Chapitre 1 : Un Espoir

« Haku ! » M'écriais-je

« Partons ! » Lança-t-il en m'attrapant par la main et en me tirant pour que je me mette à courir.

« Mais ou sont passé mes parents ? » Lui demandais-je alors que nous descendions les escaliers de la grande rue

« Ils sont déjà partis » Me répondit-il alors que nous passions devant les restaurant encore vides

« Mais il n'y a plus d'eau ! » M'exclamais-je devant les marches de pierre qui faisait face à l'océan avant mon arrivée dans le monde des esprits

« Je n'ai pas le droit d'aller plus loin. Reprend exactement le même chemin qu'à ton arrivée, mais quoiqu'il arrive ne te retourne pas, d'accord, pas avant d'être sortis du tunnel. » M'intima-t-il

« Je te le promets, mais qu'est-ce que tu vas devenir ? » Lui demandais-je inquiète

« Je dirais à Yubaba qu'elle ne compte plus sur moi pour devenir son apprentis. Ce sera facile puisque je me souviens de mon vrai nom et après je retrouverais mon vrai monde moi aussi. » Me rassura-t-il.

« Mais tu penses qu'on va se revoir ? » lui demandais-je inquiète de cette brusque séparation.

« Je te le promets. »Me répondit-il

«Tu me le promets ? » Demandais-je toujours septique

« Oui, allons part et ne regarde pas en arrière. » me répondit-il en me pressant d'aller rejoindre mes parents.

Il ne me lâcha la main qu'au dernier instant et je m'éloignais de lui sans jeter un regard en arrière.

La lumière empourpra ma vision derrière mes paupières close alors que je m'éveillais. Je battis plusieurs fois des cils et des larmes se mirent à perler le long de mes yeux en amandes pour ensuite se perdre dans mes cheveux.

Je ne l'avais pas oublié. J'avais respecté ma promesse, je ne m'étais pas retournée avant d'être sortis du tunnel. Et pendant un instant, je ne pus m'empêcher de penser qu'il n'avait pas vraiment tenu sa promesse. Il ne m'avait pas mentit sur le fait que je le reverrais. Je l'avais revue de nombreuse fois tout comme Lin, le vieux Kamaji, Bou, Yubaba, Zeniba et tous les autres, mais en rêve… Seulement en rêve…

Les six années qui me séparaient de cet instant, de mon dernier souvenir de lui, n'avait plus aucune frontière temporelle lorsque je rêvais. Mais à chaque fois que je me réveillais, une douleur horrible m'envahissait et annihilait tout espoir en moi de pouvoir le revoir un jour. Plus que tout, la peur de l'oublier, où celle de ne plus jamais le revoir en rêve me broyait le cœur à chaque fois.

Je me redressais lentement aveuglé par mes larmes encore plongé dans les brumes de mon rêve. Je me mis à tâtonner fébrilement autour de moi, le ventre noué. Je trouvais enfin ma table de chevet et parvins à allumer ma lampe. Le cadeau de Zeniba luisait accroché à mon poigné. Je le plaquais contre mon cœur. Il était l'objet le plus précieux que je possédais, la seule chose qui me rattachait, avec mes souvenirs, au monde des esprits. Je mis un moment à me calmer et à arrêter de pleurer, chaque fois c'était un peu plus difficile à faire. Je ne pouvais me raccrocher à ce mince espoir, cette promesse qu'il m'avait faite. Mais ce ne pouvait plus durer plus longtemps comme cela. Je devais absolument trouver le moyen de retourner dans le monde des esprits pour le retrouver. Je me l'étais promis.

Je m'attachais les cheveux en queue de cheval machinalement et me mit enfin debout.

Ma journée de cour se déroula avec une lenteur effroyable même si mon esprit était occupé par la résolution que j'avais prise le matin même à mon réveil.

Je fréquentais le lycée Mudashi depuis deux ans déjà, mais, à l'instar du collège, je n'avais pas réussis à me faire de véritables amis parmi les filles et les garçons du lycée. L'expérience que j'avais acquise dans le monde des esprits m'avais éloignés de mes semblables d'une telle façon que je doutais un jour pouvoir à nouveau me faire comprendre d'eux. Lorsque je côtoyais mes camarades, leurs conversations m'ennuyaient, de même que leurs présences, parfois.

Quand à ma relation avec mes parents, elle fut bouleversée lors de mon retour du monde des esprits. Une fois qu'ils eurent mesuré l'étendu de mon changement et après avoir, bien évidement, essayés d'établir un lien tangible avec mon changement d'attitude, comme le déménagement et tous les changements qu'il entrainait à l'époque, par exemple. Parce qu'ils ne se souvenaient de rien du monde des esprits. Parce que j'avais ouvert les yeux sur le monde.

De même que les filles de ma classe qui cessaient peu à peu de faire des efforts pour m'intégrer à leurs conversations à force de me voir décrocher en plein milieu d'une discussion car mes pensées me remmenaient souvent au monde des esprits et à mes amis que j'espérais revoir de tout mon cœur. De même que les garçons qui avaient cessés depuis un moment déjà, de se moquer de moi pour attirer mon attention, ou de m'approcher à cause de se voir repousser inlassablement.

Mes parents aussi finiraient sûrement par m'abandonner eux aussi.

Les cours une fois enfin terminés, je filais en ville. Je dénichais presque par hasard une petite bibliothèque miteuse sur le chemin de la bibliothèque publique. Une intuition m'y fit y pénétrer. L'accueil était vide. Je déambulais entre les rayons munis de petit écriteau qui indiquait les thèmes par étagère. Arrivée devant une vieille étagère au panonceau illisible qui faisait face à une table de travail je me stoppais avant de poursuivre ma visite. Un vieil ouvrage au titre illisible était posé sur la table avait retenu mon attention. Lorsque je mis la main au dessus le livre se mit à luire en osmose avec le cadeau de Zeniba que je gardais attaché en permanence à mon poigné pour l'avoir toujours à portée de vue, pour ne jamais oublier. L'ouvrage s'ouvrit soudainement et les pages se mirent à tourner rapidement comme soufflaient par un vent magique et elles s'arrêtèrent tout aussi brusquement sur une double page en particulier. Je m'y penchais et y déchiffrais les caractères manuscrits qui s'y trouvaient. Il traitait des frontières entre les mondes, le monde où vivent les esprits et celui où vivent les humains, mais surtout, il traitait des passages qui permettaient de passer d'un monde à l'autre.

Plusieurs fois j'étais retourné au tunnel dans l'intention de le franchir mais je ne le l'avais jamais fait jusqu'à quelques semaines en arrière sur un coup de tête. Je m'étais violement disputé avec mes parents. Je m'étais une fois de plus rendu devant le tunnel et je l'avais franchi. Après n'avoir trouvé que les ruines d'un ancien parc j'avais faillit sombrer dans un abattement profond. Plusieurs jours durant je m'étais totalement replié sur moi-même et je fuyais la compagnie des autres. Je me montrais agressive envers eux et laissais couler mes larmes douloureuses une fois seule. Puis, comme les rêves se faisaient de plus en plus présent, de plus en plus pressant j'avais décidé de reprendre les recherches. Je lus et relue le passage que je recherchais depuis des années.

« …c'est au moment des solstices que la frontière entre les mondes des esprits et celui des humains est la plus fragile, en de nombreux lieux s'ouvrent des passages entre les mondes et les relient entres eux... »

« Vous souhaitez, jeune fille ? » demanda-t-on

Je sursautais de surprise arraché à mes pensées avant de faire un mouvement rapide pour faire face à mon interlocuteur. C'était un vieil homme de petite taille, ridé comme un vieux morceau de parchemin qui m'avait adressé la parole, et qui attendais à présent une réponse de ma part.

« Obtenir ce livre. » répondis-je avec une franchise et une spontanéité qui me parut redoutable après coup.

Je le fixais droit dans les yeux avec espoir sentant une détermination nouvelle fleurir en moi.

« C'est un ouvrage très précieux, prenez en grand soin, mademoiselle. Maintenant veuillez m'excuser, mais je dois reprendre mon travail » me répondit-il avec calme déconcertant en me souriant poliment.

« Mais combien me coûtera-t-il ? » finis-je par lui demander secoué par cette réponse avant qu'il ne s'éloigne trop.

« Il n'est pas à vendre, il ne l'a jamais été. Votre parole que plus aucune personne de se monde ne puisse y avoir accès, me suffira… » me répondit-il après s'être arrêté dos à moi et avoir appuyé sa phrase d'un clin d'œil jeté par-dessus son épaule.

Je me redressais de toute ma hauteur en entendant ses mots et le fixais en plissant les yeux.

« Je vous le promet ! Votre confiance, m'honore, grand père» lui répondis-je très respectueusement et jamais je ne me sentis plus vivante et plus déterminée qu'à cet instant.

Il hocha la tête et s'éloigna sans ajouter un mot ou m'accorder plus d'attention.