Réflexions
X
Le sommeil lui échappait.
Même le repos semblait l'éviter.
La foule des évènements survenus dans la journée pressait son esprit en même temps que la blancheur du plafond qu'il contemplait déjà depuis un long moment. Devoir gagner un tournoi à tout prix pour sauver l'âme de son grand-père dépassait déjà les limites du bizarre. Mais apprendre ensuite les pouvoirs de l'oeil d'or que revêtait le fomenteur de ce complot, c'était le domaine de l'horreur... du désespoir.
Mokuba et Kaiba... Perdus eux aussi. Et le plus dur restait à venir.
Son regard demeurait obstinément fixé sur le plafond malgré les éclats dorés que renvoyait une pyramide à côté de lui. Il soupira. Il semblait qu'elle l'appelait, qu'elle l'invitait à juste penser à sa présence, à la présence de l'Autre.
Il détourna légèrement les yeux.
Un autre soupir s'échappa de ses lèvres. De lassitude, cette fois-ci. Le temps semblait s'être figé ce soir, et son âme se sentait trop lourde pour s'évanouir dans les nimbes de la nuit.
Le silence.
Un silence soudainement brisé par trois petits coups, derrière la porte de la chambre. La personne derrière la porte toqua à nouveau, face à son silence hébété. Il fit un bruit incompréhensible en réalisant qu'on l'appelait. Puis, il réussit à marmonner quelque chose de sa bouche pâteuse : « Entrez. »
La porte s'ouvrit et se referma dans un faible grincement. La pénombre cachait le visage de la personne mais il n'avait aucune difficulté à savoir de qui il s'agissait.
« Yuugi ? Je suis désolée de te déranger, » confia-t-elle dans un murmure.
« Non, ne t'excuse pas, je n'arrivais pas à m'endormir, de toute façon, » balbutia-t-il en se s'asseyant sur le lit.
Elle s'approcha de lui jusqu'à prendre place à ses côtés. Elle avait toujours été familière avec lui. D'autres gens aurait pu s'offenser du manque de manières, mais pas lui.
Certainement pas lui.
Lorsque son bras effleura le sien, il frémit. De... soulagement, bien-sûr.
« Je voudrais te parler, » elle agrippa son bras. « A propos de ton duel avec Kaiba. Je sais que tout est de ma faute, mais tu es devenu si étrange après... J'espérais que les étoiles t'auraient contenté, mais— »
Elle arrêta ses paroles et ramena son regard vers le sien. Il écarquilla les yeux. Ca se remarquait tant que ça ?
« Je suis très heureux d'avoir pu entrer dans le château grâce à toi, Anzu. Merci énormément, » répondit-il.
Il baissa la tête. Cette fois-ci, il n'avait pas pu résister à la nouvelle tentative du Puzzle pour attirer son attention, et la pensée de l'Autre envahit son esprit.
« Quoi donc ?
— C'est mon autre Moi. Il me préoccupe beaucoup ces temps-ci. Après ce qu'il a voulu faire à Kaiba, je n'ose plus... »
Le plafond n'était pas plus une source d'inspiration que le sol, pour pouvoir continuer.
Anzu hocha du chef. « Je comprends.
« ...Yuugi, » finit-elle, posant une main douce sur la sienne.
Il rouvrit ses paupières et écarquilla les yeux en sentant les doigts fins envelopper tendrement sa main. Le sourire qu'elle arborait était aussi brillant que ses yeux, et Yuugi sentit la chaleur dans ses joues descendre dans sa poitrine. Cette appellation, ce sourire, étaient pour lui.
Juste pour lui.
Elle se pencha sur lui. Malgré la gêne qu'il éprouvait de la voir si proche de lui, il ne put s'empêcher de savourer ce contact. C'était si bon de sentir cette douceur tiède sur son visage... Elle se pencha davantage et Yuugi finit par fermer ses paupières, ses lèvres retrouvant un sourire qu'elles avaient perdues depuis longtemps.
Manquer de sommeil n'avait jamais été aussi gratifiant.