Disclaimer: Harry Potter and its universe belongs to J.K. Rowling


Au départ Drago avait pris la peine de compter les jours. Il les comptait un par un et il faisait une petite marque sur le mur du bout de son index. Cela lui rappelait sa petite enfance lorsque impatient il avait décompté les jours jusqu'à son onzième anniversaire puis jusqu'à la rentrée. A l'époque ils les avaient inscrits dans un petit carnet noir, un cadeau de son parrain.

Quand les feuilles étaient venues à manquer un soir d'été alors qu'il s'apprêtait à rentrer en quatrième année, Drago avait utilisé un sort de duplication. Le carnet ainsi rallongé lui avait duré encore un an de plus.

Ce carnet lui avait été précieux. Ce n'était pas un journal, car bien entendu, les Malefoys ne tenaient pas de journal intime. Pour lui cela avait était une preuve de ses accomplis. Il y avait noté ses moyennes annuelles, les appréciations flatteuses de ses profs, les jours de vacances, les jours d'attente et, bien évidemment, ses propres résolutions.

Parfois, pris d'une envie soudaine de se confier, il avait même osé y déposer les plus intimes de ses pensées. Mais ce n'était pas un journal, et n'en avait jamais été.

Au début, il avait donc pris soins de compter les jours. Pour passer son temps lorsque le silence se faisait trop pesant et peut-être aussi un peu pour garder espoir. Son père en avait rit, presque allègrement, sa mère elle, n'en avait rien dit du tout et Drago soupçonnait, qu'elle comptait avec lui.

Il s'était cependant rendu compte qu'il n'était aucunement facile de compter les jours, lorsqu'et le soleil et la lune lui échappaient. Il faisait sombre autour d'eux, jours et nuit ne faisaient aucune différence. Il ne pouvait pas se fier à son propre sommeil. Il dormait tantôt une heure, tantôt deux, et parfois il avait l'impression de dormir tout le temps. Alors Drago avait commencé à compter les jours en fonction des visites. Il comptait, en soit le nombre de repas servis.

Il s'était douté, même au début, que les visites ne se faisaient pas de manière régulière. Parfois, il n'avait pas faim, son estomac était en ébullition et pourtant voilà qu'on lui apportait un plateau. A d'autres moments en revanche, il croyait bien mourir tellement il avait mal, tellement son ventre se creusait et se tordait de douleur.

Il avait arrêté de compter les jours.

Un soir, il s'était surpris à compter les ronflements fiévreux de son père. Il en avait compté jusqu'à mille, le sourire au bout des lèvres s'imaginant que ce sifflement, n'était autre que la mélodie douce et langoureuse d'une chansonnette moldue.

Il avait entendu une fois, alors qu'il s'était perdu dans les rues d'un Londres méconnu des magiciens, un vieil homme jouer d'un instrument cuivré. Cela lui avait plu, mais il n'avait pu en parler, ni à Blaise, ni a Pansy.

Encouragée par le sifflement de son père, la mélodie moldue lui était revenue et il s'était mis à la chanter…Et puis les sifflements s'étaient tus, et Drago avait eu honte. Pendant un instant, il s'était laissé aller, il s'était oublié et voilà qu'il n'avait pas compté.

Sa mère n'avait rien dit. Cela faisait un moment qu'elle ne disait rien, alors Drago s'était pressé contre le ventre de Narcissa et il avait observé du coin de son œil la poitrine immobile de Lucius Malfoy.

Dans les bras de sa mère, Drago avait eu l'impression d'être un jeune enfant à nouveau. Il aimait ses caresses, les doigts fin et doux dans ses cheveux. Sa mère était rassurante et elle l'aimait plus que quiconque, plus que Pansy même, il en était sur.

Un soir, la douleur le pris au ventre finalement. Il n'en pouvait plus. Il voulait hurler de tout son cœur, mais il se retenait. Sa mère était calme, toujours calme à côté de lui et doucement elle lui défit son pantalon.

Il se rappelait de ses yeux, gris et sereins et de sa voix rassurante alors qu'elle repliait ses genoux et que, de ses mains frêles elle le poussait contre le mur pour qu'il si adosse. Le reste il s'en rappelait à peine. Il y avait eu beaucoup de douleur, beaucoup de cris certainement, et toujours les doigts doux de se mère contre son front.

Il n'en pouvait plus, il avait été certain qu'il allait en mourir. Elle avait pressé maladroitement contre la bas de son votre, l'avait aidé du mieux qu'elle le puisse, allant jusqu'à enfouir le bout de ses doigts dans son intimité.

Mais à la fin, il n'y avait eu que les pleurs de Drago dans cette cellule et puis le silence de nouveau, brisé par sa respiration saccadé.

Il n'avait pas eu la force de remonté son pantalon. Il était resté allongé là pendant des heures, baignant dans son propre sang et ses excréments. Sa mère n'avait rien dit, cela faisait longtemps qu'elle ne disait plus rien. Elle s'était rassise à l'autre bout de la pièce, tenant l'enfant dans le creux de ses bras.

Cassiopée était comme sa grand-mère. Silencieuse et fière elle avait tout d'une vrai Malefoy et Drago ne pouvait être plus heureux. Il les regardait tous les trois, du coin de l'œil.

Il avait oublié de compter les jours et il avait oublié de compter les respirations de son père. Il chantait des berceuses à Cassiopée pour pas qu'elle ne pleure. Elle était tellement calme, un vrai petit ange. Sa mère l'adorait. Elle s'entendait bien toutes les deux.

Parfois, lorsque Drago regardait la petite fille, il y voyait Blaise. Elle avait les même yeux, noir comme la nuit et les même pommettes hautes. Il était inquiet parfois aussi. Elle devait avoir froid toute nue. Il la trouvait froide d'ailleurs et parfois il était surpris de constater que ses lèvres étaient d'un bleu presque noir.

Dans ces moments là, il la tenait tout contre lui. Il ouvrait sa robe et pressait son petit corps frêle contre son torse pour lui tenir chaud. Mais rien ni faisait. Elle était froide comme un serpent et cela le faisait rire. Ou pleurer peut-être.

Il avait arrêté de compter les jours et Rodolphus en avait eu marre de ses chansonnettes, alors Drago laissait le silence l'entourer et du coin de l'œil il observait sa mère faire des papouilles à la petite.

Puis un jour, Drago se surpris à compter les vers.

Il en avait trouvé un sur sa main et il n'avait pas su d'où il venait. Puis son pied l'avait chatouillé, sa cuisse ensuite, ses bras, son dos… il y en avait partout, et il les avait compté avidement heureux de la distraction. Il les avait compté dans sa tête, bien entendu, Rodolphus ne tolérait plus qu'il fasse du bruit.

Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas eu de visite, mais il ne voulait pas tenter le diable, alors il compta dans sa tête, un par un, il compta les vers et il y en avait partout.

Il se mit à rire soudainement, ou du moins il en sentait l'envie, et puis, tout d'un coup, il vomit. Son estomac était vide, il n'y avait que de la bile qui pouvait en sortir et sa lui brulait la gorge.

Il resta à quatre pates pendant un long moment, les mains boueuses, le souffle court et l'estomac en nœud. Il avait froid, et il était fiévreux mais se n'était pas ça qu'il lui avait donné le tournis.

Cassiopée était toute pleine de vers. Les vers étaient en elle, ils bougeaient sous sa peau et ils bougeaient sur le ventre de Drago aussi. Les lèvres de Cassiopée étaient noirâtres et sa peau n'était pas basané, bien au contraire, elle avait un teint cireux, halé de bleu et vert, et ça lui donna encore une fois envie de vomir. Il voulu se réfugier dans les bras de sa mère, mais elle aussi, elle ne parlait plus et cela faisait longtemps. Elle le fixait assise dans un coin de la cellule les yeux dans le vide.

Alors Drago détourna le regard, il s'éloigna, la boule au ventre. Derrière lui, il le savait son père était allongé. Il n'osa pas regarder. La dernière fois qu'il l'avait fait ses yeux s'étaient posés sur des cotes creusées et des joues osseuses. Il ne voulait pas regarder…

Et pourtant il le fit.

Son père était pire encore. Un cadavre en décomposition semblant bouger de son propre grès. Ça grouillait sous la peau laiteuse de son père. Ça grouillait et ça empestait et Drago cru bien mourir rien qu'à l'odeur.

Il voulu crier mais il ne pouvait pas alors il se rassit et il ferma les yeux.

Il ne comptait plus les jours depuis longtemps. On l'avait de toute évidence oublié, alors il se laissa porter. Parfois, il entendait des bruits. Des hurlements au loin ou bien des cris, mais ça ne le touchait pas. Cela faisait longtemps que tout ça ne le concernait plus.

Il allait mourir, il le savait.

Sa gorge brûlait tellement elle était sèche et il ne sentait plus son ventre. Il y avait un trou bayant a la place, un vide énorme et effrayant mais Drago n'avait plus peur.

Il trouvait l'obscurité réconfortante et il languissait la mort. Il l'attendait, là, en silence.

Il l'aurait embrassé aurait-elle ne serait-ce qu'un instant voulu de lui. Mais elle tardait, elle tardait trop a venir, alors il se mit à prier. Il priait Merlin et Salazar et même le dieu moldu. Mais elle ne venait pas.

Puis un jour, ses oreilles se tendirent. Il entendit des vois et des pas pressés alors peu importe que ce soit le seigneur des ténèbres en personne, il n'en pouvait plus de cette vermine, de l'odeur putride qui l'entourait. D'un geste presque incontrôlé ses doigts se refermèrent sur un objet et avec le peu de force qu'il lui restait il le racla contre les barreaux de sa cage.

Ses doigts osseux faisait chanter le métal d'un va et vient pénible, désespéré, et puis les pas se rapprochèrent.

Il eu envie de rire, de nouveau. La mort, si attendu, se présenta a lui dans un déguisement des plus absurde. Potter. Potter et la belette allaient le délivrer et il leur donna un petit sourire presque narquois. Il aurait du se douter de ce dernier petit jeu. Il aurait du savoir que même au chevet de la grande dame, ses erreurs de jeunesses le tourmenteraient encore.

Il voulu dire enfin mais il se tue et il fit preuve encore de courage lorsque Potter le hissa dans ses bras. Il n'allait pas se débattre, il n'avait pas peur. Il voulait mourir et voilà que la mort était là ! Un rire lui échappa soudain, mais à ses propres oreilles cela ne ressemblai qu'à un affreux grincement, saccadé des claquements de sa langue.

Plus tard, bien plus tard, Drago se réveilla dans un lit. Potter n'était plus là, il n'avait était que le messager, certainement. La mort, étrangement, ressemblait à une jeune fille que Drago connaissait. Elle était belle et douce, tout comme sa mère et, ses cheveux couleur or tombaient en cascade autour de ses épaules. Il ne s'en étonna pas et il trouva du réconfort dans ses yeux argentés, si différents, et pourtant si semblables au siens.

« Tu es réveillé » lui dit elle, il ne répondit pas se contentant de l'observer. Elle s'assit au bout de son lit.

« Je comprends que tu n'ais pas envie de parler. » fit-elle et il la regarda encore avec un peu d'étonnement.

« Tu as faillit mourir. »

Alors quelque chose d'inattendu se produisit, son cœur s'emballa tout d'un coup et il se mit à pleurer.

Il était en vie.

TBC...