Disclamer : Les personnages contenus dans cette histoire ne m'appartiennent pas. Ils sont la propriété des créateurs/auteurs de la série et du livre The 100.
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En revanche les fautes d'orthographes sont bien de moi...
Avertissement : Au risque d'en décevoir beaucoup, même si les personnages de Clarke et Lexa apparaissent dans cette histoire, la véritable héroïne de ce récit est, comme vous vous en apercevrez bien vite... Raven Reyes.
Au commencement fut la magie, puis vinrent les métamorphes...
Chapitre 1 :
Polis, Royaume du feu...
L'air sentait la cendre et la suie.
La matière épaisse et collante s'échappant des tours de pierres noires en activité, se déposait paresseusement sur la forteresse immense devant eux, accentuant l'aura effrayante qui s'en dégageait.
Le cortège du grand prêtre passa l'entrée sous le salut respectueux des gardes.
L'enfant entendait résonner les coups dans les forges et s'émerveillait des étincelles – fruits des maîtres du feu – qui telles de minuscules étoiles constellaient la robe noire de la nuit autour d'eux.
Elle se détacha de ce spectacle exotique visible à travers l'ouverture grillagée de leur moyen de transport, de ce lieu si différent de son propre monde, et interrogea du regard ses camarades dans le chariot renforcé et branlant dans lequel elles s'étaient déplacées toute la journée.
Au nombre de huit, à peine âgés de dix ans, les jeunes filles dormaient à moitié, fatiguées et endolories par le voyage, certaines d'entre elles apeurées par la suite des événements.
Elles avaient beau avoir passé les derniers jours ensemble, les différences entre leur royaume perduraient et chaque fille de sang noble restait à l'écart des autres, ne faisant confiance qu'à celle qui lui avait juré fidélité dans cette épreuve, celle qui deviendrait sa gardienne si elle était choisie.
Elle même avait été sélectionnée pour devenir la gardienne de l'enfant de l'air.
Reyes, une orpheline du peuple du vent qui protégerait la fille de leur roi. Clarke, aux cheveux couleur de blé et aux yeux bleus innocents, une gamine pas plus grande qu'elle, et qu'elle n'avait rencontré qu'une semaine auparavant.
L'enfant curieuse de l'endroit où elles se rendaient, se souviendrait toujours de la poussière soulevée par les sabots des chevaux des soldats lorsqu'ils étaient venus la chercher.
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L'aube pointait magnifique sur le désert autour d'elle.
Reyes suivait des yeux, émerveillée, une buse féroce jouer avec le vent. L'enfant aimait sa silhouette massive, aux ailes larges, légèrement relevées en vole planée. Elle enviait ce rapace et sa liberté dans le ciel, lui faisant oublier pour quelques temps sa vie d'enfant de la rue.
Elle baissa les yeux vers les dunes autour d'elle, ces collines de sable mouvant dont les grains dorés dansaient avec l'alizé de ce début de matinée.
Cet instant lui appartenait, précieux et silencieux avant la journée caniculaire que lui réservait la terre où elle vivait.
La misère restait la même quelque soit le royaume où vous viviez, mais au moins elle ne grelottait pas. La glace, la neige et la froidure d'un temps capricieux était le « privilège » du peuple de l'eau, le sien se résumait à la sécheresse et la chaleur.
L'enfant en haillons sourit à l'oiseau qui s'éloignait et capta le nuage de poussière puis le groupe qui s'approchait à vive allure de leur petit village. Elle descendit de son point d'observation aux cris qui retentissaient de plus en plus forts.
Le martellement des sabots faisait trembler le sol. Les claquements des fouets vibrèrent jusque dans son corps, et la peur s'insinua en elle.
Les hommes en uniforme enlevaient les enfants de son âge.
Tapie derrière la carriole d'un marchand de tissus, elle voyait à travers les rayons d'une des roues en bois, ses camarades amenés devant l'étalon de celui qui semblait être leur chef. Un homme à la moustache soignée et au regard ne trahissant pas la moindre expression.
Quelques villageois avaient bien tenté de s'interposer à cette rafle humaine, puis battus sans ménagement avaient préféré sonner la retraite. À quoi servait de risquer sa vie pour des orphelins qui ne passaient leur journée qu'à courir dans le sable et mendier leur repas ?
Reyes avait toujours apprécié la poudre jaune de la terre aride, mais aujourd'hui, crée par la violence de ces hommes terrifiants, l'ancien brouillard « magique » qui la faisait tousser n'était plus synonyme que de crainte.
La main dure et calleuse qui se plaqua sur sa bouche la fit sursauter. L'homme inconnu derrière elle, la souleva sans difficultés, marchant avec son nouveau paquet qui se débattait désespérément, tentant vainement de le mordre ou de lui donner des coups de pieds, et la lâcha brutalement au milieu des autres vauriens.
Des enfants sales et sans importance.
Reyes reconnut ceux qui partageaient cette épreuve avec elle et ne comprit pas pourquoi seules des filles étaient triées sur le volet.
Elle n'eut pas le loisir d'approfondir ses réflexions, les hommes les plaquèrent dans des charrues et commença le voyage vers la capitale.
Le silence régna pendant la traversée de l'océan de sable. Il leur était interdit de parler sous peine de représailles importantes. Reyes jetait parfois des coups d'œil à Kyla, celle plus courageuse qui avait bravé un soldat et dont le lobe d'une oreille avait été coupé sans le moindre tressaillement de la part de son bourreau, la menaçant d'arracher l'autre avec ses dents si elle ouvrait à nouveau la bouche. Kyla pleurait en silence et gardait les yeux baissés depuis ce moment, portant quelque fois pathétiquement ses doigts vers la chair qui n'existait plus.
Reyes s'interrogeait. Malgré la brutalité dont ils avaient fait preuve vis à vis de Kyla, aucun homme ne les avait touchées ou battues par pur amusement. Elles étaient donc une marchandise précieuse qui finirait certainement dans un bordel de la capitale Xas. Abîmer le produit avant de le vendre n'avait aucun intérêt et ferait baisser le prix. Mais quand même, se disait-elle, une ou deux victimes sur leur groupe pour « soulager » les soldats, paraissait dérisoire au vu de ce qu'elles rapporteraient lors de leur vente. Cette pensée tournait en boucle dans sa tête, son petit corps serré contre ses camarades, augmantant intérieurement cette angoisse qui lui serrait les entrailles.
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La muraille apparut le cinquième jours de leur trajet. Plus que l'ocre de la pierre qui se mariait avec les rayons du soleil, ce fut la taille de la citadelle qui la laissa sans voix.
L'escorte dont elle était prisonnière traversa la ville rapidement ne permettant pas à l'enfant d'assouvir sa curiosité, un bon moyen de combattre sa peur intérieure pour ce qu'elle allait affronter bientôt.
Le palais occupait le centre de la mégalopole. Bâti sur une large plate-forme en terrasse, il paraissait si petit surplombé par la tour de sept étages correspondant au symbole de chaque famille royale, quelque soit le royaume. À Xas, le beffroi quadrilatère en terre crue imposait son pouvoir sur les habitants de la capitale.
Ils arrêtèrent leur caravane au pied de l'immense escalier et les jeunes filles se mirent à gravirent lentement les marches sous le soleil de plomb. Ils furent accueillis par des femmes qui s'empressèrent de prendre soin d'elles. Reyes tourna la tête vers les soldats qui ne s'intéressaient déjà plus à leur livraison et suivaient d'illustres inconnus.
Des servantes du palais les lavèrent toutes avec une douceur insoupçonnée en ne prononçant aucune parole. Les rendant belles.
L'oreille amputée de Kyla fut cachée soigneusement sous ses cheveux propres et soyeux, et une fois toutes habillées de tenues en coton clair, elles furent conduites, toujours en silence, jusqu'à la grande salle.
Pas plus d'une dizaine, les jeunes filles furent placées en ligne et Reyes sut que les enchères ne tarderaient pas. Si elle devenait une courtisane pour la famille royale, elle ne s'en plaindrait pas, mieux valait vendre ses charmes dans un lieu où la richesse coulait à flot que dans une auberge des bas-fond de la ville.
Elle fixa la coupole si haute au dessus d'elle, légère, aérienne et hors d'atteinte puis repensa à la buse qui dansait avec le vent. Elle s'imagina voler, échappant pendant quelques instants au monde cruel qui la rattraperait bien assez vite.
Le bruit de la lourde porte annonça leur entrée. Un homme vêtu d'un scapulaire couleur sable marqué de l'emblème de leur peuple sur la poitrine et suivi d'une jeune femme portant une robe en lin blanc, des bracelets en or et une couronne simple et finement ciselée autour de sa chevelure châtain clair, trahissant son statut et son identité, s'approchèrent d'eux.
La reine, elle même, assisterait à leur achat réalisa Reyes assez impressionnée.
Elle sentait l'anxiété des autres filles qui se dandinaient mal à l'aise devant les deux adultes. L'homme fit un pas en arrière et invita la monarque à les contempler. La souveraine s'avança d'une démarche lente jusqu'à atteindre le centre de leur ligne et les observa un petit moment. Elle finit par baisser les paupières et la tête, inspirant lentement dans cette position pendant plusieurs minutes, augmentant l'angoisses des jeunes filles qui jetaient des coups d'œil dans toutes les directions.
Reyes, lassée de ce petit manège, avait reporté son attention sur la coupole inaccessible.
Elle fut la première surprise de ne pas frémir en sentant la main chaude sur son visage, croisant le regard entièrement blanc de la femme en transe devant elle qui lui souriait gentiment. Sa voix grave la désignant comme l'objet souhaité chanta à son oreille telle une mélodie rassurante, et elle regretta de la voir s'éloigner et disparaître par la même porte que celle de son arrivée.
Une fois la reine hors de vue, deux gardes l'empoignèrent et la guidèrent à travers les dédales du palais pour la laisser dans une petite chambre où une couverture, une assiette de lentilles froides – guère assaisonnées – un pot en terre cuite et une minuscule fenêtre lui tinrent compagnie durant les heures qui suivirent.
Comme dans la grande salle, Reyes « s'échappa » de sa cellule, se perdant dans ce carré de ciel bleu que lui offrait sa pauvre niche.
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Dormant en boule et emmitouflée dans sa couverture, la jeune fille ne l'entendit pas entrer dans la pièce. Il la réveilla en pressant doucement son épaule et lui fit signe de la suivre. À moitié endormie, elle se concentra sur la torche qu'il tenait, se demandant quelle heure il pouvait être.
Leur chemin les mena jusqu'en haut de la tour. L'homme portant le scapulaire – le même que dans la grande salle – ne paraissait pas fatigué par le nombre d'étages et de marches qu'ils gravirent, l'attendant patiemment quand elle s'arrêtait pour reprendre son souffle.
Il poussa la porte en bois et lui proposa d'entrer dans la pièce d'un geste gracieux de la main.
Elle apprendrait plus tard qu'il s'agissait de son atelier, que l'alchimiste qui lui souriait avec compréhension, œuvrait pour la famille royale dans cette salle – au plus près du ciel – depuis que son maître était mort quelques années plus tôt. Prenant sa place, comme la tradition l'exigeait, afin de préparer la prochaine gardienne de la Flamme.
Il marcha d'un pas souple vers une terrasse et attendit qu'elle le rejoigne. L'enfant, d'une démarche timide, finit par se placer sur la droite de l'homme qui lui tournait le dos, laissant ses yeux vagabonder sur la ville à leurs pieds.
Il abaissa son scapulaire, ferma les yeux et sourit avec reconnaissance au souffle tiède virevoltant dans ses cheveux, caressant ses traits et sa barbe. Reyes sentait, elle aussi, le vent susurrer à son oreille, lui souhaitant une journée pleine de promesses, accompagnant les rayons naissant du soleil qui réchauffaient petit à petit son visage au fur et à mesure que la boule de feu montait dans le ciel du matin.
Elle rouvrit les yeux aux pas furtif de l'étranger qui repartait vers l'atelier et se précipita derrière lui.
Il ferma la porte-fenêtre qui donnait sur la terrasse et désigna une des chaises autour de la table en bois clair. Quand elle s'assit, il poussa dans sa direction la corbeille de fruits et exécuta quelques pas vers un chevalet pourvu d'une grande feuille blanche.
Un grain de raisin dans la bouche, Reyes le suivait des yeux pendant qu'il attrapait un fusain dans une boîte sur un tabouret. Finalement il se tourna vers elle et demanda :
— Comment t'appelles-tu ?
L'enfant de dix ans décida de lui répondre par une autre question :
— Que va-t-il leur arriver ?
Il ne parut pas surpris par cette répartie et questionna :
— Les autres jeunes filles qui étaient avec toi ? Tu parles d'elles ?
Elle hocha la tête en signe d'approbation.
— Eh bien, elles n'obtiendront pas le lugubre destin auquel tu penses. Elles resterons ici, en tant que servantes et dans quelques années, elles partiront pour Elrach, y apprendront à développer leur magie et le métier qui en résultera pour elles. Une chance inespérée pour des orphelines d'un village oublié, ne trouves-tu pas ?
À nouveau elle opina et il reprit :
— Tu es bien jeune pour savoir ce qu'est l'endroit où tu croyais atterrir.
Elle haussa les épaules, elle pouvait bien habiter un endroit reculé, l'enlèvement d'enfants et leur destin funeste n'était pas une nouveauté et très jeunes, ils avaient appris qu'ils n'étaient pas à l'abri de cette horreur.
L'homme l'épiait en silence et reprit la parole :
— Te voilà rassurée ? Il n'attendit pas sa réponse, il savait qu'elle ne dirait rien et préféra reprendre où ils avaient commencé. Comment t'appelles-tu ? Répéta-t-il.
— Reyes, murmura-t-elle.
Il sourit :
— Je suis Marcus, le prêtre du peuple de l'air.
Elle hocha poliment la tête et il continua :
— Que connais-tu de notre monde, Reyes ?
L'enfant parut hésiter puis prononça du bout des lèvres :
— Il existe quatre royaumes...
— Exactement ! Répondit-il avec enthousiasme, dessinant sur la feuille pour illustrer ses propos. Le peuple du feu, dit-il en esquissant un triangle pointe en haut, le peuple de l'eau, représenté par un triangle tête en bas, le peuple de l'air, nous, précisa-t-il en lui souriant dessinant un autre triangle pointe en haut, traçant au trois quart de la hauteur un trait horizontal dans la figure, et enfin le peuple de la terre, symbolisé lui par un triangle tête en bas possédant également un trait près de la pointe. Es-tu d'accord jusqu'à maintenant ?
— Oui.
Il crayonna un nouveau triangle tête en haut et un autre par-dessus tête en bas, construisant une étoile à six branches.
— Les quatre peuples réunis. Tu vois, tu retrouves tous les emblèmes ici, expliqua-t-il, le feu, l'air, l'eau et la terre...
— Et le dernier symbole ? Demanda Reyes.
— Ah... celui qui les regroupe tous, l'étoile qui représente la Flamme ou... la magie.
— …
Il posa le bout de charbon et vint s'asseoir près d'elle.
— Sais-tu ce qu'est la Flamme ?
— La concentration de la magie dans notre monde...
Il la regarda légèrement étonnée :
— Tu connais décidément beaucoup de choses pour...
— Une orpheline qui vit loin de tout ? Le coupa-t-elle.
— Oui.
— J'aime écouter les anciens, dit-elle crânement.
Il sourit et acquiesça respectueusement :
— Et c'est tout à ton honneur... Veux-tu que je continue mon histoire, ou est-ce inutile ? Demanda-t-il avec amusement.
Reyes attrapa une orange et se mit à la peler tranquillement avec les mains en répondant :
— Je vous écoute.
Marcus n'était pas dupe, l'enfant préférait montrer qu'elle n'était pas impressionnée, mais elle mourrait de peur assise au milieu de son atelier, en haut de cette tour, si loin du petit village où elle traînait pieds nus et seule. Il recula sur sa chaise, sentit son dos contre le dossier dur du mobilier et murmura pour lui-même :
— « Au commencement fut la magie, puis vinrent les métamorphes... ».
Il se gratta distraitement la barbe, réfléchit et continua :
— Les Dieux nous ont accordé cette magie à travers la Flamme, cette énergie qui permet à notre race de vivre sur notre planète... Malheureusement le niveau d'un cadeau aussi important est tel qu'il faut l'abaisser pour qu'il puisse vivre parmi nous... Et c'est ainsi qu'apparut la première porteuse de la Flamme, une femme de sang royale qui l'accepterait en elle mais qui y perdrait quelque chose en échange. Par son sacrifice la porteuse maintiendrait la magie dans notre univers, mais je te l'ai dit, il y a un prix... Et celui-ci est différent à chaque nouvelle porteuse, la rendant plus faible.
Il vérifia que la jeune fille l'écoutait toujours et reprit :
— La dernière porteuse avait perdu la vue au moment de l'acceptation... Ça, et le fait qu'elles soient incapables de faire le moindre mal ou de se défendre contre toute attaque une fois la Flamme en elles.
Reyes manqua de s'étouffer avec un quartier d'orange et croisa le regard du prêtre imperturbable qui précisait :
— Alors les gardiennes de la Flamme furent crée... Là-aussi, les divinités exigèrent que ce rôle revienne à une femme... Son opposée, une femme pauvre et orpheline...
Il fixait la table, perdu dans ses pensées :
— La magie apporte la vie à notre monde, malgré la division constante qu'exerce les hommes entre eux... Il soupira. Nous détruisons ce cadeau incroyable, l'asséchons de plus en plus...
Il s'arrêta comme s'il estimait en avoir trop dit à l'enfant et tourna la tête vers la terrasse, laissant le silence s'installer entre eux. Reyes finit son orange et demanda :
— Qu'ai-je de si exceptionnelle pour devenir la prochaine gardienne ?
Marcus sourit et secoua la tête :
— Ton intelligence pour commencer. Comment as-tu su que c'était la raison de ta présence en ce lieu ?
Elle haussa les épaules.
— Je n'en savait rien, vous venez de me le confirmer.
Le prêtre rit devant la ruse de l'enfant et redevint sérieux.
— La porteuse de la Flamme actuelle se meurt...
— Et vous avez besoin d'une nouvelle ?
— Oui.
Elle parut réfléchir un moment puis questionna :
— Si ce rituel existe depuis la nuit des temps, pourquoi n'avez-vous pas déjà de gardienne sous la main ?
— Parce que cela est interdit. Nous pouvons prévoir que la première fille de la famille royale de chaque peuple sera une nouvelle candidate face à la Flamme après la mort de la porteuse, mais sa gardienne... ne se révèle que seulement quelques jours avant sa fin, et même une oracle ne peut nous dire qui elle est avant d'être en sa présence, elle sait simplement l'endroit où elle vit.
— Une oracle, répéta Reyes en fronçant les sourcils.
— Oui.
Elle releva la tête vers lui et s'exclama :
— La reine est une oracle, n'est-ce pas ?
— Pas tout à fait, mais elle en a les pouvoirs... Si la reine Abby avait été la première fille de sa famille, elle aurait sans doute était la porteuse, mais la Flamme a choisi quelqu'un d'autre... Sa fille, Clarke, en revanche, fera partie de celle qui devront se présenter pour ce rôle.
— Je ne comprends pas... Si elle a une sœur pourquoi n'est-ce pas la fille de sa sœur qui est susceptible de porter la Flamme ?
— La sœur de la reine est morte d'une maladie il y a plusieurs années...
Reyes accepta cette réponse et voulut savoir autre chose :
— Je suis donc la prochaine gardienne ?
— Si Clarke est choisie, oui.
— Et la gardienne actuelle ?
— Elle a failli a sa mission et n'a pas su protégée l'actuelle porteuse, elle sera certainement bannie...
La jeune fille fronça les sourcils, tout ceci la dépassait, elle le sentait, mais il valait mieux attendre un peu pour mieux digérer toutes ces nouvelles informations. Elle préféra chasser le sujet de l'ancienne gardienne pour le moment et continua :
— Il n'y a personne d'autres que moi pour ce rôle ?
— Non, une seule gardienne naît la même année que la future porteuse de la Flamme, une seule par peuple.
L'enfant parut troublée par ces propos et murmura :
— Je n'ai pourtant rien d'unique...
Marcus se leva et se posta devant elle, obligeant la jeune fille à le regarder :
— Tu as de la magie en toi...
— Non.
— Si. Elle se manifestera quelques années après la cérémonie.
— Si Clarke est choisie...
— Non. Quel qu'en soit l'issue et si Clarke n'est pas l'élue, alors dans ce cas je ferai de toi mon élève, afin que tu deviennes la prochaine prêtresse du peuple de l'air.
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La reine Abby assise sur le lit, observait sa fille en train de dormir. Elle essuya une larme sur sa propre joue, puis se leva et s'éloigna en direction de la fenêtre.
Les lumières de la ville trahissaient l'activité nocturne de la capitale.
Abby imaginait la vie de son peuple, leur joie et leur souffrance. Une mère parmi les familles en contrebas devrait-elle comme elle, offrir sa fille aux Dieux ?
Elle l'avait vue, Clarke serait la prochaine porteuse de la Flamme. Sa vie ne serait plus que dévouement et service, elle ne connaîtrait jamais l'amour, ne rencontrerait jamais un homme avec qui elle pourrait fonder une famille. Car tel était un autre fardeau de sa prochaine mission, la porteuse n'aurait jamais d'enfant.
Abby pensa à son époux Jake. La décision serait aussi difficile à accepter pour lui. La reine ne lui dirait pas, mais hormis Clarke, ils n'auraient pas d'autres descendances et la lignée des Griffin se terminerait avec la future porteuse de la Flamme.
Elle pensa à leur règne. Ils étaient de jeunes souverains et avaient tellement de travail à accomplir. Le peuple de l'air souffrait. Ils espéraient rétablir une certaine justice laissée de côté par le père d'Abby et elle savait que Clarke lui ouvrirait les yeux sur la misère des habitants de Xas, que l'aveuglement de la famille royale cesserait enfin.
Abby n'aurait pas dû accéder au trône, elle était l'oracle et se demandait souvent comment ses pouvoirs ne lui avaient pas été enlevés par les Dieux quand elle avait accepté de devenir l'épouse de Jake Griffin, le prince d'une des tribus à l'ouest de Xas.
Renoncer au pouvoir de voir le futur, même les bribes de celui-ci, n'avait pas été aisé, mais elle n'avait pas eu le choix. Il fallait bien qu'une fille soit engendrée par ses soins pour qu'une nouvelle porteuse de la Flamme soit proposée par le peuple de l'air et ce devoir reposait sur les épaules d'une princesse de vingt ans, une jeune fille qui promettait de devenir une grande oracle.
Aujourd'hui... une oracle inachevée.
Abby ne devait pas être ingrate, Jake était un homme bon et des sentiments sincères à son égard avait fini par éclore dans son cœur. Elle aimait vraiment le roi, son mari, le père de sa fille, Clarke.
Elle repensa à ses transes et se dit que finalement les Dieux avaient été cléments, ils comprenaient le sacrifice qu'elle avait accepté, les servant d'une autre manière et avaient décidé de ne pas la départir de ce qui l'avait toujours rendue si heureuse : son don de voyance.
Elle n'ignorait pas que son père, mort depuis quelques mois, avait voulu bien faire et échoué, que si sa mère avait été encore en vie, elle aurait su le guider mais qu'il avait préféré le pouvoir et la richesse à son véritable devoir envers ceux qu'il protégeait, envers son peuple. Refusant l'avis de sa fille et de son gendre pour gouverner pendant les dernières années de sa vie.
Elle réparerait les torts subis sous le joug de son propre sang et ferait tout pour se montrer digne de son nouveau rôle de dirigeante.
Abby pria les Dieux, les implora de lui apporter l'aide nécessaire au cours de son règne et les yeux fermés, appuya son front contre le verre froid.
Après quelques instants, elle recula, passa devant le lit tout en couvant des yeux sa fille endormie, si innocente et encore à l'abri de son destin, puis sortit de la chambre.
Ses pas la guidèrent vers l'antre de l'alchimiste, à cette heure il dormirait encore. C'était sans importance, elle voulait simplement jouir de la plus belle vue de la tour. Souriant intérieurement à cette fausse excuse, elle accéléra le pas.
La reine pénétra dans l'atelier et marcha vers la terrasse, évitant délibérément de regarder vers le lit du prêtre.
Sur son perchoir, à plusieurs dizaine de mètres du sol, Abby devinait les rues étroites de Xas, les tavernes encore allumées, des tâches brillantes et volatiles, des oasis pour différents pèlerins où des vies d'hommes et femmes s'entremêlaient pour quelques heures ou plus. Des vies qui existeraient encore quand l'astre du jour imposerait sa lumière.
Abby ne quitta pas des yeux la citadelle inégalement illuminée quand Marcus vint se poster près d'elle. La reine croisa simplement les bras sur sa poitrine, un geste qui pouvait passer pour un vague besoin de se protéger du vent glaciale à cette hauteur et cette heure. Un mensonge, le vent était son allié, elle ne le craignait pas, en revanche, elle appréhendait son comportement face à l'alchimiste rassurant à quelques pas à peine.
Aucun d'eux ne parla, fixant délibérément la ville dans le lointain. Abby aimait ces moments, des instants volés en compagnie d'un homme qu'elle ne pouvait aimer.
Elle se souvenait encore de leur rencontre, treize ans plus tôt, du jeune apprenti d'à peine vingt ans ramené du centre des quatre royaume : Elrach, la tour primordiale où vivait le grand prêtre, pour devenir le prochain prête du peuple de l'air à la mort de celui qui officiait.
Elle-même étudiait l'art divinatoire de la clairvoyance, un chemin que son père lui avait fait quitter, car elle n'avait déjà que trop tardé, et aurait dû se marier bien avant.
Abby avait croisé Marcus dans la grande salle où elle disait au revoir au roi avant son départ pour la tribu de Jake. Le désir lui était monté à la gorge et la transe qui l'avait assaillie dans sa tente cette nuit-là avait confirmé que le nouvel arrivé causerait sa perte si elle se laissait aller à son envie de sentir ses bras autour d'elle.
La nomination de Marcus en tant que prêtre trois ans plus tard, alors qu'elle était enceinte de Clarke et les années à la servir avec fidélité, justice et compréhension, encrèrent plus profondément en elle les sentiments qu'elle avait attribué à une adolescente ingénue. Plus que son mari, le sorcier discret, reconnaissant l'importance de la magie comme elle, la troublait, au point que parfois dans les bras de son époux, le visage de Marcus se confondait avec le sien, rendant coupable la reine d'une infidélité fantasmatique.
Abby baissa les bras puis les yeux vers la main inerte à quelques centimètres de ses propres doigts. Elle ferma les yeux s'imaginant les attraper, s'imaginant Marcus se tourner vers elle...
La bourrasque la ramena en haut de la tour. Le vent avait toujours su l'avertir et la reine inspira l'air frais pour s'éclaircir les idées, se retourna et repartit sans un mot ou un regard pour l'homme qui avait capturé son cœur et avec lequel elle aurait sans doute partagée sa vie, si la mort de sa sœur n'en avait décidé autrement.
Elle descendit la volée de marches d'un pas lent, se détachant petit à petit de ce qui l'accrochait encore dans les hauteurs de la tour et prit le couloir obscur vers la chambre pour la voir.
Une enfant d'à peine dix ans qui tiendrait la vie de sa fille entre ses mains.
Abby ouvrit doucement la porte et alluma une bougie dissimulée dans sa tunique. Elle observa le visage endormie pendant plusieurs minutes et ne bougea pas quand les yeux de l'enfant s'ouvrirent.
Leur regard s'accrochèrent. Reyes se frotta les paupières en silence, s'assit sur le lit puis se leva. Reconnaissant la reine, elle exécuta un révérence maladroite qui fit sourire la souveraine. Une orpheline qui possédait la magie se remémora Abby.
Elle s'approcha. L'enfant intimidée gardait la tête baissée et comme lors de leur première rencontre, Abby, en transe, posa la main sur sa joue, la caressant pour finalement soulever son menton et croiser le regard de la future gardienne de la Flamme. Elle lui sourit tendrement et révéla :
— Ton vœux sera exhaussé, petit corbeau, tu connaîtras les joies de la liberté comme tu l'entends...
Abby la fixa encore quelques instants et laissa une Reyes ne comprenant pas vraiment la confession de la reine de cité de Xas.
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La rencontre avec la princesse avait eu lieu dès le lendemain. Comme la nuit précédente, le prêtre l'avait emmenée dans son atelier où une jeune fille blonde attendait patiemment.
Ils les présenta. Reyes s'étonna du comportement réservé de la fillette à son égard puis se demanda, si comme elle, tout ceci ne la dépassait pas un peu.
Marcus les conduisit au milieu de la terrasse les fit s'asseoir en tailleur l'une en face de l'autre et se tourna vers l'horizon. En tenue de prêtre, il s'agenouilla face à la brise et se mit à parler doucement, ne permettant pas aux enfants d'entendre sa prière. Un oiseau cria au loin et Marcus s'inclina un peu plus bas en signe de reconnaissance.
Le magicien revint vers elle, une coupole en terre vide dans la main et la plaça entre les deux jeunes filles muettes qui gardaient les yeux baissés.
À genoux à côté d'elles, il posa délicatement une main sur le crâne de chacune, ferma les yeux, récitant d'une voix pleine de puissance :
— Filles de l'air, vous avez été choisies par les Dieux pour servir la magie sur cette terre, puissiez-vous vous en montrer digne et devenir les instruments attendus de La lumière, suivre la voie qui vous est demandée avec force, courage, harmonie et compréhension.
Il rouvrit les yeux et s'empara d'un poignard à sa ceinture, tout en continuant :
— À ces fins, vous devez jurer fidélité l'une envers l'autre par le lien du sang... Princesse Clarke, donnez-moi votre main.
La jeune fille lui jeta un coup d'œil, loucha sur l'arme, déglutit et avança son bras dans sa direction avec lenteur, malgré le regard rassurant qu'il lui lançait. La main sèche et chaude de l'homme attrapa son poignet et la lame lui entailla la paume dans un geste vif et précis tout en maintenant fermement le bras de la fillette pour qu'elle ne le retire pas dans un réflexe incontrôlable. Il hocha la tête vers elle, pour lui signifier qu'elle avait bien agi, laissant les gouttes de sang tomber une à une dans la coupelle et se tourna vers Reyes qui pinçait les lèvres.
— Reyes, donnez-moi votre main...
Elle hésita et croisa le regard de la princesse qui n'avait pu empêcher les larmes de couler sur ses joues. Elle se mordit la lèvre puis tendit le bras. L'enfant grimaça quand l'acier entama sa peau mais ne cria pas et refoula les larmes, observant à la place son sang se mêler à celui de Clarke colorant la terre au fond du bol.
Marcus lia les mains des deux enfants les enfermant dans les siennes tout en récitant une incantation dans une langue qu'elles ne comprenaient pas.
Les yeux grand ouverts Reyes détailla la lumière dorée s'échappant de leur mains accrochées et sentit la douceur de ce halo lumineux courir le long de son bras et exploser dans sa poitrine en une myriade d'étincelles remplies d'amour pour la jeune fille en face d'elle. Le regard de Clarke trahissait la même émotion et elles surent qu'elles seraient unies à jamais.
— Votre sang a été échangé, précisa Marcus, vous voilà liées l'une à l'autre, sœurs de la magie.
Il lâcha leur main et se leva en récupérant le récipient, leur ordonna silencieusement de rester à leur place et repartit, le poignard à la main, vers le bout de la terrasse.
Marcus déposa l'arme sur le bol et les paumes tendues vers le ciel, il les transforma lentement en en poussière fine, laissant le vent s'en emparer, accepter cette preuve de leur dévouement, emportant une partie de leur serviteur du peuple de l'air.
Il se tourna vers elles et leur fit signe d'approcher. Comme lui, elle s'agenouillèrent et remercièrent les Dieux de leur avoir permis de remplir ce rôle important dans leur monde.
Marcus les raccompagna jusqu'à la grande salle où attendait le couple royal. Il leur sourit et expliqua que le rituel s'était bien passé. Jake prit sa fille dans ses bras pendant qu'Abby avançait vers Reyes.
Une fois devant l'enfant, Abby posa les mains sur ses épaules et lui révéla qu'elle serait, au même titre que Clarke, leur fille à partir de maintenant et la guida vers Jake qui l'enlaça doucement et lui sourit avec tendresse.
Le prêtre observa un instant l'attitude du roi envers l'enfant, puis rejoignant la reine, il murmura :
— Que se passe-t-il, ma reine ? Vous semblez soucieuse.
Abby soupira, elle avait hésité à briser le rituel puis s'était abstenue, les Dieux ne faisaient pas d'erreur, tout cela avait donc un sens, une explication qu'elle découvrirait un jour ou l'autre.
Les yeux fixées sur ses filles et son époux qui parlaient, elle chuchota :
— N'avez-vous pas décelé quelque chose de particulier chez notre jeune Reyes ?
Marcus fronça les sourcils et répondit :
— Elle est très intelligence pour son âge et sa magie promet d'être grandiose...
Abby esquissa un sourire triste à cette remarque et demanda :
— Et savez-vous pourquoi ?
Il se tourna vers elle et scruta son profils ne trahissant pas la moindre expression.
— Qu'avez-vous vu ?
La reine épia sa nouvelle fille qui riait à une remarque de Clarke et lâcha :
— La future gardienne de la Flamme est une métamorphe.
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La naïveté ne faisait pas partie de son caractère. Reyes savait pertinemment que ses nouveaux « sentiments fraternels et protecteurs » envers Clarke résultaient du rituel sur la terrasse. Elle comprenait parfaitement l'intervention de la magie comme catalyseur dans leur relation, s'il avait fallu attendre qu'elles développent cette confiance aveugle l'une envers l'autre d'une manière naturelle cela aurait été légèrement plus long...
Marcus leur avait révélé que la porteuse de la Flamme mourait généralement bien plus tard, et que l'âge moyen des nouvelles candidates avant de commencer ne serait-ce que les préparations pour leur nouveau rôle atteignait normalement quinze ans.
Elles étaient en avance de cinq ans...
Les deux jeunes filles avaient accusées le coup. Une partie de leur enfance venait de leur être arrachée et elles se retrouvaient plongées dans le monde de la magie et des adultes plus tôt que prévu.
Reyes sentait bien que le prêtre en était affecté, son regard sur elle avait changé depuis le rituel. Elle le surprenait parfois à la fixer d'une manière insondable, perdu dans une réflexion dont elle n'ignorait pas être le sujet principal. Il lui avait dit qu'elle était peut-être la future gardienne de la Flamme ou sa prochaine apprentie. Quelque fût le destin que lui réservaient les Dieux, Reyes espérait que le Marcus agréable qui lui avait expliqué la symbolique de leur monde referait surface assez vite.
Le couple royal tint sa promesse et l'adopta comme si elle avait toujours était leur fille. Une attitude étonnante et assez perturbante pour elle. Reyes, plus habituée à une certaine indifférence de la part des adultes restait méfiante vis-à-vis d'eux. Cela ne faisait que trois jours qu'elle était devenue la sœur de Clarke et voilà qu'un autre voyage s'annonçait, ils devaient partir pour Elrach, la cité du grand prêtre, où elles rencontreraient les autres candidates avant de voyager en direction de Polis pour la cérémonie de la Flamme.
Contrairement à son premier voyage, Reyes fut traité avec soin et avec tous les égards qu'engendraient sa nouvelle position, occupant le carrosse de la famille royale en personne.
Elrach se situait à plusieurs centaines de miles de Xas et ils ne quittèrent pas la voiture pendant quasiment deux jours. Ce qui aurait pu être un voyage pénible s'avéra une source de renseignements pour l'enfant. Reyes comprit que Clarke et son père partageait une relation plus profonde que la reine et sa fille.
Cette découverte l'attrista, comment la princesse ne voyait-elle pas l'extraordinaire humanité de sa mère ?
Elle apprendrait pas la suite que cette préférence était normale. Que chaque première fille, promise à être candidate comme porteuse de la Flamme, entretenait une certaine distance avec sa mère pour que la transformation de la porteuse et leur séparation soient moins difficiles entre elles.
Reyes plaignit la reine, sa vie n'était plus la sienne depuis la mort de sa sœur d'après ce qu'elle avait conclu des paroles du prêtre et l'enfant se promit qu'elle ferait tout pour apaiser une peine enfouie chez l'oracle.
Elle se demanda si la magie était responsable de ce nouveau sentiment de protection envers Abby puis s'aperçut que non. Un lien entre elles était né dès leur premier contact, durant lequel une enfant perdue avait découvert la douceur, par une simple caresse sur sa joue, de la part d'une femme qui voyait quelque chose d'unique en elle.
Quand le carrosse s'arrêta et que la famille en sortit, Reyes se dit que la tour de Xas paraissait bien petite par rapport au donjon de vingt-huit étages construit en plein centre des quatre royaumes, et en haut duquel une lumière brillait rassurante et éternelle, tel un phare guidant vers le rivage les navires à la dérive dans un océan de ténèbres.
Elrach bien que portant le nom de cité, n'en était pas vraiment une. Seule cette flèche de marbre blanc touchant le ciel et quelques maisons à ses pieds tenaient lieu d'habitations. À vrai dire, la tour abritait essentiellement des salles d'études pour les détenteurs de magie, des êtres de plus en plus rares comme lui confirmerait Abby par la suite, un endroit où ses camarades enlevées dans le désert avec elle, grandiraient loin de la pauvreté et de la violence qui leur étaient destinées.
Ils pénétrèrent dans la tour blanche et marchèrent le long d'un couloir immense et froid, accompagnés de l'écho de leur pas, atteignant finalement la salle où les attendait le grand prêtre en personne, un certain Dante Wallas.
Reyes ne s'intéressa pas à lui.
Les corridors nus et peu accueillants qu'elle venait de traverser jurèrent avec l'imposante pièce dans laquelle elle se trouvait qui proposait trois niveaux jusqu'au plafond. Les colonnes cannelées soutenaient chaque étage et les frises aux couleurs vives accentuaient la solennité et l'harmonie des proportions parfaitement maîtrisées par l'architecture de ce qu'elle saisit être la base d'un temple phénoménale.
La coupole de la grande salle du château de Xas, si appréciée, paraissait bien dérisoire par rapport à cette manifestation de la beauté sur terre dont les vitraux, apportant la lumière du soleil à différents endroits stratégiques, augmentaient le mystère et l'aura de sagesse autour d'elle.
Son admiration à peine voilée fut interrompue par l'homme en tunique blanche qui se dressait devant elle et la considérait gravement.
L'enfant aurait dû baisser les yeux devant le grand prêtre en personne, pourtant elle n'y arrivait pas, il l'en empêchait et ses iris verts rivés dans les siens, semblaient lire au plus profond de son être. Il finit par fermer les paupières, esquissant un sourire énigmatique et tourna la tête vers la reine et Marcus, à quelques pas, les interrogeant silencieusement du regard. Ils confirmèrent discrètement ses conclusions et il secoua la tête en proie à un questionnement intérieur puis s'éloigna, leur précisant qu'à partir de maintenant, les deux enfants devaient être séparées de leur famille jusqu'à la fin de la cérémonie au royaume du feu.
Comme son quotidien depuis plus d'une semaine, Reyes fut emmenée dans une pièce qu'elle ne connaissait pas, accompagnée cette fois d'une autre personne, Clarke. Les enfants se tenaient la mains pour se donner du courage en entrant dans la salle sans fenêtre et étouffante ou se trouvaient déjà plusieurs autres fillettes.
Elles furent présentée par Dante au groupe et Reyes détailla les jeunes filles.
La couleur de leur habit trahissait le peuple auquel elles appartenait.
La princesse Lexa et Luna du peuple de l'Eau portaient du bleu.
Reyes remarqua une détermination importante, une assurance énervante dans leur regard ne faisant qu'apporter une confirmation sur la supériorité ressentie par les habitants d'Azgeda sur les autres royaume.
Contrairement à elles, Gaïa et Niylah du peuple de la Terre, suintaient l'humilité et l'harmonie avec ce qui les entouraient. Reyes fixa longuement la couleur verte qui les caractérisait, douce et changeante en fonction de la lumière, passant étrangement au brun quand elles se mouvaient en s'éloignant de la flamme d'une torche.
Et enfin, le « couple » le plus étrange, celui du Feu. Vêtue de rouge sang, ne prononçant pas la moindre parole mais vous scrutant d'une manière dérangeante, les jeunes filles du nom d'Octavia et Ontari ne paraissaient pas ravies d'être présentes.
Clarke essaya timidement d'engager une conversation une fois le grand prêtre parti, mais se confronta au regard plein de dédain de la princesse de l'eau, à la haine non dissimulée de la princesse du feu et même le sourire engageant de la princesse de la terre ne suffit pas à la convaincre de continuer ce début de civilité.
Les huit enfants plongèrent dans un silence pesant pendant quelques temps pour finalement se recroqueviller naturellement dans un coin de cette pièce carrée près de leur future gardienne, chuchotant avec énergie sur les autres candidates et leur comportement.
Clarke méditait, s'interrogeant sur le pourquoi d'une telle condescendance de la part du peuple de l'eau et tant de furie de la part du feu. Au fond, le peuple de l'air ne connaissait pas grand chose de ses voisins, et comme Reyes, se demandait si la paix entre eux n'existait pas bel et bien simplement parce qu'elle assurait le prolongement de leur race.
Les lois étaient simples, si un peuple en attaquaient un autre il s'exposait à la disparition complète de ses membres et engendrerait la faute d'avoir brisé l'équilibre dans leur monde.
La magie n'existait que grâce à cette harmonie, à cette paix entre eux.
Pourtant la méfiance continua toute la soirée. L'ambiance aurait pu s'améliorer pendant le repas qu'elles partagèrent, mais encore une fois, les jeunes filles du feu ne répondirent à aucune question et se contentèrent de jeter des regards peu amènes aux représentes du peuple de l'eau, ignorant superbement la terre et l'air, étouffant par cette attitude l'envie d'une alliance entre les autres jeunes filles qui ne cherchèrent plus vraiment à se connaître.
Les nattes, à même le sol n'empêchèrent pas Reyes de dormir, Clarke, moins habituée à cette litière très dure, chercha un moment le sommeil jusqu'à ce que sa nouvelle sœur, réveillée par ses mouvements, décide de la distraire en lui décrivant la beauté du désert, lui parlant du vent jouant avec le sable, enchantant le jeune princesse qui s'endormit avec des images plein la tête.
Dès le lendemain, elles furent conduite au carrosse qui commença son périple vers Polis.
La capitale se situait derrière les montagnes visibles d'Elrach, moins loin que Xas. Le voyage s'avéra plus court et seule une journée fut nécessaire pour découvrir le royaume du feu.
À la nuit tombée, le cortège du grand prêtre pénétrait dans la cour de la forteresse noire.
En sortant du véhicule, Reyes leva la tête vers la tour effrayante. Marcus lui apprendrait par la suite que la pierre utilisée pour les constructions était responsable de cette couleur noire, qu'elle provenait du volcan en activité visible de la capitale, l'emblème de ce peuple, un feu en ébullition qui ne s'éteignait jamais.
Elles furent à nouveau conduit à travers des couloirs guère éclairés. Contrairement à Elrach, cette fois, les jeunes filles de chaque peuple se retrouvèrent séparées et laissés dans des chambres plus accueillantes avec leur sœur de cœur.
Le grand prêtre lui-même vint avertir chaque « couple » que la porteuse de la Flamme venait de mourir, que la nouvelle cérémonie aurait lieu à minuit, et qu'il était temps qu'elles se préparent.
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N / A : Notes importantes.
Un chapitre sera posté un mardi sur deux.
Cette histoire est assez noire et les personnages pas toujours sympathiques... De plus, comme il s'agit d'un UA, le caractère des personnages peut varier et, de nouveaux personnages n'existant pas dans la série, sont susceptibles d'apparaître .
Je tiens à remercier Esys, qui par le biais de son histoire Résilience, m'a fait voir le personnage de Becca sous un autre jour...
Bonne lecture...
