Welcome mes chatons sur ce recueil de ficlets, qui sans reprendre les mêmes personnages d'un chapitre à l'autre, se situe dans le même univers. J'me suis dit que c'était mieux de simplement les regrouper ici plutôt que flooder...


Disclaimer: One Piece n'est pas à moi, et c'est une nouvelle tellement inédite qu'on en est tous sur le cul. Moi y compris.

Rating: K+

Genre: Family/Hurt/Comfort

Pairing: Moria/Perona

Settings: Ceci est un UA, plus ou moins apocalyptique. Pour remettre le compteur des âges à niveau, si Perona a six ans, Moria doit avoir la trentaine. Grosso Modo.

N/A: Mes amis, je vous remercie d'être là et de ne pas avoir fui en voyant Moria dans les personnages. Maintenant, je pense qu'il serait bon de vous inculquer quelques notions de survie, parce que votre instinct m'a tout l'air défaillant. Fuyez pauvres fous! ...Ou restez, et on sera tous amis! :'D


Bouffeur de chiens

Dehors, il pleuvait. Ça faisait un moment que la pluie avait arrêté d'être juste de l'eau. Pas un être dehors n'aurait essayé de braver l'acide qui déferlait en trombe. Les plus cyniques disaient qu'au moins, le son des clapotis n'était pas couvert par un concert de bombes. Le ciel était gris, mais ce n'était que routine un coin de bleu au-delà de la grisaille, lui, aurait étonné les foules. La ville aussi , ou les ruines qui en restaient, était grise, couverte des cendres des corps qui avaient brûlés lors de l'incendie des usines. Une crasse poisseuse régnait sur ces vieux restes d'humanité.

Moria se tenait éloigné des fenêtres, par peur qu'elles ne fondent, et qu'il ne reçoive une giclée brûlante qui le défigurerait. De la même façon, il se méfiait de la toiture qui ne résisterait plus longtemps, et avait planifié de la réparer quand le temps serait plus clément. Il roulait nerveusement entre ses longs doigts la dernière cigarette qui lui restait. Il doutait pouvoir en retrouver, mais plus il la tenait, plus il la voyait lui faire de l'œil. Il la porta à ses lèvres, sans pouvoir se résoudre à l'allumer. Il se mit à jouer avec son briquet, sans allumer la flamme, par peur de gâcher l'essence. Du coin de l'oeil, il regardait, la petite fille à ses pieds qui s'amusait avec un vieil ours en peluche élimé qu'il avait déniché. Il ne lui avait pas dit qu'il l'avait arraché au cadavre d'une gamine qui devait avoir à peu près son âge. Malgré tout ce qui leur arrivait, il tentait, tant bien que mal de la protéger d'un monde bien trop cruel pour une enfant.

Perona avait été ravie quand elle l'avait vu rentrer avec le jouet dans ses bras. Du haut de ses six ans, elle avait décrété qu'il s'appellerait Kumaci. Elle babillait autour de lui, lui servant un thé imaginaire, le grondant aussi parfois. Quand elle boudait, c'était à lui que Moria devait s'adresser pour présenter ses excuses, qu'elle finissait toujours par accepter d'une petite moue dédaigneuse. Petit à petit, Kumaci était devenu un membre de leur famille, construite de bric et de broc, comme le cabanon bancal qui leur servait d'abri. La peluche distrayait la fillette lors des moments où son ventre gargouillait, se crispait, et où Moria se trouvait désemparé, sans rien à lui donner pour calmer sa faim. Il fouillait minutieusement les poubelles, les appartements vides à la recherche de conserves, et plus le temps passait, plus il devenait difficile d'en trouver. Il avait fini par se résigner à laisser Perona seule lors de ses recherches, lui faisant promettre de ne pas sortir, de n'ouvrir la porte qu'à lui et à personne d'autre, sous aucun prétexte.

Pendant plusieurs jours, il n'avait rien trouvé. Il ne l'avait pas dit à Perona, lui avait fait chauffer une boîte de raviolis. Lui, il avait déjà mangé, les restes d'un chien. Sur le coup, il avait eu envie de vomir, et puis, il s'y était habitué. On s'habitue à tout, surtout à l'horreur.

Finalement, il avait craqué. La fumée glissait le long de sa gorge, pour s'infiltrer, sinueuse, dans ses poumons. Il avait envie de pleurer, parce qu'il ne pourrait plus fumer après cette clope, parce que son odeur, les gestes qu'il faisait, lui rappelaient trop comment était sa vie d'autrefois. Il la regrettait, désespérait à l'idée de ne s'être jamais rendu compte dans quel sorte de paradis il vivait. Et, dans les cendres, il avait trouvé Perona.

Elle ne s'en rendait pas compte, elle était trop jeune, mais c'est elle qui lui permettait de tenir. C'est elle qui, en riant, pleurant, jouant, lui proclamait que tout espoir n'était pas perdu, car elle était elle-même un brin d'espoir. Il n'avait pas besoin d'être son père pour qu'elle le considère comme tel, et pour la première fois de sa vie, il avait senti qu'on lui vouait une abnégation sans bornes. Alors, lorsque ses grands yeux gris se mouillaient de larmes, il était prêt à la consoler, l'entourer de ses bras que les autres trouvaient trop grands, trop pâles, trop effrayants. Il ne lui faisait pas peur, avec ses dents pointues, ses cheveux violets, sa silhouette décharnée, ses tatouages en forme de croix sur le visage. Elle le croyait capable de soulever des montagnes, et quelque part au fond de lui, il se demandait si, en effet, il ne le ferait pas pour elle. Elle lui avait parlé, avec son babil d'enfant, de sa famille, de sa chambre, de ses jouets. Il avait été mal à l'aise, tout le long de son récit, incapable de lui assurer pareil environnement, mais elle l'avait rassuré, dégageant ses drôles de bouclettes roses de son visage pour mieux planter son regard dans le sien, lui disant qu'il valait mieux que tout ça.

Une bombe s'est faite entendre au loin. Perona a sursauté, serré Kumaci un peu plus fort contre elle. Elle a fermé les yeux, s'est recroquevillée un peu plus sur elle-même.

« Papa...J'ai peur. »

Moria s'est penché sur elle, l'a doucement étreint. Et puis, il a posé ses mains sur ses oreilles, pour lui mentir dans un murmure paternel :

« Ne t'inquiètes pas, c'est bientôt fini. »