Chapitre I
Principio
- …l'incident au ministère ne passera pas inaperçu…La Gazette en fera sa propre affaire…
L'homme ne cessait de tourner en rond dans une pièce spacieuse, magiquement remise à neuf. Le lourds rideaux de velours sombre obscurcissaient la salle déjà mal éclairée. Le lit à baldaquins occupait un côté de la pièce, deux étagères pleines à craquer d'ouvrages aux reliures dorées et de parchemins étaient placées face à face. Une large table de travail trônait face à l'unique fenêtre, couverte de divers rouleaux et volumes tirées des étagères, de plumes et journaux.
L'homme continuait de faire les cents pas, marmonnant de sombres pensées. A peine visible, un petit homme se tenait recroquevillé près de la porte.
- Il aurait déjà dû mourir dans le cimetière ! Et voilà qu'il m'échappe à nouveau au ministère ! Et tous ce que ces abrutis ont su faire, c'est une attaque déplorable dans l'école ! Seul ce vieillard a succombé ! siffla l'homme d'une voix étonnamment froide.
L'individu près de la porte aurait pu passer pour une statue si sa respiration laborieuse ne le trahissait pas. Ses yeux luisants fixaient les pieds du premier homme, n'osant se risquer à franchir cette limite.
- Comment peut-on échouer de la sorte ? gronda la voix glacée.
- Il…il ne n…nous échappera plus, Maître, osa alors la silhouette près de la porte, visiblement mal à l'aise. Ne…c…craignez rien…
L'homme se tourna instantanément vers la forme repliée.
- Craindre ?….Craindre ? Regarde-moi Queudver, regarde-moi ! Que devrais-je craindre ?…Réponds !
- Per…personne, Maître…
- Alors ne t'avise plus de redire de pareilles insanités !
L'homme à la voix glaciale poussa un grognement avant de se vautrer dans un fauteuil.
- Quelle heure est-il ?
- Presque neuf heures du soir, Maître.
Le dénommé Queudver attendit anxieusement une réponse qui ne vint jamais. L'homme était complètement absorbé par ses pensées, peut-être même qu'il ne se rendait plus du tout compte de sa présence. Ses yeux ne se détachaient plus du parquet de la pièce. Une main sous son menton, l'autre reposait négligemment sur le bras du fauteuil.
Queudver commença à compter les secondes, puis les minutes. Se décidant enfin, il esquissa alors un geste vers la sortie.
- Qui t'as permis de te retirer ?
Le petit homme se tint alors immobile, courbant l'échine de nouveau.
L'homme se leva lentement en étirant ses muscles raidis. Puis il se plaça devant la fenêtre, écartant d'une main aux doigts longs et fins un pan de rideau, scrutant l'extérieur de ses iris rougeoyantes.
- Il faut retenter une nouvelle attaque, souffla-t-il enfin.
- Au…au ministère ? s'empressa Queudver.
Une minute de silence s'installa. Un silence lourd, très lourd avant que l'homme ne soupire d'exaspération.
- Pauvre idiot…que m'importerait-il de me rendre là-bas ? Une intrusion…des cadavres…et après ? Qu'en résultera-t-il sinon une nouvelle raison pour les journaux d'imprimer un peu plus ?
- Vous êtes donc décider à attaquer sur le chemin de Traverse ?
- Je suis très décidé, sans nul doute.
En plus de la froideur, il y avait à présent dans la voix de l'homme une sorte de démence, comme s'il délirait. Une folie placide. Queudver sentit son sang se figer et prit peur en voyant un sourire sous entendu étirer les lèvres fines de l'homme.
Il hésita puis les mots se bousculèrent dans sa bouche, le faisant à nouveau bégayer :
- Mais Maître…si…s'il y a des Au…Aurors là-bas ? Et…et l'Ordre ? Et…et si t…tous les Mangemorts ne répondent p…pas à l'appel ?…et…
- Alors je me ferais un plaisir de rappeler à ces Mangemorts-là que la déloyauté ne reste pas impunie, fit l'homme dans un rictus.
Queudver déglutit avant de parler à nouveau :
- C…c'est plus que risqué, M…maître…
- Tu sembles contester ma décision, mon cher Queudver ?
- Maître ! Ma…ma dévotion à v…votre Excellen…
- Ta dévotion n'est que couardise ! Silence !
La voix s'était faite sifflante et agressive. Queudver, qui s'était mis à aligner des mots incohérents, se tu aussitôt.
- Et maintenant laisse-moi seul, ta vue m'exaspère !
Le serviteur ne se le fit pas dire deux fois et disparut aussi vite que pouvaient le porter ses petites jambes.
L'homme passa une main sur son visage terne dans un mouvement de lassitude avant de reporter son regard sur les imprimés étalés sur la table.
Le jour déclinait peu à peu. Il devait se décider.
Il s'assit à son bureau, relisant pour la énième fois les dépêches : « LE MAGE NOIR SERAIT DE RETOUR », « CELUI DONT ON NE DOIT PAS PRONONCER LE NOM FAIT SON APPARITION AU MINISTERE », « ATTAQUE DES MANGEMORTS A POUDLARD »…
Il repoussa d'un geste furieux les journaux qui s'éparpillèrent sur le plancher, restant un temps interminable à ordonner ses idées.
Le ciel s'assombrissait au dehors.
Soudain, le sorcier se leva brusquement et glissa sa baguette dans sa ceinture. Il enfila une longue cape noire qui faisait alors paraître sa silhouette plus décharnée que jamais.
- Queudver ! cracha la voix glacée de l'homme.
Le serviteur rappliqua presque aussitôt.
- Maître ?
- Ton bras.
- M…Maître…
A bout de patience, le sorcier se pencha et empoigna le bras du petit homme, découvrant sous sa manche une curieuse marque, mettant fin aux protestations de Queudver. L'homme sourit avec une certaine barbarie tout en appuyant sur la marque.
Le gémissement du serviteur résonna dans la demeure, se confondant avec le rire cruel du maître.
Lorsque celui-ci retira son doigt, la trace était devenue d'un noir de jais.
- Descends rejoindre les autres !
Queudver s'exécuta, ravalant une plainte douloureuse.
L'homme ramena sur lui les pans de sa cape puis emprunta les pas du serviteur.
Dans l'immense salle au rez-de-chaussée, les fidèles formaient un cercle impeccable au centre. Quand l'homme à la cape noire apparut, ils se courbèrent dans des murmures mêlés de crainte et de respect.
- Mes chez Mangemorts…si prompts à transplaner…parfait.
Les silhouettes vêtues également de noir et aux visages masqués s'inclinèrent un peu plus bas.
- Je m'en tiendrai finalement à une petite attaque de routine…toi ! Il désigna l'un des homme masqué. Tu dirigeras le groupe. Ne me déçois pas.
Le Mangemort désigné bomba légèrement le torse.
- Bien, Maître.
Quelques instants de silence s'installèrent. Les Mangemorts retenaient leur souffle.
- Rendez-vous au Chemin de Traverse, annonça-t-il.
Les hommes masqués eurent de brefs murmures de protestation puis se turent sous le regard aigu du Maître.
- Je ne veux aucuns prisonniers, inspirez seulement la terreur à chacun, quelques blessés feront l'affaire, ordonna froidement Voldemort. Si certains se montrent trop téméraires, supprimez-les.
