Middle Child Syndrome

Quand les Archanges étaient évoqués, Raphaël était celui qu'on mentionnait le moins.

Ça se comprenait, quand on le comparait à ses trois frères. Michel était le Commandant de la Milice, Lucifer était le préféré de Père, et Gabriel était le Messager. Ils étaient sociables, ils avaient du pouvoir et de l'influence, et ils n'hésitaient pas à s'en servir.

Par contraste, Raphaël faisait un peu tache.

Il n'aimait pas la compagnie, c'était ça qui frappait le plus. Les anges étaient de nature grégaire, ils détestaient se retrouver seuls, et il leur fallait absolument des interactions, avec n'importe qui tant que c'était une interaction. Raphaël aurait été heureux comme tout si on ne l'avait embêté qu'une fois tous les mille ans.

Ensuite, il était nettement plus faible que les trois autres Archanges. Oh, il restait nettement plus puissant qu'un ange ordinaire, mais comparé à ses frères directs, il ne faisait pas du tout le poids. Ça tombait sous le sens : il était supposé être un médecin, pas une arme de destruction massive. Pour soigner, un pouvoir démesuré n'était pas nécessaire.

Il n'avait jamais eu beaucoup d'ambition, au contraire de Lucifer qui tenait à être l'idole des foules. Il n'avait jamais reçu autant d'admiration que Michel, le fils aîné, la référence absolue. Il n'avait jamais été adoré comme Gabriel, qu'il était tout bonnement impossible de détester.

Oh, ce n'était pas de la négligence, c'était juste que les trois frères de Raphaël prenaient réellement beaucoup de place dans la famille. Si bien que l'Archange au teint sombre se demandait s'il en avait réellement une, chez les anges.

Il s'en fichait un peu.

Si l'attention générale était focalisée sur le reste des Archanges, ça signifiait qu'on se concentrait moins sur lui. Qu'il pouvait davantage passer inaperçu.

Raphaël voulait qu'on le laisse tranquille. En tant que membre de la famille princière, il n'aurait jamais vraiment cela, mais il en avait quand même déjà pas mal. Il avait seulement besoin de se montrer poli et digne quand c'était attendu de lui, jouer son rôle d'Archange quand on le lui demandait, et le reste des neuf chœurs lui fichaient une paix royale.

Ça ne le gênait pas d'être le cadet, l'enfant oublié : il pouvait lire tranquille, faire des randonnées, rêvasser, et tout cela plus souvent que Michel, Lucifer et Gabriel. Il subissait moins de pression, aussi.

Non, vraiment, pourquoi se serait-il plaint ?

Il était l'enfant du milieu, celui qu'on oubliait en faveur de l'aîné et du benjamin. Ça lui allait très bien.

Le syndrome de l'enfant du milieu, c'est une situation du monde réel : exemple moi, ma grande sœur étant le génie de la famille et mon petit frère ayant collectionné les allergies graves, deux situations qui ont attiré beaucoup d'attention sur eux. Et ma mère se demande pourquoi je me sens toujours à l'écart.