12 avril 1961

Bilius Weasley s'empare du Soafle – il remonte le terrain tel un boulet de canon ! – la foule est en délire, mesdames et messieurs, je n'ai jamais vu une telle aisance chez un joueur – Aïe ! Voilà les joueurs de l'équipe adverses – mais que fait-il ? il ne passe pas à ses équipiers – il passe un premier joueur, feinte le deuxième, un dernier tonneau pour éviter le cognard que le batteur français vient de lui renvoyer – il passe le gardien avec une facilité déconcertante – tir - et c'est le buuuuuuuuuuut ! Magnifique, Mesdames et Messieurs, ce garçon est un géni du Quidditch - Grâce à lui, l'Angleterre mène désormais la France par 350 points à 100. L'écart se creuse grâce au poursuiveur le plus talentueux de l'histoire du Quidditch – c'est incroyable ! L'Angleterre est en passe de remporter le titre mondial – le stade résonne des acclamations à la gloire du jeune joueur – Bilius ! Bilius ! Bilius !…

- Bilius ! Le déjeuné est près.

D'un coup, d'un seul, le stade s'évanouit sous mes yeux, les acclamations cessent et le sublime Nimbus 1000 sur lequel je venais de marquer un but décisif lors la final de la Coupe du Monde de Quidditch n'est plus que l'antique Brossdur 3 de Papa. Le contact rugueux du manche plein d'échardes sur mes paumes achève de me ramener définitivement à la réalité.

- BILIUS !

Je vois ma mère qui passe son visage courroucé par l'embrasure de la porte. Résigné, j'atterris en soupirant (et en souplesse, s'il vous plaît).

- J'arrive M'man !

- Essaie de retrouver ton frère, tu veux ? Il m'a dit qu'il sortait cinq minutes et voilà bien une heure qu'il est dehors. Je suis sortie tout à l'heure mais je ne l'ai pas trouvé.

Je passe déposer notre balai période post-néolithique dans la petite cabane au fond du jardin et ne met pas longtemps à retrouver mon frère. Il est entrain de rêvasser, comme d'habitude, lui qui a toujours la tête dans les nuages. Je trouve ça très agréable d'ailleurs. Ca me change de l'autre qui a à peu près autant de fantaisie qu'une poêle à frire.

Je suis le seul à connaître sa cachette. C'est une de mes grandes fiertés. La preuve qu'il me fait confiance. En échange, je viens le déranger le moins possible. Enfin, j'essaie.

- Tu viens manger, Arthur ? Maman nous a appelés.

- Encore cinq minutes.

Il a le nez pointé vers le haut.

- Ah non, pas d'accord ! Si Maman se met en colère c'est encore sur moi que ça va retomber.

Il ne me répond pas. Il fixe obstinément le ciel comme si il essayait de distinguer quelque chose de particulièrement difficile à… distinguer, justement.

- Mais qu'est-ce que tu regardes, comme ça ?

- J'essaie de voir l'homme dans l'espace.

Je tire un sourcil vers le haut et l'observe d'un œil circonspect. Ca y est, il délire. Je lui avais pourtant dit de ne pas mettre autant de brillantine dans ses cheveux. Ca a finit par lui engluer les neurones.

- L'homme dans l'espace ?

Il pointe le doigt vers le ciel, les yeux brillant d'excitation.

- Les moldus ont envoyé un homme dans l'espace, tu te rends compte ! Gagarine, il s'appelle. Un Russe. Il est là-haut. Il tourne autour de la terre.

- Un homme dans l'espace ? je répète un peu perdu. Mais pour quoi faire ?

Arthur me regarde d'un un air sidéré.

- Pour quoi faire ? Mais pour explorer l'espace. Pour repousser les limites de la connaissance. Pour aller toujours plus haut, plus vite, plus loin…

- Bon ça va, j'ai compris ! je l'interromps, sentant poindre l'un des ses habituels discours interminables. Allez viens ! J'entends d'ici Aaron nous traiter de sales gosses désobéissants.

Il finit enfin par se lever, jette un dernier coup d'œil plein de regret au ciel et consent à me suivre.

Aaron est notre frère aîné. C'est le plus grand rabat-joie que la terre ait jamais porté. Il est en troisième année à Poudlard. C'est chouette de ne pas encore être à Poudlard, au moins je n'ai à le supporter que pendant certaines vacances. Arthur doit entrer en première année en septembre. Je préfère ne pas trop y penser pour le moment.

Lorsqu'on arrive au bout du jardin, ça ne loupe pas. Aaron nous attend sur le pas de la porte.

- Qu'est-ce que vous faîtes encore dehors ? Maman vous a dit que c'était l'heure, il me semble. Ne profitez pas que papa travaille tard pour désobéir.

A chaque fois, c'est la même chose. Dés que Papa est absent, c'est à dire très souvent, Aaron en profite pour jouer les chefs.

Je ralentis légèrement l'allure et attends qu'il soit rentré pour chuchoter à Arthur :

- Dis ? Tu crois que si on demande gentiment aux russes, ils voudront bien envoyer Aaron dans l'espace ?