Ne vous indignez pas tout de suite quant à la situation d'énonciation, elle suit une logique précise. ;)
Disclaimer : Les personnages de cette histoire ne m'appartiennent pas, cependant il est évident que le scénario et chacun des mots mis bout à bout pour la rédiger viennent de mes petites mains.
One :
« Qui comprend l'humanité recherche la solitude. »
Un souffle de vent fit bruisser les feuilles des arbres de la forêt dense, et une paire d'yeux attentifs discerna la branche suivante sur laquelle se poser. La vitesse des cinq silhouettes dans l'obscurité augmenta encore. Un masque sur le visage, les deux têtes du convoi échangèrent quelques signes, et la plus petite des deux siffla doucement entre ses lèvres. Les trois derrière ralentirent, et se rangèrent devant la plus grande, alors que l'autre s'éloignait un instant dans une autre direction.
L'homme en tenue d'anbu du village caché de Konoha leva un bras, main à plat, et s'arrêta quelques arbres plus loin, sur ses gardes.
— Nous allons nous reposer ici un instant, nous approchons. Notre éclaireur ne tardera pas à revenir, mais nous sommes tout près.
Les trois ninjas derrière lui acquiescèrent, et sur un signe du chef, une jeune femme d'une vingtaine d'année aux yeux nacrés forma quelques signes de ses deux mains, et dirigea son regard tout autour d'eux. Elle utilisait une technique héréditaire du clan Hyûga dont elle était l'héritière : le Byakugan.
— Rien à signaler.
Aucun des trois jounins de l'équipe de cinq ne savait qui se cachait sous les masques de leurs chefs, mais accordaient une confiance absolue à ces deux silhouettes dans l'ombre qui se battaient pour le village qui leur était cher. La première des deux leur semblait familière à la voix, dans sa façon de se mouvoir, tandis que la seconde ne prononçait jamais un seul mot, une capuche noire fine accrochée au faciès de porcelaine qui recouvrait son visage. Elle était plus mystérieuse que la première, mais sûrement plus douée pour se battre que celle-ci. Après tout, elle avait déjà eu le temps de faire ses preuves en six jours de voyage.
— Lord ne va pas tarder à revenir, sustentez-vous en attendant.
Comme souvent, les sens en alerte, le chef anbu s'appuya contre un arbre, les yeux fermés. Les trois autres n'avaient aucun doute sur le fait que l'homme réfléchissait à la route à suivre ainsi qu'à la procédure.
Les jounins ne connaissaient pas leurs noms, les membres des services secrets étant toujours anonymes, et ne les appelaient que par leur nom de code : Lord pour la plus petite silhouette et As pour la seconde, celle qui les dirigeait. Les trois autres en revanche, étaient Ino Yamanaka, Kiba Inuzuka et Hinata Hyûga, accompagnés d'un chien du clan Inuzuka, Akamaru.
Un nouveau sifflement fit relever les yeux aux trois ninjas qui buvaient ou étiraient leurs muscles fortement sollicités. Ils n'avaient pas senti le retour de Lord, contrairement à leur chef qui leur fit signe de se remettre sur leurs gardes.
— Rapport.
Lord forma à son tour plusieurs signes de ses deux mains, et le regard de One se brouilla un court instant avant qu'il n'acquiesce enfin. Il savait que son coéquipier anbu, le seul à connaître son identité avec l'Hokage qui dirigeait leur village ninja, ne voulait pas se dévoiler par sa voix.
— Nous nous remettons en route, d'ici une heure nous toucherons au but. Préservez au maximum vos forces pendant le trajet, nous ignorons ce qui nous attend.
Les jounins approuvèrent d'un signe de tête silencieux, et suivirent les silhouettes qui déjà reprenaient leur course. La plus petite des silhouettes de tête tourna les yeux vers l'autre, et décela dans ses yeux noirs cette déchirure qui avait fait de lui ce qu'il était. Shikamaru Nara, chef anbu, souffrait chaque seconde d'une perte qui n'aurait jamais dû survenir.
De longs mois plus tôt, une missive était parvenue, signée de la main même du Kazekage du village caché du sable, Gaara No Sabaku. La dernière des trois sannins légendaires, à la tête de Konoha, avait immédiatement fait appeler dans son bureau le meilleur stratège de la nouvelle génération, un jeune homme flemmard, n'ayant même pas vingt ans, mais plus que prometteur. En haut d'une tour impersonnelle, face à la falaise où étaient sculptés les visages des defunts Hokages qui l'avaient précédé, Tsunade annonça à Shikamaru Nara le décès de Témari No Sabaku, sa fiancée.
Celui-ci avait eu une relation plus qu'étonnante pour un jeune adulte, mais qui l'était moins lorsque l'on connaissait les Nara. Il avait verrouillé son regard sur le dos de sa supérieure et s'était incliné respectueusement avant de disparaître soudain. Dieu seul sait ce dont les trois jours durant lesquels il avait disparu étaient faits. Dieu, et une jeune femme aux yeux verts.
Shikamaru, sous son masque, ploya une fois de plus sous le vide des yeux que les siens rencontrèrent. Des yeux verts aux cils rosés qu'il avait vus baignés de larmes plus d'une fois. Longtemps le jeune homme avait mal jugé Sakura Haruno. Trop faible. Trop fragile psychologiquement et physiquement pour être ninja, il n'avait découvert la vérité sur cette force de la nature que trois mois après la mort de sa blonde. Planquée sous un masque de fragilité, de medic-nin planqué dans son hôpital derrière les barrières du village, il avait découvert une anbu douée et au palmarès impressionnant. L'hôpital n'était qu'une couverture depuis que l'Hokage l'avait prise sous son aile. Comme si l'on pouvait être le disciple d'une femme aussi légendaire et rester faible. Comme si l'on pouvait être piétiné par la personne que l'on aimait de tout son cœur et rester indemne psychologiquement.
Les deux ninjas avaient perdu la personne qu'ils aimaient de toute leur âme, de tout leur être, mais Shikamaru préférait savoir Témari morte que dans un état d'esprit semblable à celui de Sasuke Uchiha.
Les yeux verts se détournèrent, et le vide perça la cime des feuillus, avant que la jeune femme n'accélère. Plus fine, son sexe était rendu indiscernable par un bandage écrasant sa poitrine. Elle semblait seulement un peu androgyne, c'est tout. Soudain, sans prévenir, elle plongea vers le bas, et tout le monde suivit. Les trois jounins se rendaient bien compte que contrairement aux titres des deux anbus, aucun d'eux ne se permettait réellement de donner des ordres à l'autre, et encore moins One.
— C'est ici.
Une clairière se dessina progressivement devant eux, et la rose diminua au maximum la signature de son chakra en s'engageant sur l'étendue verte. Shikamaru suivit, sachant qu'elle avait déjà sondé la zone, alors que conformément aux ordres, Kiba, Hinata et Ino montaient la garde, échangeant des chuchotements anxieux malgré l'ouïe développée de leurs coéquipiers.
Des ombres en pleine lumière, les deux anbus s'approchèrent de la stèle, tendus malgré eux à cause de l'absence de cachette à proximité, et s'empressèrent de remplir la mission pour laquelle ils étaient là. Sauf que brutalement, ils posèrent la main sur leur sabre en relevant la tête, et d'une main posée sur l'épaule de son ami, Sakura lui fit signe de se dépêcher. Malheureusement, la tension dans leurs muscles et le chakra disséminé dans leur corps réagît à la présence qu'ils discernaient. La force coulant en eux se renforça dans leurs yeux et cette simple utilisation de leurs canaux spirituels fit exploser l'air autour d'eux. Ils échangèrent un regard et s'approchèrent de la stèle blanche immaculée malgré les hurlements de leur instinct.
— Ça sent mauvais, One.
Sakura, qui avait parlé pour une fois, contourna la stèle et ouvrit de grands yeux.
— One, recule !
Son cri perça le silence, mais l'effleurement d'une feuille d'arbre portée par le vent, sur la pierre blanche fissura celle-ci. Une lueur rougeâtre émana de l'intérieur étonnamment creux de la stèle, et dans un éclat, les deux silhouettes se contractèrent sous la douleur. Une plainte correspondant à un hurlement bloqué dans leur gorge émana des anbus, attirant l'attention des jounins, et dans un bruit de tonnerre, une onde parcourut la clairière, s'arrêtant pile à sa lisière sans toucher les trois intrus. L'éclat rouge qui suivit en revanche, les projeta contre plusieurs arbres, et alors qu'ils s'évanouissaient sous l'impact d'une force inouïe, les deux ninjas un peu plus loin disparurent. Eux, et la signature de leur chakra. Eux, et leur cri de douleur. Eux, et toute leur vie. Effacés, semblerait-il pour toujours.
