Le Règne Rouge
Pairings : Darius x Vladimir ; Riven x Katarina ; Vi x Caitlyn ; Swain x Leblanc ; Zyra x Cassiopeia (et sans doute bien d'autres...)
Note : Pour des raisons évidentes de cohérence scénaristique, je ne peux pas traiter tous les couples, faire apparaître tous les personnages en même temps. Je consacrerai probablement alternativement un chapitre au développement des personnages principaux (tous ne le sont pas).
Cette fic est un cadeau pour une personne qui se reconnaîtra ;)
Prologue :
Ce n'était pas bien compliqué d'ordinaire pour lui de capter l'attention de quelqu'un. Sauf lorsqu'il s'agissait de cette personne-là. Avec ce petit génie, un sourire trop assuré et brillant ou le fait de multiplier les coups d'éclat, aux yeux de ses camarades naturellement et non de ses professeurs qui le réprimandaient constamment, ne suffisait pas. En réalité, ça ne le menait nulle-part, excepté en retenue, week-end après week-end. Il ne savait même pas vraiment ce qu'il cherchait, en tentant ainsi d'entrer en contact avec lui. Il était probablement juste intrigué ; il peinait à imaginer quel plaisir l'albinos pouvait trouver à lire des bouquins ennuyeux à longueur de journée, cloîtré dans la bibliothèque mal éclairée de l'école. Plusieurs fois, il l'avait regardé par la fenêtre, jetant un coup d'oeil depuis le terrain de basket. Il n'était peut-être pas bien futé, mais avait noté quelques petits détails surprenants. Vladimir s'asseyait toujours à l'exacte même place, qu'il y ait d'autres élèves ou non. Il disposait toujours d'une manière similaire ses effets personnels sur la table, et ce après les avoir sortis dans un ordre invariable. Darius s'était senti encore plus éloigné de lui que s'il avait été un extraterrestre. Lui passait pour un gros dur plutôt brutal, un peu lourdingue sur les bords, voire grossier quand il balançait des plaisanteries douteuses, insultait ses camarades. Il était surtout réputé pour être le cancre de l'institut et c'était sûrement le premier mot qui venait à l'esprit de quiconque parlait de lui. Ils se gaussaient de son manque de culture, de sagacité, et du fait qu'il était fraîchement sorti de ses campagnes de Noxus pour devenir soldat. La majorité s'accordait sur le fait qu'il ne gravirait jamais les échelons et stagnerait au rang minable de troufion. D'ordinaire, Darius se fichait bien de ce que racontaient les gens, dans son dos ; ceux qui s'étaient hasardés à se moquer devant lui avaient fini leur journée à compter leurs dents dans la cour. Par la violence, il avait gagné une forme de respect, même si ce n'était qu'hypocrisie. Le comportement de Vladimir à son égard, en revanche, était le pire, parce qu'il ne lui donnait pas l'occasion de le « corriger » d'un bon coup de poing en le raillant en public, mais il le méprisait si cordialement qu'il ne lui lançait pas même un regard dédaigneux. C'était comme vivre en pleine guerre froide et Darius, qui n'avait rien fait pour mériter ça, avait envie d'en savoir la raison.
Il n'était peut-être pas malin, mais il pouvait se montrer convaincant, quand il vous plaquait contre le mur en vous menaçant ; il avait vite appris deux trois choses au sujet de Vladimir, en interrogeant de la sorte ses fréquentations. Toutes ces informations l'avaient conduit à une seule conclusion : ils n'étaient pas du tout du même monde. Bien que noxiens, c'était comme si Vladimir et lui avaient grandi dans des univers opposés. Et ce fut précisément ce qui décida Darius à se rapprocher de Vladimir ; il voulait savoir comment était sa vie, comment aurait été sa propre vie s'il avait été né avec une cuillère en argent dans la bouche à son instar. L'inconnu l'intriguait. Lui avait grandi dans une petite ferme, fils de paysans, tandis que Vladimir descendait d'une lignée de la haute aristocratie noxienne. Apparemment, des serviteurs l'avaient élevé, sans pour autant pouvoir prétendre à quelque autorité sur lui, ce qui expliquait ses airs d'enfant roi, et pour cause, ses parents semblaient comme... absents ? Darius n'avait pas saisi ce que balbutiait le type qu'il étranglait à moitié. C'était d'autant plus étonnant que Vladimir était bien plus jeune que Darius, déjà majeur ; Vladimir, lui, ne dépassait pas la quinzaine. Qu'il fût livré à lui-même, assisté par des domestiques, était étrange. Tout cet ensemble d'éléments inexplicables et incongrus renforçait la curiosité de Darius.
Destiné à poursuivre dans l'armée de Noxus, sa journée se scindait en cours et entraînements physiques, les seconds occupant davantage de plages horaires. Lorsqu'il eut terminé sa session de fin de matinée, au lieu d'aller directement déjeuner, il choisit de faire un détour par la bibliothèque. Comme prévu, Vladimir était là, fidèle à son poste.
Hum... Darius n'avait pas honte de l'avouer ; il n'avait jamais mis les pieds auparavant dans cet endroit. Le seul son de la porte s'ouvrant et se fermant parut agacer prodigieusement Vladimir, qui lui jeta un regard bref, mais incisif, par-dessus son épaule. Darius en eut l'impression de profaner une terre sacrée. Ou un refuge. Il alla à lui de sa démarche habituelle, calme, plutôt fière mais sans excès ; il n'était pas de ceux qui roulaient des mécaniques et cherchaient toujours à impressionner. La nervosité le gagna incompréhensiblement alors qu'il se rapprochait de son but et il devina que Vladimir n'était pas imperméable à cette gêne non plus. Ses longues mains trop pâles frissonnèrent légèrement, alors qu'il tassait ses feuillets. La proximité le mettait mal à l'aise, de toute évidence.
- Vladimir, j'peux te parler une minute ?
Le regard que Vladimir lui lança était si agressif, si glacial, que le grand Darius, celui-là même qui ricanait ouvertement au nez du principal et des professeurs, tressaillit. Pendant quelques secondes, incapable de savoir comment réagir, il resta debout, ne faisant plus un geste, ni un son. Remis de sa surprise, il s'empara de la chaise voisine de la sienne et s'assit. Sur-le-champ, Vladimir se décala. C'était bien plus cruel qu'une moquerie c'était plus vicieux et insultant. Vladimir lui signifiait clairement : Tu n'es même pas assez bien pour que je t'accorde le privilège de siéger à mes côtés. Lorsqu'il le regardait, il ne voyait que ce fils de roturiers méprisable. Mais encore aurait-il fallu qu'il lève de nouveau les yeux sur lui ! Or il ne lui accorda même pas cette attention. A la place, il se replongea dans sa lecture, comme si rien ne s'était passé. Darius n'osait plus bouger, pétrifié sur son siège. Et il se mortifiait, parce qu'il vivait là la situation la plus ridicule de toute son existence. Il se mettait dans des états incroyables pour rien. Il en venait à se poser des questions absurdes, à se répéter mentalement les phrases qu'il avait dites ou à se rassurer en se souvenant s'être douché après le sport ; peut-être paraissait-il encore en sueur ? Il se secoua. Ça me ressemble pas. Il coupa cette sérénade de pensées stupides. Il s'éclaircit la voix et rompit le silence, arrachant un soupir ennuyé à l'albinos :
- J'me demandais...
Un reniflement peu amène, suivi d'un coup d'oeil en coin des plus désagréables, lui annonça la couleur. Néanmoins, il poursuivit :
- Comme t'es le meilleur élève de notre promo, t'accepterais de m'aider pour les examens ?
Vladimir ferma sèchement son livre et ricana nerveusement.
- Même si je t'accordais chaque minute de mon temps, qui est bien trop précieux, il ne reste que deux semaines et je doute que ton cerveau assimile quoi que ce soit en ce laps de temps.
Darius crut qu'il allait le tuer. Il se contint à grand peine.
- Pourquoi t'es comme ça ? Rétorqua-t-il, les sourcils froncés, Vladimir l'imitant vite, surpris qu'il lui réponde.
- Qu'est-ce que t'insinues ?
- Tu t'enfermes dans cette putain de pièce comme si c'était une tour de verre ! T'es à côté de la plaque !
Personne au grand jamais n'avait dû lui parler de la sorte, car Vladimir manqua de s'étrangler. Ses joues blafardes rosirent presque de colère.
- Quoi qu'il en soit, je n'ai pas besoin de l'avis d'un débile profond sur la façon dont je mène ma vie.
A ce stade, Darius regrettait d'avoir essayé de faire un pas vers lui. Il se dressa et sortit en claquant la porte. Durant son entraînement du soir, il envoya bien quelques gars à l'infirmerie et, dans sa tête, tous avaient le visage de Vladimir.
Il n'y avait pas que Darius qui suait sang et eau pour espérer une vie correcte. Si douée qu'elle défiait parfois les garçons, Riven ne déméritait pas non plus dans les matières requérant davantage d'intellect, même si elle devait avouer préférer battre des mannequins de bois à bouquiner. En dépit de son jeune âge, de légères cicatrices parsemaient déjà ses bras et jambes bronzées. Elle travaillait dur en vue d'atteindre son objectif et son corps qui avait d'abord souffert de son entraînement intensif s'était développé et musclé à hauteur de ses ambitions. Aujourd'hui, elle maniait presque avec aisance son épée. Mais elle se montrait si perfectionniste, si attentive à son but, qu'elle en perdait tout le reste de vue. Aussi n'avait-elle ni amis, ni même simples connaissances. Son caractère dur et affirmé ne la rendait pas forcément très avenante. Elle intimidait les garçons et se faisait rejeter par les filles qui ne la comprenaient pas.
De l'endroit où elle s'exerçait, elle entendait les éclats de voix des disciples de la maison Du Couteau et tâchait de ne pas se laisser déconcentrer. Elle n'était pas du genre à espionner, à se mêler des affaires d'autrui, mais elle avait détecté la présence, derrière ces murs et cette rangée d'arbres lugubres, d'un homme assez âgé, d'un second plus jeune et d'une jeune fille, qui devait avoisiner son âge. Jamais elle n'entraperçut l'un d'eux, jusqu'à ce qu'un soir, un ricanement ne lui parvienne. Elle se désintéressa de sa lame qu'elle aiguisait et se tourna vers la muraille. Perchée entre deux créneaux, une jeune fille à la chevelure rouge tressée, dont des mèches rebelles s'échappaient, l'observait d'un air à la fois narquois et alangui. Dans l'instant, Riven ressentit une montée d'agressivité, mais elle ne réagit pas et baissa de nouveau les yeux, reprenant sa tâche, faisant fi de l'inconnue. Celle-ci, peu habituée à être ainsi ignorée, la héla :
- Jolie épée...
Elle sauta à bas de son perchoir.
- Mais pas vraiment maniable.
Riven gardait les yeux rivés sur son arme, jusqu'à ce qu'elle soit avalée dans l'ombre de la femme. Comme elle demeurait muette, celle-ci reprit, toujours de la même voix assez taquine qui irritait Riven :
- C'est trop lent. Voilà pourquoi les poignards sont plus efficaces.
- Très bien, répliqua sombrement Riven. Tu me piquerais avec tes dagues, mais je te couperais en deux avec mon épée.
Katarina ne souffla mot. Alors que Riven l'imaginait furieuse, offensée, son sourire s'accentuait. Loin de s'en douter, Riven rangea son aiguisoir dans sa besace.
- Ecarte-toi.
L'apprentie assassin ne remua pas d'un pouce. Butée ? Bien, moi aussi. Riven avait à peine feint de se redresser que l'assassin dégainait un coutelas. Ce que l'inconnue ne soupçonnait même pas était qu'elle avait déjà tout prévu. Son poing se resserra autour de son poignet, beaucoup plus fin, et Riven retourna le couteau contre sa propriétaire, le plaquant contre sa gorge.
- ça manque de muscles et... de rapidité tout ça. C'est... trop lent, rit-elle, à mi-voix.
Malgré sa contrition d'avoir été si prévisible, l'assassin afficha un sourire forcé.
- Tu m'as déjouée... Tu es douée. ça ne m'étonne pas. Tes coups d'épée sur ces pauvres cibles me donnent la migraine à longueur de journée.
Une bien petite pique, qui n'en était peut-être même pas une volontaire. Riven rétorqua, d'une voix peu amène, le visage fermé et dur :
- Je t'entends aussi et, rassure-toi, ça ne me fait pas davantage plaisir.
Cependant, elle relâcha sa prise, libérant le bras de la femme et la repoussant presque, ce qui ne la désarçonna pas.
- Katarina, déclara-t-elle subitement.
Riven la balaya brièvement du regard, d'un air absolument désintéressé, avant de se détourner et de s'éloigner , son sac sur l'épaule et son épée rengainée. Aux abords des grilles, elle marqua un temps d'arrêt, paraissant hésiter, puis finalement lâcha :
- Riven.
Elle n'escomptait pas revoir cette Katarina de sitôt, sauf s'il lui prenait encore l'envie de franchir le mur qui les séparait, mais cracher son nom une fois de temps en temps n'engageait à rien. ça ne pouvait pas lui nuire.
Il passa une main calleuse sur son visage harassé. Les jointures avaient été déjà brisées plusieurs fois ; la peau couturée en attestait. C'était sans doute son second moment préféré dans la journée. Quand il se retrouvait seul, sur le banc devant son casier. Il ne ressassait pas ; il faisait juste rapidement le point. Il était mécontent, mais ne pouvait en déterminer la raison précise. Sa journée n'avait pas été plus mauvaise, ni meilleure, que d'habitude. Pourtant, il n'avait pas l'esprit tranquille. Peut-être parce qu'il avait permis à ce petit bourge insupportable de Vlad de l'insulter en toute impunité, sans en payer le prix ? Il se fustigea ; il n'allait pas le laisser en plus gâcher sa soirée. Sur les coups de sept heures du soir, Darius quittait les vestiaires. Il marchait vers le portail, quand des éclats de voix lui parvinrent.
- Je vous ferai tous pendre ! Vociférait une voix sifflante, assez aiguë en dépit de la menace qu'elle proférait, elle trahissait de la peur. Une peur réelle.
- Je ne crois pas, Vlad. Notre sang est aussi bleu que le tien.
Puis retentit un son que Darius connaissait trop bien. Le son d'un poing qui s'encastrait dans l'abdomen, cognait dans l'estomac. L'idée de Vladimir recevant la correction qu'il méritait n'aurait pas dû le déranger. D'ailleurs, pendant un moment, il songea à simplement passer son chemin, comme s'il n'avait rien entendu, voire à encourager ceux qui le maltraitaient. Son dilemme résolu, il marcha droit sur le groupe.
- Hé ! Vous foutez quoi là ?
- Darius ! Piailla presque l'élève le plus proche de lui.
Les autres, intimidés par sa seule présence, s'arrêtèrent de frapper Vladimir, qui resta prostré une seconde, par crainte d'un nouveau coup, puis il scruta Darius, dans l'attente, incertain. Par chance, il n'était pas trop amoché, pas assez pour que les conséquences de cette soirée soient graves. Darius perdit ses moyens ; par chance, il sut le dissimuler. Ce ne furent pas des remords qui le firent se raviser, mais plutôt la sensation étrange et formidable d'être une sorte de miracle inattendu. Dans la vie, il n'était pas loué et, pour la première fois, il se sentit puissant, véritablement puissant. Comme s'il incarnait la Loi. Les petites frappes prises en flagrant délit l'épiaient avec cette angoisse dans leurs yeux qu'il les châtie, parce que, soudain, il était devenu celui qui avait raison, celui qui possédait l'autorité. Il adora ça. Cela le fit même changer d'avis.
- Dégagez. Laissez-le.
- De quel droit nous donnerais-tu des ordres ? S'écria le plus grand des garçons, mais il s'aperçut bien vite que Darius le dépassait d'une bonne tête, quand il s'avança.
- J'te jure, tire-toi p'tite merde avant que ce soit moi qui t'envoie par-dessus la grille...
Celle avec les piques évidemment. Darius esquissa un sourire moqueur, en voyant sa mine se décomposer. Pas de vrais durs. Pas comme moi. Il aurait sûrement pu l'amener à se pisser dessus, si son ami n'avait pas commandé à son groupe de partir. Darius, qui se sentait si sûr de lui, perdit toute son assurance lorsqu'il se retrouva seul, nez-à-nez avec Vladimir. Il ne savait plus que dire, ni que faire. Le héros tout puissant s'effaça. Heureusement, Vladimir parla en premier cette fois-ci.
- Tu risques d'avoir des problèmes... murmura-t-il, d'une voix éteinte.
- ça ira. J'ai l'habitude, sourit Darius.
Il n'y aurait pas de preuves de toute manière ; il n'avait pas battu ces idiots. Darius observa Vladimir. Il l'avait laissé le midi en désirant lui arracher la tête à mains nues et il le secourait maintenant ; étonnamment, il était comme soulagé. Son mal de tête s'était estompé. L'albinos continuait, tout en époussetant ses habits :
- Les rumeurs... vont aller bon train... Ils diront que je déshonore mon rang, en traînant avec un sans-titre...
- C'est toujours mieux que de finir en sang, la gueule éclatée par terre, non ?
Un sourire fugace apparut sur la bouche du noble.
- Oui... je suppose...
Darius n'osait pas lui demander, mais une question lui brûlait les lèvres. Vladimir n'allait certes pas vaincre un groupe entier, mais il aurait pu au moins essayer de se défendre. Tout le monde savait se battre à Noxus ; c'était primordial ; un vrai noxien devait en être capable, sans quoi il n'était rien. Un faible. Vladimir n'était pas stupide. Il dut deviner ses pensées. Lui, qui était toujours si impeccable, se laissait à présent glisser au sol, les vêtements salis et la mine abattue. Tout à coup, il admit, d'une voix plutôt piteuse dont Darius ne l'aurait pas cru capable :
- Je n'ai aucun talent. Rien pour assurer mon avenir...
Darius n'était certes pas une personne attentive, à appeler en cas de coup dur. Pourtant, il s'assit par terre, près de lui.
- Tu es intelligent, lâcha-t-il après un temps.
Vladimir fut agité d'un léger rire ironique.
- Tout le monde ici est intelligent. Sauf toi peut-être, acheva-t-il avec un sourire, mais qui ne semblait plus méchant, si bien que Darius ne se sentît point offensé.
L'albinos recueillit ses livres éparpillés non loin de lui.
- Je n'ai rien pour me défendre dans un combat... Ici, à Noxus, c'est une tare énorme.
Pas de sortilèges à lancer, pas de force herculéenne. Juste rien.
- ça viendra avec le temps, présuma Darius en haussant les épaules.
- Je ne crois pas. Regarde Leblanc, Elise... Tous les autres maîtrisent déjà chacun un type de magie. Je suis... loupé.
Darius le trouva un peu trop fataliste, mais la mine qu'il affichait prouvait sa sincérité et sa détresse. Vladimir ne devait pas être du genre à s'apitoyer longtemps ; il se redressa, non sans peine, se retenant de grimacer.
- Merci... pour le coup de main. Si tu veux toujours de mon aide, tu l'as gagnée.
Darius dut s'efforcer de ne pas sourire trop largement ; il réalisait mal pourquoi il était si content d'entendre ces mots.
- Bien sûr. T'es toujours le premier de la classe. ça a pas changé.
Un sourire étrangement pudique fendit les lèvres de Vladimir. Se faire passer à tabac lui avait inculqué un brin d'humilité dans l'instant, mais le naturel reviendrait à coup sûr au galop.
- Nous commencerons demain.
Et il s'apprêtait à s'en aller, quand Darius se pressa de le rattraper.
- J'te raccompagne ! Proposa-t-il il crevait d'envie d'apercevoir sa demeure ; il l'imaginait luxueuse, magnifique.
Vladimir parut très embarrassé.
- Darius... Je préférerais qu'on ne se fréquente pas en dehors de l'école... et qu'on reste discrets.
Ça m'étonne pas... Il l'avait sauvé, mais ça n'effaçait pas le fossé entre un aristocrate et un fils de serf, de rien du tout.
- Ils sont peut-être encore dans les parages. J'veux juste m'assurer que t'arrives pas plus abîmé chez toi.
De tranquille le regard de Vlad devint suspicieux.
- Qu'est-ce que tu veux exactement ? Tu ne t'es jamais préoccupé de savoir ne serait-ce que si j'existais avant aujourd'hui et...
- C'est ce que tu crois.
A cette réponse, sa confusion se lut dans ses yeux grenat.
- Il n'y a rien à voir, trancha-t-il, de nouveau sur la défensive.
Darius eut envie d'éclater de rire.
- Tu déconnes ? T'es putain de bizarre !
Vladimir tiqua à cause de son langage davantage encore que de sa remarque. Il aurait pu s'emmurer dans le silence et s'éloigner tout seul, mais il enchaîna, preuve que discuter ne lui déplaisait tant que ça :
- Je ne suis juste... pas très doué en matière de relations sociales.
- Alors on est deux !
L'albinos émit un sifflement de reproche.
- Toi, tu as au moins ton frère.
- Draven ? S'étonna Darius ; bizarrement, la possibilité que Vladimir le fréquente l'ennuyait. Tu le connais ?
- Qui ne le connaît pas ? Ricana-t-il et, pour la première fois, il avait presque ri de bon cœur. Il passe son temps à fanfaronner et draguer. On l'entend jusque dans la bibliothèque.
Sans savoir vraiment pourquoi, Darius se sentit obligé de se défendre :
- Je suis pas comme lui.
Pas du tout. Tout l'inverse en réalité. Vladimir lui accorda un léger sourire malicieux.
- Je sais, sinon je n'aurais jamais accepté que tu m'accompagnes.
Merci aux lecteurs,
Beast Out
