san ~ ! Bien le bonjour à vous ~ ! les salua-t-il derrière son éventail cachant la moitié de son visage.
- Bonjour, Urahara san ~ ! répondit la sœur de Sora avec un grand sourire.
- Renji et Rukia sont arrivés ?
- Je vais bien, Kurosaki san, merci de demander. Qu'en est-il de ton côté ? ironisa le vendeur.
Une veine apparut sur le front du fils Kurosaki.
- J'ai pas le temps pour tes conneries, réponds plutôt à ma question !
- Que tu es offensant… Pour te répondre, ils sont…
- Nous sommes là, intervint une voix facile à identifier. Et tout le monde se fiche de ton état de santé, Urahara, quand on sait l'effet que tu produis sur celle des autres.
- Kuchiki saaan ~ ! explosa Orihime en courant la prendre dans ses bras tandis que le blond affichait une mine dépitée. Renji kun ~ !
- Yo Inoue san ! dit-il en levant la main, dans un gigai également. Salut, Ichigo.
- 'lut, lâcha-t-il, une main dans sa poche.
- C'est quoi cette tête que tu nous sors !? On s'est pas vus depuis deux mois et tu n'as rien d'autre à nous servir que ta tronche éternellement renfrognée !
- Putain, Rukia ! cria-t-il de douleur en frottant sa joue démolie par son petit poing. Et toi alors, c'est comme ça que tu me salues !
- Tu n'espérais tout de même pas que je te saute dans les bras ! lui hurla-t-elle au visage, les mains sur les hanches.
- Ah non, plutôt crever !
- BAKA !
- AÏE !
Orihime et Renji bavardaient tranquillement tant la scène se déroulant près d'eux s'apparentait à la routine.
- Bon, expira la brunette, pouvons-nous y aller maintenant ?
- Oh, Ishida kun et Sado kun ne sont pas encore là…
- Nous voilà, Inoue san, s'éleva une voix derrière eux.
Le Quincy et leur grand ami se tenaient côte à côte.
- Bonjour Inoue san, Kuchiki san et Abarai kun. Kurosaki, ajouta-t-il d'un ton sec en remontant ses lunettes flashant le soleil.
- Ishida, marmonna-t-il, la voix également dépourvue du moindre milligramme de chaleur en regardant ailleurs.
Chad opta pour un salut de la main universel tout aussi efficace.
- Allez, on y vaaaaa ~ ! hurla la beauté auburn.
- Oui, c'est parti ! la suivit la Shinigami de la 13ème division, des étoiles dans les yeux. J'ai tellement attendu ce moment !
- C'est que de la poiscaille, pas de quoi s'extasier, râla Ichigo qui se frottait la nuque.
- On t'a pas forcé à venir alors si t'es là pour dégrader l'ambiance, rentre chez toi ! le cassa à son tour la Kuchiki.
Il serra les dents mais ne dit rien. Bras dessus bras dessous, les deux femmes ouvrirent ainsi la marche, les quatre garçons marchant d'un pas plus tranquille dans leur sillage.
Une agréable brise souffla.
- Je me suis rarement senti aussi invisible.
- Vous en faites pas, Patron. Quand ils auront besoin d'objets dangereux à la provenance douteuse ou de conseils pour se sortir d'une situation merdique, ils rappliqueront vers vous comme des lapins !
En cet instant précis, Urahara Kisuke ne savait pas s'il devait se sentir flatté ou insulté.
(…)
- Oooh ! Ce poisson à la forme étrange est vraiment énorme !
Si on avait pu voir des étoiles dans les yeux de Rukia avant leur arrivée, à présent c'est une galaxie entière qui était visible dans ses prunelles émerveillées.
- Ce n'est pas un poisson, Rukia, mais un requin-marteau, corrigea le frère des jumelles.
- Pour être plus précis, Kuchiki san, les requins appartiennent à la famille des…
- Ah non, tu ne vas pas recommencer, Ishida ! s'exaspéra le roux. Tu nous les as déjà brisés en nous servant un exposé complet et détaillé sur les tortues, les raies, les étoiles de mer et même sur les crevettes alors qu'il n'y en a même pas ici nom d'un kami ! On n'est pas venus là pour recevoir un cours théorique sur les différentes espèces sous-marines !
- Que ce soit les musées, les aquariums, les expositions ou tout autre lieu culturel, c'est fait pour approfondir ses connaissances ou les faire partager, et non regarder bêtement sans connaître ! se défendit le fils de Ryuken.
- C'est pourtant ce qu'on fait ! rétorqua l'adolescent au sang chaud. Alors si t'es pas content, tu peux toujours te tirer ou aller habiter avec l'un de ces poissons, tu ne manqueras à personne de toute façon.
Uryuu le fixa durement, prêt de toute évidence à sortir une phrase cinglante. Sauf que…
- Regarde, Kuchiki san ! Des poissons clown ! pointa Orihime qui, comme son amie, n'avait pas capté la dispute. Ils sont orange et blanc, un peu comme les cheveux de Kurosaki kun !
Ce dernier rosit légèrement en croisant le regard pétillant qu'elle lui lança accompagné d'un sourire lumineux. Il se reprit bien vite cependant.
- Ne me compare pas à un poisson, Inoue.
- C'est clair que ce serait une insulte sévère envers la bestiole, commenta le tatoué qui avait plus imaginé comment déguster les différentes espèces aquatiques qu'admiré leur beauté. Toi, t'as rien d'un clown, tu ressembles plus à un démon avec ta tronche.
- Va te faire foutre, Renji !
Complètement fascinée, Rukia colla ses mains et son nez contre la vitre, ses grands yeux indigo suivant le déplacement des poissons.
- Pourquoi les appelle-t-on « poissons clown » ? se renseigna-t-elle.
Le Quincy rajusta ses verres tout en s'approchant d'elle, prêt à répondre avec un grand luxe de détails.
- Ta gueule, Ishida, le stoppa le fils Kurosaki avant même qu'il ne puisse formuler un mot, pas d'humeur à entendre une conférence sur les poissons.
Il reçut un éclat meurtrier de la part de son ami fier qu'il fit mine de ne pas voir.
- Sont-ils supposés faire rire ou quelque chose ? continua la sœur de Byakuya, dans son monde.
- Oh s'il te plaît, Rukia. On vient de voir un requin-marteau mais c'est pas pour autant que je vais m'en servir pour planter un clou, soupira Ichigo. T'as toujours pas compris que tous les noms ne sont pas à prendre au premier degré ?
Son amie se décolla de la vitre avec un sourire nerveux, une veine sur la tempe. Sentant l'explosion imminente, Chad choisit d'intervenir.
- Et si on poursuivait la visite ?
Ils suivirent le conseil.
L'aquarium possédait un restaurant où ils s'arrêtèrent pour déjeuner avant d'achever la visite dans une ambiance mitigée. Ils sortirent de l'établissement aux alentours de 15h30 et décidèrent d'aller faire un tour en ville, considérant qu'il était bien trop tôt pour rentrer.
Alors qu'ils déambulaient dans l'une des avenues les plus fréquentées de Karakura, Ichigo reconnut parmi la foule la tête châtain de Yamato avec sa bande de potes du lycée. Le Shinigami remplaçant se tendit aussitôt et jeta un œil alarmé à Inoue qui parlait avec animation à Rukia, et n'avait de toute évidence rien remarqué.
Le roux analysa la situation pour le moins irritante. Nobura n'était pas ami avec Ishida et Chad, et ne connaissait pas Renji et Rukia qu'il n'avait jamais vus. Par conséquent, il n'y avait pas grand risque qu'il les arrête pour taper la discute sauf qu'Inoue se trouvait parmi eux, ce qui changeait complètement la donne : elle ne manquerait jamais de saluer un ami croisé sur son chemin. Lorsqu'ils passèrent devant une certaine boutique, Ichigo eut une idée qu'il exécuta sans réfléchir.
- …et donc en mélangeant le miel avec le beurre de cacahuète, disait Orihime, tu obtiens… ah ?
Surprise, elle regarda son épaule qui venait d'être saisie par…
- Kurosaki kun ?
- Entrons là-dedans, Inoue. Je vais t'offrir une glace.
Elle n'eut pas le temps d'enregistrer sa phrase qu'elle se retrouva devant le magasin en question. Ichigo ne savait pas pourquoi Yamato provoquait une telle réaction chez lui ni pourquoi le fait qu'il s'entende si bien avec Inoue mettait ses nerfs dans un tel état inflammable. Ce dont il était sûr en tout cas, c'est qu'il devait mettre un terme à cette « relation » et le plus vite serait le mieux, peu lui importaient les conséquences.
- C'est quoi le problème de Kurosaki cette fois ? soupira Uryuu, le majeur au centre de sa monture.
- Pff, n'essaie pas de mettre un mot derrière chaque action d'Ichigo parce que t'as pas fini mon vieux, lâcha Renji qui parlait d'expérience.
Sado posa une lourde main sur l'épaule d'Ishida (dont les genoux fléchirent) comme pour lui dire silencieusement de suivre le conseil, un léger sourire aux lèvres. Après tout, Ichigo était une énigme à lui tout seul. Sauf pour les personnes sachant le décrypter.
- Bon, on ne va pas rester ici à rôtir, suivons-les, proposa Rukia.
Finalement, ils prirent chacun au moins une glace. La princesse avait longuement hésité puisque c'est celui qu'elle aimait qui lui proposa de prendre ce qu'elle voulait. Le fait qu'il paye pour elle la gênait énormément.
Même s'il ne s'agit que d'une glace.
Mais c'était bien connu : difficile -voire impossible- d'échapper à Ichigo surtout quand il avait une idée bien ancrée en tête. Aussi la belle cessa de s'interroger et opta pour un cornet à trois boules : orange et blanc (comme le poisson clown) et marron pour ses beaux yeux chauds devant lesquels elle fondait. Évidemment, elle se garda bien de dire cela à qui que ce soit. Elle se contenta juste de le remercier timidement en arrangeant une longue mèche auburn derrière son oreille. Elle eut droit à un sourire en retour, il était petit mais venant de l'élu de son cœur, c'était amplement suffisant.
Le maître de Zabimaru, pour sa part, choisit cinq cornets comportant quatre boules chacun. Comment il comptait les manger avant qu'elles ne fondent sous la chaleur cuisante ou même comment il avait l'intention de les porter, seul Kami sama le savait. Quant à la provenance de l'argent pour les payer, ça demeurait un mystère tout aussi entier que personne ne voulait résoudre.
Lorsque vint le tour d'Ishida qui ne prit que des boules blanches, ça souleva une petite dispute avec Ichigo qui ne comprenait décidément pas comment on pouvait aimer une couleur à ce point. A vrai dire, ça le dépassait complètement.
Le crépuscule finit par tomber, avec lui le moment de la séparation. Renji et Rukia retournèrent à la boutique d'Urahara pour regagner la Soul Society en promettant de revenir bientôt. Sado et Ishida rentrèrent également dans leurs appartements respectifs, laissant donc Ichigo et Orihime seuls. Cette dernière le pressait un peu pour rentrer et il ne saisissait pas pour quelle raison.
Peut-être qu'elle a simplement hâte de s'asseoir, ce qu'on n'a pas fait depuis des heures.
La porte de la maison poussée, une délicieuse odeur leur frappa aussitôt les narines.
- Onii chan, Orihime chan, vous voilà enfin !
- Désolée pour le retard, Yuzu chan ! s'excusa la guérisseuse en enlevant ses chaussures à la hâte. Tu as besoin d'aide ?
- Oui, pour mettre les couverts s'il vous plaît, répondit-elle, vêtue d'un tablier, une louche à la main.
- Um ! Je vais juste me changer et me laver les mains, je reviens tout de suite.
Elle disparut dans un tourbillon auburn. Le jeune homme, lui, était toujours debout au même endroit, les sourcils froncés, se demandant ce qui se passait.
- Yo Ichi nii, lança Karin en passant près de lui. Ça a été ta journée entre potes ?
- Euh ouais, la routine… Qu'est-ce qui se passe au juste ?
- Ne me dis pas que t'as oublié ? expira sa sœur, une main sur la taille.
- Oublié quoi ? commença-t-il à s'irriter.
- On…
- Karin chan ! Va voir ce que fait papa, c'est bientôt l'heure ! cria Yuzu d'une voix stressée.
Sa jumelle soupira de plus belle.
- A toute, Ichi nii, dit-elle simplement en lui claquant l'épaule.
Celui-ci choisit de lâcher l'affaire et de monter dans sa chambre. Près de l'escalier, il croisa Inoue qui manqua de le faire tomber tant elle revenait à toute vitesse.
- Gomen, Kurosaki kun ! s'excusa-t-elle par-dessus son épaule.
Sentant qu'il se passait décidément un truc mais ne se sentant pas le moins du monde concerné, le lycéen alla enfiler des vêtements décontractés dans sa chambre puis se laver les mains. Il était en train de les sécher quand la petite maman aux fourneaux l'appela.
- Quôaaa ? C'est ça que tu as choisi de porter ? s'exclama-t-elle en le voyant surgir du bas des marches dans un vieux t-shirt et un pantalon de survêtement usé. Tu aurais pu faire un effort, onii chan !
- Hein ? Mais de quoi tu…
- Peu importe, le coupa-t-elle en lui fourrant une pile d'assiettes et de verres dans les mains. Tiens, va aider Orihime chan qui s'occupe des couverts et des plats.
De plus en plus largué et énervé, son grand frère fit malgré tout ce qu'on lui dit.
- Pourquoi y a un sixième couvert ? ne capta-t-il pas, perplexe.
On frappa à la porte à cet instant.
- Oh non ! se lamenta Yuzu.
- Je vais ouvrir ! se chargea Orihime qui fila dans le couloir.
- Me voilà, me voilà ! s'incrusta Isshin accompagné de sa seconde fille.
Ichigo s'apprêtait placer le verre et l'assiette qu'il tenait quand les voix en provenance de l'entrée se rapprochèrent.
- J'espère que je ne suis pas en retard ?
- Non, non, pas du tout, gazouilla Inoue. C'est même l'inverse !
Elle apparut dans le salon avec un jeune homme dans sa tranche d'âge.
- Alors, je te présente Kurosaki san qui a la gentillesse de m'héberger, ses filles Karin chan et Yuzu chan et tu connais déjà Kurosaki kun ~
L'assiette qu'Ichigo tenait se fracassa au sol dès qu'il croisa le regard du garçon, interrompant ainsi les salutations de sa famille à l'égard de l'arrivant. Tous les regards se tournèrent vers lui mais il ne s'en souciait pas, toujours occupé à mitrailler ce type.
- Oh, bien sûr que je connais Kurosaki, confirma justement ce dernier avec un léger sourire.
- Qu'est-ce que tu fous chez moi, Yamato ? demanda-t-il sur un ton qui causa un frisson à Orihime.
- Bonsoir à toi aussi, ironisa son camarade de classe. Quoi de neuf depuis hier ?
Les yeux plissés, son aura plus sombre, le Shinigami suppléant préféra ne pas répondre. Chacun put sentir la tension dans la pièce et la princesse se mordit la lèvre dans l'inquiétude. Quand celui dont elle était amoureuse basculait dans cet état, il fallait soit le calmer, soit fuir. Ne voulant pas d'histoires, elle espérait qu'il se calmerait de lui-même.
- Quoi qu'il en soit, c'est vraiment sympa de m'inviter à dîner avec ta famille qui m'a l'air tout à fait charmante et…
L'air sembla se fissurer.
- …et Orihime chan qui est si délicate, acheva Nobura sans perdre son sourire qui s'élargit à la fin de sa phrase.
La complimentée rougit profusément.
- A-Arigato, Nobura kun, souffla-t-elle en se tortillant sur place.
- Oh, mais je ne fais que dire la vérité, répliqua-t-il en lui frottant le sommet de la tête, penché vers elle, ce qui accentua la couleur de ses joues.
Le self-control d'Ichigo explosa en même temps que le verre dans sa main.
- Ne la touche pas !
- K-Kurosaki kun ? Non, arrête !
Ce dernier ignora ses supplications et fonça sur sa cible, le regard enflammé, les muscles de son cou tendus. Cependant, avant même qu'il ne puisse se soulager en cadrant son poing dans le visage de cet enfoiré, il vit son amie se placer devant Yamato tel un bouclier humain tandis que son père le retenait par les épaules afin de stopper sa marche meurtrière.
- Ça suffit, Ichigo, murmura Isshin.
- Qu'est-ce que tu fais, Inoue ? Il ne mérite pas ta protection ! Et toi papa, dégage de là ! essaya-t-il de le repousser.
- Yuzu ma chérie, peux-tu balayer l'assiette et le verre brisés pendant que je vais soigner ton frère ?
Celle-ci jusque-là en état de choc face à la tournure inattendue de la situation hocha la tête, les mains croisées devant elle.
- Oui, papa.
Elle tourna les talons en quête du balai et de la pelle. Avec une force incroyable, son frère fut tiré par son père hors du salon en direction du bureau. En jetant un coup d'œil derrière lui, il vit Inoue bégayer ses plus plates excuses à Nobura en son nom, la mine contrite. Le jeune homme lui tapota l'épaule avant de la prendre dans ses bras. Cette vision ne fit qu'attiser la colère du Shinigami remplaçant.
- Qu'est-ce qui t'a pris, papa ! s'écria-t-il en claquant fortement la porte du bureau derrière lui. Pourquoi tu laisses ce sale type dîner avec nous ?!
Son paternel se détourna de l'armoire avec un petit plateau contenant des pinces de différentes tailles, un petit bol en aluminium pour recueillir les morceaux de verre, du coton, un bandage et du désinfectant.
- Assieds-toi sur le lit, fils. Ta main est dans un sale état.
- Réponds à ma question ! exigea ledit fils sans bouger.
Le brun soupira tout en préparant son matériel.
- Je me doutais que tu avais oublié : Orihime chan nous a demandé la semaine dernière si elle pouvait l'inviter à dîner avec nous.
- Quoi ?! L'idée vient d'elle ?! Qu'est-ce qui lui est passé par la tête cette fois, bordel !
- Ce n'est qu'un ami, tu sais. Orihime chan voulait juste l'aider à mieux s'intégrer, ajouta-t-il en faisant signe vers le lit, une pince en main.
- Tch !
Avec mauvaise humeur, le lycéen s'installa sur le lit médicalisé et consentit enfin à laisser sa main écarlate et douloureuse se faire soigner.
- Ce n'est l'affaire que d'une soirée, Ichigo. Fais un effort…, commença-t-il doucement.
- Pourquoi je devrais faire ça ? Pourquoi je devrais supporter sa putain de présence chez moi quand je n'y arrive déjà pas au lycée !?
- C'est à ce point ? s'étonna son géniteur qui acheva de retirer les bouts de verre.
- Ne me dis pas que tu n'as pas perçu sa provocation ?! C'était subtil mais je l'ai saisie !
- Vraiment ? sourit le père Kurosaki qui désinfectait à présent. La subtilité ne fait pourtant pas partie de tes qualités alors il est assez surprenant que tu parviennes à la déceler chez les autres.
- Arrête, je suis sérieux ! hurla presque Ichigo sans savoir si c'était à cause de ce qu'il venait d'entendre ou de la douleur extrême de sa main en piteux état.
- Fiston, je t'ai surtout vu sur le point de lui casser la mâchoire devant ton amie et tes sœurs. Je suis médecin et nous avons une clinique mais tu as fait fort quand même, lâcha son papa après quelques secondes de silence.
- Ça n'a rien à voir ! répliqua aussitôt le frère de Karin & Yuzu, sa colère toujours aussi vive. On serait dans la rue que je lui aurais cassé la gueule de la même manière !
- Pourquoi ?
Un autre silence plus long régna pendant lequel le chef de famille entreprit de bander solidement sa main. Son aîné avait le visage baissé, son autre poing serré sur le matelas.
- Ce gars, il prétend considérer Inoue comme une amie sauf qu'il la voit comme plus que ça, répondit l'adolescent en se mordant la lèvre inférieure, des franges orange couvrant ses yeux.
Isshin termina le bandage puis laissa reposer sa main sur le support métallique prévu à cet effet. D'abord muet, il observa son fils d'un regard triste. C'était toujours difficile pour lui de voir Ichigo dans un état pareil, c'est-à-dire perdu, en colère, déstabilisé par ce qu'il ressentait.
- J'ai comme l'impression que Nobura san n'est pas le seul à poser un regard différent sur Orihime chan, déclara-t-il à voix basse.
Avant même que le roux ne puisse réagir ou même donner un sens à ses paroles, quelqu'un frappa à la porte puis une tête flamboyante apparut timidement.
- K-Kurosaki kun ?
Il ne remua pas un muscle, refusant de poser ses iris sur elle.
- Je pourrai te soigner complètement une fois que Nobura kun sera parti, enchaîna la sœur de Sora en passant tout son corps dans la pièce.
L'homme qu'elle aimait se tendit en entendant cela.
- Ne te donne pas cette peine, Inoue.
Son ton remua quelque chose de désagréable en cette dernière. A l'évidence, il était toujours énervé et après elle maintenant. Elle se mordit la lèvre et s'entoura elle-même dans l'espoir de calmer son cœur douloureux.
- Bon, tu es sûr que ça va aller ? s'assura-t-elle quand même.
Ichigo se remit debout en grognant, ce qu'elle prit pour une réponse positive.
- Très bien, et concernant ce qu'il s'est passé tout à l'heure…
Sa phrase resta en suspens et elle cligna des yeux avec étonnement : il venait de passer près d'elle pour quitter le bureau comme si elle n'avait pas ouvert la bouche. La guérisseuse fixa Isshin en quête d'une explication, l'éclairer sur la situation tendue et incompréhensible, et dans laquelle son Shinigami lui en voulait pas mal pour une raison qui lui échappait. Seulement, le Docteur Kurosaki se contenta de hausser les épaules avec un sourire désolé, son expression disant clairement « laisse-lui un peu de temps, ça lui passera ». Avec un lourd soupir, la princesse se détourna pour aller manger également.
Quelque chose lui disait que les choses étaient loin de toucher à leur fin et hélas pour elle, Isshin pensait de même au plus profond de lui à cause du tempérament bien connu de son cher fils.
(…)
Le dîner fut loin d'être qualifié de « moment convivial » mais au moins, Ichigo parvint à garder le contrôle de ses poings même si des ondes vraiment mauvaises s'échappaient de lui. En bout de table, face à son père, il avait choisi de s'assoir à côté d'Inoue. Seulement Yamato siégeait de l'autre côté de la belle et ne cessait de tout faire pour monopoliser son attention. Isshin tentait d'égayer l'ambiance avec des blagues stupides, Yuzu participait tant bien que mal alors que Karin était totalement indifférente en apparence. A l'intérieur, elle s'inquiétait pour son Ichi nii sous pression. Elle ne serait pas surprise qu'il explose à nouveau. Il faut croire que le destin voulut lui donner raison.
- C'était délicieux, Yuzu chan ! la complimenta Yamato en se caressant le ventre. Orihime chan ne m'a pas menti en disant que tu cuisinais comme un chef.
La jumelle de Karin s'empourpra et se tortilla sur sa chaise.
- O-Oh, merci beaucoup mais ce n'est rien, tu sais, dit-elle modestement en agitant la main. Je vais débarrasser ! ajouta-t-elle, voulant fuir la tension trop énorme dont son onii chan était la cause principale.
- Je vais t'…
- Non, Nobura kun ! Tu es notre invité ~
Orihime et Karin l'aidèrent à tout ramener dans la cuisine. Le père de famille, lui, préféra rester à sa place et intervenir au cas où. Yamato avait essayé à plusieurs reprises d'engager la conversation avec son fils qui lui avait mis un vent à chaque fois. Ichigo était néanmoins très attentif à tous les gestes que Nobura avait envers Inoue et lorsque l'un d'eux lui paraissait déplacé, son reiatsu augmentait très sensiblement. Le pire fut sans doute le moment où Yamato entoura les épaules d'une Orihime au visage rose suite à cette proximité, pour lui chuchoter quelque chose à l'oreille. Quoi qu'il ait pu lui dire, elle avait rougi davantage. Le reiatsu du roux avait atteint un tel pic que le châtain demanda si on ne pouvait pas aérer tant l'air était « devenu hyper lourd tout d'un coup ».
Le dessert (un succulent gâteau à la crème fouettée préparé par Yuzu) fut apporté. Ils le savourèrent tous et Ichigo lui-même parvint à se détendre un peu en laissant le doux parfum du chocolat provoquer une agréable explosion de saveurs dans sa bouche. Quand il reposa sa cuillère, il félicita sa sœur pour sa réussite pâtissière et se désaltéra en avalant un grand verre d'eau.
- Kurosaki san, puis-je vous demander quelque chose ?
Évidemment, sa petite sérénité ne pouvait pas durer éternellement mais le fils Kurosaki préféra ignorer son ennemi dont la voix mielleuse le répugnait.
- Je voudrais savoir si vous m'autoriseriez à sortir avec Orihime chan ?
Isshin s'étrangla avec sa bouchée, Karin lâcha sa cuillère dans la soucoupe avec des yeux écarquillés, Yuzu portait la même expression mais sa main était figée à trois centimètres de la bouteille qu'elle s'apprêtait à attraper, et Ichigo recracha son eau sur toute la longueur de la table au point que son père lui-même reçut des gouttes. Orihime, pour sa part, n'était pas différente de d'habitude car à fond dans son gâteau, elle n'était pas certaine d'avoir bien entendu.
- Eeh ? dit-elle élégamment, de la crème fouettée sur la joue.
Avant même qu'elle ne puisse se familiariser avec la nouvelle ambiance mortelle ou avoir le loisir de prononcer un mot de plus, Karin et elle tournèrent la tête d'un même mouvement à l'une des extrémités de la table. Là même où un reiatsu déjà instable arriva à son point de rupture.
- Ichi nii !
O
O
Et voilà, une nouvelle histoire postée ! J'espère que vous avez aimé cette première partie ^^ Laissez-moi vos avis, ça me fera plaisir et ça m'aidera peut-être à m'habituer et me motiver à poster sur ce site mdr Merci pour la lecture ~ !
