Bonjour à tous !

Me revoilà une nouvelle fois sur le forum Francophone de Captain America, avec un petit AU Stucky pour changer (légèrement) de registre…

Je tiens pour responsable Lithium Sodium pour cette idée, qui m'en donne d'ailleurs beaucoup trop (ou pas assez?) et qui est en partie responsable de mes 8 OS en cours sur ce petit couple… (je vais jamais m'en sortir, je vous jure !)

Elle m'a envoyé l'histoire derrière la photo de Sebastian Stan avec un fan à la Wizard World le weekend dernier, le jeune homme qui était triste de s'être fait quitter juste avant la photo. Sebastian a complètement joué le jeu (forcément, c'est un amour!) et a fait une super photo avec lui, pour « rendre jaloux son ex »…

Ce gars doit arrêter d'être adorable, ça en devient indécent.

Quoi qu'il en soit, voici un OS, qui pourrait bien se transformer en fiction vu toutes les idées que j'ai pour la suite, avec pour thème cette photo.

Je remercie Lina (Lithium Sodium sur fanfiction) pour la super idée, mais aussi Luna (ça devient compliqué avec tous ces noms qui se ressemblent haha, Solealuna sur fanfiction) pour le soutient comme d'habitude, et le Sebastian Stan trash club sur What's App pour l'accompagnement constant, -vous savez les soixantaines de photos de Stucky que vous envoyez à la minute... oui oui, je sais que vous voyez de quoi je parle xD

Sur ce, bonne lecture à tous, et n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez ! :D


New York était baignée dans les premiers rayons de douce lumière matinale, enveloppant Central Park d'une aura féérique, encourageant les premiers sportifs à finir leur course pour laisser place aux travailleurs et familles. Steve Rogers descendit de son petit appartement de Brooklyn avec empressement, un livre pressé contre la poitrine et son téléphone dans une main, s'engouffrant dans le premier Starbucks ouvert qu'il trouva sur son chemin.

Du revers de la main, il essuya les larmes qui avaient coulées sur ses joues et commençaient lentement à sécher, reniflant peu gracieusement. Il commanda sa boisson et paya au comptoir, avant d'aller se réfugier dans un coin de la salle, posant livre et téléphone sur la petite table devant son fauteuil. Avec un pincement au coeur, il regarda une nouvelle fois l'écran de son mobile, sur lequel s'affichait toujours le même message.

Brock, 5h34: Ne m'appelle plus. C'est fini.

Ignorant la chaleur du liquide, Steve porta le gobelet de carton à ses lèvres, buvant une grande goulée de son café. Sa poitrine était encore compressée, son coeur douloureux et ses yeux menaçaient déjà de déborder d'une nouvelle vague de larmes. Il se racla la gorge, ravalant son sanglot, avant de s'emparer de son téléphone. Il ferma l'application de messages, ouvrant sa galerie de photos afin de supprimer les derniers clichés qu'il avait pris de Brock et lui, plusieurs semaines auparavant.

Sa relation avec Brock n'était plus au beau fixe depuis des mois déjà. Pour être complètement honnête, Steve ne se rappelait pas réellement d'un moment où il avait été pleinement heureux avec son compagnon, si ce n'était aux débuts de leur relation. Brock et lui étaient entièrement différents, ils s'étaient tous deux rencontrés à la salle de sports et il savait que son ex compagnon avait été immédiatement attiré par son physique. Steve n'avait pas toujours eu la chance qu'il avait à présent physiquement, et était toujours extrêmement mal à l'aise avec son corps. Etant petit, il avait été très fin et extrêmement fragile durant toute son enfance et adolescence. Il avait eu énormément de soucis de santé et sa mère avait dû le veiller durant des semaines lorsqu'il tombait malade. Une fois la puberté arrivée, il avait enfin grandi et pris du muscle comme il l'avait toujours rêvé, mais les moqueries de ses camarades et les insécurités l'accompagnaient toujours.

Brock l'avait abordé en lui proposant un café, et bien vite leur relation avait complètement évolué. Steve ne s'en plaignait pas, il aimait les rapports physiques et Brock était indéniablement beau garçon, mais il aurait aimé plus. Il savait que son compagnon n'était pas un homme à engagements, mais étonnamment, ils avaient réussi à faire marcher cette relation pendant plusieurs mois. Steve était extrêmement attaché au jeune homme, et Brock semblait lui rendre la pareille. Dans un coin de sa tête, Steve avait espéré que cette relation soit celle qu'il lui faille, celle dont il avait toujours rêvé étant petit. Et tant pis si Brock ne lui rendait pas ses sentiments aussi fortement.

Mais le rêve s'était effondré petit à petit. Brock passait des journées sans appeler ou même envoyer un message à Steve, qui ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter. Lorsqu'ils se voyaient, ils n'avaient pratiquement rien à se dire et les désirs de Brock tournaient particulièrement autour du sexe. Steve acceptait, bien entendu, mais il ne se souvenait plus la dernière fois qu'il avait réellement pris du plaisir à faire l'amour avec son compagnon. La honte qui lui tordait le ventre à l'idée que Brock sache qu'il simulait la plupart de son plaisir lui gâchait chaque expérience. Il en parlait beaucoup à son meilleur ami Sam, mais ce dernier détestait Brock au plus haut point depuis le début. Sa mère n'était pas elle non plus de bon conseil, et Steve avait réalisé avec peine plusieurs semaines auparavant que malgré leurs huit mois ensemble, Brock n'avait su se faire aimer de personne dans son entourage.

L'inévitable était arrivé durant la nuit. Brock avait fini par rentrer, aux environs de trois heures du matin. Steve, inquiet, s'était levé. Une dispute avait alors éclaté entre les deux hommes, dispute durant laquelle Steve apprit que son compagnon voyait d'autres hommes depuis le début de leur relation. Bien entendu, ce dernier insista sur le fait qu'il ne lui avait jamais rien promis -ce qui était vrai-, mais Steve avait pu sentir son coeur se briser en milliers de petits morceaux dans sa poitrine. Ce qu'il craignait le plus venait d'arriver. Avec son nouveau corps, il savait qu'il tournait les regards et les têtes, mais n'en avait cure. Steve voulait trouver quelqu'un avec qui il partagerait plus que le physique, car il n'avait pas toujours été ainsi. Attirer quelqu'un uniquement par ses pectoraux et son sourire ne l'intéressait pas. Mais c'était exactement ce qui s'était passé, et Steve s'était investi émotionnellement dans une relation qui ne signifiait rien d'autre que du sexe pour Brock.

A présent, Steve se tenait, seul et dévasté, au Starbucks du coin de sa rue. Son café lui brûlait le bout des doigts mais il n'y faisait pas attention, perdu dans les photos qu'il effaçait une à une. Il passa ainsi plusieurs minutes à supprimer toute preuve de leur relation sur son mobile, avant d'ouvrir son carnet de contacts et de chercher le numéro de son meilleur ami. Il hésita une demi seconde avant d'appuyer sur le petit téléphone à côté de l'icône de Sam, portant le mobile à son oreille.

« Allo ? » lui répondit une voix encore teintée de sommeil au bout de quelques secondes de tonalité.

« Oh, Sam. Tu dormais. Je suis désolé, je ne voulais pas te déranger. Je vais te laisser… »

« Steve, Steve. C'est bon, c'est pas grave. Mon alarme sonne dans une petite demi heure de toute manière. »

Il entendit un bruissement à l'autre bout du combiné, ainsi qu'un chuchotement. Steve se mordilla l'intérieur de la lèvre lorsqu'il se rendit compte qu'il avait très certainement réveillé Sasha, la compagne de Sam, par la même occasion. Une nouvelle fois, les larmes de frustration lui montèrent aux yeux et il inspira lentement plusieurs fois, tentant de retenir sa crise d'angoisse. La dernière chose qu'il voulait à présent était de se rendre encore plus ridicule en public.

« Steve, tu es toujours là ? »

« Oui, je… » il se racla la gorge de nouveau, la voix nouée et terriblement faible. Il détestait se mettre dans de tels états, mais son corps ne semblait pas coopératif, bien décidé à ne pas alléger sa journée déjà mal commencée. Il sentait déjà ses mains commencer à trembler contre son gré, et il ferma délicatement le poing pour le poser sur ses genoux. « Je suis là. »

« Quelque chose ne va pas ? »

Il pouvait entendre l'inquiétude de Sam même à travers le combiné, à la façon dont il laissait trainer la dernière syllabe sur le bout de sa langue lorsqu'il posait une question tout en sachant la réponse, et ce petit degré d'inquiétude qui se cachait derrière ses paroles. C'en fut trop pour le blond, qui laissa échapper une énième larme qu'il écrasa du creux de sa main avec véhémence, se mordillant la lèvre inférieure.

« Il m'a quitté. »

Aussitôt, la réponse ne se fit pas attendre.

« J'arrive tout de suite. »

Après avoir envoyé par message l'adresse du Starbucks à Sam, Steve avait pris le temps de calmer ses larmes et ses tremblements. Heureusement pour lui, personne dans le petit café ne semblait avoir prêté attention à lui, et les premiers travailleurs commençaient à affluer pour prendre un breuvage chaud à emporter au travail.

Ce fut seulement quinze minutes plus tard que Sam Wilson passa la porte du café, se dirigeant d'un pas assuré vers son ami. Par réflexe, Steve se leva pour l'accueillir et fut enveloppé dans une étreinte chaleureuse, qui lui fit relâcher la grosse inspiration qu'il venait de prendre sans réellement s'en rendre compte.

« Raconte moi tout » fit ensuite Sam en s'asseyant.

Il s'empara du gobelet de Steve, encore à moitié plein, et en prit une grosse gorgée sous les yeux amusés de son ami. Sam et Steve se connaissaient depuis l'enfance. Pratiquement voisins, ils étaient allés à l'école ensemble, et Sam avait toujours soutenu son ami dans ses projets et tout au long de sa vie. Il avait connu le petit Steve trop petit pour se défendre ou même intéresser qui que ce soit, et il avait grandi à ses côtés, fier de voir Steve se lancer dans ce qu'il aimait le plus, l'art. Mais malgré les réticences de Sam, Steve avait continué à voir Brock quand son ami l'avait averti de son compagnon. Sam savait à quel point Steve pouvait être sensible, et c'était la raison pour laquelle il ne lui sortait pas le vieux couplet d'ami du « je te l'avais bien dit », même s'il le pensait sans conteste.

« Brock a rompu avec moi cette nuit » commença Steve en baissant les yeux. Il se sentait affreusement honteux d'avoir douté de Sam et de ses mises en garde, et il sentit ses mains trembler contre ses cuisses. « Il… Il voyait d'autres personnes. »

La mâchoire de Sam se serra, tendant son visage entier. Son regard dur était planté sur Steve, mais le jeune homme savait que ses envies de meurtre ne le concernait pas.

« Je n'étais qu'un beau cul à serrer, selon ses mots. » finit Steve dans un soupir.

« Je vais le tuer » murmura Sam d'un ton glacial.

« Non. Car il n'en vaut pas la peine. »

Un silence tomba entre les deux amis, et Steve secoua la tête.

« Je suis désolé. Si je t'avais écouté… »

« Steve. Arrête. Ne te sens pas désolé pour le monde entier. Tu ne pouvais pas savoir, Brock était charmant avec toi et je sais que tu avais des sentiments pour lui. Rien n'est de ta faute dans cette histoire, tu m'entends ? »

Steve haussa les épaules, tournant la tête pour regarder au loin, à travers la vitre du petit café. Le monde commençait à se presser dans les rues, la tête baissée ou le regard sur leurs téléphones. New York s'éveillait doucement.

« Je suis tellement stupide » souffla finalement Steve. « J'aurais dû savoir qu'il ne m'aimerait pas pour… »

« Pour ce que tu es ? » le coupa Sam. « Steve, je te l'ai déjà dit et je vais te le redire, d'accord ? Tu es la personne la plus gentille, généreuse et adorable que je connaisse, d'accord ? Bon, peut-être pas la première, disons que Sasha passe avant, mais tu sais bien que ma fiancée passe toujours avant tout. »

Cette remarque amusa Steve, qui sentit ses lèvres s'étirer malgré lui. Sam, visiblement content de son effet, continua.

« Brock était un connard. Je l'ai su dès le début, ta mère l'a su depuis le début, tout le monde le savait. Mais toi Steve, tu vois le meilleur côté des gens. On s'est tous dit que peut-être, et bien peut-être qu'on se trompait. Et que tu arriverais à faire ressortir le meilleur de ce gars. »

« Je suis surtout un idiot » grogna Steve. « Sam… Je me sens tellement… »

Il ne finit pas sa phrase, étouffant un sanglot en baissant les yeux vers ses mains, toujours posées sur ses genoux.

« Hey, Stevie. »

Sam posa un doigt sous son menton pour le forcer à lever les yeux vers lui. Le regard peiné sur le visage de son ami déchira encore plus le coeur du blond, et il cligna plusieurs fois des yeux pour chasser les larmes qui s'accumulaient au coin de ceux-ci.

« Tu n'es pas un idiot. Tu es une bonne personne qui est tombée sur une ordure. Cette personne ne te méritait pas, et la seule et unique raison qui me retient d'aller le chercher et le tabasser c'est le fait que tu aies besoin de moi. Mais je ne veux plus te voir verser une autre larme pour ce salaud, d'accord ? »

Steve hocha la tête malgré lui, heureux de voir le sourire de Sam revenir. Son ami lâcha son menton, s'emparant de son café pour le finir d'une seule gorgée.

« Et pourquoi tu te trimballes avec un bouquin ? » demanda finalement son ami en désignant le roman oublié sur le bord de la table, face contre le bois.

Steve s'en empara, le retournant pour montrer le titre et la couverture à son ami, qui ricana aussitôt.

« James Barnes, encore ? » demanda-t-il en s'en emparant pour lire rapidement le résumé. « Ce gars t'obsède à ce point ? Je pensais que tu avais déjà lu celui-là. Tu me l'as prêté l'an dernier, il est sympa. »

Steve secoua la tête, amusé.

« Il ne m'obsède pas, je suis simplement fan » objecta le blond en lui arrachant des mains. « Et ce n'est pas pour le lire que je l'ai ramené aujourd'hui. Mais ça n'a plus d'importance. »

« Comment ça pas pour le lire ? » demanda Sam. « Tu étais censé en faire quoi ? »

Steve haussa les épaules.

« Aujourd'hui, James Barnes fait une dédicace au WHSmith à côté de Central Park. Je voulais y aller, mais… » Il haussa les épaules, le regard dans le vide. « Je n'ai plus la motivation. »

« Comment ça plus la motivation ? » s'exclama Sam. « Steve ! Tu suis les bouquins de ce gars depuis qu'il a commencé à écrire ! Tu es passionné par l'histoire et il écrit sur tout ce que tu aimes, pourquoi est-ce que tu te priverais de ce plaisir, surtout aujourd'hui ? »

« Une rupture a cet effet sur le moral » coupa Steve sèchement.

Sam leva les yeux au ciel.

« Qu'on me sauve de l'entêtement de Steve Rogers. »

« Personne ne te retient. »

Un silence tomba suite à sa phrase, et le jeune homme soupira, sentant les yeux de son ami sur le haut de son crâne alors qu'il avait une nouvelle fois baissé la tête.

« Je suis désolé, Sam. Je suis simplement… a bout. Je ne sais pas si aller à cette dédicace est une bonne idée. Tu me connais… tu sais que je ne vais pas réussir à me sortir toute cette histoire de la tête avant un bon bout de temps. Aujourd'hui… C'est simplement trop tôt. »

« Je pense justement que c'est une excellente idée. Qui sait dans combien de temps ce gars va revenir sur New York pour faire des dédicaces ? C'est la première fois qu'il en fait, il n'en refera peut-être jamais. Si tu loupes ta chance, tu vas le regretter, Steve. »

Le blond baissa les yeux vers le livre qu'il tenait toujours dans ses mains, la couverture brillant sous les rayons du soleil qui perçaient à travers la fenêtre du Starbucks derrière lui. James Barnes. L'écrivain qu'il suivait depuis ses débuts, celui qui avait grandement contribué à son amour de l'histoire et des guerres, en étant lui même militaire pendant plusieurs années. Il sentait les yeux de Sam sur lui, savait que son ami attendait une réponse de sa part. En soupirant, il céda.

« D'accord, d'accord. Je vais y aller. »

Il n'eut pas besoin de relever les yeux pour sentir le sourire victorieux de Sam étirer ses lèvres. Son ami eut l'indécence de jeter un poing en l'air en signe de victoire, ce qui lui valut un regard noir.

« Quoi qu'il en soit, je vais devoir te laisser » s'excusa finalement Sam en regardant son portable. « Je dois encore déjeuner avec Sasha, et me préparer pour aller au travail. »

« Pas de soucis. Merci d'être venu, Sam. »

« Toujours, Steve. Toujours. »

Il se leva pour se diriger vers la porte, se tournant une dernière fois pour jeter un oeil suspicieux à son ami.

« Et tu as intérêt à aller à cette dédicace, tu m'entends ? »

« Ça va, ça va » rit Steve en lui faisant signe de sortir. « Va t'en avant que je change d'avis. »

Avec un sourire, il regarda son ami sortir du café et traverser la rue, retournant chez lui à pas pressés.


Steve contempla pendant de longues minutes l'idée de rester chez lui.

Il avait promis à Sam d'aller faire un tour à la dédicace, et s'il était honnête avec lui-même, il avait terriblement envie de mettre un visage sur un nom. Malgré sa notoriété, James Barnes n'avait jamais communiqué de photos de lui, et Steve n'était pas le genre de personnes à fouiller aux tréfonds d'internet pour ce genre d'informations. Les livres de Barnes avaient été un vrai déclic lorsqu'il avait commencé ses études d'histoire en parallèle avec ses cours de dessin. Il avait découvert une écriture passionnante qui transpirait le vécu, et était tout de suite tombé amoureux de la plume de l'auteur et de ses personnages. Barnes abordait tous les sujets, sans tabous ni complexe, ayant même consacré un livre sur l'homosexualité dans l'armée et durant les guerres. Les critiques s'étaient données à coeur joie pour tenter de découvrir sur le mystérieux personnage représentait le Sergent Barnes, mais jamais ce dernier n'avait répondu.

L'auteur semblait être quelqu'un de très discret. La mince biographie au dos de son livre faisait état d'un homme vivant à Brooklyn, tout comme Steve, entouré de ses amis. Il était orphelin et fils unique, engagé dans l'armée à son plus jeune âge. A l'âge de trente ans, il avait été blessé gravement au combat, abandonnant l'armée pour être rapatrié aux Etats-Unis où il avait commencé à écrire.

Steve fit tourner une nouvelle fois le livre entre ses mains, assis sur le bord de son grand lit vide. A quoi ressemblerait James Barnes ? La blessure qui l'avait forcé à rentrer aux Etats-Unis se verrait-elle ? Serait-il gêné s'il se trouvait face à un homme défiguré par une bombe ?

Il secoua la tête. La séance de dédicaces avait commencé le matin à neuf heures, et il était à présent bientôt quatre heures de l'après midi. Il ne savait pas s'il y avait encore du monde, ou s'il valait mieux qu'il reste chez lui.

Ce fut un regard au dehors le décida. Le soleil était radieux, et il savait que s'il restait enfermé, il allait ressasser des idées noires tout au long de la journée, emmitouflé dans sa couette. Il avait promis à Sam d'au moins essayer, alors il essayerait. Et même s'il n'avait pas le courage d'entrer dans la boutique, il aurait profité des rayons du soleil le temps d'une balade autour de Central Park.

Il sortit donc de chez lui, affublé d'un teeshirt où s'étalait un dessin abstrait du drapeau Américain, et d'un jean bleu clair qui, il le savait, moulait parfaitement ses jambes. Ses lunettes de soleil sur le nez, il serra son livre contre sa poitrine, rangea son téléphone dans sa poche et se dirigea à grands pas vers la librairie où avait lieu la dédicace.

Lorsqu'il arriva, il fut surpris de voir le monde qui attendait encore à l'extérieur de la boutique. Devant lui s'étalait une queue d'une centaine de personnes, toutes aussi excitées à l'idée de rencontrer l'auteur de leurs livres favoris. Fort heureusement, la file semblait avancer assez rapidement, et il se retrouva à l'intérieur quelques minutes seulement après être arrivé.

Il réalisa lorsque seulement trois personnes se mirent à sa suite qu'il était arrivé juste à temps car la librairie fermait déjà ses portes au public, au grand désespoir de certains, qui regardèrent les portes vitrées se fermer avec mécontentent. Autour de lui, la population était majoritairement féminine, et il se sentit soudainement étranger à toutes ces personnes qui discutaient majoritairement de l'auteur plutôt que de l'oeuvre. Au détour de quelques conversations, il apprit que c'était le bras de James Barnes qui avait été touché lors de l'explosion. Sa prothèse était métallique plutôt que faite de plastique, ce qui semblait révulser plusieurs personnes, le faisant grincer des dents. Il détestait les gens qui jugeaient au physique, et se retint de leur apprendre que l'homme faisait comme il l'entendait, et se fichait probablement de leurs avis esthétiques. Il apprit aussi qu'il avait trente six ans, et vivait toujours à Brooklyn. Il ne sut pas en quoi ces informations semblaient tant intéresser les personnes présentes, et décida de se concentrer sur le livre qu'il tenait dans ses mains, le feuilletant de nouveau pour patienter.

Perdu dans sa lecture, Steve ne remarque pas que la file avait avancé considérablement, et ce fut lorsque la personne -une femme d'un certain âge- derrière lui se racla bruyamment la gorge qu'il réalisa qu'il n'était plus qu'à quelques personnes de l'auteur. Relevant les yeux vers la dame, il s'excusa, avant de faire volte face et combler la distance qui le séparait de la personne en face de lui. De là où il était, il pouvait voir la personne assise à côté de James Barnes. C'était une jeune femme d'une beauté rare, ses cheveux roux bouclés tombaient en ondulant gracieusement sur ses épaules et le haut de sa poitrine. Elle avait le visage fin mais fermé, et semblait veiller au grain à ce que personne ne pénètre l'espace vital de l'auteur à ses côtés. Steve se demanda un instant si cette jeune femme n'était pas dans un métier de forces de l'ordre, à la vue de sa posture droite et de son visage impassible. Il lui était impossible de là où il était de voir James Barnes pour l'instant, malgré son mètre quatre vingt cinq, et il abandonna rapidement l'idée de se mettre sur la pointe des pieds et retourna à sa lecture.

Devant lui, les gens avançaient de nouveau, et il fit un pas en avant pour ne pas se laisser dépasser. Ce fut alors qu'il le vit, tandis qu'une jeune femme avançait vers lui pour lui tendre son livre, visiblement tremblante d'excitation.

James Barnes était tout simplement époustouflant. Il sourit à la femme qui lui tendait l'ouvrage, l'ouvrant aussitôt afin de déposer sa signature sur la première page de celui-ci. Il écouta avec attention la lectrice lui parler, très certainement de son oeuvre -de là où il se trouvait, il ne pouvait entendre sur quoi ils échangeaient-, et ne se répartissait pas de son sourire.

L'homme ne faisait clairement pas ses trente six ans. Il avait le sourire d'un enfant au matin de Noel, ses dents blanches parfaitement alignées attirant le regard sur cette bouche à damner un saint. Steve se sentit déglutir difficilement. Les cheveux de l'homme étaient assez longs, tirés en un chignon négligé à l'arrière de sa tête. En observant son visage si fin et clairement dénué de tout défaut, Steve se sentit stupide d'avoir pu penser à un moment donné que cet homme ait été défiguré par la guerre. Car il n'y avait décemment pas une partie de son visage qui n'était pas digne d'une oeuvre d'art.

La file avança de nouveau, et par automatisme, Steve fit un pas en avant. Ce fut lorsque les pupilles bleu océan de James Barnes se posèrent sur lui qu'il réalisa qu'il était le prochain, et que par conséquent, c'était à son tour de se poster devant la table de dédicaces.

« Bonjour ! » fit James d'un ton amusé, avec un petit sourire en coin qui lui semblait plus grand encore qu'avec les personnes précédentes.

Ses yeux bleus étaient magnifiques, et Steve se retrouva sans voix devant les deux perles océan qui semblaient lire à travers lui.

« Hum, bonjour, je suis désolé… j'avais le tête ailleurs. » réussit-il à bafouiller, tendant son livre pour que l'auteur s'en empare.

Lorsque James tendit la main, Steve tourna aussitôt les yeux vers la jeune femme rousse à ses côtés. Instinctivement, il lui adressa un petit sourire, et elle lui adressa un regard confus, avant de lui rendre son rictus. Se sentant rougir jusqu'à la pointe des pieds et totalement stupide d'avoir fait ce geste, il concentra de nouveau son attention sur James, qui tenait à présent son livre avec un petit froncement de sourcils.

« C'est la première fois qu'on me donne celui-ci à signer » finit-il par dire,

Steve baissa les yeux vers le livre. Sans réellement réfléchir, il avait pris celui qu'il préférait, qu'il connaissait pratiquement sur le bout des doigts sans réellement penser à ce que l'auteur en penserait. Ce fut lorsqu'il posa les yeux vers la couverture qu'il réalisa qu'il avait pris celui qui avait tant fait débat au sein de la communauté homosexuelle, et celui qui avait commencé toutes les rumeurs sur la sexualité de son auteur.

« Oh… C'est mon préféré » souffla Steve en haussant les épaules, baissant les yeux vers ses pieds.

Il n'aurait jamais dû écouter Sam, et venir à cette dédicace. En moins de quelques secondes, il venait de se ridiculiser devant son auteur préféré, comme s'il n'avait pas eu une journée assez compliquée ainsi. Et le pire était qu'il venait sûrement de mettre mal à l'aise l'homme qui l'avait tant aidé durant ses années de doute sur son homosexualité. Quel idiot.

« Il m'a beaucoup aidé à m'accepter, lorsqu'il est sorti » murmura de nouveau le blond, comme pour se justifier.

Il se gifla mentalement en mordillant l'intérieur de sa joue, se maudissant d'avoir parlé, ce qui n'aidait sûrement pas son cas. Ce ne fut que lorsqu'iil entendit James se tourner vers la rousse à ses côtés, et se pencher pour murmurer quelque chose à son oreille qu'il osa relever les yeux. Avec un sourire énigmatique, la jeune femme fit aussitôt signe à Steve de venir près de lui, et James lui offrit un sourire éclatant.

« Je vais signer les trois derniers livres, et j'arrive tout de suite, d'accord ? »

Ébahi et sans réellement comprendre ce qui se passait, Steve hocha la tête par automatisme, se tournant vers la jeune femme qui attendait toujours qu'il fasse un pas vers elle. Hésitant, il la rejoint de l'autre côté de la table, mordillant sa lèvre d'anxiété lorsqu'il réalisa qu'elle le détaillait de la tête aux pieds. Un petit rictus se dessina au bord de ses lèvres, et elle désigna le livre du menton.

« Celui-ci, hein ? » murmura-t-elle malicieusement.

Steve se sentit rougir de la tête au pieds à présent, et il soutint son regard malgré son envie de se faire avaler par le sol.

« C'est mon préféré. Je ne pensais pas… »

« C'est son préféré aussi » le coupa la rousse.

Surpris, il haussa un sourcil. Elle le regarda de nouveau attentivement, guettant ses réactions, avant de lui tendre la main.

« Natasha Romanoff. Je suis l'agent mais aussi meilleure amie de Bucky. »

Steve lui rendit sa poignée de main, surpris par la poigne de fer de celle-ci malgré son petit mètre cinquante et sa carrure fine.

« Steve Rogers. Hum… Bucky ? »

« C'est le surnom de James, Bucky. Personne ne l'appelle autrement que par ce surnom parmi nos amis. »

Steve jeta un nouveau coup d'oeil vers l'écrivain, qui signait le dernier livre sans se départir de son sourire pour la lectrice à laquelle il parlait.

« Oh. » fit-il bêtement, ce qui fit sourire Natasha.

« Il a fini. Vous allez pouvoir parler. »

Sur ces mots elle se leva, posant une main sur l'épaule de Bucky qui saluait la dernière personne, et se leva pour quitter la pièce. Complètement abasourdi par cette femme mystérieuse et difficile à déchiffrer, Steve mit un long moment à réaliser qu'il était à présent seul dans la salle avec l'auteur. James le regardait avec amusement, rebouchant son stylo afin de se lever et s'asseoir sur la table directement, faisant face au jeune homme.

« Steve Rogers, hum ? » demanda Bucky, les yeux brillants. « Désolé, je n'ai pas l'habitude d'espionner les conversations privées, mais je dois dire que vous m'avez intrigué depuis le début. »

Steve sourit malgré lui.

« Oui, Steve Rogers. Je suis désolé d'avoir amené ce livre, je ne savais pas… »

« Natasha vous l'a sûrement dit, c'est mon préféré aussi. »

Il se tut, passant une main distraite sur la couverture de son ouvrage, semblant perdu dans ses pensées.

« Vous dites qu'il vous a aidé à vous accepter ? » demanda-t-il finalement, se concentrant de nouveau sur Steve, qui se balançait d'un pied sur l'autre.

Le blond hocha la tête.

« Lorsque j'ai commencé à avoir des doutes sur mon homosexualité, je n'ai pas osé en parler à ma famille. Ce n'est pas que j'avais peur de leur rejet, car je sais qu'ils m'acceptent comme je suis… Mais j'avais besoin… Je ne sais pas. Je me sentais seul face au monde. Dans ces moments là, je pense qu'on a tous ces moments de doute où on est pas sûrs de réellement savoir ce que l'on veut, au plus profond de soi. Lire ce livre, ce fut comme une révélation. Je pense que c'est ce dont j'avais besoin pour réellement faire face au fait que je ne serais jamais ce que la société veut que je sois. »

Il releva les yeux vers James, s'attendant à le voir rire, ou même sourire de ses paroles. Ses mots étaient des plus sincères, cependant il savait que beaucoup de gens devaient tenir le même discours pour s'attirer la sympathie de leur auteur favori. Il ne cherchait pas sa sympathie, ou même sa reconnaissance. Il voulait simplement le remercier, pour ce qu'il avait fait pour lui sans le savoir. Mais lorsqu'il posa ses yeux sur le visage de Barnes, l'homme ne souriait pas. Ses sourcils étaient froncés, et ses yeux perdus dans le vague.

« Je ne pensais pas que ce livre aurait du succès. » murmura l'auteur d'une voix étrangement calme. « Il est si différent de ce que j'avais l'habitude de publier. Ce livre, » fit-il en le faisant une nouvelle fois tourner entre ses doigts « je l'ai écrit pour moi même. En réalité, il n'a même pas bien marché, et s'est beaucoup moins vendu que les autres. Les critiques ont grandement contribué à le descendre, aussi. Mais je me doutais que le monde et la société n'était pas prête à lire les aventures d'un soldat homosexuel au sein de l'armée Américaine. »

Son regard se concentra de nouveau sur Steve, et un sourire énigmatique se dessina sur le creux de ses lèvres.

« Être un militaire homosexuel n'est pas quelque chose d'aisé. Je voulais partager cette expérience, simplement parce que j'ai eu énormément de chances lorsque j'ai été déployé d'avoir des camarades compréhensifs qui ne me jugeaient pas sur ce que j'étais lorsque je leur ait annoncé mes préférences, car je n'avais aucune envie de cacher ma nature simplement pour rentrer dans des cases. »

Cette fois, il se leva, s'approchant de Steve pour poser une main sur son épaule.

« Je suis heureux d'avoir pu t'aider, même si ce n'était pas mon intention première. Au final, cette oeuvre n'aura pas été un échappatoire uniquement pour moi ! »

Il s'empara de son stylo feutre noir, ouvrant le livre afin d'apposer sa signature délicatement. Une fois que cela fut fait, il resta contemplatif un instant, relevant les yeux vers Steve avec un air malicieux.

« Est-ce que je peux te poser une question indiscrète ? »

Le blond se sentit hocher la tête.

« Pourquoi est-ce que tu as l'air… Si triste ? Ce n'est pas de la déception j'espère ?! Tu t'attendais à quelqu'un de plus impressionnant, de plus vieux, de moins… Relâché ? » fit-il en désignant son sweatshirt bleu marine et son jean noir.

Steve secoua négativement la tête, riant doucement à la blague. James le mettait à l'aise, et il sentait que l'auteur était un homme plein de douceur et empli d'amour. Il ne savait comment l'expliquer, mais sa présence même le confortait et lui donnait un sentiment de familiarité qu'il ressentait rarement en présence d'inconnus.

« Non, je suis désolé. C'est simplement… » il soupira, passant une main dans ses cheveux blonds. « Mon petit ami m'a quitté ce matin. Dans des conditions… Enfin. Quoi qu'il en soit, cela n'a rien à voir avec vous. Je suis heureux d'être ici, de vous rencontrer. »

James haussa un sourcil, visiblement piqué dans sa curiosité.

« Quel idiot serait assez stupide pour quitter un garçon aussi adorable ? »

Cette fois, Steve se sentit rougir des pieds à la tête, baissant les yeux vers ses chaussures. Il se sentait affreusement flatté du compliment, venant d'un homme aussi beau et angélique que James Barnes. Il ne put s'empêcher de relever que l'homme n'avait pas fait de compliment basé sur son physique, et ses joues rougirent d'autant plus à cette pensée. Cela faisait bien longtemps qu'un homme ne l'avait pas remarqué pour autre chose que sa taille impressionnante et ses muscles saillants.

« Je suis désolé » s'excusa James sans réellement sembler le penser, à la vue de son énorme sourire. « Je ne pouvais pas résister. Mais je le pense. On ne se connaît pas, mais vous m'avez l'air d'être un garçon plein de charme et intelligent. Il devait être sacrément idiot pour ne pas voir toutes ces qualités en vous. »

« Hum » bafouilla Steve en haussant négligemment les épaules. « C'est moi qui suit idiot. Je n'ai pas su voir qu'il n'y avait pas que moi sur son tableau de chasse, la honte est pour moi. J'ai simplement tendance à trop… voir le côté positif des gens. Mais parfois, il n'y en a simplement pas, et c'est sur moi que ça retombe. »

James fronça les sourcils, son poing se serrant sur le stylo qu'il tenait encore dans sa main de chair. Ce fut à cet instant que Steve remarqua que son autre main était couverte d'un gant noir.

« Quel enfoiré. Désolé du terme, mais c'est encore pire que s'il vous avait quitté par idiotie. »

Il soupira, secouant la tête de gauche à droite. Ses doigts se desserrèrent légèrement du stylo, et il rajouta quelque chose à sa dédicace, avant de fermer le livre précautionneusement.

« Je vais devoir y aller. Natasha m'attend dans la voiture, et il est déjà étonnant qu'elle ne soit pas revenue pour me tirer par la peau des fesses hors de la boutique. »

Son sourire charmeur était de retour, et Steve ne put s'empêcher d'y répondre. Cet homme était une oeuvre d'art à lui tout seul, et en tant qu'artiste, Steve s'y connaissait plutôt bien. Il se refusa de penser aux longues heures qu'il aurait aimé passer à dessiner chaque détail du visage ou du corps parfait de l'homme devant lui, se contentant de reprendre son livre timidement.

« Merci encore, je suis désolé de vous avoir réquisitionné ainsi… »

« Non, ne vous excusez pas » le coupa aussitôt James. « Croyez-moi, le plaisir était pour moi. »

L'homme s'empara de son manteau, l'enfilant avec dextérité malgré la prothèse que Steve devinait sous sa manche gauche. Il reprit son stylo et son téléphone, laissés sur la table de dédicace, avant de faire un petit clin d'oeil à Steve et de disparaître à l'arrière de la boutique.

Le jeune homme resta un instant interdit, réalisant avec grande peine ce qui venait de se passer. Non seulement il avait eu la possibilité de rencontrer son auteur favori, mais en plus il avait passé du temps avec lui, apprenant qu'il avait vécu les mêmes mésaventures avec son homosexualité. Un sourire heureux se dessina sur ses lèvres et lorsque le gérant de la boutique lui demanda de sortir, il ne put s'empêcher d'éclater d'un rire cristallin dans la rue, serrant son livre contre son torse.

Il fallait absolument qu'il remercie Sam de l'avoir poussé à aller à cette dédicace malgré les évènements du matin, car sa journée s'était sans aucun doute grandement améliorée avec cette rencontre. Par curiosité, il s'empara de son livre, ouvrant ce dernier à la page signée par James, son coeur manquant un battement lorsqu'il découvrit ce que l'auteur lui avait marqué.

Pour l'adorable Steve, en espérant que tu n'oublies jamais qu'il est important de se battre et d'être fier de qui l'on est. Je suis avec toi jusqu'à la fin de l'histoire.

- James « Bucky » Barnes.

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