Disclaimer : j'ai beau espérer chaque soir de voir le nom des couvertures changer, ça marche pas. Les personnages sont tous la propriété de Mr Kurumada. L'histoire est de moi par contre ! ;)

Avertissement : il y aura des références à Lost Canvas de Shiori Teshirogi, ainsi qu'à deux fictions que j'ai écrites (Guérison Mutuelle et Nous nous retrouverons).

Merci à ma relectrice Camhyoga pour ses corrections avisées ! :)

.......................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

Cloth Memories - Prologue

Il se réveilla en sursaut, la moindre parcelle de son corps frémissant encore du cauchemar qu'il venait de faire. Il se souvenait des ombres malveillantes, des regrets et d'une peine affreuse.

Il passa une main devant ses yeux fatigués, essayant de chasser les quelques bribes d'images qui lui restaient. Il n'avait encore pas fait de nuit complète depuis qu'ils avaient tous été ressuscités par les dieux. Il restait souvent là, dans son grand lit vide, à attendre que le sommeil le rattrape ou que le jour se lève.

Mais depuis quelques temps, ce cauchemar flou où il ne distinguait que des silhouettes le taraudait. Il voyait un bref éclair lumineux, qui était suivi d'un cri de souffrance. Quelqu'un esquissait un sourire, avant de se détourner de sa victime qui se vidait de son sang.

Et c'était lui le bourreau.

Il se recroquevilla sous le drap, rabattant le tissu sur lui, essayant de s'en faire une vague protection. Il referma les yeux, tout en sachant qu'il ne trouverait plus le sommeil.

Une étrange sensation le fit se redresser. Une sorte de chaleur diffuse l'entourait faiblement. Intrigué, il se leva et se rendit compte qu'une lumière passait sous la porte de sa chambre. Silencieux, il sortit de la pièce et traversa son temple, se rapprochant de l'endroit où était émise cette étrange lueur.

Lorsqu'il ouvrit la porte, il resta un moment totalement ébloui. Lorsqu'il put enfin fixer la source de la lumière, il écarquilla les paupières.

La lumière lui vrillait les yeux, mais il ne pouvait pas détourner son regard. Il se sentait comme un papillon attiré irrémédiablement par une lampe, sous l'emprise de la lueur qui causerait sa mort. Il s'approcha de la source lumineuse et y posa la main. Tout redevint sombre en quelques secondes, mais il pouvait voir autour de lui comme en plein jour.

Il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Et d'un certain côté, il ne le voulait pas. En quoi le fait de savoir changerait-il les choses ?

Une sorte de douce torpeur l'envahit lentement. Il se laissa glisser au sol, la main toujours plaquée contre le métal froid. Il se sentait si bien… Était-ce cette sensation que ressentaient les toxicomanes en ingurgitant leur dose de crack ? Cette impression d'être léger, d'être invulnérable, en sécurité ?

Il ferma les yeux quelques instants pour savourer ce moment de plénitude. Mais une voix retentit soudain, le faisant sursauter :

Tu as mal.

Il aurait voulu se redresser mais n'y parvint pas. Ses jambes ne lui répondaient plus. Une légère panique commença à monter en lui, faisant battre son cœur plus rapidement.

Tu as mal. Je le sais.

Sa respiration s'accéléra imperceptiblement. D'où venait cette voix ?

Je le sens.

Il la connaissait, il en était certain. Mais où l'avait-il déjà entendue ?

Laisse-moi t'aider.

Il tressaillit, tenta une nouvelle fois de se mettre debout, mais sans succès.

Laisse-moi te soulager.

Pouvait-il faire confiance à cette voix ? Et pourquoi ne se souvenait-il pas où il l'avait déjà entendue ? Pourquoi ?

Ne te tracasse pas. Je suis là.

Mais qui ? Qui ?

Je peux te soulager. Laisse-moi te montrer…

Puis plus rien.

Lorsqu'il reprit connaissance, il se trouvait couché à même le sol. Quelques rayons de soleil tombaient sur lui et l'avaient réveillé. Le carrelage froid lui avait raidi les membres et il se leva avec une grimace. Il se dirigea en titubant vers la salle de bain et s'aspergea la tête avec de l'eau glacée. Un peu plus réveillé, il repensa à ce qui s'était passé la veille.

Il ne comprenait pas tout, mais il se sentait mieux. Le poids qu'il avait à la poitrine depuis tant de temps semblait moins lourd et pour la première fois depuis plusieurs semaines, il se sentait apaisé. Il esquissa un sourire avant de se préparer pour la journée.

###

Une routine s'était installée progressivement au Sanctuaire : le matin, les entraînements avaient toujours lieu. Il s'agissait plus d'une question d'habitude que d'une réelle nécessité. C'était l'occasion de se défouler entre camarades, de faire des paris plus ou moins ridicules et d'être entouré. Cela durait quasiment jusqu'au déjeuner, où tout le monde mangeait dans le grand réfectoire prévu par Shion après être passé sous la douche pour enlever la crasse des combats. Les cuisiniers, à la demande des chevaliers, essayaient différents recettes chaque jour, de la plus savoureuse à la plus improbable. L'après-midi, chacun faisait ce qu'il voulait. Les mardi, mercredi et samedi étaient réservés aux joueurs de poker, avec l'interdiction formelle de déranger en pleine partie. Aphrodite avait aménagé une salle spéciale dans son temple pour accueillir ses camarades : une grande table ronde trônait au centre, recouverte d'un tissu ressemblant à du gazon. Un bar se trouvait à côté de la table, refuge des bières et autres alcools qui finiraient dans les estomacs des chevaliers. Egidio s'arrangeait toujours pour être assis près de la porte du bar, pour attraper les bières sans avoir à se lever. Lorsque Mu venait parfois assister aux parties, il secouait la tête avec un sourire amusé.

Milo se tenait en face de l'italien. A sa droite, Kanon, puis Aphrodite. A sa gauche, Shura, Saga, que Kanon avait réussi à convaincre de jouer et qui, depuis, était devenu accro, et enfin Aiolia. Les sept joueurs restaient ainsi chez le suédois jusqu'à tard dans la nuit, et rentraient chez eux en titubant légèrement mais ravis de leur après-midi entre amis.

###

Il referma la porte de ses appartements avec un soupir satisfait. Egidio et lui avaient royalement plumé les jumeaux, qui étaient de corvée de pizza pour le lendemain soir. Aiolia s'était bien moqué d'eux et avait projeté de raconter à tout le monde que les deux frères devaient cuisiner. Bien mal lui en avait pris, car Saga et Kanon l'avaient menacé de raconter à Ayoros les excursions de son cadet dans certains quartiers chauds d'Athènes. Aiolia avait eu beau faire le fanfaron, il craignait un peu la réaction de son aîné.

Son sourire se fana aussi rapidement qu'il était apparu. Satanée douleur à la poitrine qui ne lui laissait aucun répit ! Rien que de penser à lui faisait mal. Tellement mal.

Je peux t'aider si tu le souhaites.

Il se retourna. Après tout, pourquoi pas ? Il s'était senti mieux, alors autant réessayer. Il se dirigea vers la pièce, comme il l'avait fait la veille au soir. Il posa à nouveau sa main sur le métal agréablement froid et laissa la douce torpeur s'emparer de lui. Glissant lentement sur le sol, il ferma les yeux avec un sourire apaisé.

###

Cette nouvelle routine s'ajouta naturellement dans son quotidien. La voix lui parvenait toujours lorsqu'il se sentait mal, de plus en plus souvent même, lui semblait-il.

Laisse-moi t'aider. Tu as besoin de moi.

Il la laissait le soutenir à sa façon. Mais peu à peu, quelque chose avait changé. Il ne réussissait pas à percevoir quoi, c'était sans doute trop infime. Mais cette différence était là. Elle ne se contentait plus de l'aider, elle voulait aussi lui montrer.

« Mais… quoi ? » avait-il balbutié en comprenant sa demande.

Ce que je fus… Ce que tu as été… Laisse-moi te montrer, tu verras.

Il décida de la laisser faire. Il n'aurait pas dû.