En rouge et noir
Comme tous les matins, Spock, longue robe noire et sac à dos sur l'épaule, emprunte le grand escalier menant à sa salle de classe située au quatrième et dernier étage de l'établissement scolaire où il poursuit de brillantes études.
Comme d'habitude, sa silhouette longiligne ne passe pas inaperçue et certains camarades de classe montent cet escalier en courant et le bousculent tout en lui adressant des regards méprisants.
Une fois encore, Spock tente de les ignorer, redresse la tête et agit comme le lui a demandé son père. Il contrôle ses émotions, reste digne et continue d'avancer...
Cependant, ses sens restent en alerte. Et ce jour-là, alors qu'il atteint le second palier et qu'il continue de gravir les marches, il constate que ses pairs ne cherchent plus à le bousculer...au contraire, ils l'évitent.
Cela n'est pas plus mal, pense-il alors. Peut-être se sont-ils lassés des coups de coudes et des insultes à mon égard...
Arrivé au troisième palier, il s'arrête, perplexe. Un papier traîne sur le sol. Il s'en approche et y lit cet avertissement écrit en vieux vulcain: Attention, Peinture fraîche.
Il se retourne et constate qu'il est à présent seul à monter les marches. Il relève la tête ...pour ne voir que le contenu d'un pot de peinture rouge lui arriver dessus. Il lève ses mains pour protéger son visage ...mais trop tard!
oOOOo
Les insultes fusent depuis le dernier étage.
...Humain...Terrien...Bâtard...sang rouge...
La peinture rouge continue de couler de ses cheveux. Elle descend à présent le long de sa nuque et entre par le col béant de sa robe qui n'est plus tout à fait noire. Spock n'est plus debout mais recroquevillé, ses mains couvrant ses yeux.
"Cela ne te rappelle pas ta naissance, Spock?" S'écrit soudain un jeune vulcain. "Toi qui es né couvert du sang rouge de ton humaine de mère...Fils d'une putain et d'un traître..."
"...Bâtard...Terrien..." Répètent inlassablement d'autres élèves.
Sa respiration s'accélère. Elle devient laborieuse. La peinture rouge chemine lentement à travers sa trachée. C'est douloureux mais la brûlure qu'il ressent au niveau de ses yeux est plus intense encore.
Ses oreilles bourdonnent...Elles aussi sont pleines de peinture. Au moins, maintenant, il n'entend plus les insultes...
Ses paupières sont closes, comme collées. Même ses larmes ne peuvent s'échapper de ses yeux, de même qu'elles ne peuvent rincer sa cornée. La peinture est en train de sécher après s'être infiltrée partout.
Un marteau frappe l'intérieur de son crâne. L'air chaud de Vulcain ne parvient plus à ses poumons...Son rythme cardiaque s'accélère...à moins que cela ne soit l'inverse, il ralentit. Spock ne sait plus. Il ne contrôle plus rien et perd progressivement conscience.
Quelqu'un l'approche. Cette personne le soulève du sol avec aisance et l'emporte avec lui...
oOOOo
"Où est-il?" Demande Sarek à son épouse, arrivée la première à l'hôpital de Shikahr.
Amanda ne répond pas immédiatement et sarek en comprend la raison. Elle tente de contrôler sa colère qui provoque la constriction de sa gorge. Elle retient également ses larmes. Celles-ci risquent de déborder de ses yeux rougis tel un tsunami. Elle sert un mouchoir couvert de peinture rouge entre ses mains tremblantes...Sa femme a vraisemblablement vu son fils et essuyé son visage.
Sarek se trouvait en réunion à l'Ambassade lorsque le Directeur de l'école l'a contacté. Ce dernier lui a relaté les faits tels qu'ils s'étaient produits sans montrer la moindre émotion et donc sans montrer la moindre inquiétude pour son élève. Si bien que Sarek fut convaincu que son fils s'était évanoui sous le coup de l'intense humiliation ressentie. En Vulcain, Sarek contrôla sa colère à l'encontre des agresseurs de Spock et sa déception à l'égard de la réaction émotionnelle de son fils. Cependant, lorsque le Directeur en vint à lui parler du transport de Spock à l'hôpital de Shikahr, il ne put dissimuler sa surprise et sa soudaine inquiétude.
"Il semblerait que la peinture ait obstrué les voies respiratoires de Spock en séchant...Ceci est à l'origine de son malaise et de sa perte de connaissance..."
Sarek avait immédiatement mis fin à la conversation et prit congé de ses collègues afin de rejoindre son fils.
"Ils ...Ils l'ont emmené au bloc opératoire il y a une heure..." Répond enfin Amanda. Cette dernière tremble de tout son corps malgré l'écrasante chaleur qui règne dans la salle d'attente des urgences.
"Respirait-il?" Demande Sarek, avide d'informations.
"Un médecin a dû l'intuber sur place...et le mettre sous sédatif, sa douleur étant trop grande..." Parvient-elle à dire avant de s'effondrer en larmes dans les bras de son mari, lequel étreint sa femme sans un regard pour les autres Vulcains présents en salle d'attente.
oOOOo
à suivre...
