Alors me revoilà pour une nouvelle fic ! J'espère qu'elle vous plaira. Je compte poster un chapitre toutes les semaines, si possible. Comme je n'ai rien d'autre à dire, et que sans doute la plupart d'entre vous ne lise même pas ces quelques mots, bonne lecture !
Et merci d'avance à ceux qui me laisseront une review !
Appelez- moi par mon prénom
Je me souviendrais toute ma vie de cette journée. Encore aujourd'hui, je pouvais sentir les rayons du soleil qui caressaient mes joues rougies par la chaleur de ce mois de juin. Je me souviens avoir pensé que cela signifierait une bonne récolte de blé pour mes parents cette année. En effet, ils possédaient une exploitation agricole avec mon oncle et mes deux tantes, près de la Red River dans l'état de l'Oklahoma, aux Etats- Unis.
En cette après- midi, alors que j'avais quitté à trois heures mon collège car ma professeur d'allemand était absente et que donc ma journée d'école était terminée, je m'amusais à courir avec mon chien dans la cour de la villa sautant par dessus les buissons et à ramper sous les basses branches des arbres. Anna, notre femme de ménage était en train d'étendre le linge sur deux fils attachés sur des poteaux en fer rouillés tout en me surveillant de loin car mes parents ainsi que oncle Fred et tante Eliza travaillaient à la grange alors que tante Heather faisaient des courses car sa blessure à l'épaule l'empêchaient de faire quoi que ce soit d'utile dans une ferme telle qu'il se doit.
J'étais couverte d'herbes sèches quand j'ai entendu les sirènes avant de percevoir le cri d'horreur d'Anna qui courait à en perdre haleine dans ma direction pointant son doigt derrière moi. En un saut, j'avais fait volte face et commencé à couper à travers les champs dorés, écrasant par centaines les brins de blé. Au loin, sur le ciel azur se dressaient des flammes immenses crachant une fumée noire vers lesquelles je me précipitais. Anna n'a pas eu le temps de m'arrêter bien sûr, j'étais une coureuse à pied hors pair du haut de mes douze ans.
Mais je ne fus pas assez rapide pour arriver avant les secours qui me stoppèrent rapidement avant que je franchisse les derniers mètres me séparant de l'incendie. Pourtant je me rappelle m'être débattue vaillamment, criant toutes les insanités me passant à l'esprit, cognant de toutes mes forces les tibias du pompier et j'étais un peu plus fière d'avoir réussi à lui casser le nez. Mais un secouriste était arrivé, m'avait fait une piqûre et je n'avais plus été capable de crier quoi que ce soit.
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Un nouveau départ. Voilà la formule utilisée par le stupide directeur de mon orphelinat pour désigner cet offre de la Wammy's House. Il assurait que c'était un honneur de se voir proposer une place dans cet établissement anglais. Un établissement de génies.
Je ne m'étais jamais considérée comme une génie. J'avais conscience que je comprenais mille fois plus de choses, quel que soit le domaine, que des autres enfants de mon âge. Mais je n'avais gravé dans mon esprit que j'appartenais à une autre catégorie qu'eux. Je restais une fille de douze ans, orpheline.
Mes parents, Bill et Hélène Walter avaient succombé le dix juin 2002, c'est à dire il y a deux mois maintenant. Mon oncle et ma tante avaient eu moins de chance, ils ont souffert respectivement quatre et cinq semaines avant de mourir suite à de graves brûlures causées par l'accident. Pendant ce temps passé à l'hôpital c'est ma dernière tante, consciente, qui s'était occupée de moi et des biens. Mais après la mort de sa soeur Eliza bien- aimée, elle avait décidé d'arrêter de s'occuper de l'exploitation en ruine pour aller à New York tenter sa chance dans le marché biologique. Avec sa blessure, ma charge aurait été trop dure à porter, sans compter le fait que les services sociaux ne l'auraient jamais laissée m'emmener sans aucune promesse d'embauche, donc de revenus stables.
J'avais donc atterri ici, dans cet orphelinat où la dépression et l'ennui m'accablaient de plus en plus chaque jour qui passait. A mon admission, après les tests pompeux du docteur, du dentiste et de la psychologue j'avais répondu à un questionnaire qui sortait du lot. Pour la première fois de ma vie les questions abordées étaient suffisamment osées pour que je mette plus d'un centième de seconde pour répondre. Mais j'étais en période de deuil alors si tôt la copie rendue, j'avais eu autre chose à penser.
Voilà pourquoi je n'avais sans doute pas fait immédiatement le lien avec ce test au niveau si élevé alors qu'il était destiné à des enfants de moins de quinze ans. Mais maintenant que je devais faire un choix, je me rendais compte que j'aurais dû réfléchir avant de le réussir. On me voyait comme une surdouée à partir d'aujourd'hui. Alors que j'aurais préféré oublier que j'étais différente des autres enfants de l'orphelinat. Si je ne me reconnaissais pas en eux, qui sera là pour partager ma douleur ?
La réponse était pourtant évidente. D'autres génies, eux aussi orphelins rassemblés à la Wammy's House. J'aurais préféré ne pas m'éloigner de mon ancien lieu de vie mais si c'était la seule option pour avancer... Qu'il en soit ainsi.
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Il pleuvait contre les vitres de la berline noire lorsque je parcourus avec Roger, le directeur de mon nouvel orphelinat, la distance qui séparait l'aéroport de l'établissement. Nostalgique, je me souvenais du dernier trajet que j'avais fait avec mon père le jour de l'incendie. Surexcitée par le fait de finir plus tôt les cours, j'avais passé ma tête à l'extérieur de la voiture tandis que nous apercevions la maison. Hurlant à plein poumon, j'avais appelé mon chien et levé une main pour saluer oncle Fred poussant une brouette vers la grange, encore intacte à ce moment là.
Je me rappelais aussi du ton sévère mais affectueux qu'avait eu mon père pour m'ordonner de m'asseoir correctement, craignant qu'il ne m'arrive quoi que ce soit. Je m'étais exécutée et avais ensuite presque sauté de la voiture alors qu'il venait à peine de la rentrer dans la cour, sans même le remercier d'être venu me chercher alors qu'à cette période de l'année, il avait beaucoup de travail sur les bras. J'avais atteint la cuisine, jeté mon sac aux pieds d'Anna avant de filer dans la cour, mon chien à mes trousses.
Le contraste avec le trajet d'aujourd'hui était flagrant. Roger se présenta de sa voix enrouée et me demanda comment s'était passé le voyage jusqu'ici. Je répondis vaguement, absorbée par une goutte traçant un mince filet sur la vitre, avant qu'une des remarques du directeur ne me surprenne.
« Tu comprends, pour plus de sécurité tu vas devoir abandonner ton nom. Il est important que tu réalises qu'à partir d'aujourd'hui, tu pourrais devenir celle qui succédera à L. As- tu une proposition ? »
Succéder à L. Je n'avais jamais été ambitieuse, avant je me voyais déjà prendre la succession de l'exploitation alors devenir la plus grande détective du monde... Pour moi, la justice s'écrivait sans majuscule et elle ne m'inspirait aucun respect. C'était un fondement de la démocratie, point. Mais jamais je ne lui consacrerais ma vie. Alors je me voyais mal recevoir le flambeau de L. Laissons cet honneur à quelqu'un de plus engagé.
Mais abandonner mon nom, mon identité, me paraissait horrible. Je ne voulais pas renier mes parents, mon nom était la dernière chose qui me restait d'eux avec mes souvenirs. Nerveuse, je tripotais le bracelet de perle que j'avais un jour trouvé sur une cagette vide au marché. Mais si c'était une obligation...
« Perle, murmurai- je en faisant rouler une dernière fois mon bijou entre mes doigts.
- C'est un beau surnom, constata Roger avant de le noter dans un petit calepin. »
Il enchaîna sur le règlement de la Wammy's House, de ses objectifs, des cours proposés alors que se rapprochait la bâtisse imposante cachée par des murs de deux mètres et par un immense portail en fer noir. Sur le plateau de bord du véhicule, je vis qu'il était dix- sept heures moins quart, les autres devaient être soit en cours, soit en train de se reposer à l'intérieur vu le temps maussade de ce mois de septembre.
Je poussais sans délicatesse la portière et tandis que nous nous dirigions vers les portes en bois qui formaient l'entrée, j'ôtai mon bracelet et le jetai dans la première bouche d'égout que j'aperçus avant de m'engouffrer à l'abri, dans le hall de l'orphelinat, faisant désormais partie de ses génies.
Et c'est ainsi que toute trace de l'existence de Penny Walter disparut à jamais.
