Nous allons vers Ming."

Les sabots du cheval plongeaient dans la fine couche de neige qui recouvrait le chemin longeant la plage. Le galop égal de la monture berçait le samurai installé en croupe derrière l'enfant qu'il avait protégé la veille. Mais la douleur dans son flanc commençait à l'engourdir, et si il s'endormait, il ignorait si il serait capable de se réveiller.

Même si l'allure du cheval était régulière et confortable, chaque foulée pouvait aggraver d'avantage la perte de sang. Mais il n'osait pas inquiéter le jeune garçon, si fier d'assurer un parfait galop.

De son côté, Kotarou commençait à percevoir la fatigue du cheval. Lui-même était fatigué par la nuit éreintante où Nanashi et lui se sont battus pour leur survie face aux Mings.

Le corps du ronin se faisait plus lourd dans son dos.

"Ça va, tu tiens le coup ? s'enquit le garçon derrière son épaule.

- On peut dire ça comme ça, tenta de le rassurer son compagnon d'une voix faible.

- Tu es sûr ?

- Regarde toujours où tu vas, gamin ! Sinon tu perturbes la monture", répliqua-t-il.

Le garçon se retourna brusquement et regarda droit devant lui en se demandant si ce que lui disait Nanashi était vrai, autant à propos de la blessure que de cette histoire de perturber le cheval.

Il aperçut de l'autre côté des arbres morts les fumées blanches sortant de cheminées, indiquant la présence de la ville.

Puis il vit tout droit, une cabane dans un sale état sur le front de mer. Mais ça serait amplement suffisant pour y déposer Nanashi.

Lorsqu'il y arriva devant, il descendit et aida son ami à glisser du cheval pour aller vers la cabane. Il le fit s'assoir contre le mur et l'enveloppa avec soin dans la cape de Ming qu'ils avaient récupérée.

"Où est-ce que tu comptes aller ? demanda l'homme d'une voix rauque.

- Je vais aller en ville seul, je serai plus discret. Je te laisse le cheval et Tobimaru. Je vais voir si je peux trouver quelqu'un pour venir ici te soigner. Il te reste de l'argent sur toi ?

- Un peu. Dans mon kimono..."

Kotarou fouilla et en sortir la ficelle qui attachait des pièces entre elles. Il y en avait une vingtaine. Juste assez peut-être pour payer un docteur mais pour le reste du voyage ça allait être dur. Mais le plus important restait la santé de Nanashi. Il se leva et glissa les ryos dans sa tunique.

"Tu ne devrais pas y aller, protesta le samurai dans un râle de douleur, c'est dangereux, je te signales que les avis de recherches sont toujours affichés dans la province.

- T'inquiètes pas pour moi ! s'exclama le garçon en souriant, si Tobimaru ne vient pas et si j'y vais seul personne ne me remarquera. Je ferai attention, promis.

- Je suis tout de suite rassuré, ironisa l'autre.

- Roh, ferme-la un peu ! grommela le garçon. Je te préviens qu'il en va de ta survie alors fait moi confiance pour une fois. Et puis maintenant que les étrangers sont morts, qu'importe ce qu'il m'arrivera, rien ne me fera plus peur, après ce qui s'est passé. Tobimaru je compte sur toi pour le protéger."

Le chien aboya sa confirmation. Et le garçon sortit en courant après avoir solidement attaché le cheval à une branche solide. Il devait faire vite.