Chapitre 1

Le soleil vient tout juste de se lever quand je me réveille. C'est l'heure d'y aller, et je ne doute pas un instant que mon père m'attend près de la porte. J'enfile rapidement mon pantalon marron, un débardeur noir et des chaussures de terrain pour marcher dans les champs, légères. C'est qu'il fait très chaud dans le 11. Je me nettoie le visage, manque de tomber en butant contre ce qui semble être un livre et je me précipite vers la cuisine. J'ai à peine le temps de vérifier que mes tresses collées ne se sont pas défaite que déjà j'atteins une vielle porte. Nous avons de la chance, notre maison est assez grande et elle tient debout. Ce n'est pas le cas de tout le monde, malheureusement. Je pousse la porte dans l'intention de prendre au moins quelque chose à grignoter sur le chemin mais j'aperçois déjà une silhouette, grande de plus de deux mètres. C'est mon père, mais je suis pourtant surprise. D'habitude, il m'attend devant la porte de l'entrée, pas dans la cuisine. Je l'interroge du regard, mais comme tous les matins, il est froid et distant.

-Tu ne manges pas ce matin.

C'est définitif et non discutable, je me contente d'attendre qu'il sorte de notre maison pour lui emboîter le pas. Qu'allions-nous faire aujourd'hui, à la veille de la moisson ? Maman dit qu'il n'y a aucune chance que je sois tirée au sort, papa dit que je les aie toutes. Pourtant il m'a catégoriquement interdit de prendre des tesseraes. Il est encore trop tôt pour la récolte et les enfants travaillent dans les champs avec leurs parents quelques heures après l'aube. Habituellement, les enfants vont à l'école jusque leur 16 ans, mais durant la période de récolte, le capitole à ordonné que tout le monde se mette à la tâche. Personne n'y échappe. Jeunes, vieux, enfants, adultes, handicapés. On se plie aux ordres, c'est tout. J'habite dans un district très encadré, notamment à cause de la révolte que nous notre peuple à fait au moment du soulèvement du district 13. On en paie toujours le prix aujourd'hui. Je me souviens de ceux qui n'avaient pas de quoi manger l'année dernière et qui travaillaient sous le soleil ardent durant la récolte. Il n'est pas rare de retrouver des corps sans vie, étalés au milieu des épis de blés et du coton. Quelque fois, même, on retrouve celui d'un enfant malade. J'ai presque honte de dire que je ne risque pas de mourir de maladie aussi futile, mes parents peuvent sacrifier quelques dîners pour nous offrir un remède. Et puis je suis leur seule enfant.

Mon père sort alors et je le suis sans dire un mot, sentant la faim venir. Mais je ne montre rien, comme il m'a appris à le faire. Nous arrivons facilement, après avoir traversé un grand champ vierge, vers un vieux dépôt désaffecté dans lequel on déposait les récoltes. Avant qu'il ne soit brûlé lorsque le district 13 s'est levé. L'avantage dans tout ça, c'est que cet entrepôt a été réaménagé et est trop loin des champs cultivé pour qu'on s'y intéresse. Il est laissé là à l'abandon et on s'y réfugie comme une résistance aux jeux. Sous leur nez. Et finalement, ça nous fait bien rire, surtout quand l'on nous fait des remontrances. On sait quelque chose qu'ils ne savent pas, et qu'ils accepteraient encore moins. J'ai un mépris infini pour les gens du Capitole. Mais que puis-je faire ? Me rebeller ? Tout perdre ? Non. Non, je ne peux pas, je dois me l'avouer, j'ai trop peur et je me conforte dans l'idée qu'un jour, quelqu'un de plus courageux agira comme il le faut. Et là, la dictature du Capitole tombera. J'en suis sure. Enfin, mon père ouvre une grande porte en fer noircie et c'est un bruit de grincement qui nous annonce.

Lorsque nous pénétrons dans la salle un grand silence nous accueille. Mais nous sommes pourtant loin d'être seuls. Devant moi, des hommes et des jeunes garçons ont arrêtés leur mouvement. Je suis la seule fille qui ait jamais pénétré dans cette salle je crois. Ce silence, c'est le bruit du respect pour mon père. Il faut dire qu'il est reconnu pour sa carrure et sa résistance silencieuse face à l'autorité. Il transpire la puissance dans toute sa beauté. S'il le pouvait, il monterait une rébellion. Mais il y a ma mère et moi, il doit penser qu'il a trop à perdre, même si pour mon cas, je ne suis pas tout à fait convaincue. Mon père s'avance et me plante là, mais je sais quoi faire, je rejoins le groupe des jeunes adultes. J'ai beau avoir 16 ans, je suis une des meilleures élèves de mon père. Probablement parce qu'il est deux fois plus exigeant avec moi et deux fois plus sévère. Je ne sais pas trop quoi en penser mais je n'ai jamais vu un sourire s'élargir sur son visage, juste pour moi. J'ai même l'impression de ne jamais être trop bien pour lui, et pourtant j'essaie.

Je rejoins le groupe qui me salut avec plus ou moins d'enthousiasme car certains ont encore du mal a accepter une fille dans salle d'entraînement, et encore plus une fille qui leur a fait goûter le sol. Je ne manque pas le regard emplis de mépris d'Ethan. Ce grand bonhomme blanc d'environ deux mètres ne m'impressionne pas tant que ça. Il me bat au corps à corps, j'imagine bien, mais je suis moins fière, plus prudente et futée alors je lui rends son regard. Tant pis s'il ne m'aime pas, je me passerais volontiers de son amitié. Il se garde pourtant bien de me le dire, il préfère se cacher derrière ses feuilles de planification des combats. Je ne l'ai jamais vu se battre d'ailleurs, mais je vois bien les muscles dessinés sur son tee shirt. Je lui jette un dernier regard de dédain et de méfiance mêlé. Je ne le supporte pas. Enfin, s'il ne m'avait pas autant détesté, je crois que j'aurais pu l'apprécier, mais il avait une sacré dent contre moi et il me le montrait ça, par contre. Toute la semaine, j'avais eu le droit à des combats assez bestiaux et généralement, j'en sortais avec des bleus et la bouche en sang. Même mon père n'était pas aussi cruel. J'ai beau me dire que combattre contre les plus forts est une réalité que je devrais affronter dans l'arène si j'étais tirée au sort, mais je n'arrive pas à m'y résoudre. Je dois progresser, pas me suicider.

Ce qui est étonnant, c'est que dans ce gymnase, fait avec le peu de moyens que l'on a, et donc en piteux état, il n'y a aucune fille, sauf moi. Pourtant, elles font les Hunger games aussi. La réponse c'est que c'est trop risqué. Pour les hommes, risquer leur vie n'est rien comparé à l'exécution de leurs filles et de leurs sœurs. Alors les filles qui le peuvent s'entraînent chez elle avec leur frère ou leur père, mais c'est rare. D'ailleurs, nous sommes déjà très peu dans ce gymnase, à risquer nos vies chaque jour. Si j'y suis entré, c'est uniquement parce que mon père est trop respecté pour qu'on lui dise ce qu'il a à faire. Il sait ce que je risque et il s'est disputé des jours durant avec ma mère, quand j'avais 11ans. Mais il a été ferme. Les carrières s'entraînent, il n'y a aucune raison pour que je ne le fasse pas aussi. Ma mère répondait comme toujours que je ne serais jamais tirée au sort, et étant donné le nombre d'année qui est passé depuis, j'ai tendance à espérer qu'elle dise vrai. Mais mon père mise tout sur mon entré dans les Hunger games et il veut être sure que j'en ressorte vivante. Il y a tellement peu de gagnants du district 11 que ça m'effraie. Mais ils n'avaient pas ma chance. Alors peut être qu'après tout, je peux garder espoir en toute circonstance.

Je regarde autour de moi et constate que c'est mon tour de voir mon planning de la journée. Je regarde Ethan, toujours sur sa paperasse. Je m'approche cependant de lui, je suis bien obligée, il surveille les combats cette semaine. Et cette pensée éveille la douleur de mon bleu sur la joue. Je ne comprends vraiment pas pourquoi mon père apprécie autant un mec de ce genre comme si c'était son propre fils. Alors que celui-ci fait en sorte que sa fille se batte avec beaucoup plus fort qu'elle. Si c'était des filles, je pouvais comprendre, mais des garçons de deux fois mon poids et mes muscles, c'était me condamner. Et il le sait. Cependant, je garde pour objectifs de lui montrer que sa haine pour moi ne me fait rien, que je garde la tête haute même si, sincèrement, au fond de moi, je ne voudrais pas me retrouver face à face avec lui. Il était brun, les cheveux court et se distinguait nettement des autres garçons de son âge par sa peau mate mais plus blanche que la nôtre. Je suis métisse, et la plupart des habitants du 11 sont des personnes de peau colorées. Mais ce sont aussi ses yeux noisettes qui ressortent, trop à mon goût. Tout en lui n'est qu'arrogance. Il m'insupporte, mais quelque part, je sais que mon père y ait pour quelque chose. Ethan lève enfin les yeux et me regarde de nouveau, d'un air distant et froid, celui auquel je suis habituée. Aux autres, il sourit. Espèce d'ordure. Il finit par rebaisser les yeux comme si je ne méritais même pas qu'il me regarde.

-Acacia, tu as trois combats ce matin. Tu t'échauffes, tu affrontes Calvin puis Mess, il rencontre de nouveau mon regard et me fixe d'un air hautain. Que du combat à mains nues aujourd'hui, « comme toute la semaine, imbécile, ais-je envie d'ajouter ».

-Et le troisième combat ? Demandais-je avec indifférence, histoire de lui montrer que ça ne me fait ni chaud ni froid, bien que je tressaille au nom de Calvin -un grand noir dont les muscles ressemblent à des montagnes russes qui n'est pas dans ma liste d'amis.

-Contre moi.

Je tente de cacher ma surprise mais c'est plus fort que moi. Je lève la tête et je fronce les sourcils. Il ne sourit pas mais je parie qu'il en meurt d'envie. Je suis abasourdie. Ethan. Il a donc décidé de m'achever avant la Moisson ? Je suis indécise et le doute doit se lire sur mon visage car pour la première fois de ma vie, il me sourit. Un sourire qui veut dire qu'il va bien s'amuser, qu'il attendait ça depuis un moment. Cet homme veut ma mort.