Disclaimer : rien n'est à moi, tout est à JKR... Je ne fais qu'emprunter...

Résumé : Assis sur son banc, Ron attend. Il se sent con, là, à attendre comme ça... Mais pour elle il attendrait jusqu'aux aurores s'il le fallait. Si encore elle venait... Bien des choses lui passent par la tête, et il se dit que lorsqu'il imagine le pire, le meilleur lui arrive... Assis sur son banc, Ron se sent con, mais là, debout, tout seul, il se sent encore plus con.

NDA: Voilà un p'tit one-shot tapé en deux heures au son de Muse... J'espère que vous aimerez, l'histoire date de mes quinze ans, et il a une saveur particulière pour moi...

Pour le Meilleur et pour le Pire.

J'étais sur un banc... Un joli banc, tout blanc. Il était assez vieux, il portait les stigmates des jeunes adolescents qui s'asseyaient là. Un 'Niobé aime Plantus' et des 'Bouse de Dragon' l'ornaient de part et d'autre, formant une mosaïque de topoi adolescents...

Je l'attendais. Elle était en retard.

Une femme passa. Deux.

Une heure passa. Deux.

Je l'attendais toujours. Je l'attendrais au bout du monde. Je l'attendrais pendant des heures, des mois, des jours. Parce que je l'aime. Parce que nous nous aimons depuis nos premiers jours de première année. Comme tous les enfants, nous nous chamaillions, mais comme tous les enfants, c'était parce que nous nous aimions... Les années avaient passé, et la jalousie s'était emparée de mon cœur. Je souffrais, elle souffrait, et nous nous évitions. Je ne voulais pas regarder la vérité en face. Elle était ma meilleure amie. Et j'étais persuadé qu'elle aimait Harry. Alors par amour pour eux, je me suis effacé.

Puis nous avons tous les trois recherché les Horcruxes. Et Harry m'a ouvert les yeux. Je me souviendrai à jamais de l'impression de bonheur qui m'avait envahie. J'avais l'impression que les griffes qui étreignaient mon cœur depuis déjà trop longtemps se transformaient en velours. Je sentais le manteau chaud des belles espérances recouvrir mon corps, mon cœur, mon âme. Elle m'aimait peut-être. Peut-être que finalement je ne la rebutais pas. Elle n'aimait pas Harry, c'était déjà ça... Peut-être qu'elle finirait par m'aimer, moi le grand dadais naïf au grand cœur. Pas le genre qui tourne les têtes, mais celui sur qui on peut se reposer... Peut-être qu'elle ne cherchait pas un survivant, un héros, mais la simplicité, l'humilité et les coulisses... Les illusions avaient peuplé mon cœur, et il n'avait fallu que quelques semaines, une grande bataille, et de nombreux deuils pour que nous reconnaissions notre amour.

Enfin, je me suis rendu compte que je ne pouvais vivre sans elle. Je me suis rendu compte qu'elle était mon pilier, ma raison de vivre, le gué qui me tenait aux amarres, la béquille qui m'empêchait de vaciller. Elle m'a fait accepter la mort de Fred... Je l'ai aidée à se remettre de ses idéaux déchus. Elle qui était si bonne, si douce, si généreuse avait perdu avec la guerre sa foi en l'âme humaine. Elle ne croyait plus -c'était fini- que l'homme naissait fondamentalement bon, et que seule la société le pervertissait. Non, c'en était terminé, elle avait vu le mal droit dans les yeux, elle avait tué, elle avait emprisonné. Elle avait compris.

Doucement je l'ai aidée à s'en relever. Elle s'est jetée dans mes bras. Un jour, alors que nous étions au Terrier, et que, comme à l'habitude, une ambiance de mort régnait. Personne ne parlait, plus personne ne riait. J'étais avec mes frères et ma sœur, auxquels il manquait toujours Un. Auxquels il manquera à jamais Un. Et Hermione est arrivée. Elle était douce, pimpante. Pour la première fois, elle semblait profiter du fait que la guerre était terminée. Nous, nous n'avions pas réussi à nous en remettre, deux mois après. Mais elle, elle est entrée, rayon de soleil au milieu des ombres, vivante et vivifiante au milieu de la mort et de la morosité. Si je ne l'aimais déjà, j'en serais immédiatement tombé amoureux.

Elle s'est avancé dans le salon. A compris. S'est tue. Elle s'était assise, et attendait. Elle était venue passer trois jours de vacances avec Harry, Ginny et moi. Ce n'étaient pas les vacances rêvées. Soudain, j'en eus marre de ce silence, de cette tristesse. Je n'en pouvais plus. Fred n'aurait jamais voulu cela. Comme il aimait à le répéter, 'en temps obscur, on a toujours besoin de rigoler'. Alors je me suis levé brusquement. Tout le monde a sursauté, elle comprise. Je me suis levé, et j'ai dit d'une voix forte et déterminée

'Viens Hermione, viens, je vais t'aider à monter tes affaires. Ça te dit un énorme gâteau au chocolat pour le goûter?'

Ma voix vacillait. Je n'étais pas capable de faire tout ça. De remonter le moral des troupes. J'ai fait comme j'ai pu. Et tout a marché. Mieux que je ne l'espérais. Ma mère, réflexe habituel, s'est levée à son tour, vieillie de vingt ans.

'Laissez les enfants - a t-elle dit – allez vous amuser, je m'occupe de la cuisine. Tu veux un gâteau Ronald? Qui d'autre en veut?'

Mollement, mais une nouvelle étincelle dans les yeux, ils s'étaient relevés. Ce n'était rien. Un simple gâteau au chocolat. Mais on avait tous besoin de faire quelque chose, de bouger, de trouver une nouvelle occupation. Avec Hermione, on est montés. Elle m'a dit ce jour là combien elle m'admirait. Elle m'a dit que j'étais maladroit, mais que j'étais fort, et qu'avec ma maladresse, je réussissais à déplacer des montagnes mieux que quiconque. Qu'elle croyait en moi, que j'étais l'homme le plus courageux qu'elle connaisse. Qu'elle m'admirait, vraiment. Qu'elle m'aimait, beaucoup.

Je la revois, douce, fragile, au milieu de l'orangé écrasant de ma chambre. J'entends sa voix, claire, qui vacille sur la fin. Je revois comment elle s'était tue, le carmin aux joues. Comment elle avait baissé les yeux. Je lui ai relevé le menton, ne sachant exactement que faire, que dire. Je lui ai relevé le menton, et puis à ce moment là, plus rien n'eut d'importance. Je ne savais que dire, alors je l'ai embrassée. Je me suis saisi doucement de ses lèvres, et alors a commencé la caresse la plus douce que je n'ai jamais connu. J'ai tenté de maitriser la frénésie qui avait pris part de mon corps. La caresse était longue, douce, et avait la saveur de l'inconnu. Doucement, tranquillement et avec sensualité, elle m'apprit le plaisir et l'amour. Lentement, posément, je lui appris le bonheur et la douceur. Nos mains se joignaient en même temps que nos corps. Nos cœurs avaient déjà fait tout le reste.

Une nouvelle femme passe.

Il commence à faire froid. La soirée tombe, et l'évidence se pose devant mes yeux. Elle ne viendra pas. Elle m'a oublié. Comme il y a trois jours quand elle était censée me rejoindre au restaurant et que j'ai poireauté tout seul. Comme il y a une semaine, quand elle a oublié les enfants à l'école. Comme il y a quinze jours, quand elle n'est pas rentrée de la nuit... L'évidence me saute dessus, prend part de mon être, me poursuit, envahit mes pensées et fourmille dans mon cœur. Elle voit un autre homme. Qui peut-ce être? Krum, son amour de jeunesse? Non, il est marié depuis quatre ans maintenant... Diggory père qu'elle console le soir lorsqu'il a un peu trop bu? Non, il semble la dégoûter. Je cherche et fouille dans mon esprit qui sont ses collègues de bureau. Ce comportement lui ressemble si peu... Elle a forcément un autre homme dans sa vie... Mes poings se serrent. Nous avions rendez-vous à trois heures de l'après-midi. Il est dix-huit heures. Elle se moque de moi...

Je commence à me lever et grimace lorsque mes muscles figés se remettent en marche. J'ai trente ans et le quidditch m'a déjà usé... Je rentre. C'est décidé. Je commence à me mouvoir vers la sortie du parc, lorsque je la vois. Les années m'ont donné un petit ventre, ont clairsemé mes cheveux, et m'ont rendu apathique. Je suis encore jeune, mais j'ai déjà un peu trop vécu. Les années sont une chape de plomb sur mes épaules.

Chez elle en revanche, les années sont une étole de soie dont elle se drape pour embellir son corps. Magnifique, resplendissante, éclatante... Les mots ne sont pas suffisant et le vocabulaire pas assez étendu pour décrire ma femme. Elle avance vers moi de sa démarche chaloupée, ses cheveux ébouriffés ceignant son doux visage de madone. Elle est belle. Immensément belle. Et alors que je la regarde, que je me plonge dans ses yeux aimés, je me rassure. Elle est en retard, mais elle est venue. Peut-être qu'elle avait un dossier difficile à traiter... Je refuse la petite voix qui me glisse que le département de justice magique n'a plus autant de travail qu'aux premières années d'après guerre alors qu'à cette époque-là, elle était systématiquement à l'heure... Et je ne fais que la regarder, l'admirer.

Comme à l'habitude, elle m'embrasse doucement. D'aucuns auraient dit furtivement, mais je sais qu'elle n'aime pas les effusions publiques. Une nouvelle fois, je refuse ce qui me souffle qu'en ce moment elle n'est pas friande d'effusions privées non plus... Et puis je vois son visage marqué de fatigue. Et elle me souffle

-Tu viens? Je suis désolée, je suis affreusement en retard, mais j'avais un dossier horrible à traiter... Un gamin qui a fait usage de la magie du côté moldu, et qui involontairement en a tué deux. Techniquement, c'est Azkaban à vie, mais ce n'est qu'un gamin qui a voulu s'amuser...

Elle m'a pris le bras, et tous deux nous marchons tranquillement. J'imagine sans cesse le pire... Qu'elle me quitte, qu'elle aie trouvé quelqu'un d'autre, qu'elle m'abandonne. J'ai toujours été ainsi, reprochant à Harry sa célébrité parce qu'elle m'excluait, reprochant à Hermione son travail parce qu'il me sortait de sa vie... J'ai toujours été jaloux, et j'ai toujours cru au pire. C'est vraiment un défaut qui me poursuit, car je me torture seul. Par exemple, voici trois heures que je me torture... Pour au final quoi? Que ma femme me rejoigne, tous sourires -ou presque- et me prenne par le bras pour m'expliquer son retard...

Nous continuons à marcher, et soudain elle tourne son beau visage vers moi. Soucieuse, elle fouille mes yeux, m'évalue du regard, comme si elle avait une grande nouvelle.

-Ron, j'ai quelque chose de très important à te dire.

Des larmes viennent mouiller ses yeux. Son visage se plisse et elle semble apeurée. L'effroi me saisit soudain. Lorsque je la vois reprendre son souffle et afficher un air déterminé ainsi que l'ombre d'un sourire -comme si elle était heureuse d'éclaircir une situation- je me détends. Elle n'a rien. Ou en tout cas rien de grave. Et elle semble penser de même. Qu'a t-elle à m'annoncer? Je cherche, et des milliers d'idées me traversent l'esprit, dont une, fulgurante, s'imprime au fer rouge dans mes pensées. Je ne peux m'en départir, et elle investit chaque pore de ma peau. Bien sûr, il faudra agrandir la maison, ajouter une chambre, mais en attendant, Rose et Hugo peuvent partager la leur, ils sont encore petits... Le fait que nous ne roulons pas sur l'or et qu'une nouvelle bouche à nourrir serait peut-être un fardeau ne fait que passer d'un neurone à l'autre pour ressortir de ma tête... Hermione... Mon Hermione est enceinte! J'en suis sûr! Je vais être encore papa! Le bonheur me saisit le cœur, et une flambée d'adrénaline me parcourt le corps...

Mais brusquement, elle resserre sa poigne, nous arrête, et se met complètement face à moi. Elle semble ennuyée. Pire, atterrée. J'ouvre la bouche pour lui dire de ne pas s'inquiéter... Oh mon amour...

-Ron! Attend, laisse-moi parler. Je ne sais pas ce que tu vas imaginer, mais...

Elle secoue la tête de gauche à droite, comme repoussant l'idée qui m'est venue. Je retiens mon souffle, et plus rien ne bouge en moi.

-Ron... Je crois que tu ne comprends pas... Je... Il faut... Je...

Elle halète, reprend son souffle, essaye, se trompe, recommence, et puis inspire profondément, me regarde cette fois dans les yeux, et j'y vois ce qu'elle s'apprête à me dire. Son courage gryffondorien ne lui fera donc jamais défaut... J'aurais préféré. À défaut de Ça, j'aurais préféré qu'elle soit veule, et peureuse. Qu'elle ne me l'avoue jamais. J'aurais préféré...

-Ron. Je te trompe depuis déjà deux mois. Je... Je ne t'aime plus. Et je suis enceinte. Et ce n'est pas de toi. Je... Je te quitte Ron. Tu recevras les parchemins de divorce d'ici une semaine. Je... Je te laisse tout. Tout ce que tu veux. Si tu veux que les enfants soient avec moi la semaine, c'est comme tu préfère, je ne veux pas qu'on se déchire... Au moins pour eux... Et puis pour toi. Je ne veux pas que vous souffriez de mon égoïsme. Mais je te quitte, c'est fini.

Ses mots sont autant de poignards qu'elle plante dans mon bonheur. Ma couverture chaude d'homme marié et fidèle, de papa préféré et d'homme modèle se lacère en même temps que mon cœur. Ma vie part en lambeaux, et mes entrailles se déchirent. Je reste figé. Je ne peux rien faire. Je ne peux rien dire. Pas même courir. Pas même hurler. Pas même pleurer. Ma façade se fissure et laisse apparaître toutes les vilenies de mon existence. Et la pire de toute. La plus horrible. Celle qui me foudroie sur place.

Elle ne m'aime plus.

Ma femme ne m'aime plus et me quitte.

Elle me regarde avec cet air de pitié qu'elle a de si particulier. Elle pleurerait presque pour moi. Je crois que ça y est. Je vois des larmes dans ses grands yeux chocolats. Ses grands yeux aimés. Mais non pas aimants. J'aurais dû le voir. J'aurais dû le savoir. Mais les seuls regrets qui m'envahissent en ce moment sont des regrets d'amour. Elle part. Elle m'abandonne. Elle me laisse, et surtout, surtout, elle ne m'aime plus.

Je la vois lever la main, comme pour me caresser la joue. Renoncer. Et recommencer. Je sens ses petits doigts légers parcourir ma joue, remonter sur mes tempes, les masser délicatement et redescendre. Je ferme les yeux sous la caresse et tends mes lèvres vers le creux de sa main. Je l'embrasse. Pour la dernière fois. Je sens sa paume mouillée. Je réalise que ce sont mes larmes. Je rouvre les yeux et elle laisse tomber sa main le long de son corps. Elle pleure aussi. Les sanglots déchirent sa gorge, mais par égards pour moi elle tente de ne pas le montrer. Comme si j'avais encore une quelconque fierté. Elle pleure. Je pleure. Et elle se détourne.

À travers mes yeux brouillés de larmes, je la vois traverser l'allée de chênes qui forme deux chemins opposés. Elle franchit l'allée et va retrouver quelqu'un. Son amant sans doute. Par curiosité, je me sèche les yeux pour distinguer ses traits. Et là je le vois. C'est donc pour lui qu'elle me quitte. Elle me quitte pour Drago Malefoy. Évidemment. Mes yeux se brouillent et je n'ai eu le temps que de voir rapidement son regard à lui. Comme s'il regrettait. Lui.

Lui qui me vole ma femme.

Lui qui s'est fait aimer d'elle alors qu'elle ne m'aime plus.

Lui qui la prend par le bras et qui l'éloigne.

Lui qui l'emmène chez lui.

Lui qui va élever son enfant.

Lui.

Mais tout cela ne m'atteint presque pas. Tout ceci n'est que vague douleur à côté de la phrase qui tourne en boucle, qui est une ronde qui n'en finit pas, me poignardant chaque fois, me brûlant, me torturant.

Elle ne m'aime plus.

Alors? Tou bi continuède ^^