Here's My Station
Note : Aucun des personnages de cette histoire ne m'appartient. Ils sont la propriété des King et de CBS.
L'histoire se situe entre la fin de la saison 2 et juste après l'épisode What Went Wrong (3X11)
Le titre de cette fic vient de la chanson « Saint Claude » de Christine and The Queens que j'ai écouté des centaines de fois l'écrivant.
Cette fic est notée M parce que je ne sais pas écrire autre chose en ce moment -) et plus sérieusement parce qu'elle impliquera dans les prochains chapitres, des scènes de sexe explicites entre deux femmes.
I.
Here's my station
Here's my station
But if you say just one word
I'll stay with you
Le premier sentiment, c'est l'incompréhension. Le temps que son cerveau assimile l'information, la traite et la classe dans la catégorie Haute Trahison. Assez rapidement, lui succèdent simultanément la haine et la tristesse. La haine à leur encontre à tous les deux, la tristesse, uniquement lorsqu'elle pense à ce que Kalinda a brisé. Peter ne peut plus la rendre réellement triste, puisqu'il n'y a plus rien à sauver entre eux. C'est presque plus simple finalement.
Lorsqu'elle annonce à Kalinda qu'elle sait, tristesse et haine sont si puissantes qu'elles en deviennent physiques. Alicia a envie de se jeter sur elle pour la griffer, la frapper, lui faire mal comme elle à mal. Elle a envie qu'elle saigne comme elle a fait saigner son cœur.
Les jours, les semaines qui suivent, ce n'est pas exactement comme si la haine disparaissait, mais elle s'estompe et laisse place à une colère sourde, plus raisonnée. Et à un sentiment de désespoir. C'est étonnant parce que dans les différentes phases du deuil, le désespoir n'est pas censé poindre… La colère, c'est quand Kalinda entre dans son champs de vision. Elle est sourde parce qu'elle est tellement forte et palpable, qu'elle a l'impression que ses oreilles se bouchent et qu'elle peut entendre dans sa tête son cœur battre plus vite. Le désespoir c'est quand, après avoir quitté Will après leur brève amourette, elle se retrouve seule, le soir. Les enfants sont chez leur père, elle a du passer les 4 soirées précédentes avec son frère, elle ne peut décemment pas l'appeler pour combler encore une fois le vide. Alors elle pense que si tout avait été différent, elle aurait appelé Kalinda, et elles seraient sorties boire des verres, s'amuser, faire ce que font des amies… Elle est désespérée parce que, si elle est totalement honnête avec elle même, elle doit avouer que Kalinda lui manque.
Après le désespoir qui n'était pas réellement prévu au programme, viennent la jalousie, et quelque chose qui s'approche de la gratitude. C'est là qu'on sort tout à fait d'un processus classique. La jalousie, c'est quand elle croit comprendre que Kalinda et Cary se fréquentent au delà d'une simple relation professionnelle. Elle devrait n'en avoir strictement rien à faire. Mais voilà, ça fait quelque chose. D'énervant et d'irrépressible…
La gratitude, c'est quand elle découvre ce que Kalinda a fait pour elle, pour Grace, le jour où cette dernière a disparu plusieurs heures. Elle est teintée de colère parce qu'elle voudrait sincèrement n'en avoir rien à faire, elle voudrait que Kalinda n'ait pas tant d'importance dans sa vie après qu'elle ait mis tant de rage à l'en fait sortir.
Elle va la chercher au commissariat de police après avoir passé ses nerfs sur Cary, après s'être transformée en dragon tellement elle est en colère. Et quand elle la voit, elle a l'impression de la regarder comme si c'était la première fois. Où comme si c'était autrement. C'est là, à ce moment précis qu'elle se dit qu'il faut qu'elles parlent. Ou qu'elle parle et que Kalinda écoute, elle ne sait pas encore bien.
Mais dans la voiture, les mots qu'elle cherche ne viennent pas. A la place, c'est encore de la colère, des remerciements du bout des lèvres, et Kalinda qui la blesse en lui disant qu'elle n'a pas changé, qu'elle est toujours la même. Pourtant, ces quelques minutes de trajet jusqu'au bureau terminent de conforter Alicia dans ce qu'elle commence à comprendre : il y a quelque chose qui fait que quand elle est avec Kalinda, malgré TOUT ce qui a pu se passer, malgré TOUT ce qu'elle ne comprend pas encore bien, malgré la colère et la douleur, elle est avec la bonne personne.
De retour au bureau, le travail la happe, ne lui laisse aucun répit jusqu'au soir. Mais elle trouve tout de même le temps de se glisser dans le bureau de Kalinda et de lancer très très vite, avant de reperdre le fil de ses sentiments contradictoires
«-Je voudrais te parler.
Kalinda lève les yeux vers elle, la regarde sans parler pendant ce qui paraît une minute entière, soupire, et hoche la tête.
-Ok.
Elle a manifestement compris qu'Alicia ne voulait pas parler de travail mais d'elles. Et qu'elle ne voulait pas parler ici mais plus tard dans la soirée. Alicia est terrifiée. Elle dit, très vite et sans respirer. Sans y croire non plus
« - Ce soir, 21 heures, dans ce bar près du tribunal qu'on avait parlé d'essayer l'été dernier…
-Ok.
Kalinda est tellement facile à convaincre que ç'en est presque louche. Alicia n'ajoute rien, elle essaye de sourire mais n'y arrive pas. Alors elle se détourne et retourne à son bureau. Elle se demande mollement si les papillons dans le ventre font partie du processus de deuil d'une relation. Elle sait que non. Mais bon…
{…}
Lorsqu'elles sont face à face dans ce bar un peu trop cosy, un peu trop silencieux, elles pensent au même moment que finalement, ce n'est pas une bonne idée. Elles ne se regardent pas, ne se parlent pas, fixent avec insistance leurs verres. Alicia sait qu'elle est à l'initiative de ce désastreux moment. Elle boit son premier verre d'un trait, en commande un second instantanément, se ravise, en commande deux d'un coup, et se lance, parce qu'il le faut.
« -Merci d'être venue…
- Pas de problème. »
Alicia sent une volute de colère qui s'enroule autour de sa nervosité diffuse. Kalinda ne va pas l'aider ce soir.
« -Ecoute, je sais que revenir à avant ce qui s'est passé n'est pas possible. Mais est ce qu'on pourrait… Essayer autre chose ? Redevenir quelqu'un l'une pour l'autre ?
Il y a un silence qui dure tellement qu'Alicia finit par se demander si elle n'a pas parlé dans sa tête plutôt que tout haut. Kalinda a ce tic nerveux avec sa lèvre inférieure. Elle finit par lever les yeux vers Alicia et dit
« -Tu n'as jamais cessé d'être quelqu'un pour moi. »
Là, voilà, non seulement elle ne l'aide pas, mais en plus elle rend ça encore plus difficile. Alicia finit son second verre et son troisième trop vite, en commande encore un en se disant que peut-être il serait plus sage de garder les idées claires. Mais en fait non, elle a envie de dire au serveur de lui laisser la bouteille, elle se débrouillera, merci.
«-Ce que j'essaye de dire Kalinda… C'est… Oh bon sang ! »
Elle est en colère, fatiguée, triste. Elle a envie de se lever, d'attraper Kalinda par les épaules pour la forcer à la regarder dans les yeux. Elle a envie de la secouer et de lui crier Mais aide moi bon Dieu ! Elle ne fait rien de ça. A la place, elle ferme les yeux, inspire trois fois et lâche doucement, comme dans un souffle :
«- Tu me manques. »
La main de Kalinda sur son verre arrête de le tripoter nerveusement. Elle se fige à l'extérieur tandis qu'à l'intérieur elle implose. Elle lui manque…
« -Je ne pouvais pas prévoir ça Kalinda. Tu manques à ma vie. Et ça ne me fait pas plaisir de l'avouer, ni à moi, ni à toi, ni à personne d'autre… »
Elle s'arrête parce qu'il y a un sanglot dans sa gorge. Et parce qu'elle voit bien qu'elle a ébranlée Kalinda. Elle boit encore trop vite son verre, fait signe au serveur de remettre ça, Elle attrape la main de Kalinda qui est posée sur la table, le contact est paradoxal, comme si elle se brûlait avec de la neige.
« - Ca me fait mal d'avoir besoin de toi comme ça. Parce que je n'aspirais qu'à t'oublier le plus vite possible. Mais c'est au dessus de mes forces. Il faut que tu reprennes une place dans ma vie. Il faut que tu m'aides… »
La main de Kalinda tremble doucement dans la sienne. Comme le menton de quelqu'un qui va se mettre à pleurer. Elle lève enfin les yeux sur Alicia.
« -Qu'est ce que je suis sensée faire de ça ? »
Sa voix n'est pas aussi dure qu'elle l'aurait voulu. Elle aussi elle tremble. Et dans ses yeux il n'y a pas que de la colère.
« -D'abord, peut être que la première question c'est : et moi, est ce que je te manque ? »
Kalinda soupire. C'est du soulagement, et un peu de la colère. D'ailleurs sa voix en est teintée
« -Alicia… Tu ne vois donc rien ? Tu ne comprends donc rien ? Tu n'écoutes donc pas ? Depuis le début, depuis avant, depuis pendant, depuis après ce jour, je n'ai de cesse de faire tout ce que je peux pour que tu me pardonnes. Pour que tu oublies ce que j'ai fait avec ton mari. »
Elle retire sa main, se lève, attrape son manteau. Elle est en colère et son menton tremble quand elle dit :
« -Dire que tu me manques, ça serait en dessous de la vérité… »
Elle a un regard qu'Alicia n'a jamais vu chez elle : il exprime mille sentiments, du plus douloureux au plus tendre, du plus éclatant au plus sombre. Elle se détourne et fait un pas en direction de la porte quand Alicia se lève, mal assurée sur ses deux jambes, et l'appelle avec un petit quelque chose d'éméché, d'ébréché dans la voix :
« -S'il te plaît Kalinda… »
Elle a envie de partir. De la laisser plantée là. Pour qu'elle comprenne que bon sang elle n'est pas la seule à regretter ce qui a été perdu. Mais voilà, elle se retourne parce que dans la voix et dans la posture d'Alicia, outre la supplique, il y a les effets de l'alcool, et qu'elle ne peut pas la laisser comme ça. Et puis, même si elle ne se l'avoue pas, il y a la promesse que les choses peuvent, doivent, vont changer.
Elle se rassied docilement, esquisse un sourire – le premier depuis avant – et dit avec douceur
« Finis ton verre, je te raccompagne chez toi. »
Alicia la défie du regard et se sert un autre verre parce que le serveur a finalement compris qu'il aurait moins de boulot à leur laisser la bouteille plutôt qu'à revenir toutes les 3 minutes. Puis elle sert Kalinda d'autorité. Alicia dit, la voix éraillée :
« Après celui là. »
Elles se regardent sans parler. Certes elles ont mal, beaucoup. Mais elles sont ensemble et c'est bien là tout ce qu'elles désiraient depuis tout ce temps.
Finalement, après celui là, il y en a plusieurs autres. Parce qu'Alicia en a besoin, et parce qu'elles n'ont pas envie de rentrer chez elles. Au bout de ce qui pourrait bien être là 7ème téquila d'Alicia, Kalinda paye leurs consommations, attrape la main d'Alicia et lui dit :
« Allez, on rentre. »
Il y a quelque chose dans le regard d'Alicia qui fait peur à Kalinda. Trop d'alcool, des larmes qui sont juste là, et du désir. Elle en est sûre et certaine, et ça lui fait peur parce que ça lui rappelle combien Alicia est vulnérable. Et comme elle pourrait facilement profiter de la situation.
A la place elle l'aide à enfiler son manteau, glisse son bras sous le sien, et l'entraine vers la sortie du bar. D'autorité, elle l'accompagne à sa voiture. Alicia proteste mollement :
« Je ne vais pas laisser ma voiture ici…
-Tu viendras la récupérer demain.
-Tu as bu autant que moi Kalinda…
-Non pas autant. Allez, monte. »
Elle la porte presque jusque sur le siège passager.
{…}
Lorsqu'elle arrive en bas de l'immeuble d'Alicia, elle sait qu'elle va devoir l'aider à monter. Elle ne serait même pas capable de retrouver ses clefs dans son sac à main. Elle se gare et aide Alicia à regagner son appartement. Dans l'ascenseur, elle pèse de tout son poids contre Kalinda. Qui frissonne, qui se dit Mais bon sang mais pourquoi je me suis mise dans cette situation…
Avant d'ouvrir la porte, elle se retourne vers Alicia et demande doucement
« -Est ce que tes enfants…Ton mari, sont là ?
Alicia réfléchit de longues secondes et finit par souffler
« -Non, les enfants sont chez Peter »
Elle ouvre la porte de l'appartement, attrape la main d'Alicia et l'entraine à l'intérieur.
« -Voilà. Tu es arrivée à bon port. Je vais y aller maintenant.
Alicia ouvre complètement les yeux. Elle serre sa main à celle de Kalinda, elle rapproche son corps et murmure
« -Non. »
Dans le brouillard de téquila qui embrume tout, elle voit quand même que Kalinda a un regard perdu. Elle essaye de mettre ses idées à peu près dans l'ordre et dit doucement
« -Ca tourne trop… Accompagne moi jusque dans la chambre… »
Kalinda soupire et ferme les yeux pour faire face à l'afflux d'émotions à l'œuvre dans sa tête. Elle n'est pas loin de la soirée la plus étrange de sa vie. Elle entraine Alicia dans sa chambre et la guide jusque sur son lit. Alicia s'y assied, enlève ses chaussures, s'allonge, se tourne, se roule en boule sur le lit encore fait, et soupire d'aise. Kalinda reste plantée là, à la regarder. A se féliciter qu'elle se soit endormie avant qu'elle ait proposé de l'aider à enfiler un pyjama.
Elle reste longtemps à l'observer. Elle ne l'aurait pas cru, si on lui avait dit le matin même, qu'elle se retrouverait à regarder une Alicia saoule, dormir recroquevillée comme une enfant. Elle a un sourire, réprime l'envie de caresser les longs cheveux qui se sont éparpillés sur l'oreiller. Elle se retourne pour sortir de la pièce et rentrer chez elle, quand une petite voix, endormie et éraillée, s'échappe du lit :
« -Kalinda ?
Elle se retourne et murmure
« -Oui ?
-S'il te plaît, reste… »
Ca non plus elle ne l'aurait pas cru si on le lui avait dit le matin même. Elle contourne le lit et s'assied au bord opposé à celui où repose Alicia. Elle ne réfléchit pas. A rien. Elle est épuisée de toute façon. Elle retire ses bottes, défait son chignon, enlève sa veste et s'allonge sur le lit. Le plus près possible du bord. Sur le dos, les mains sagement posées l'une sur l'autre sur son ventre. Elle est encore réveillée une demi heure après, quand elle est à peu près certaine qu'Alicia a sombré dans le sommeil. Elle fixe l'obscurité en focalisant son attention sur sa respiration. Elle ne veut pas penser.
Elle sent une main qui se pose sur la sienne. Si elle n'était pas si fatiguée, elle aurait probablement sursauté. Avec force, Alicia l'attire contre elle. Kalinda se retrouve tout contre elle. Alicia murmure à son oreille, dans un demi sommeil
« -Merci. »
Elle sent sur son épaule qu'Alicia pleure. Elle passe son bras gauche autour d'elle et l'attire encore plus près. Alicia soupire et s'endort, instantanément. Quelques secondes plus tard, Kalinda la rejoint dans un sommeil un peu brumeux, un peu heureux. Dans un sommeil à deux.
