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Chapitre I

Appelez-moi Lia.

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Tu te rends compte de ce que tu viens de faire, Aqua ? s'exclama Kitty, ahurie.

– Je pensais avoir été clair concernant les surnoms stupides, me contentai-je de répliquer sans lui accorder un regard.

Sans en démordre, ladite Kitty continua de marcher à ma droite, restant néanmoins à une distance acceptable.

– Tu m'appelles bien Kitty ! Puis, de toute manière, tout le monde t'appelle comme ça.

– Parce que tu veux qu'on te nomme de cette façon, Catherine. Pas moi. Les surnoms de super-héros, c'est pour les autres. Et ils peuvent bien m'appeler Jaqueline en mon absence, je m'en fiche. Mais moi, c'est Idélia.

Un soupir sortit d'entre les lèvres de Kitty alors que j'entendais nettement un « Tu m'étonnes que t'as pas d'amis » qui aurait dû, en d'autres circonstances, me faire sortir de mes gonds. Inspirant fortement pour m'inciter au calme, je me contentai de plaquer un regard froid et distant sur Kitty avant de cracher :

– C'est pas l'heure pour toi d'aller baver sur le cul de Bobby ? Oh j'oubliais ! Il est avec Marie, maintenant. Ça doit te rendre les choses un peu plus difficiles, j'imagine. Non ?

Sur ces mots, j'arquai un sourcil moqueur avant de reprendre ma route, sans demander mon reste. Les pas de Kitty se firent de plus en plus distants, ce qui m'indiqua qu'elle avait pris le chemin inverse. Bon vent ! Oui, j'étais méchante. Et même bien plus que méchante lorsque l'envie m'en prenait. Je pouvais sans mal être cynique, insolente, hautaine… quand on venait me déranger. Ce qui était souvent le cas de Kitty qui, malgré l'absence de points communs entre nous, tentait toujours d'engager la conversation. Peine perdue.

Une fois seule, je me dirigeai vers le sous-sol. À ma droite, l'infirmerie. À ma gauche, un lieu que, j'en étais persuadée, j'allais détester.

Je pénétrai néanmoins dans ce dernier après avoir apposé la main contre la plaque électronique. Cinq cellules, sans fenêtre autre que celle insérée dans la porte, me faisaient face. Je croisai Travis – qui se chargeait de la sécurité du lieu depuis que quelqu'un l'occupait – et hochai la tête avec un sourire poli. À défaut d'être gentille, j'étais – je suis ! – toujours d'une politesse exemplaire. Bonjour, s'il vous plaît, merci, au revoir. Là étaient les bases du savoir-vivre, selon mes parents. À cette pensée, ma mâchoire se contracta et je me concentrai à nouveau sur la tâche qui m'était incombée. J'ouvris ma besace et Travis l'inspecta avec minutie. Non, ne t'inquiètes donc pas gentil mutant au regard revolver, je n'amènerai pas de quoi me faire trancher la gorge. Ou pire.

À peine avait-il fini sa petite inspection que le gardien retournait à son poste et que je m'installai devant la porte de la cellule. Je n'eus pas à attendre longtemps avant qu'il appuie sur le fameux bouton pour y pénétrer. Une grande bouffée d'oxygène pour se donner du courage, une prière au dieu des pompiers, et ça y été, j'étais entrée. Où comment employer à la lettre l'expression : « Se jeter dans la gueule du loup ».

D'abord, ce fut la clarté de la pièce qui me brouilla la vue. Des milliers de petites étoiles colorées dansaient devant mes yeux, alors que le néon leur brulait la rétine. Je dus papilloter des paupières pendant un court moment avant que les étoiles ne virent de mon champ de vision.

Rien que pour ça, j'aurai dû refuser.

– Alors, laisse-moi deviner. T'es la fille que j'ai commandée ?

Venait-il de m'insulter de pu… Mh, de péripatéticienne ? Ça annonçait la couleur, au moins. Ravalant ma fierté, et une réplique plus que cinglante, je pris soin de ne pas jeter un seul regard à l'abruti qui se tenait affalé de tout son long sur le lit blanc et m'approchai de la table en plexiglas pour y déposer la nourriture que je lui avais amenée. Quelle connerie. Il aurait mieux fallu que je le laisse crever de faim.

Quel monstre, tu fais !

Soit. Je m'étais même attardée pour lui prendre plusieurs types de plats, pour être sûre qu'il trouve son bonheur. Quelle gourde je fais !

– J'avais pensé que tu serais un peu plus grande, continua-t-il, dans son délire.

Ok, fais-lui bouffer la poussière.

Je remerciai ma voix intérieure pour cet accord et jetai pour la première fois un regard au prisonnier. Hautain, arrogant, méprisant. Qu'il s'agissait de lui, ou de mon regard.

– C'est histoire de s'accorder avec la taille du client, répliquai-je finalement, bien décidé à le remettre à sa place.

Et ça eut l'effet escompté ! Ma voix avait claqué dans la pièce un peu plus méchamment que prévu et avait jeté un froid que – j'en étais sûre – même lui aurait eu du mal à combler. St-John Allerdyce alias Pyro.

Ou le mec qui contrôle le feu. Je me repris immédiatement en réutilisant les mots de Kitty : « Le taré incontrôlable qui contrôle le feu ». Tout ça était très sécurisant. Évidemment, taré qui, à présent, me fixait d'un air mauvais. Mon regard glissa sur sa main qui venait d'entrer dans la poche de son jean, à la recherche de quelque chose.

– J'imagine que tu voudrais reprendre… Ça ? m'exclamai-je en tirant le zippo de ma propre poche de pantalon.

L'expression qu'afficha Allerdyce me laissa perplexe un moment. Il était soulagé, c'était évident. À croire que je venais de lui ramener son gosse de trois ans qu'il avait perdu au supermarché. Mais, l'éclat dans ses yeux ressemblait bien plus à de la colère qu'à autre chose. Beaucoup de colère. Bipolaire, le mec ? Il se leva de son lit, l'air pas vraiment commode, et me fusilla du regard. Ok, on respire. Allez, Idélia, tout va bien se passer.

– On se calme, d'accord ? tempérai-je de mon mieux. Si tu le veux, je vais te le rendre… Une fois que tu m'auras dit « s'il te plaît ».

– Ok ! rit-t-il jaune, – et un frisson me parcourut l'échine, dévastateur. On m'a amené ici pour m'inculquer les bonnes manières ? Tu perds ton temps, autant que tu le saches.

– Très bien, me contentai-je de répliquer en attrapant mon sac désormais vide.

En quelques pas rapides, j'étais devant la porte qui s'ouvrait. Allerdyce, quant à lui, tenta de me rattraper et je priai pour que la porte se referme aussi sec ! Mais, pas tout à fait remis de sa dernière escapade avec Magnéto, il ne fit que tanguer avant d'avoir à se rattraper au montant du lit en fer. À peine avais-je franchi la porte qu'elle se refermait déjà sur Allerdyce, plus furieux que jamais. Des dizaines d'insultes étouffées me parvinrent, et la partie la plus folle et moins noble de moi-même ne souhaitait qu'une chose : retourner à l'intérieur et lui faire avaler sa langue. Lui péter le nez m'avait traversé l'esprit, aussi. Néanmoins, dans un calme presque olympien, je réussis à sortir de la pièce sans commettre de meurtre et en prenant même soin de saluer Travis, qui n'avait pas loupé une miette des ignominies que m'avait lancé Pyro.

En retournant au rez-de-chaussée, je ne savais qu'une seule chose : j'étais dans une merde tout à fait grandiose. Et je m'y étais plongée seule, en plus ! J'avais convaincu, puis aidé Bobby à ramener le pyromane au manoir. Je… Bon dieu, j'avais fait beaucoup de choses en moins de vingt-quatre heures. Beaucoup trop de choses. Peut-être qu'en allant voir Tornade… Elle accepterait mes excuses à coup de larmichettes et d'yeux de chat Potté et accepterait de trouver quelqu'un d'autre pour s'occuper de lui. Mais qui ? Bobby ? Après leur dernière altercation, c'était la guerre assurée… Et personne ne serait assez fou pour s'empatouiller dans cette affaire. D'ailleurs personne de censé ne se serait volontairement fourré là-dedans. Réfrénant une envie d'enfoncer mon poing dans le mur qui se trouvait à ma droite, je prenais une longue inspiration. Jamais je ne réussirai à faire quoi que ce soit de lui. Je ne serai pas mieux lotie que Bobby… Il ne m'avait fallu qu'à peine dix minutes pour me le mettre à dos. Combien de temps lui faudrait-il avant qu'il ne se mette en tête de me tuer ? Si ce n'était pas déjà le cas, cela va de soi.

Je m'arrêtai à une intersection du manoir, juste en face des escaliers. C'était l'heure du dîner. Tout le monde devait s'être rassemblé au réfectoire… Non, je n'avais pas le courage de passer du temps entouré. Ma journée avait déjà été assez merdique. Et le stress montait.

Beaucoup trop vite. Alors, je m'empressai de grimper les marches quatre à quatre pour m'engouffrer dans une des chambres du troisième étage. Ma chambre. Aussitôt, une sensation de paix m'envahit. J'étais bien, ici. Les murs étaient vierges de tout poster, photo ou autre… Il n'y avait que le minimum du minimum, si on excluait le lit double que je m'étais permis d'amener de chez moi… Mais cette chambre me semblait juste parfaite. Bien sûr, des tonnes de livres jonchaient mon bureau et autres meubles. Partout, et sur tous les sujets possibles et imaginables. Cela allait de l'histoire de la Grèce Antique, aux cours de philosophie et aux théories des philosophes célèbres, à l'art en général en passant par l'apprentissage du yoga. Un sourire atteignit d'ailleurs mes lèvres lorsque je croisai ce dernier du regard. Je pouvais remercier le professeur Xavier pour cela. Après ma détention forcée, ma solitude plus ou moins aménagée, il avait fallu me trouver une manière de décompresser et de gérer mes émotions un peu… explosives. Mais, au fond, ça importait peu.

Un regard vers l'horloge m'apprit que j'étais bien trop en retard sur mon planning habituel, avec le bouleversement qu'avait été pour moi l'arrivée d'Allerdyce. Oui. J'en avais honte – bien que jamais je n'aurai pu l'avouer –, mais toute ma vie, toute ma petite vie, se résumait au papier que je tenais entre mes mains. Un vulgaire planning que je n'avais pas modifié depuis des mois. Et que j'allais devoir revoir dès ce soir. Malheur soit ce pyromane et ce fichu besoin existentiel de me mêler des affaires qui ne m'incombaient pas. Néanmoins, mon cœur palpitait encore étrangement et je m'accordai l'heure où je dinais habituellement pour méditer. Le yoga avait cet effet sur moi. Je me changeai à vitesse grand V en lançant mes vêtements sur mon lit, sans la moindre gêne, avant d'enfiler une brassière et un legging noir.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Installée au milieu de la pièce, j'enchainais les positions demandant un minimum de souplesse et de concentration. Ainsi, je tentais tant bien que mal de mettre de côté tous les soucis que ce soudain regain d'empathie m'avait occasionnés dans un coin de mon esprit. Très, très loin. Appuyée sur les avant-bras, le bas du corps dans les airs, je tentais de rester en équilibre en contractant mes abdominaux au maximum… Alors que je me demandai si mes abdominaux pouvaient s'enfuir de mon abdomen d'eux-mêmes, tant la douleur que cette position m'offrait était affreuse, la porte s'ouvrit en grinçant. Bobby venait d'entrer.

– Je vois que je dérange, se risqua-t-il.

En soufflant, je me laissai retomber sans la moindre grâce à quatre pattes avant de me relever en me frottant les mains. J'attrapai une serviette éponge et me tapotai doucement le visage avant de prendre la parole, la voix rauque de fatigue.

– Tu sais que les gens normaux frappent avant d'entrer.

– Mh… Je suis désolé, c'est vrai que j'aurai dû… mais t'es toujours avec tes écouteurs, alors…

Devant la mine affolée d'Ice, comme il aimait qu'on l'appelle, je n'eus pas le cœur à le faire souffrir un peu plus. J'eus un sourire narquois avant de répondre.

Sadique, plutôt.

Soit.

– Je blague, Ice. Tu me voulais quelque chose ?

Il hocha la tête, appréciant mon humour en demi-teinte, avant de s'appuyer sur la commode près de l'entrée, les bras croisés et la mine grave. Le thème de notre prochaine conversation n'avait pas à être annoncée, elle était déjà écrite en grosses lettres sur le front de Bobby : Pyro. John. Allerdyce. Qu'importait la façon dont on le nommait : c'était lui, la raison de sa venue.

– Kitty m'a raconté…

– Quelle garce, me contentai-je de répliquer. Toujours à l'ouvrir sans savoir.

Bien évidemment, elle avait bavé. Dès qu'elle avait connaissance de quelque chose, vous pouviez être sûr que le reste du manoir en aurait la connaissance dès lors qu'elle vous aurait quitté… Garce. Les lèvres pincées, je me contentai de m'asseoir sur le lit, dans l'attente de la suite. Bobby me ressemblait beaucoup, plus que n'importe qui au manoir. Tant par ses pouvoirs que sa personnalité. Calme, doux, poli, et il avait le sens des responsabilités… Tout comme moi.

Dixit celle qui martyrise la pauvre Kitty. Tout à fait.

Je ne la martyrise pas. Je lui rends la monnaie de sa pièce, nuance.

– Je sais pourquoi tu fais ça et… Tu ne devrais pas t'imposer ça.

– Tu es mon ami, Bobby. Lui, le tien. Et ce n'est pas parce que Magnéto lui à retourner le cerveau qu'il faut l'abandonner. On a choisi de le ramener ici, je ne peux pas … juste décider de revenir sur mes choix. Je dois assumer.

– Justement ! Je devrais aussi, plutôt que…

Je l'arrêtai d'un geste brusque, le regard dur.

– Tornade a dit que tu ne devais pas le voir pour le moment. Il est encore trop chamboulé. Et puis, ça s'est plutôt bien passé ! mentis-je, à court d'arguments.

– Vraiment ? s'étonna Ice, les yeux écarquillés.

Il avait vraiment l'air étonné. Était-il aussi affreux pour que cela l'étonne plus que n'importe quoi ? Une étrange peur s'infiltra doucement dans chacun de mes pores et j'eus un léger rire jaune avant de soupirer.

– En vérité, non. Je crois qu'il m'imagine déjà morte et enterrée, lançai-je finalement. Et dire que je vais devoir aller le voir plusieurs fois par jour, continuai-je dans un murmure, perdue. Je ne sais pas comment je vais réussir à tenir sans me faire arracher les yeux.

Contrairement à ce que j'avais imaginé, Bobby ne tenta même pas de me réconforter, se contentant de rire. Sympa, l'ami.

– Tu m'as fait peur. J'aurai cru avoir tapé trop fort, sinon. Si tu veux, je peux te dire ce qu'il faut et ne faut pas faire… Histoire que tu restes en vie assez longtemps pour que je prenne la relève.

Je hochai la tête, tout ouïe.

– D'abord, il a une sainte horreur qu'on lui donne des ordres.

Premier hochement de tête, alors que je me sentais devenir blême.

– Ensuite, reprit Bobby. Ne parle pas de sa taille. Je ne sais pas s'il est complexé ou s'il s'en fout réellement… Mais il a déjà démoli un gars, juste pour lui prouver que les sept centimètres qu'il avait en plus n'en faisaient pas un gros dur.

Second hochement de tête, alors que mon rythme cardiaque augmentait considérablement.

– Et… surtout, quoi qu'il se passe, ne touche pas à son Zippo. Ça pourrait s'apparenter à une déclaration de guerre pour lui.

Ok, j'avais arrêté de respirer.

Rien qu'un instant, certes. Mais j'avais tout de même senti mes poumons se bloquer dans ma cage thoracique. Je venais donc de donner trois raisons suffisantes à Allerdyce de souhaiter m'envoyer six pieds sous terre. Ne sachant quoi dire, je hochais à nouveau la tête, comme un automate. Que pouvais-je dire de plus ? J'avais plongé la tête la première dans une merde énorme.

– Tu crois que ça va aller ?

– Oh… Oui. Je vais – je me raclai la gorge – m'employer à ne rien faire de tout cela, Bobby.

– J'ai confiance. Tu sais faire ressortir le meilleur chez tout le monde, me complimenta-t-il avec un sourire sincère.

Je le remerciai d'un signe de tête, accompagné d'un léger sourire, avant de m'excuser : je devais prendre une douche.

N'empêche, je comprends que tout le monde lui court après… Beau, intelligent, adorable… Miam !

Ferme-la, il a une copine.

Et alors ? Ce qu'elle ne sait pas ne peut pas lui….

Je suis mortifiée.

Bien, finis vieille fille.

Je devais surtout réfléchir seule à ce que j'allais pouvoir faire pour arranger les choses… Sans excuses, cela allait de soi. Vu la manière dont il m'avait traité, il méritait même quelques jours de diète. Alors aucune excuse ne sortirait de ma bouche. Je chopai un pyjama en vitesse, ma trousse de toilette, et sortis de la chambre en direction de la salle d'eau. Pourquoi fallait-il toujours que je mette mon nez dans les affaires qui ne me concernaient pas ? Cette histoire… c'était entre Bobby et Allerdyce. Je n'aurai jamais, ô grand jamais, dû y mettre les pieds.

Je pinçai les lèvres, puis pénétrai dans la salle de douche. Il n'y avait personne pour le moment. Les filles devaient encore être au réfectoire ou en train de piailler entre elles de ce que la grande Kitty Pride avait dû leur annoncer.

– Saleté, marmonnai-je dans ma barbe, alors que je me débarrassais de mes vêtements pour entrer dans la douche.

Je n'aimais pas grand-chose chez Catherine. Mais, plus le temps passait, et plus l'envie que j'avais de lui arracher les dents avec une pince se faisait présente. Néanmoins, tous les sentiments néfastes que j'éprouvais furent balayés d'un seul geste lorsque l'eau chaude de la douche toucha ma peau de porcelaine. Ça m'apaisait d'une manière tout à fait étonnante. Et, je devais avouer que, sans mon principe de ne pas faire passer mes pouvoirs avant ma propre personnalité, j'aurai apprécié qu'on me surnomme Aqua. L'eau était mon élément… Celui que j'avais choisi.

Du bout du doigt, je fis naitre dans ma main droite un petit cheval constitué simplement d'eau stagnante. Il se mit à galoper autour de moi et un sourire idiot s'attaqua sur mes lèvres. Je trouvais cela si drôle, si reposant… Alors mon esprit se cala à nouveau sur la fréquence « Allerdyce » et je me sentis un tant soit peu coupable. Peut-être que, pour lui, le feu avait la même résonnance apaisante que l'eau avait sur moi. Encore une fois, j'étais partagée. Néanmoins, je n'eus pas le temps d'y réfléchir davantage, car la porte de la salle des douches grinça, rapidement suivie par les rires de quelques filles. Aussi, je laissai s'évaporer le cheval, jusqu'à ce qu'il se perde dans l'eau qui gisait à mes pieds, et me savonnai en vitesse. Moins de cinq minutes après, j'étais sorti de mon petit coin de paradis et m'employais à me sécher avec la même rapidité, à l'écart des autres filles.

Ces dernières se contentèrent de m'observer de loin en baissant le ton, ce qui était chose habituelle dorénavant. Pas étonnée pour un sou, je me contentai de revêtir un bas de jogging trop grand pour moi et un débardeur blanc, en ignorant les regards qu'on posait sur moi. En sortant de la pièce surchauffée, de nouveau tendue, je me félicitai : c'était de plus en plus facile de passer outre ces comportements. Un jour, peut-être, je parviendrai même à ne plus les remarquer. Oui et demain, il pleuvra des crabes à plumes. Cette pensée me fit rire et je me contentai de retourner à ma chambre, un léger sourire aux lèvres.

En parfaite petite ménagère, je rangeai les affaires que je venais d'utiliser et, lorsque je pris mon jean pour le mettre dans le panier à linge, un bruit métallique brisa le silence habituel. Je baissai le regard sur le petit objet brillant et, aussitôt, mon sourire s'amenuisa. Le Zippo de Pyro. Oui, parce que ça sonnait mieux que « Le Zippo d'Allerdyce ». Au moins, il avait le sens de la rime. Je l'attrapai du bout des doigts et jetai finalement mon jean dans le bac.

– L'objet du délit, murmurai-je avant de le poser sur mes cuisses pour pouvoir l'observer pendant que je me tressais les cheveux.

Argenté, brillant, il avait été customisé. On pouvait remarquer sans mal qu'une gueule de requin y avait été peinte, de telle manière qu'une fois ouvert… le requin semblait prêt à vous croquer. Était-ce une sorte de… menace ? Je voulus rire à cette idée. Un requin qui vous prévenait des flammes à venir… Un peu comique, non ? Non, mh… Des branchies avaient même été dessinées avec minutie, et je devais cependant, même sans être fan, avouer que c'était un beau briquet.

Ma masse de cheveux maîtrisée, je me débarrassai de mon jogging et me calai sous les draps, le Zippo toujours en main. Avec appréhension, je l'ouvris. Comme s'il allait m'exploser au visage ! Je secouai la tête avant de fixer la flamme avec attention. Elle dansait, comme l'avait fait plus tôt l'eau autour de moiA nouveau, je me pinçai les lèvres avant de fermer le briquet avec empressement et de le poser sur la table de chevet.

Cette nuit là, pour la première fois, mes cauchemars avaient le nom de St-John Allerdyce.


INFORMATIONS

J'aimerai remercier comme il se doit Daiky, ma Beta masochiste qui doit buter encore et encore sur mes textes pendant des heures. *-*

Comme vous pouvez vous l'imaginer, les avis sont toujours appréciés, chers amis lecteurs.

En espérant que ce chapitre aura piqué votre curiosité.

S.