Bonjour! Cette fanfiction raconte ma vision du passé de Nevra, très longtemps avant l'arrivée de la gardienne dans la garde d'Eel. Il est donc possible que les personnages ne ressemblent parfois pas tout à fait à ce qu'ils sont dans le jeu. Cette histoire essaie de relater ce qu'ils ont vécu pour devenir tels qu'on les connaît. Ayant été écrite peu après la sortie de l'épisode 4 du jeu, il est possible que certains éléments soient contredits par la suite des aventures de notre gardienne.

Cette fanfiction est partiellement inspirée de la chanson Mary de Cécile Corbel.

L'univers, le personnage de Nevra, et d'autres qui arriveront par la suite, appartiennent à ChiNoMiko et à Beemov.

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Chapitre 1 : La fille du corsaire

Comme tous les dix ans en cette période de l'année, on pouvait lire sur les visages de tous les villageois un mélange d'inquiétude et de tristesse. Indifférente aux regards qui se tournaient vers elle à son passage, une jeune fille aux cheveux blonds noués en queue de cheval et aux yeux océan marchait d'un pas assuré dans les ruelles pavées. Des murmures se faisaient entendre autour d'elle.

« Il paraît que c'est elle qui va être…

- Une si jolie petite, et si jeune avec ça ! C'est bien triste…

- Jusqu'à quand va-t-on les laisser nous prendre nos gamines ? Ca ne peut plus continuer !

- Tu sais bien qu'on ne peut rien faire… »

Sans écouter ce qui se disait, la jeune fille poussa la porte de la librairie et entra. Elle fut alors accueillie par le vieux vendeur qu'elle connaissait bien. Lorsqu'il lui adressa la parole, son regard ne parvenait à dissimuler une pointe de tristesse et de pitié.

« Mary, que me vaut le plaisir de ta visite ? Tu cherches quelque chose en particulier ?

- Pas spécialement M. Flanders. Je suis simplement venue voir vos derniers arrivages. J'aimerais acheter un livre. »

Peut-être pour la dernière fois, pensa-t-elle. Et en voyant l'expression affichée par le libraire, elle comprit qu'il avait pensé les mêmes mots.

« Ne bouge pas, dit-il alors, je vais te chercher ça. Je pense qu'il y en a un en particulier qui devrait t'intéresser… »

La jeune fille le vit alors disparaître dans la réserve, et laissa son regard vagabonder dans les rayons presque vides des étagères. Les livres étaient très rares dans la région, et c'était une véritable souffrance pour une jeune fille comme elle, avide de connaissances. La ville de Plymouth était située sur une île, et les humains qui y vivaient n'étaient pas autorisés à la quitter. Il n'était possible de se procurer des livres que par l'importation, et les commerçants devaient donc s'adresser aux maîtres de cette île pour se les procurer. Il leur fallait alors patienter pendant de longues périodes avant de pouvoir renouveler leurs stocks, et ils ne pouvaient le faire en grandes quantités.

« Regarde ce que je viens de recevoir ce matin », dit alors le vendeur en revenant, un carton dans les bras.

Il le posa sur le comptoir et Mary s'approcha. Il contenait une dizaine de livres. C'était peu quand on savait que cela faisait six mois que le libraire avait reçu de nouveaux livres pour la dernière fois. De plus, tous ces ouvrages n'étaient pas forcément dans les goûts de la jeune fille. La plupart traitaient de sujets comme le jardinage, ou encore la cuisine. Cependant, l'un d'entre eux attira son attention, et elle l'attrapa, intriguée.

« Ah ah, j'étais sûr que celui-là te plairait », dit le libraire qui commençait à la connaître.

Il avait pour titre « Eldarya, un monde sans frontières » et offrait un panorama de la plupart des choses qu'on pouvait trouver dans ce monde. Il décrivait les différentes espèces qui y vivaient, mais aussi les modes de vie des peuples qui se répartissaient sur toute la surface de ces vastes terres.

« Un livre sur le monde extérieur ! s'exclama Mary. C'est très rare, comment avez-vous fait pour vous le procurer ? Normalement, jamais ils ne nous laissent posséder de tels ouvrages…

- J'ai eu de la chance, répondit le vieillard. Mais je pense qu'il te revient de droit. Il n'y a personne ici qui soit plus fasciné que toi par l'extérieur. Allez, je te l'offre.

- Ne dites pas de sottises, je vais payer.

- Mary, répondit-il avec un air plus sérieux que jamais, je te dis que je te l'offre. Prend-le s'il-te-plaît. »

Sa voix était légèrement tremblante, et ses yeux semblaient tristes.
Alors elle comprit. C'était un cadeau d'adieu qu'il lui faisait. Les yeux de la jeune fille s'humidifièrent, mais aucune larme ne coula. Elle sera le livre contre sa poitrine.

« Merci M. Flanders, merci pour tout. »

Sans un mot de plus, elle se retourna pour cacher son visage et sortit de la boutique. La clochette accrochée à la porte retentit lorsque cette dernière se referma.

« Au revoir Mary… » dit le vieil homme dans un murmure.

Une fois sortie de la librairie, la jeune fille laissa ses pas la porter vers la falaise où elle avait l'habitude de se rendre. Elle aimait s'y asseoir pour voir les vagues se briser contre les rochers. Lorsqu'elle était ici, elle pouvait rêver à des terres lointaines et imaginer ce qu'elle n'aurait jamais la chance de connaître.
Car les humains qui vivaient sur l'île d'Hellsbay étaient captifs depuis des générations. Les vampires qui régnaient sur la région les surveillaient comme du bétail et tuaient quiconque aurait tenté de quitter l'île. Les anciens racontaient que cela n'avait pas toujours été ainsi, et qu'il y avait un jour eu une époque où les humains vivaient libres.

Mais tout avait commencé plusieurs siècles auparavant. Leurs ancêtres vivaient alors dans une contrée nommée Angleterre. Cependant, pour fuir les persécutions religieuses qu'ils y subissaient et dans l'espoir de construire un nouveau pays libre, ils avaient pris les mers en direction de l'Amérique, décidés à tout recommencer à zéro dans ce nouveau monde. Mais le destin n'avait pas été de cet avis. Alors qu'ils naviguaient, une violente tempête avait éclaté, et les avait déviés de leur itinéraire. Lorsqu'une accalmie était arrivée, ils s'étaient retrouvés plongés dans un brouillard épais et étrange qui avait fait perdre connaissance à tout l'équipage. Lorsqu'ils avaient repris leurs esprits, leur navire s'était échoué sur un rivage inconnu. Ils avaient alors exploré l'île ainsi découverte et, en constatant qu'elle était hospitalière et visiblement inoccupée, ils avaient décidé de s'y installer. Les colons avaient alors commencé à y construire des habitations, et leur ancien capitaine était naturellement devenu leur chef.

Cependant, l'île n'était pas aussi inhabitée qu'ils avaient bien voulu le croire, et, quelques mois après leur installation, ils avaient eu la surprise de découvrir que des créatures aussi dangereuses qu'improbables la peuplaient. En effet, le brouillard dans lequel ils s'étaient perdus durant leur traversée en mer n'était pas un simple phénomène météorologique. Il était doté de facultés surnaturelles, qui permettaient notamment de traverser les frontières séparant les mondes. Sans le savoir, ils avaient alors étés transportés dans le monde d'Eldarya, contrée peuplée d'espèces qu'ils auraient autrefois qualifiées d'imaginaires.
Et sur l'île qu'ils avaient abordée vivait un clan de vampires assoiffés de sang humain. S'était alors engagée une guerre entre les deux espèces. Les buveurs de sang étaient moins d'une dizaine mais, malgré leur très nette infériorité numérique face aux humains, ils n'avaient eu aucun mal à les vaincre, et les combats n'avaient duré que quelques jours. Après la mort de leur ancien capitaine, William London, les colons avaient déclaré forfait et avaient accepté de signer un pacte de paix avec les créatures qui les avaient vaincus.

Ce traité autorisait les humains à vivre sur cette île sous couvert de plusieurs conditions. Ils devaient désormais accepter le règne des vampires sur leur peuple et n'étaient plus autorisés à quitter l'île sous peine d'être tués sans procès.
Mais la dernière condition imposée par les vainqueurs était sans doute la pire de toutes, et faisait régner une aura de terreur sur le village des humains. Les vampires avaient en effet imposé aux colons qu'ils leur offrent une vie humaine en sacrifice une fois tous les dix ans. C'étaient les vampires eux-mêmes qui choisissaient qui devrait leur être livré, et la malheureuse victime était alors condamnée à devenir leur captive, et à servir de repas quotidien à ces créatures jusqu'à sa mort, qui survenait généralement moins de dix ans plus tard, du fait des mauvais traitements qui lui étaient infligés, et des quantités de sang importantes qui étaient prélevées sur elle.
Cette pratique avait toujours lieu aujourd'hui, des siècles après le débarquement de leurs ancêtres, et la cérémonie au cours de laquelle le conseil des vampires devait décider qui serait l'humain sacrifié cette année aurait lieu cette nuit.

Cependant, la cérémonie ne serait cette fois-ci qu'une formalité, car tous savaient déjà qui serait choisi ce soir.
William London avait été le premier et le dernier chef du clan des humains de Plymouth. C'était l'unique personne qui avait réussi à les liguer contre les vampires, et seule sa mort était parvenue à faire cesser la guerre. Il était un symbole pour les villageois.
Par esprit de vengeance et par simple goût de faire souffrir, le conseil des vampires avait alors progressivement désigné chacun de ses descendants comme sacrifice.
Cependant, une règle stipulait qu'un humain ne pouvait être choisi s'il avait moins de quatorze ans, et c'était la seule chose qui avait jusqu'ici sauvé par deux fois la vie de celle qui était désormais la dernière descendante de William London.

Mais aujourd'hui, elle avait vingt-et-un ans, et elle ne pourrait plus y échapper. Ce soir, Mary London serait choisie comme sacrifice par le conseil des vampires.