Yoho les gens ! J'avais prévu de faire un AU longue, sérieuse et tout, mais entre temps je suis partie quelques semaines en vacances en Nouvelle-Zélande avec des amis qui regardent aussi Supernatural. Et au détour d'une visite et d'une discussion de qualité (hum…), cette fic est née. Donc l'AU sérieuse attendra et en attendant voici l'AU débile. Ca commence comme une fic sérieuse mais… bon… ça risque de ne pas durer.

« *** »

Le soleil brillait haut dans le ciel mais Dean aurait préféré trouver un peu d'ombre. Le terrain que Hamish lui avait cédé était escarpé et depuis presque une heure qu'il le parcourait, Dean sentait la sueur lui couler dans le dos aussi bien que sur le front. Sans compter les nuées d'insectes qui lui bourdonnaient dans les oreilles.

Il souffla bruyamment, s'épongea avec le bas de son t-shirt et s'assit sur une grosse pierre plate. Il n'avait pas le droit de se plaindre. Après tout, il avait eu ce bout de terre pour trois fois rien. Et même s'il était en pente et plein de roches, il était sûr de pouvoir en faire quelque chose. Hamish l'avait laissé en friche depuis des années mais le vieil homme disposait déjà de larges terres cultivables et à son âge, il n'avait plus envie de s'enquiquiner avec cette parcelle au milieu de nulle part. Au début, Dean avait prévu d'y planter des patates douces, mais vu son orientation, il penchait de plus en plus pour de la vigne. Les vins locaux avaient le vent en poupe et il avait peut-être là l'occasion d'en profiter. Et puis au pire, s'il se révélait être un piètre cultivateur, il pourrait toujours acheter des chèvres et des moutons et faire son propre fromage.

Quoiqu'il en soit, il se sentait libre comme il ne l'avait jamais été. Et toutes les perspectives de ce qu'il pouvait faire avec son nouveau terrain lui faisait presque tourner la tête. Du temps où il travaillait au garage, sous les ordres de son père, il n'avait jamais eu autant de possibilités. En fait, il n'avait jamais eu le choix de rien. Son père prenait arbitrairement toutes ses décisions. Et en bon fils, Dean s'y pliait.

Il soupira.

Il n'avait aucune envie de penser à son père maintenant. Il faisait beau, il était propriétaire de son propre petit coin de paradis et même s'il dormait dans une cabane en bois sans eau courante, l'avenir lui paraissait radieux. Et puis Sam n'allait pas tarder à arriver et ça, ça lui réchauffait le cœur. Il n'avait pas vu son frère depuis deux ans. Et même s'ils se parlaient plus régulièrement au téléphone maintenant que Dean avait à son tour fui le cocon familial, ce n'était pas la même chose que de l'avoir en chair, en os et en cheveux. Alors Dean s'en réjouissait. Et ce malgré le fait que son petit frère trainait dans son sillage l'insupportable Gabriel.

Dean serra les poings. Pour des raisons qu'il ne saisissait pas, Sam appréciait ce type alors il ferait l'effort d'être poli le temps de leur séjour.

Il se redressa. Il avait encore pas mal de boulot et pas le temps de trainer. Il devait finir la cloison qui donnerait un peu d'intimité à Sam et Gabriel, faire un peu de ménage, finir quelques courses et il avait encore vingt bonnes minutes de marche jusque chez lui.

Puis il irait prendre une douche froide grâce à un ingénieux système qu'il avait mis en place pour détourner le petit ruisseau qui coulait à quelques pas de son chez lui. Il n'y avait pas beaucoup de pression mais vu son enfance, Dean avait connu pire. Sam aussi et Dean ne doutait pas qu'il s'en accommode. Gabriel en revanche lui avait paru un peu précieux pour les quelques mots qu'ils avaient échangés des années auparavant. Et Dean avait hâte de voir sa tête lorsqu'il découvrirait qu'ici, l'eau chaude n'était pas disponible. Ca allait être hilarant. Il ricana avant d'éclater franchement de rire. Rire qui se mua en cri de surprise lorsque sa jambe gauche s'enfonça de cinquante bons centimètres dans le sol.

Il jura.

Prenant appui sur un rocher proche, il se hissa en avant. Le sol le relâcha sans grande difficulté. Il souffla de soulagement. S'il s'était retrouvé coincé ici, sans réseau et loin de tout, il serait sans doute mort avant que qui que ce soit ne le retrouve.

Il s'accroupit pour étudier ce qui avait failli le tuer. A deux mains, il poussa un grosse pierre ronde.

_ Qu'est-ce que… grogna-t-il, les dents serrées.

« *** »

_ Tu n'as pas oublié ta brosse à dents ? cria Sam à travers l'appartement. Parce qu'il y en a encore une dans le verre.

_ J'en ai pris une neuve, lui répondit Gabriel depuis le salon.

Sam haussa les épaules et tourna sur lui-même pour étudier la salle de bain sous tous les angles. A vue de nez, ils n'avaient rien oublié. C'était un sacré voyage qu'ils allaient entreprendre, le plus long que Sam ait jamais fait, et probablement pour Gabriel aussi. En fait, il se demandait si l'un d'eux avait déjà quitté les Etats-Unis. Pas à sa connaissance. En tout cas, Sam était nerveux et il angoissait à l'idée d'oublier quoique ce soit.

Ce qui était idiot, il le savait. La Nouvelle-Zélande était un pays développé et s'ils oubliaient quelque chose, ils pourraient toujours le racheter sur place. N'empêche que… Et puis il était aussi angoissé à l'idée de revoir Dean. Deux ans qu'ils ne s'étaient plus vus. Et la dernière fois, le résultat avait été catastrophique. C'était lorsqu'il avait eu la riche idée de reprendre contact avec son père après des années de silence parce qu'il voulait présenter Gabriel au reste de sa petite famille. Sans doute une de ses pires décisions qui s'était terminée dans les hurlements et les claquements de portes. Classique de toutes ses interactions avec son père en fait. En pire. Surtout que Dean, comme à son habitude, s'était rangé du côté de leur paternel.

C'est pourquoi Sam avait été surpris lorsque six mois auparavant, Dean lui avait téléphoné pour la première fois depuis leur engueulade biblique pour lui annoncer qu'il se trouvait de l'autre côté du globe.

_ Tu es prêt ? Le taxi ne va pas tarder à arriver !

La voix de Gabriel le tira de ses pensées et il jeta un sourire tendre au petit homme qui se tenait contre le chambranle.

_ Oui, oui, c'est bon, répondit-il.

Mais son ton trahissait ses angoisses.

Gabriel saisit sa main et la serra.

_ Hey, ça va aller Sammy. Je sais que tu es nerveux à l'idée de revoir Dean mais ça va bien se passer. Et puis depuis le temps que tu espérais qu'il s'éloigne de ton père, tu devrais te réjouir.

Sam roula des yeux en pensant aux nombreuses heures d'avion qui les attendaient.

_ Ah ça pour s'éloigner, il s'est éloigné ! grommela-t-il. Dean c'est vraiment tout ou rien.

Gabriel rit et le tira jusqu'au salon où leurs deux lourdes valises les attendaient. A l'intérieur, assez de vêtements pour plusieurs semaines et tous types de temps et quelques cadeaux pour Dean, comme de vieilles photos d'eux enfants que Sam avaient fait retirer pour l'occasion. Il espérait que ça aiderait à retisser quelques liens que les années avaient brisés.

_ Au moins il parait que le pays est magnifique, commenta Gabriel. Ca s'appelle comment déjà le bled où on va ?

_ Waitomo, répondit Sam en vérifiant une fois de plus dans les poches de sa veste qu'il avait bien son passeport.

_ White Homo ? Je vois que Dean a trouvé là une communauté rien que pour lui, répliqua Gabriel tout sourire.

Sam lui jeta un regard sombre.

_ Gabe ! le sermonna-t-il.

Les yeux de Gabriel se firent plus pétillants encore.

_ Nie tant que tu veux Sammy, je n'ai vu ton frère qu'une fois mais je sais.

Sam secoua la tête. Il adorait Gabriel mais quand il avait une idée en tête, il était impossible. Avant qu'il ne puisse répliquer, son téléphone bipa. Le taxi les attendait.

« *** »

Les mains solidement agrippées à la rambarde de métal, Dean tendait le cou dans l'espoir d'apercevoir son frère. Il savait que c'était inutile. Déjà parce que les portes automatiques laissant échapper les voyageurs par petits groupes n'étaient pas transparentes, ensuite parce que de toute façon la tête de Sam dépassait toujours et que même avec dix centimètres de moins, Dean n'aurait pas pu le manquer. Gabriel par contre, c'était une autre histoire et avec un peu de chance, ils le perdraient dans la foule avant d'atteindre la Hilux garée sur le parking.

Abandonner son Impala lui avait autant brisé le cœur que d'abandonner son père mais sur place il avait trouvé cette robuste voiture et s'en était au final plutôt bien accommodé. Sûr, elle n'avait pas le charme de la Chevrolet mais elle était une belle œuvre de mécanique, solide et qui remplissait bien sa fonction. Dean n'avait cependant pas pu s'empêcher de remarquer que le pays grouillait de vieilles voitures en excellent état et il songeait à s'en procurer une dès que ses moyens le lui permettraient. Après tout, il avait les connaissances nécessaires pour l'entretenir et la maintenir au top de sa forme pour les prochaines décennies.

Ses yeux se reportèrent sur le panneau d'affichage à sa gauche. Le vol de Sam avait atterri deux minutes auparavant, trop tôt pour que son frère ait eu le temps de descendre de l'avion, récupérer sa valise et passer la douane. Les formalités locales étaient moins longues et pénibles qu'aux Etats-Unis mais tout ne se faisait pas non plus en un claquement de doigts. Dean leva le regard au plafond, se remémorant avec nostalgie le moment où lui-même avait débarqué ici quelques mois auparavant. Ca n'avait été qu'un coup de tête.

Ce jour là, il n'était rien arrivé d'exceptionnel. Une journée comme tant d'autres au garage. Son père avait passé des heures à se plaindre d'une chose puis de l'autre, ignorant comme toujours le magnifique travail de carrosserie que Dean avait terminé sur une Shelby de 1965. Seul Benny, un des mécanos, lui avait lancé un sourire appréciateur mais Dean avait détourné les yeux. Le sourire de Benny était pour lui problématique et le renvoyait à trop de choses qu'il tentait d'ignorer. Qu'il parvenait en fait à ignorer avec brio depuis deux décennies.

Puis, un à un, les employés avaient quitté les lieux, son père y compris, lui laissant le soin de finir le rangement et la paperasserie comme il le faisait toujours. Dean s'était soigneusement lavé les mains, se frottant scrupuleusement les doigts pour en retirer le cambouis avant de s'atteler au tri du courrier et au règlement des diverses factures. Il avait, comme à son habitude, déposé une pile de côté pour que son père, unique propriétaire du garage, signe le lendemain matin, puis il avait verrouillé la lourde porte de métal de l'atelier. Et enfin, il était rentré chez lui.

Il s'était pris un petit appartement pas loin du garage lorsque son père l'avait officiellement embauché, préférant sa solitude aux soirées alcoolisées de John Winchester. Au fil du temps, Dean s'était mis à boire presque autant que son père mais il serait mort de honte si ce dernier l'avait appris. Alors il buvait surtout dans son salon.

Ce soir là, il n'avait même pas pris la peine d'allumer la lumière. Il avait jeté son sac à terre et avait ouvert son frigo pour en sortir une bière. Il s'était ensuite laissé tomber dans son fauteuil préféré. Habituellement, sa main se tendait d'elle-même vers la télécommande et allumait la télé pour que Dean s'abrutisse devant des feuilletons idiots qu'il n'assumait pas regarder. Mais la capsule de sa bière résistait et ses deux mains étaient occupées. Alors il avait forcé, forcé mais sans résultat. La bière avait refusé de s'ouvrir. Il avait senti la frustration le gagner.

Il aurait été tellement simple de se lever pour prendre un décapsuleur ou une autre bouteille. Tout aussi simple de se calmer, reprendre son souffle et faire une nouvelle tentative. Au lieu de cela, Dean avait jeté aussi fort que possible la bière contre le mur où elle avait explosé, projetant des morceaux de verre un mètre alentour.

Il avait senti une larme lui couler le long de la joue et l'avait rapidement essuyée. Il s'était trouvé ridicule de pleurer pour une ridicule bouteille de bière. Mais tout au fond de lui, il savait qu'il n'y avait pas que cela. C'était toute sa vie qui lui donnait envie de se rouler en boule et de disparaitre aux yeux du monde. C'était l'indifférence de son père, qui ne voyait pas à quel point Dean se démenait pour être son égal et lui soutirer ne serait-ce qu'un hochement de tête satisfait, c'était ce garage où jamais rien ne changeait et dans lequel il se rendait la boule au ventre tous les matins sans aucun autre avenir, c'était la main de Benny sur son épaule qui lui donnait envie de hurler car jamais, non jamais, il n'aurait dû la trouver si chaude à travers son t-shirt, c'était l'absence de son frère dont il était coupé depuis tant de temps car il avait osé faire ce que Dean n'avait jamais eu le courage de faire, à savoir s'opposer à leur père.

Les mains tremblantes, il avait pris son téléphone pour appeler Sammy, lui demander des conseils ou juste entendre sa voix. Mais il n'avait pas été capable d'aller jusqu'au bout. Il se sentait sale de l'avoir trahi lors de leur dernière rencontre. Et pas que là en fait. Quand adolescent Sam avait émis le désir d'aller à l'université, Dean ne l'avait pas soutenu. Quand son père, après le lycée, l'avait mis à la porte, Dean ne l'avait pas soutenu. Lorsqu'il était revenu bien plus tard, brillant avocat à San Francisco, pour leur présenter son compagnon, Gabriel, et que son père avait craché sa haine et sa déception, une fois de plus Dean ne l'avait pas soutenu non plus. Quel droit avait-il de retourner vers lui et de lui déverser ses états d'âme ?

Il avait alors bondi de son fauteuil pour se rendre dans sa chambre où une pile de linge sale attendait à terre le jour de la lessive. Il avait l'intention de se jeter sous ses couvertures et de tout oublier grâce à la flasque de whisky qu'il gardait dans le tiroir de sa table de nuit.

Au lieu de cela, il avait vu ses mains saisir un vieux sac de sport et y entasser autant de vêtements qu'il lui était possible.

Quelques minutes plus tard, il était dans l'Impala en direction de l'aéroport le plus proche. Il n'avait pas de plan ni de destination en tête, seulement une carte de crédit et un compte lui permettant de se payer un billet d'avion mais pas beaucoup plus. Il n'avait pas hésité une seconde en abandonnant sa voiture sur le parking. Il savait que s'il restait bloqué dans cette vie, elle le détruirait.

A l'intérieur, il avait à peine jeté un coup d'œil aux prochains vols, en cette fin de journée, il n'y en avait plus beaucoup. New-York, Londres, Tokyo et Auckland. New-York était trop proche. Et lorsqu'il avait demandé un billet pour Londres, on lui avait dit que le vol était complet et qu'il devait attendre le prochain, prévu pour le lendemain matin. Dean n'en avait aucune envie. Sa résolution risquait de flancher s'il attendait trop et il se détesta pour même songer retourner travailler auprès de son père.

Tokyo était tentant mais il ne partait pas juste faire du tourisme. Il voulait une nouvelle vie et la barrière de la langue lui faisait peur. Alors il s'était tourné vers Auckland et lorsque de nombreuses heures plus tard, les bras solidement accrochés aux accoudoirs à cause des turbulences sans fin, il avait atterri, il avait réalisé l'énormité de sa décision.

Epuisé et courbaturé, il avait étudié sa montre. La vie avait repris au garage et ils devaient le chercher partout et l'appeler sans relâche. Il avait abandonné son téléphone dans son appartement.

Une fois les formalités de douane passées, il avait souri en découvrant à l'extérieur un soleil brillant et une brise agréable. Il était monté au hasard dans un bus, avait dormi dans un motel ou deux, pris un autre bus pour Hobbiton, passé sa meilleure journée depuis longtemps et là seulement avait-il réalisé qu'il pouvait faire absolument tout ce qu'il voulait et que plus jamais il n'aurait à se soucier de l'approbation de son père. C'était à la fois grisant et terrifiant.

Le lendemain, il avait repéré un panneau dans un champ demandant de l'aide pour ramasser des fruits et il s'était présenté dans le bâtiment le plus proche. Le vieux Hamish avait à peine levé les yeux vers lui avant de lui confier un secteur et ce soir là Dean s'était endormi plus riche de quelques dollars. Le matin, il avait enfin eu le courage d'appeler Sam pour l'informer de son nouveau choix de vie et depuis, ils n'avaient plus perdu le contact.

Si quelque chose tout au fond de Dean culpabilisait toujours d'avoir délaissé son père et de ne lui avoir donné, depuis le jour de son départ, aucune nouvelle, globalement, il ne regrettait pas d'avoir troqué le dédain de John pour la complicité réconfortante qu'il recréait petit à petit avec Sam. Et lorsque ce dernier avait émis le souhait de lui rendre visite, Dean avait littéralement sauté de joie.

Les voyageurs se faisaient de plus en plus nombreux dans la salle d'attente, poussant leurs lourdes valises et s'écroulant dans les bras de leurs proches. Dean trépignait sur place. Où était Sam ?

Enfin la grande tête chevelue de son frère apparut. Il n'avait pas changé d'un pouce depuis qu'ils s'étaient vus pour la dernière fois. Il était peut-être un peu plus pâlot et avec des cernes mais ce devait être juste la fatigue du voyage.

Dean agita les bras.

_ SAM ! appela-t-il sans retenue.

Le visage de Sam s'éclaira et il lui répondit d'un petit signe de la main. A ses côtés, Gabriel faisait des gestes désordonnés pour attirer l'attention. Dean ne fit en sa direction qu'un discret hochement de tête. Pour être honnête, il ne connaissait pas bien l'ami de son frère mais sa surexcitation permanente l'avait pas mal agacé lors de leur première rencontre.

Enfin ils furent face à face. Il y eut comme un flottement lorsque tous deux hésitèrent.

_ Sam ! fit Dean.

_ Dean ! répondit Sam.

Et finalement, ce dernier craqua le premier et attira son grand frère dans ses bras en une longue accolade. Dean s'en sentit immédiatement apaisé. Les choses allaient bien se passer entre eux. Après tout, lorsqu'ils étaient gamins, c'était eux deux contre le monde entier.

_ Regarde-toi, fit Sam en lui tapant dans le dos de ses larges mains. Bronzé et rayonnant.

_ Ca c'est le travail dans les champs, répondit Dean en cherchant un compliment à faire à son frère.

Mais il n'était vraiment pas bon pour exprimer ses sentiments ou sa gratitude. Heureusement, Sam le sauva en reprenant les rênes de la conversation.

_ Tu te souviens de Gabriel ? demanda-t-il en le relâchant pour se tourner vers le petit homme à ses côtés qui était aussi souriant que dans les souvenirs de Dean.

Même lorsque la vaisselle s'était mise à voler à table entre Sam et John, il ne s'était pas défait de son rictus amusé et Dean avait détesté ça.

_ Comment oublier ? répliqua Dean, décidant de faire contre mauvaise fortune bon cœur.

Il crut un instant que Gabriel allait à son tour l'attirer contre lui mais ce dernier se contenta de lui donner de grandes claques sur l'épaule comme s'ils étaient des amis de toujours.

_ Deano ! Quel plaisir ! Nous n'avons pas eu l'occasion de vraiment discuter la première fois alors j'espère profiter de l'occasion pour te connaitre plus en profondeur !

Dean eut pour lui un sourire crispé et saisit la valise de Sam avant que son frère ne puisse protester.

_ Venez, on a de la route ! Pas trop fatigués du voyage ?

« *** »

_ Combien de temps jusqu'à White Homo ? demanda Gabriel depuis le siège arrière.

Dean avait déposé leurs valises sur la plate forme de la Hilux avant de faire grimper son frère à l'avant avec lui.

Ce dernier jeta un regard noir à son compagnon mais Dean qui venait de mettre le moteur en marche n'en comprit pas l'origine.

_ Trois heures de route, répondit-il. Si ça circule bien.

_ En roulant de l'autre côté ? fit Sam en bouclant sa ceinture.

_ En roulant de l'autre côté, confirma Dean.

_ Pas trop difficile de passer de l'autre bord ? caqueta Gabriel.

Dean haussa les épaules en s'engageant vers la sortie du parking.

_ C'est un peu déstabilisant au début, admit-il, mais on s'y habitue.

Du coin de l'œil, il vit Sam pincer les lèvres pour ne pas rire.

_ J'ai manqué quelques choses ? dit-il, suspicieux.

Sam secoua la tête, ses longues mèches revenant miraculeusement en place.

_ Non, non, rien. C'est la fatigue. J'espère que tu n'as pas prévu un programme trop lourd pour aujourd'hui ?

Dean arborait un large sourire.

_ Non, non, rassure-toi. J'ai juste à passer en ville pour acheter du charbon, après on se fera un barbecue d'enfer… Aucun d'entre vous n'est végétarien au moins ? s'inquiéta-t-il soudain.

Il savait que Sam aimait manger sainement, il espérait juste qu'il ne soit pas passé du côté sombre de la force parce que la viande dans ce pays était juste fabuleuse.

_ Non, non, le rassura son frère, aussi amusé que s'il avait lu dans ses pensées. J'espère juste qu'il y aura aussi quelques légumes en accompagnement.

Dean hésita puis opina.

_ Tu prendras ce que tu veux à l'épicerie, conclut-il. Et il faudra aussi que je vous montre un truc trop cool.

_ Un truc trop cool ? s'enthousiasma Gabriel en se penchant vers les sièges avant. Qu'est-ce que c'est ?

_ Vous verrez, répondit Dean, plein de mystère.

Les trois heures passèrent rapidement pour tous les trois. Gabriel entreprit de compter les moutons dans les champs mais abandonna bien vite face à l'ampleur de la tâche. Puis il s'endormit, épuisé par le manque de sommeil accumulé depuis le début de leur très long voyage. Les deux frères discutèrent tranquillement, évoquant avec tendresse leurs meilleurs souvenirs d'enfance, à l'époque où ils n'imaginaient pas être séparés un jour.

Lorsque Dean se gara devant la petite épicerie, il avait l'impression que toutes ces années loin l'un de l'autre venaient d'être effacées.

Ils entrèrent tous trois dans le magasin, faisant sonner une clochette au timbre cristallin.

_ Les légumes sont dans l'aile de gauche. Je vais chercher le charbon, on se retrouve à la caisse, planifia Dean en faisant de grands gestes du bras.

_ Dean !

Une voix éraillée les fit se tourner vers un vieil homme à la mine rude mais aux yeux bienveillants. Il tenait à la main un pack de bières.

_ Hamish ! répondit Dean avec enthousiasme en se précipitant pour saluer le vieillard.

Puis il se tourna vers les deux autres qui attendaient patiemment.

_ Sam, Gabe, voici Hamish. Il m'a donné mon premier boulot ici et m'a aussi vendu mon terrain. Hamish, voici Sam, mon frère et Gabe, son… un ami.

Hamish les salua d'un geste de la main.

_ Ca fait plaisir de savoir que Dean a de la visite, fit-il en dévoilant des dents trop blanches pour être naturelles. Il vous a montré son trou ?

Sam ouvrit de grands yeux mais Gabriel éclata de rire.

_ Nous n'avons pas encore eu cet honneur, répondit-il sans pouvoir supprimer les soubresauts de sa voix. Mais j'ai grandement hâte !

_ Nous arrivons à peine de l'aéroport, précisa Dean qui avait rougi et fixait ses bottes poussiéreuses.

_ Il va falloir qu'il vous le montre ! Parce que tout le monde ne parle plus que de ça en ville. Le trou de Dean ! Le trou de Dean ! Il est sur toutes les lèvres.

Visiblement, Dean était mortifié, Sam avait désormais un sourire jusqu'aux oreilles, quand à Gabriel, il était plié en deux tellement il riait.

_ C'est ça le truc cool que tu devais nous montrer ? fit Sam qui ne contenait plus son amusement.

Dean approuva.

_ Si j'avais su le que le trou était aussi prometteur, je ne lui aurais jamais vendu mon terrain, fit Hamish avec une grande claque entre les deux omoplates de Dean. Bon allez, c'est pas tout ça mais je suis attendu à la maison.

Il s'éloigna en direction des caisses en clopinant, laissant Dean bien mal entouré.

_ Le trou de Dean hein ? fit Sam, hilare.

_ J'ai eu le malheur de dire au bar que j'avais trouvé un grand trou sur mon terrain et depuis le nom est resté, grogna Dean en serrant les poings comme s'il voulait se boxer pour sa bévue.

_ Oh Dean, fit Gabriel des larmes plein les yeux, montre-nous ton trou !

_ Tout à l'heure, marmonna Dean en se dirigeant vers les grands sacs de charbon.

A en juger par l'énorme pile, le barbecue était ici un sport national.

Sam décida de ne pas embêter son frère plus longtemps et traina un Gabriel réticent jusqu'à une petite étale de légumes frais.

« *** »

Dean avait prévu de manger avant de faire visiter son terrain à ses invités mais Gabriel avait insisté pour voir avant tout autre chose le trou qu'il avait trouvé par hasard quelques jours auparavant. Le regard brillant de Sam lui avait indiqué que son frère aussi était impatient. Alors il avait posé son sac de charbon au sol, mis les légumes au frigo et les avait menés entre roches et pente jusqu'à l'endroit de sa découverte.

Il avait agrandi l'ouverture qui ne faisait que quelques dizaines de centimètres lorsque sa jambe était passée à travers en débroussaillant et en dégageant quelques grosses pierre. Désormais, il était possible d'y pénétrer en entier.

_ C'est un sacré trou, commenta Gabriel, entre stupéfaction et amusement. Deano, tu m'impressionnes.

Dean l'ignora.

_ Tu es descendu dedans ? demanda Sam en se penchant pour jeter un coup d'œil à l'intérieur.

_ Une fois, admit Dean. J'avais une lampe de poche et une corde. Mais je ne suis pas allé bien loin. Il y a un genre de galerie mais le sol est instable et s'il m'arrive quoique ce soit, tout seul ici, je n'ai aucune chance de m'en sortir.

_ Donc tu ne connais pas la profondeur de ton trou ? fit Gabriel.

Dean secoua la tête.

_ Je suis curieux mais ça me semble dangereux. Trop dangereux. Il me faudrait un professionnel mais financièrement…

Il grimaça.

Payer quelqu'un pour explorer la grotte potentielle qu'il venait de trouver était bien au dessus de ses moyens.

_ Je pourrais demander à mon frère, intervint alors Gabriel.

_ Lequel ? interrogea Sam.

Son amant avait toute une tripotée de frères que Sam n'avait jamais rencontrés car ils ne semblaient pour la plupart pas bien sympathiques. Sans compter que Gabriel avait un surnom pour chacun d'entre eux et Sam avait tendance à les mélanger.

_ Castiel.

Devant l'air perplexe de Sam, il développa.

_ Celui que j'appelle Forrest Gump, poursuivit-il. Gentil mais pas bien fin et un peu paumé dans son monde. Il est géologue et je crois qu'il fait pas mal de spéléologie. Il pourrait peut-être aider.

_ Sans se faire payer ? s'inquiéta Dean.

Gabriel opina comme s'il était très sûr de lui.

_ C'est un idéaliste. L'idée de pénétrer là où nul n'est allé avant devrait lui suffire. Je suis certain qu'il serait ravi d'explorer ton trou de fond en comble.

Dean hésita. Si son frère était aussi lourd que Gabriel, il n'était pas sûr de tenir sans prendre l'un pour taper sur l'autre. Mais d'un autre côté, il serrait bête de laisser passer une telle chance. Les grottes étaient nombreuses dans la région et plus nombreux encore étaient les touristes prêts à payer pour les visiter. Il tenait peut-être là la chance de sa vie. Alors il approuva.

_ Si ton frère est d'accord, je lui ouvre mon trou, répondit-il avant de grimacer à sa propre formulation.

(à suivre…)

« *** »

Merci d'avoir lu jusqu'ici. La suite très bientôt. En attendant, pour précision, le délire en vacances est parti d'une grotte qu'on a appelée pour des raisons quasi inexplicables « le trou de Dean », ce qui nous a beaucoup fait rire. Et puis un soir, l'un de nous a cherché sur google « le trou de Dean » et il s'avère qu'aux Bahamas existe un endroit qui s'appelle vraiment « Dean's Blue Hole », à savoir le «Trou Bleu de Dean » et qui est le trou bleu le plus profond au monde (j'en ai pleuré de rire pendant de très longues minutes ce soir là vous pouvez me croire). Mon prochain but maintenant est de passer mon diplôme de plonger pour aller explorer le Trou Bleu de Dean (nom qui donne presque envie de faire une AU Schtroumpf, il faut bien l'avouer) !