Ce texte a été écrit pendant la nuit du Fof sur le thème Objectif.

Il n'y avait qu'une seule chose qui l'obsédait depuis qu'il l'avait rencontré. Une seule qui éclipsait toutes ses autres préoccupations. Même devenir champion olympique devenait secondaire lorsqu'il songeait à le battre. Lui. Le dauphin. Haru.

Alors il s'était entraîné, entraîné jusqu'à devenir le plus fort. Il avait musclé son corps, avait appris à ne faire qu'un avec l'eau… Il avait relégué au fond de son esprit tout ce qui n'était pas la victoire, avait écarté sa sœur, rejeté ceux qui avaient été ses amis…

Il était prêt à tout. Absolument à tout. Même si c'était à l'encontre de ses valeurs, à l'encontre de tout ce en quoi il croyait. Il voulait le vaincre, il le vaincrait. Quoiqu'il lui en coûte. Parce qu'il avait l'impression que s'il ne le faisait pas alors rien de ce qu'il ferait ne pourrait lui permettre d'être heureux. Ce n'était pas seulement une question de fierté, c'était un besoin, un besoin instinctif et brutal qui lui déchirait l'âme.

Enfin c'était ce que Rin croyait jusqu'à ce qu'il ne se batte vraiment contre Haru et qu'il gagne. Alors pour la première fois depuis des années, le jeune homme se mit à douter. Il hurlait sa joie, déchirait le cœur de celui qui avait été son rival, se montrant absolument infect mais son corps entier lui faisait mal. Tellement mal que c'était presque dingue qu'il réussisse à sourire comme cela.

Lorsqu'il fut seul, Rin se mit à crier. Crier plus fort, encore et toujours pour que la douleur parte, qu'elle le quitte. Enfin. Mais elle resta. Toujours plus forte. Et il ne savait pas pourquoi. Il ne comprenait pas. Il avait réussi son objectif, il avait accompli ce qu'il avait toujours voulu faire alors pourquoi, pourquoi ressentait-il ce vide ?! Qu'est-ce qui clochait chez lui franchement ?! Qu'avait-il fait pour ne pas avoir droit au bonheur ?

Cette nuit-là, il ne parvint que difficilement à trouver le sommeil. D'ailleurs, celui-ci fut complètement contre-productif, les nombreux cauchemars qui l'assaillirent l'empêchèrent de se reposer et plus d'une fois, il se réveilla en sursaut, le corps trempé de sueur. Dans son esprit, quelqu'un l'appelait au secours. Quelqu'un qu'il ne supporterait pas de voir mourir, qu'il ne supporterait pas de perdre. Mais qui ?! Il ne parvenait pas à s'en souvenir. Son père peut-être…

Le lendemain, il alla à la compétition en traînant les pieds et avec l'impression que toute sa vie n'était qu'une intense mascarade. Il avait renoncé à tout, il s'était battu jusqu'au bout et cela n'avait servi à rien. Il y avait toujours ce vide immense en lui, ce gouffre sans fond qui aspirait son âme et brulait ses veines.

Et puis, il y eut la révélation. Nitori qui lui disait qu'Haru allait faire un relais. Ses jambes qui le portèrent jusqu'au bassin sans qu'il ne comprenne vraiment comment. Et puis, les voir. Makoto, toujours aussi grand, toujours aussi puissant. Nagisa, petit mais souple, le meilleur des nageurs de brasse. Rei, cet inconnu, ce voleur, qui ne méritait vraiment pas d'être là. Et puis lui, Nanase, Haruka, Haru, tellement beau que ça lui faisait mal au cœur, tellement doué qu'il semblait qu'il ne faisait qu'un avec l'eau.

Alors ce fut le déclic, tandis que ses yeux dévoraient le corps de son ancien ami, tandis que son cœur battait la chamade, tandis qu'Haruka posait sa main sur le rebord de la piscine et que son équipe gagnait, Rin comprit enfin quel était ce qu'il désirait plus que tout au monde, son véritable objectif.

Ce n'était pas de vaincre Haruka. C'était Haru lui-même. Haru, son cœur, son sourire et son amitié.