Lost Angel
Prologue
Rien n'avait changé. Tout était comme il y a dix ans. Tout était intacte. Comme si le temps s'était arrêté dans cette maison. Comme si la vie l'avait quitté. C'était peut-être vrai dans le fond car plus personne ne l'habitait, sauf peut-être des fantomes. Ceux d'un lointain passé. Ceux d'une époque presque bénis. Mais le temps était passé et avait fait les ravaches connus et commun. Nul ne peu lutter contre lui et il était bien placé pour le savoir. Dix ans, c'est long. Mais il était enfin revenu.
Une bruit. Il était léger. Presque inperseptible. Le grincement d'une porte qui s'ouvre. Mais il ne fut pas suivi de pas. Personne n'entra dans la pièce. Personne ne le rejoignit devant cette fenètre devant laquelle il était debout depuis si longtemps. Son regard ne se porta pas non plus vers cette personne qui devait très certainement se tenir sur le pas de la porte. Il resta face à cette fenètre vieille et sale, à regarder un jardin envahi par les plantes. Ce paysage lui rapellait l'Angleterre où il y avait fait ses études. Mais il n'était pas sur le vieux continent. Il était sur sa terre natale. Il était au Japon. Il était chez lui.
« Est-ce que je peux faire quelque chose pour toi ?
- Non, répondit-il presque froidement. Si, laisses-moi seul. »
L'autre referma la porte presque silencieusement et s'en alla. Ses pas résonnèrent dans le couloir et lui parvinrent aux oreilles. Une fois sûr d'être complètement seul, il sortit son paquet de cigarette. La première chose qu'il s'était acheté en sortant de là bas. Il alluma sa première cigarette depuis dix ans. Savourant ainsi la première bouffé nocive qui le tuerait à petit feu car il n'en resterait pas là, loin de là. Mais qu'avait-il à perdre ? Rien. Il n'avait plus rien. Quoi qu'il n'ait jamais rien eu de sa vie de toute façon. Cette pensée le fit sourire. Elle était tellement vraie. Et c'était bien le seul cadeau que la vie lui avait faite. Ne rien avoir, ça veut dire ne rien avoir à perdre. Son rictus se changea bientôt en gloussement. Il était enfin revenu. Il était enfin sorti de ce trou où il avait bien cru finir toute sa vie. Il allait pouvoir recommencer.
Après avoir pris le temps de fumer sa cigarette, il se détacha de la fenètre et quitta le salon. Celui dans lequelle il pouvait encore les entendre rire. C'était il y a dix ans. C'était il y a tellement longtemps ! Mais il se souvenait de chaque détail. Tout était si claire dans son esprit. Comme si pour lui aussi le temps s'était arrêté. C'était peut-être vrai dans le fond car malgré les années, il n'avait pas changé, un peu comme cette maison.
D'un pas lent mais sûr de lui, il marcha vers cette porte qu'il avait si souvent franchi par le passé. Celle qui autrefois restait continuellement verouillée et dont il avait été le seul à détenir l'unique clef. Un sourire nostalgique se dessina sur ses lèvres alors que sa main se posait sur la poignée. Un sourire de dément, un sourire sadique qui en avait fait trembler plus d'un. Mais c'était il y a longtemps. C'était il y a dix ans. C'était presque dans une autre vie.
Au delà de la porte se trouvait ce petit escalier en ciment. Lui non plus n'avait pas changé. Il y avait encore quelques taches sombres, aussi petites que des goutes de pluie mais tellement différentes. Il les fixa un moment avant de se décider à les descendre pour rejoindre ce que beaucoup à l'époque avait appelé l'Enfer.
Si rien n'avait changé, cette pièce était l'exeption qui confirmait la règle. Elle n'était plus la même. Elle était vide. Et pourtant sur le sol, on pouvait encore voir des taches. Autrefois, du sang avait coulé ici. Il s'en souvenait parfaitement. C'était lui qui avait persé la peau qui avait ensuite laissé échapé ce flot rouge. Il s'accroupit et tendit la main vers elle. En fermant les yeux, il se rappela de tout. De chaque objet qui n'était plus ici. Mais également de chaque visage qui avait connu cet endroit, même en étant déjà mort.
Après avoir longuement caressé la flaque sèche depuis dix ans, il s'assit sur le sol poussiereux sans jamais la quitter des yeux. Elle voulait tellement dire pour lui. Elle avait été la dernière à avoir coulé ici. Celle qu'il n'avait pas eu le temps d'essuyer. Celle qui était restée gravée dans la pierre. C'était il y a si longtemps mais il s'en souvenait comme si c'était hier. Tout s'était terminé ici et c'était ici que tout recommencerait...