Quand la neige tombe, c'est plus fort que toi, tu ne peux t'empêcher d'y repenser. De te rappeler elle.

Il neigeait, le jour où elle t'a invoqué – il neige toujours, dans cette forêt allemande où se cache le château ancestral des Einzbern. C'est ce qui t'a accueilli, lorsque tu as foulé à nouveau la terre – des flocons blancs, des murs blancs, et elle dans sa robe blanche, le visage pâle sous des cheveux d'argent, sans autre dissonance que deux prunelles rouge sang. Un univers de blanc.

Tout comme il neigeait le jour où elle est morte dans tes bras – le teint si blanc, son manteau blanc ruiné par son sang rouge coulant sur la neige blanche. Déjà si froide contre ta poitrine, aussi froide que les flocons tombant imperturbablement sur vous deux.

Elle était belle, ces deux jours – elle a toujours été belle, mais ce sont les deux jours où ça t'a le plus marqué. Où elle t'a le plus rappelé une de ces rares statues d'ange que tu as eu le privilège d'apercevoir à une ou deux reprises – si pure, si détachée de ce monde. Si pareille beauté se trouve en ce monde imparfait, n'est-ce pas la preuve que la grâce existe ?

Seulement, tu aurais dû t'en douter, la grâce n'est qu'éphémère. Elle était condamnée à n'être qu'un bref chapitre de ta seconde vie, rien qu'un prologue de quelques jours pour les soixante ans de labeur ayant suivi. Une simple introduction.

Mais tu te rappelles. Toute transitive qu'elle était, elle t'a ramené en ce monde. Comment pourrais-tu jamais l'oublier ?

Tu sais que tu en seras incapable. Que ces deux jours ne s'effaceront pas de ta mémoire. Les souvenirs ne fondent pas, contrairement à la neige.

Cette neige qui tombait si doucement, le jour où elle est entrée dans ta vie, et le jour où elle en est sortie.