Personne

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Continuation directe du chapitre 127 de Bakuman. Nanamine est un peu OOC dans cette scène fantaisiste. Angst/Romance

«Attends, Nanamine ! »

Le mangaka marchait à vive allure. Comme s'il niait l'existence de la nature qui se trouvait autour de lui.

Kosugi courait. Mais il avait déjà l'impression que la veste de Nanamine se perdait dans la foule obscure. Bientôt il ne serait plus qu'une tâche rose, plongée dans l'immensité.

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Nanamine pouvait être si capricieux parfois. Il devait le ratrapper, ou sinon…

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« Kosugi ! »

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L'apostrophe brisa le ciel nocturne.

Et le jeune auteur s'était retourné. Il fixait son responsable éditorial de ses yeux perçants.

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« Vous ne devriez pas courir comme ça. Vous connaissant, vous risquez de trébucher. Un trottoir plein de boue n'est pas le lieu le plus agréable du monde. »

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En effet, il avait neigé la nuit dernière. Mais le sel avait bien fait son travail. Quitte à tomber, il aurait préféré le faire sur un tapis blanc.

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« Nanamine…pourquoi es-tu parti si vite ?

-Vous ne m'avez pas entendu ? Je souhaitais seulement parler à Ashirogi-sensei. Je n'ai plus qu'à m'éclipser sans faire de bruit.

-Certes… Mais je ne parlais pas seulement de la fête du nouvel-an.

-Qu'est-ce que tu racontes encore ?

-Tu m'avais dit qu'on retravaillerait ensemble. Tu as fait tes nemus, nous sommes remontés dans le classement. Et…

-Je ne t'avais rien promis que je sache.

-Tu n'es pas venue à la réunion que nous avions fixée, à Ginza.

-Kosugi, je croyais pourtant avoir été clair. »

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Il se rapprocha peu à peu de son éditeur incrédule.

Il le toisait de haut. Leur écart de taille était moindre mais l'âme de Nanamine était destinée à …à écraser. Quand il fut à quelques mètres du brun, le mangaka se stoppa net. Plongea ses yeux dans les siens avec intensité.

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« Jamais je ne travaillerai avec vous. »

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Son interlocuteur ouvrit légèrement la bouche sous le choc. Oh comme il était stupide. Il aurait dû s'y attendre.

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« Je ne prétends pas être parfait. Tu aurais même le droit de me traiter d'incapable

-J'en meurs d'envie, je vous l'avoue.

-Je ne te comprends pas, Nanamine. Un coup, tu me laisses t'approcher et l'autre tu me plaques encore plus violemment au sol.

-Vous divaguez.

-Tu n'es qu'un enfant Nanamine. Un enfant intelligent peut-être, mais tu restes un enfant. Aussi vif qu'immature, aussi innocent que cruel.

-James Barrie…si vous connaissiez les mangas aussi bien que la littérature enfantine, vos livres se vendraient comme des petits pains ! »

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Kosugi ne peut s'empêcher de sourire.

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« Tu me traites toujours aussi mal. Mais malgré tout, j'ai cette envie irrépressible de continuer avec toi.

-Tant pis pour vous, si vous êtes masochiste.

-Je te l'ai déjà dit, mais j'admire ta détermination. Tu as du talent, tellement plus de talent que nous pouvons l'imaginer.

-…C'est rare que vous me fassiez de tels compliments. Ou que vous exprimiez votre opinion, tout court.

-Alors…si tu penses que tu exploiterais mieux ce talent avec un autre que moi, pars. J'aurai d'autres auteurs, et je lirai ton prochain manga avec plaisir. »

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Le châtain marqua une pause. Il réduit à néant la distance entre lui et son interlocuteur. Puis il inclina la tête d'un air interrogateur.

Kosugi était toujours aussi sérieux.

Un temps. Nanamine attendit.

Et pressa et un baiser chaud sur les lèvres de Kosugi.

Il s'imposa avec rudesse laissant peu de place au pauvre responsable éditorial.

Les joues de son vis-à-vis étaient écarlates. Stupéfait, voilà ce qu'il était.

Le mangaka se retira, et l'examina quelques temps. Il s'empressa de demander :

« Quoi ?

-A-as tu seulement conscience de ce que tu viens de faire ?

-Alors je me serais trompé ?

-Eh ?

-Avec ce ton si grave, on aurait dit une déclaration d'amour.

-Je ne vois pas du tout comment tu as pu imaginer ça !

-Alors, pourquoi vos joues sont rouges ?

-J-je…

-Oh, à cause du froid sans doute. N'oublions pas que nous sommes en hiver, hein Kosugi ? »

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L'éditeur resta interdit. Il avait envie de frapper Nanamine et en même temps…il sentait un souffle dans sa poitrine. Cette situation était tellement inédite qu'il ne savait que penser.

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« Bon, si c'est comme ça, je vous laisse très cher éditeur. N'attrapez pas froid et, oh, oui, rappelez-vous : je n'ai besoin de personne ! »

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Et il disparut dans la nuit laissant Kosugi seul avec ses pensées.

Mars 2015