Disclaimer : Cette histoire, le film Le Hobbit, un Voyage Inattendu et le livre The Hobbit, sont la propriété de Warner Bros Pictures et de J.R.R. Tolkien et tous les droits de création des personnages leur appartiennent, exceptée mon personnage : Sif.

2 sept. 2013 -

I
La Rôdeuse


Un vol d'hirondelles traversa le ciel dans une aérienne course-poursuite, faisant courir leurs ombres graciles sur l'orée d'une forêt. Le terrain était inhospitalier, clairsemé d'herbe et de roches abruptes émergeant du sol, pourtant une petite ferme s'était tenue ici. Sa carcasse se dressait encore, solitaire, la charpente de bois à demi emportée, le mur de pierre effondré.
En bas de la petite colline, la silhouette d'un cheval blanc pommelé de gris sans aucun harnachement d'aucune sorte broutait paisiblement, le pied sûr parmi la rocaille environnante. A quelques pas de l'animal, dans un potager abandonné, une femme était accroupie au sol, les mains dans l'herbe à la recherche de champignons et de légumes qu'elle enfournait dans une besace. Un vent d'est soulevait de longues boucles d'un roux foncé où le soleil jetait des reflets de cuivre. Levant la tête vers le vol d'hirondelles qui passait au dessus d'elle dans un pépiement joyeux, la femme dégagea les boucles qui dissimulaient un visage charmant, parsemé de mutines taches de rousseur autour du nez. Ses yeux gris acier, d'une forme féline, suivaient le ballet des oiseaux tandis que sa bouche s'ourlait d'un discret sourire.

Soudain, des voix d'hommes troublèrent le calme des collines, tapageuses, reflétant au moins la présence d'une cinquantaine d'individus. Les intrus semblaient aborder la colline surplombée par la ferme en ruine où la femme avait prévu de passer la nuit.
Se relevant lestement, la rouquine arrima son butin à sa ceinture et épousseta ses mains terreuses sur les braies de toile résistante qui soulignaient ses jambes, insérées dans des bottes de voyage.

- Elwë, appela-t-elle.

Le cheval gris qui avait également dressé ses oreilles à l'approche des intrus, s'approcha de la femme, ses sabots n'émettant étrangement aucun son au contact de la roche.

- Nous avons de la visite, allons voir, reprit la rouquine sans détacher ses yeux de la colline avant de sauter à cru sur le dos de l'animal.

Attrapant l'arc qu'elle portait en travers du dos d'une main, elle emmêla ses doigts dans l'épaisse crinière cendrée de l'autre et talonna Elwë qui prit aussitôt le galop en direction des ruines.

La Compagnie de Thorïn Ecu-de –Chêne à la reconquête d'Erebor, comptait en vérité quatorze Nains, qui faisaient le boucan de toute une garnison. Arrivant en vue de la ferme en ruine, l'héritier de Durïn qui menait l'expédition ordonna le bivouac et toute la Compagnie fut heureuse de prendre enfin un peu de repos.

Tapie derrière un rocher, la rôdeuse épia le groupe un instant, surprise par la présence de Nains dans ces terres et méfiante : c'étaient une race de guerriers féroces. Elle les compta, étudia leur équipement, elle observa deux jeunes Nains regrouper leurs poneys dans un enclos de fortune et quelques autres s'atteler à la préparation du dîner. Bien qu'armés jusqu'aux dents, ce groupe de Nains semblait baigner dans une atmosphère joyeuse de camaraderie. La femme aperçut également un vieillard gris d'une grande taille appuyé sur un bâton aussi haut que lui, un magicien errant, ami des rôdeurs, sur lequel il était impossible de se tromper de nom. Ce dernier s'était d'ailleurs isolé avec l'un des Nains et tenait une discussion animée.
La vue de Gandalf le Gris fit oublier toute méfiance à la rouquine qui failli sortir de sa cachette comme une fleur, mais elle se ravisa en voyant le magicien s'éloigner soudainement à grands pas excédés. Elle entendit :

- Rechercher la compagnie de la seule personne qui ait la tête sur les épaules ! … MOI, Monsieur Sacquet !

La rouquine n'ayant aucune idée de la réaction des Nains face à une inconnue sans la présence du magicien, elle jugea plus sage d'encocher une flèche sur son arc qu'elle garderait baissé et distendu, mais prêt à servir. Pressant doucement les flancs d'Elwë, elle sortit de derrière le rocher en hélant la compagnie d'une voix forte.

- Que font des Nains si loin des Montagnes Bleues ?

La Compagnie sursauta, pensant l'endroit désert de toute vie, et se rua sur ses armes. Alors, la rôdeuse banda son arc et ajusta sa visée avant de crier.

- Je ne suis pas une ennemie, j'escomptais seulement bivouaquer à l'abri de cette ferme, comme vous !

- Baissez vos armes, intima froidement Thorïn, sortant de la ferme en ruine. Qui êtes-vous ?

- Peut-être pourrions-nous en discuter autour d'un feu et d'un bol de ragoût, proposa la femme en rangeant arc et flèche avant de descendre de cheval et d'avancer les paumes levées. Je ne suis pas une ennemie, je le jure, juste une simple voyageuse.

- J'espère que vous ne comptez pas nous nuire, vous n'auriez aucune chance de vous en sortir, asséna Thorïn d'une voix grondante. Joignez-vous à nous.

- Je vous remercie, répondit la rôdeuse en inclinant légèrement la tête.

- Thorïn, tu es sûr de vouloir l'accueillir autour de notre feu ? chuchota Balïn tandis que les présentations se faisaient entre l'inconnue et les Nains.

- C'est une femme, seule, elle ne représente aucun risque. Veille à ce que nul ne mentionne notre quête.

- Je me nomme Sif, ravie de vous rencontrer, se présenta la rouquine en recevant les tapes dans le dos d'une multitude de Nains.

- Enchanté ! Moi c'est Bofur, et voici Nori, Ori, Dori, Oin, Gloin, Bombur, Bifur, Balïn et Dwalïn ! Notre chef renfrogné là-bas, c'est Thorïn Ecu-de-Chêne, fils de Thrain, petit-fils de Thror, Roi sous la Montagne, etc. Et nous en avons encore deux autres qui sont partis garder les poneys, nous vous présenterons, ce sont Fili et Kili ! Ah, et voici Bilbon, notre cambrio… notre hobbit !

- Je ne vais jamais parvenir à retenir tous ces noms ! rit Sif d'une voix claire, avant de se joindre à Oin, Gloin et Bombur pour la préparation du repas, auquel elle contribua par sa récolte de champignons et de tubercules.

Plus tard, assis autour du feu sous la charpente démolie, chacun dévorait le contenu de son écuelle en écoutant une histoire de Balïn. Sif n'en dit mot mais elle aurait adoré entendre les Nains chanter, car l'on disait que leurs voix réunies avaient quelque chose de magique, que l'on pouvait presque y entendre le marteau frapper l'enclume, le feu ronfler dans la forge et le bruissement de rivières de joyaux. La jeune femme n'avait pas partagé le repas beaucoup de Nains dans sa vie, mais elle fut agréablement surprise par leur promptitude à l'amitié, ne fusse que pour un dîner. Dans les Monts de Fer, les Nains l'avaient surtout marqué par leur sens des affaires, leur rusticité et leur amour de tout ce qui brille.

- D'où venez-vous, Sif ? questionna Balïn en rompant une miche de pain pour saucer son écuelle.

- D'un peu partout, répondit la rouquine d'un air énigmatique. En vérité, je suis originaire de la ville de Dale, à l'époque où elle n'avait pas connu le feu de Smaug.

L'évocation du cracheur de feu, effleurant de si près le but de l'expédition des Nains tenu secret, raidit imperceptiblement les membres de la Compagnie. Mais la rôdeuse apportait un vent de fraîcheur sur la Compagnie, lui faisant presque oublier les épreuves qui l'attendait. La femme poursuivit. Elle dominait les autres Nains d'une bonne tête, mais son sourire franc, son aplomb et sa pipe la rapprochait d'eux. Vêtue comme un homme, il n'y avait ses courbes, dissimulées sous les couches de laine et de cuir, qui changeaient le paysage des Nains, il fallait le dire.

- Aujourd'hui, je finis par revenir sur mes pas. Dale n'existe plus bien sûr, mais je me rends à Lacville.

- Comment une femme parvient-elle à survivre sur des terres aussi hostiles ? s'étonna Dwalïn, que la délicatesse n'étouffait pas, comme la plupart des Nains.

- En n'attirant jamais l'attention, proféra Sif en mordillant sa pipe avec un sourire.

- A l'époque où Dale existait, commença Bofur, mais c'était il y a plus de cent soixante-dix ans !

Dans le silence qui s'installait, douze paires d'yeux écarquillés se rivèrent alors sur Sif, la détaillant, la jugeant bien trop jeune pour avoir vécu plus d'un demi-siècle. Chacun décelait l'aura qui se dégageait de la rôdeuse, endurcie, téméraire et sauvage. Thorïn réfléchissait dans son coin, peut-être était-elle une descendante de Numenor ? Sif quant à elle, éclata d'un rire enjoué, ce qui contrasta aussitôt, prétextant qu'elle était très bien conservée, ce qui en soi n'était pas faux.
Puis, reportant son attention sur la curieuse présence d'un hobbit plutôt silencieux au sein d'une compagnie Naine, Sif l'interpella par-dessus le feu.

- Et vous Bilbon Sacquet, d'où venez-vous ?

Le hobbit sembla soudain sortir de ses pensées, surpris que l'on s'intéresse à lui, et secoua énergiquement ses boucles châtain pour les chasser définitivement. Il reporta son regard sur le visage de Sif noyé par la lumière du feu et chercha ces mots un instant.

- Je viens de la Comté, de… Hobbitbourg, Cul-de-Sac, répondit Bilbon de façon un peu abrupte.

Sur ce, Bofur avait rempli deux écuelles de ragoût qu'il chargea le hobbit de porter à Fili et Kili.

- Ai-je dit quelque chose qu'il ne fallait pas ?

Il y eut un silence de quelques secondes, les Nains s'échangeant des regards hésitants, jusqu'à ce que Thorïn, resté mutique depuis leur rencontre, ne réponde d'un ton acerbe. Sans regarder Sif, il ne semblait pas s'adresser à qui que ce soit en particulier d'ailleurs.

- Le hobbit s'est joint à nous par pure folie, tout comme nous avons été fous de lui proposer ce poste : c'est un fardeau.

Le semi-homme n'avait certes pas l'air très féroce mais Sif s'étonna de la dureté de ces paroles. Les Nains étaient rustres, elle le savait, même si entre eux régnait une entraide et une fraternité exemplaire, le cas de Thorïn Ecu-de-Chêne l'intriguait. La sévérité de ses mots n'avait d'égale que celle de son apparence, austère, solennelle, et son caractère acariâtre.
Toutefois, personne ne put méditer plus longtemps car Kili et Fili arrivèrent en catastrophe sur le bivouac, leurs écuelles à moitié renversées, l'air paniqué.

- Thorïn, des trolls ont volé les poneys ! s'exclama Fili.

- Et Bilbon s'est fait capturer ! ajouta Kili.

- Quoi ! Maudit soit ce hobbit ! pesta Thorïn en bondissant sur ses pieds.

- Nous devons sauver notre cambrioleur ! protesta Balïn.

- Comment avez-vous pu laisser cela arriver ! Vous étiez sensés surveiller les poneys ! accusa Dwalïn, dont les veines saillirent sur ses tempes tatouées.

- Nous avons rien vu ! se révolta Kili.

- Les trolls des montagnes sont énormes et bruyants, comment auriez-vous pu les manquer si vous montiez correctement la garde ? s'en mêla Dori.

Une dispute éclata où une profusion de jurons naniens s'échangèrent de toutes parts. Sif était restée assise par terre, et ne dut se relever que quand Bombur manqua de lui marcher dessus. Dominant la compagnie d'une bonne tête, elle en profita pour lancer d'une voix forte.

- Pendant que vous vous chamaillez, Monsieur Sacquet est certainement en péril !

- Ne vous mêlez pas de ça, vous ! répliqua vertement Thorïn.

- La rôdeuse à quand même raison, Bilbon à besoin de nous ! Nous sommes une Compagnie ! lança Bofur en serrant le poing.

- Très bien, aux armes ! appela Thorïn. Kili, Fili, montrez-nous le chemin !

- Et elle, qui c'est ? lança Kili en désignant Sif.

- Plus tard ! gronda son oncle en partant le premier, suivit par toute la compagnie.

Kili les dépassa prestement, porté par la jeunesse de ses jambes et par son ardeur. Il arriva le premier au feu de camp des trois trolls au moment où ces derniers balançaient le hobbit par les pieds.

- Colle-lui les orteils au dessus du feu, faut l'faire couiner !

Le jeune Nain bondit comme un diable et tailla le mollet du troll le plus proche avant de faire face aux deux autres.

- Lâche-le ! hurla-t-il.

- Qu'est-ce que t'as dit ? s'étonna Bert, le troll.

- J'ai dit : « Lâche-le », abruti ! répéta Kili en faisant tourner son épée dans sa paume d'un air effronté.

Bert lança alors Bilbon que Kili réceptionna dans ses bras, roulant tous les deux dans les feuilles mortes alors que le reste de la Compagnie, menée par Thorïn, se ruait dans la clairière à l'assaut des trolls. Dans un chaos indescriptible de cris de colère, de moulinets de bras et de glapissements de troll. Chacun tâchait de porter secours à l'autre tout en se battant, Kili, Fili, Thorïn, Dori et Balïn tailladaient les jambes et les ventres des monstres, tandis que Dwalïn, Bombur et Bofur leur écrasaient les pieds et brisaient leurs mâchoires de leurs masses.

Ori s'était fait attraper par Bert qui fut aussitôt mordu au bras par l'épée de Kili, qui entendit également une flèche siffler au ras de son oreille pour se ficher dans le cuir coriace de la main du troll. Le jeune Nain chercha l'archer des yeux quand il vit Sif entrer dans la lumière du feu, l'arc en travers du dos, une épée à la main. Elle ne lui accorda qu'un regard avant de remettre Ori sur ses pieds et de se jeter dans la mêlée.

- Les sacs ! Faut les mettre dans les sacs ! hurla Bert.

Mais les Nains couraient entre les jambes lourdes et pataudes des trolls, trop lents pour les attraper. Le plus bête, William, voulant rafler Dwalïn, n'arrêta pas son énorme mouvement de main après que le Nain tatoué ne se soit baissé et balaya Sif. La rouquine traversa la clairière et sentit brièvement les flammes lui chauffer le flanc avant d'atterrir sur Thorïn Ecu-de-Chêne avec une exclamation de surprise.

- Que faites-vous là ? tonna le prince Nain en refoulant Sif pour bondir sur ses pieds et repousser la main avide de Tom qui allait se refermer sur eux.

- Curieusement, j'ai pensé que mon aide ne vous serait pas de trop ! rétorqua sèchement la femme en plantant son épée dans la cuisse du monstre.

Soudain, un bruit de sabots effréné sembla se diriger vers Sif, et cette dernière eut juste le temps de s'écarter avant que les quatre poneys ne la piétinent. Plus loin, elle vit Bilbon tenir la lame volée d'un troll près de la corde tranchée qui retenait les bêtes quelques instants plus tôt. Mais la rôdeuse ne fut pas la seule à le voir, Bert se dirigeait droit sur le hobbit. Sif courut alors dans leur direction mais Fili, Bofur, Bifur et Nori lui bloquaient le passage, faisant tournoyer leurs armes pour maintenir William à distance. Alors, on entendit Kili crier.

- Bilbon !

Les Nains s'étaient retrouvés d'un côté de la clairière, fixant avec colère les deux trolls qui tenaient chaque bras et jambe du hobbit, prêts à l'écarteler.

- Jetez vos armes, ou on en fait des miettes ! menaça Bert.

Une lueur emplie de doute passa dans le regard terrifié de Bilbon, les Nains allaient-t-ils rendre les armes pour le sauver ? Après un instant, où chacun jetait des coups d'œil anxieux à Thorïn, ce dernier finit par planter son épée au sol avec répugnance en jetant un regard amer au cambrioleur. Les autres jetèrent également leurs armes, Kili et Ori les derniers, d'un geste rageur.

- J'ai dit : jetez TOUS vos armes !

Alors seulement les Nains remarquèrent Sif, solidement campée de profil, l'empennage de sa flèche juste au dessous de son œil droit, en direction de Bilbon.

- Abaissez votre arc ! gronda Thorïn.

- Je ne fais pas partie de votre compagnie, Thorïn Ecu-de-Chêne, vous n'avez pas d'ordres à me donner, cingla Sif sans quitter ses cibles des yeux.

- Mais Monsieur Sacquet en fait partie, nous avons besoin de lui ! implora Balïn. Sif, baissez votre arc, je vous en prie.

La rôdeuse, les yeux toujours rivés sur le hobbit, détendit lentement son bras.

- J'espère que Maître Sacquet vaut la peine de finir dans le gosier immonde d'un troll, siffla-t-elle en jetant son arc au sol.

(Voilà, voilà ! Je suis un peu intimidée, c'est la première fois que je poste ici et je sais qu'on y trouve plein de petites merveilles, sachant que c'est extrêmement délicat de se glisser dans le monde et la tête des personnages de Tolkien... Tout comme il est délicat de ne pas tomber dans le Mary-Sue, mais je tâcherai de développer un peu plus le caractère de Sif pour vous en donner une idée plus nette.

En espérant que ce avant-goût plaira et méritera quelques petites reviews agréables, ou du moins constructives ! J'essayerai d'y répondre ! Concernant la suite, le chapitre II est déjà prêt mais mérite sûrement quelques finitions, et je préfère me donner une longueur d'avance en écrivant le III préalablement.

Voilà, see you soon !)