Prologue

Superbe saison froide et son mois qui va avec. En vrai ça faisait quatre hivers que je passais à Los Angeles en tant que vampire. Et franchement ça me déprimait. La neige encore ça allait. Mais est-ce que quelqu'un aurait l'extrême gentillesse de faire taire les radios et les téléviseurs qui gueulaient à tout va sur noël ?

Non parce que ça me file le cafard, j'ai beau être un macchabée qui marche et qui parle j'ai encore mon petit cœur. Ou comme dit Nines : « ton usine socratique ».

Bah quoi ? C'est pas ma faute si je suis Toréador !

Pour en revenir au sujet, on était à deux jours de noël et il neigeait cette nuit alors qu'en cette belle nuit multicolore j'étais dans les hauts quartiers de Los Angeles en train de faire du shopping. J'avais assez d'argent pour refaire entièrement une garde robe de princesse. J'avais la chance que mes derniers mangas se vendissent bien depuis le mois d'août. Là c'était carrément la ruée, ma maison d'édition était aux anges et surtout j'avais gagné au loto !! Bon d'accord, c'est pas vrai. Pour le loto.

Alors là j'étais en train d'hésiter entre une robe crème or en satin et dentelles sur le décolleté ou une robe elfique. La poisse. Pour l'heure je portais un pantalon en cuir avec des bottines à talons aiguilles, une chemise noire en coton et un épais manteau de laine noire. Je devais avoir l'air fine avec la capuche sur la tête et les mains dans les poches devant la vitrine.

Chapitre 1 – Décembre

« Maudit soit l'empaffé qui a décidé que noël serait mon anniversaire, » marmonnai-je à mon reflet avant d'hausser les épaules et de reprendre ma route au milieu des joies des mortels allant fêter la venue du petit Jésus. Misère, qu'est-ce qu'une pro-lucifer comme moi fout en Californie ?

Décembre me foutait vraiment un pire cafard. Pour la peine j'allai voir à la patinoire si j'y étais. Avec un peu de chance un patineur aurait le bon goût de patiner sous la musique des cygnes du lac ?

Et c'est une fois devant la patinoire que je me rendis compte qu'il y avait vachement trop de monde pour mon cafard, soupir, et je repartis les épaules basses et l'envie de meurtre. Je cherchai un endroit où trouver cette mélodie de rêve et me plantai finalement face à la seule et unique télé d'un vendeur électroménager qui diffusait le lac des cygnes. La valse en plus ! Le sourire revint et je me mis rapidement à chantonner la valse en balançant la tête en rythme. Jusqu'à ce que je sentisse une main se poser sur ma hanche droite et m'attirer. BUMP ! Nines ! ÔO ?

« B'soir jeune fille, » commença t-il en me souriant légèrement, il était vraisemblablement de mauvaise humeur lui aussi, « je t'ai vue à la patinoire, tu errais comme une âme en peine. Qu'est-ce qui ne va pas ? »

Ah ben non, lui va très bien. Il portait toujours un jean bleu mais pas troué, des bottes noires et une épaisse chemise de laine noire. Juste à côté de moi, le bras autour de mes hanches pour me garder contre lui.

Dernièrement Nines était tendre avec moi, on avait tué LaCroix, rendu le masque à Monsieur Beckett, et on commençait même à réinstaurer l'ordre dans Los Angeles et monter nos défenses contre les envahisseurs. Le rêve d'un Etat Libre renaissait de ses cendres pour Nines Rodriguez.

Mais pour moi rien n'allait vraiment en s'arrangeant. Je savais que Judas était en ville et qu'il se souvenait de moi humaine. Le mieux dans tout ça c'était ma famille. J'étais censée retourner en France pour passer les fêtes de noël avec eux ! Dur ! Ca a failli mal terminer la dernière fois, genre 'on entre presque en force dans ta chambre d'hôtel gardée par Heather'. Alors cette fois-ci niet, trop de boulot mais je ne verrai personne.

Comme je ne répondais pas à la question du vampire Brujah et me contentais de regarder la télévision sur le lac des cygnes, le Brujah pressa un peu plus sa large main bronzée même de nuit sur ma hanche pour me serrer un peu plus contre son côté. « C'est parce que tu ne reverras pas ta famille pour les fêtes ?

-Mouais.

-Vous êtes combien ?

-Quelle importance maintenant ?

-Juste histoire de parler… Tu veux boire un verre au Last Round ?

-Damsel est rentrée, elle va me sauter à la gorge. »

Nines claqua de la langue par impatience et sans attendre pour changer à d'habitude il me tira à sa suite. Impossible de résister au charismatique leader du bientôt nouvel Etat Libre. M'en fous j'en profite pour mater na, les plus belles fesses de Downtown ça ne se perd pas de vue ! Surtout quand ces mêmes fesses ont buté elles seules un loup-garou ! Mais alors qu'il me tractait derrière lui et qu'on croisait des couples, je soupirai. M'énervent tous ces gens !

Nines me tira par le poignet de telle sorte que je me retrouvai maintenant épaule contre épaule et son bras autour des miennes. Je levai la tête pour le voir passer sa langue sur ses lèvres fines pour les humidifier, baissant la tête et les yeux vers moi, il sourit. « Je sais qu'on est le vingt-trois décembre, Lia, et en général les jeunes sont déprimés eux aussi par cette fête, alors, » dit-il à voix basse alors que la neige continuait à tomber. Les pas des mortels et les nôtres crissaient sur le tapis blanc.

Même Heather ne connaissait pas la date de mon anniversaire, je rendis son sourire à mon héros en le remerciant timidement. Posant ma tête blonde contre son épaule. Respirant son parfum musqué contre sa peau à travers sa chemise. Il mettait du parfum pour homme plutôt fort mais pas désagréable, au contraire c'était un parfum léger mais délicieux. Chaleureux.

Jack était loin pour les fêtes, il avait décidé de se rendre en Egypte pour ne pas entendre ces conneries de petit Jésus mais il allait être déçu. Aucun d'eux ne savait qui j'avais été durant ma vie humaine. Quelqu'un qui se serait étalé par terre plusieurs fois à cause de la neige et qui n'aurait pas été l'héroïne que j'étais aujourd'hui. Mais une fille trop affectueuse qui ne reverrait plus sa famille. Est-ce que ça attristerait mes frères ? Ma maman sûrement. Je devais les voir, au moins pour ne pas rendre maman triste.

Sans rien pouvoir retenir, tout à coup je me mis à pleurer à chaudes larmes en m'arrêtant en pleine rue. Levant les mains sur mon visage pour l'y couler et le cacher. Je gémis le moins fort possible mais j'entendis Nines soupirer mais pas d'exaspération. Plutôt avec chagrin, mettant ses bras autour de mes épaules pour me serrer ensuite contre lui. Le nez contre son torse et agrippant la chemise noire des deux mains. Ce genre de situations aussi était un calvaire.

Serrée comme ça en pleurant contre lui, les bras dans mon dos qui frottaient. « Lâche moi ! » Glapis-je en voulant me détacher, les mains appuyées contre sa poitrine. Mais il sembla hésiter et je répétai en arrivant à le repousser. Courant ensuite à l'opposé.

Sans l'entendre m'appeler, sans entendre ses pas derrière les miens. Tournant à une ruelle vide mais propre et m'arrêter là pour pleurer tout mon saoul le dos de mes mains sur mes yeux.

Quand est-ce que j'arriverai à l'oublier ? Comment vivre ma nouvelle 'vie' sans faire pleurer ma mère lors des fêtes ? Tournant sur moi-même pour flanquer un coup de pied au mur, et enfouir mon visage dans mes mains. Gémissant un peu plus fort mais en retenant.

Jusqu'à finalement sentir qu'on saisissait doucement mes mains pour les baisser, je levai la tête mais en réalité Nines était baissé pour être à ma hauteur. L'air inquiet, ayant sorti un mouchoir en tissu blanc pour tamponner mes joues, mes paupières et mes lèvres.

Il parcourut mon visage de ses yeux clairs, soupirant sombrement. « Ne pleure pas Lia, tu peux aller les voir si tu veux. Montre toi juste prudente pour ton refuge, » me dit-il en se redressant lentement. Sa main droite venant soudain sur ma joue pour caresser la pommette du pouce. Je le regardai dans les yeux. Essuyant sous un œil du doigt en m'excusant. Il sourit en secouant la tête. « T'en fais pas pour ça, c'est normal, » répondit-il en gardant sa main sur ma joue. C'était la première fois qu'il faisait ce geste envers moi. Et je fronçai un peu les sourcils avant de baisser les yeux.

« Alors, on va au Last Round ? » Demanda t-il alors que sa main quittait ma joue pour descendre sur mon épaule puis le long de mon bras gauche pour prendre ma main. J'hochai la tête. Me tirant ensuite pour reprendre le chemin, son bras musclé autour de mes petites épaules.

Parcours en silence. Jusqu'à ce qu'on arrive au Last Round et que Nines ouvre la porte. La fumée, le rouge, et comme le bar s'était fait agrandir, y'avait aussi au fond un groupe débutant qui se produisait. C'était plus grand qu'avant, avec plus de monde, plus de bruit et plus de fumée. Ceux là jouaient du Tiamat, la chanson nommant le père de tous les vampires. Caïn.

Nines s'enfonça dans la foule en ayant lâché ma main, il se dirigeait vers le bar alors je me dirigeai vers la piste de danse. Retirant mon manteau pour le poser au hasard d'une chaise et marcher jusqu'au milieu de la piste. Je vis qu'il y avait Damsel qui se déhanchait aussi avec un mâle mortel qu'elle avait dû pêcher au hasard.

Mais moi je commençai à danser les bras pliés au-dessus de la tête, les cheveux dénoués sur mes épaules. Me déhanchant lascivement en gardant les yeux baissés. Finalement je fermai les yeux et relevai légèrement la tête pour me laisser entraîner par la musique sombre et envoûtante. Je sentis ma tête se pencher sur le côté droit alors que tout mon corps se mouvait comme hypnotisé par la voix grave du chanteur. Tournant, tendant les bras vers le plafond l'un sur l'autre, ondulant du bassin en mouvements circulaires. La tête suivant les mouvements soupirants de mes hanches ou d'une cuisse tenue en retrait. Les bras pliés. Entrouvrant les paupières pour voir le sol du plancher en vieux bois. Quelques pieds des danseurs et danseuses autour de moi.

Puis entre les vapeurs étranges de ma transe, je sentis dans mon dos un torse fort et je reconnus le parfum de Nines, comme ses mains sur mon ventre posées sans appuyer. En temps normal je me serais posé des questions à ce que le Brujah fût derrière moi, ses mains sagement posées sur mon ventre pour juste suivre mes mouvements. Mais j'étais ailleurs et absolument pas encline à avoir les pieds sur terre.

Je sentais les hanches du vampire Brujah proches des miennes mais non plaquées. Je sentais l'espace vide entre nos deux corps faire le lien charnel entre nos mouvements, chaud, électrique. Je refermai les paupières, penchant la tête sur le côté gauche en déposant doucement mes doigts sur ceux du vampire. Envoûtée par cette ambiance interdite. La proximité intime de mon idole et leader. Cette voix qui susurrait en chantant comme il pleurait sur lui-même. Les mouvements, comme un cercle infernal. Le menton, la barbe rêche de la Racaille contre la peau tendre de ma gorge, sous mon oreille. Ses lèvres effleurant sans la toucher. Juste chuchotant mon diminutif d'une voix de velours.

« Lia… »

Je rouvris les yeux. Ses doigts sous les miens qui se retournèrent pour les saisir et lever mes bras au dessus de ma tête et me faire tourner vers lui. Happée par ses yeux clairs si grands en amande, honnêtes et beaux. Son nez fin. La beauté de ses sourcils noirs épais semblant tristes au naturel avec son front bas. Ses cheveux bruns si courts couvrant le haut de son front en étant aplatis. Tout son corps de mâle un peu rude Brujah. Sa main droite lâcha une de mes mains pour se glisser au creux de mes reins. Appuyant légèrement dessus comme pour m'attirer contre lui sans le faire.

La masse des danseurs évoluant sans nous ou avec, je ne savais plus trop. Nines ne me quittait pas des yeux et sa main gauche gardait la mienne pour la passer derrière sa nuque.

Que faisait-il ? M'amenant doucement plus près de lui et m'entraîner dans une danse plus sensuelle encore que tout à l'heure. La chaleur électrique tout autour comme une nuit d'été. Moite. Mon autre bras le long de mon corps, j'avais les hanches collées à celles du Brujah, mon bras derrière sa nuque était le seul à me tenir. Ses mains sur mes côtes juste près de mes seins. Ondulant, gauche et droite, avant et arrière, tournant, retournant. Emportée, subjuguée. Mes yeux dans les siens, son visage semblait si loin, si tout. Dans l'obscurité fumante de la salle.

C'était comme si trois mots flottaient dans l'atmosphère sans oser qu'on les prononce.

« Nines ? » Murmurai-je comme si je manquais de souffle, syllabes perdues, hors de l'entendement comme des formules magiques obscures. Fermant les yeux, la tête penchée vers l'arrière, mouvement sinueux. Tout en son pouvoir sans aucun. Ne pensant plus à rien. Sa main quittant ma côte droite pour aller sur mon bras derrière sa nuque. Et l'autre autour de ma taille.

Nines, merveilleux… Serre moi contre toi et protège moi. Garde moi.

Ses doigts larges or pâle se mêlaient aux miens sur sa nuque. Caressant du pouce le dos de ma main. Je me sentis rougir, étrangement. Cela m'effraya et je rouvris les yeux en étouffant un cri. Un cri ? Le souffle, la chaleur de ma main sur sa nuque froide. Je tremblai tout à coup et croisant les yeux clairs du Brujah fronçant les sourcils inquiets. « Qu'est-ce qu'il y a ? » Me demanda t-il à voix basse, grave et anxieuse. Je le repoussai, j'essayai mais j'étais faible. « J'ai chaud ! » Bafouillai-je sans comprendre. Est-ce que tout cela avait été un rêve ou un cauchemar ? Est-ce que je redevenais cette pitoyable mortelle ?

Nines me saisit les mains et me murmura tout doucement de me calmer, que ce n'était pas grave. Il m'emmena hors de la piste, à l'étage à une table à l'écart des autres en commandant au passage deux bloody mary. Damsel au moment de monter l'escalier ricana et avec un sourire en coin laissa échapper que : « la petite découvre l'allumage ? » Tout de suite suivi par un glacial « la ferme Damsel, » de Nines.

Le Brujah me fit m'asseoir et j'étais prête à fondre en larmes aussi dès que je fus assise je plongeai mon visage dans mes mains, toujours chaudes j'hoquetai et les plaquai sur mes genoux. « Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi… » Balbutiai-je à mi-voix en les fixant. Puis Nines ayant attiré sa chaise juste en face de la mienne me saisit les mains encore une fois. Les serrant dans les siennes puis les tenant du bout des doigts dans une seule pour porter sa main droite sur mes cheveux. « Chut, calme toi Aurélia. C'est normal tu viens juste de découvrir qu'on peut imiter les humains en faisant affluer plus vite et plus fort notre sang. Ca va s'estomper dans quelques minutes si tu te calmes. D'accord ?

-D'accord… D'accord… » Répétai-je en commençant par répéter le discours dans ma tête ou de penser à autre chose. Normal, imitation, afflux du sang. D'accord. Nines lissait mes cheveux du haut du crâne en passant par l'oreille jusqu'à la gorge et plusieurs fois. J'hochai rapidement la tête sans le quitter des yeux. Me mordillant la lèvre inférieure. Me concentrant sur le visage du vampire lissant ma chevelure blonde. Il avait l'air anxieux à froncer les sourcils et avoir les yeux grands ouverts. « Personne ne t'a jamais expliqué ça ? » Finit-il par demander à mi-voix. Et je répondis assez violemment en hurlant presque : « Non !! Jack m'a jamais parlé de ça !! »

Déjà qu'il m'avait appris le b.aba sur le tas…

« Pourquoi tu es si inquiète ? Ce n'est pas grave, calme toi Lia, » dit-il doucement en semblant un peu plus perplexe et anxieux de seconde en seconde. Il garda sa main sur mes cheveux contre mon oreille. Damsel revint avec trois bloody mary. Prenant une place sur la table entre nous et sortant une cigarette en lançant, les yeux baissés sur son briquet : « c'est de ta faute, m'sieur Nines Rodriguez le mâle le plus chaud de Los Angeles une fois par an ! Merde !

-Qu'est-ce que tu m'chantes ?

-T'as qu'à voir l'escalier là, regarde, don juan. »

Ce que fit Nines et moi aussi. Décidemment Nines avait des groupies. Il y avait deux jeunes filles d'environ dix-huit ans que je n'avais jamais vues ici avant. L'une brune l'autre châtain jolies visiblement trop bien pomponnées pour être ici. En fait la brune cheveux longs bouclés ramenés en chignon portait un jean bleu taille basse à pattes d'ef avec un haut en satin noir à petites bretelles. La châtain portait elle aussi un jean de même facture mais avec un gros pull en laine blanche. Elles avaient de beaux yeux clairs et me voilà clouée sur ma chaise, tendue comme un ressors devant deux jolies jeunes filles bavant sur mon héros !

Ce qui s'était passé sur la piste de danse était flou et nébuleux… Je levai les yeux au ciel pour arriver à la simple conclusion que ça avait été très chaud… Je me raclai la gorge en détournant le regard des deux jeunes filles qui avaient pris leur courage à quatre mains pour grimper l'escalier et s'approcher de Nines. J'échangeai un regard avec Damsel qui me fit quand même un clin d'œil. Je savais qu'elle m'aimait bien, elle était juste un peu rude en bonne Brujah. Je déportai mon regard sur Nines pour voir qu'il s'était à moitié tourné vers les filles, un bras sur le dossier de la chaise. Le sourcil haussé. Elles marmonnaient des « allez toi, demande ! » Jusqu'à ce que devant lui la brune prenne l'initiative. Souriante, brillante. « Bonsoir, je m'appelle Jessie, où est-ce que vous avez appris à danser comme ça ? »

Je les voyais venir grosses comme des citernes. Levant les yeux au ciel intérieurement pendant que Damsel les roulait extérieurement. Je décidai de prendre un des bloody mary à la paille et d'aspirer.

« Nulle part, » répondit simplement Nines en haussant les épaules. Mais au lieu de les refroidir évidemment ça força leur admiration et vint alors la phrase fatale : « vous voulez nous montrer ? »

Ben voyons ! Je me levai en soupirant à fendre l'âme avant de dire bonsoir à Damsel et Nines surpris. Bonsoir mesdemoiselles, puis je prétextai du travail en retard (ce qui était vrai) et descendis l'escalier, saisis mon manteau et sortis en ramenant la capuche sur le haut de ma tête.

Me font toutes chier ces Lolitas !

Dans la rue j'en étais à pester après ces saloperies de chansons de noël !

Bousculant quelqu'un en marchant…

Judas ! « Oh merde ! » Marmonnai-je en moi-même en m'excusant, mais voilà que monsieur me reconnaissait ! Qui lui a remis les neurones à l'endroit ? Et qui lui a regreffé ses couilles ? Tzimisce ou Tremere ?

« Aurélie ? C'est toi ? Bonsoir !! » S'exclama t-il en me saisissant directement par les épaules pour me faire la bise laquelle je consentis de mauvaise grâce du coup. Il n'avait pas changé, semblait en meilleure santé qu'à Paris et portait gros manteau beige et jean bleu avec bottes dessous sans doute. « Ca va, ça va, » commençai-je à répondre en souriant le mieux possible alors qu'il prenait ma main dans la sienne comme si de rien n'était. Personne ne lui avait effacé le coup de la dernière fois non par hasard ?

« Ca fait longtemps qu'on s'est pas vu ! Tu fais quoi aux Etats-Unis ? » Me demanda t-il encore en voulant m'entraîner à sa suite. Ma grande question était : pourquoi je me laisse faire ? Pour faire comme si de rien était et endosser la Mascarade. « Je travaille pour une maison d'édition ici. T'as pas dû entendre parler de la série de manga Rose's Mask je suppose.

-Ah !! Si j'en ai entendu parler si !! C'est toi qui est l'auteur ? »

Non, couillon, c'est mon chien.

« Oui, ça t'ét… Te dirais de discuter ailleurs ? Il fait froid ici…

-Non, y'a un café pas loin, on y va ? Comment tu te débrouilles ici toute seule ? »

En marchant… Et gardant mon bras coulé sous le sien. « Ben j'ai fait des progrès, tant et si bien que y'a plus rien.

-C'est cool ça ! Tu vas bientôt pouvoir faire du patin sur glace ! »

J'ai dit que y'avait plus rien, mais c'est pas grave… « Et toi, tu fais quoi à L.A ?

-Travaille aussi, avec un ami on cherche un appartement et on va enseigner ici le français. »

Et un coup d'œil à son portable… Ben tiens.

« Ah voilà le café, entre je t'invite ! »

Un café bien français dans le centre ville… Il poussa la porte devant moi et j'entrai en baissant ma capuche de laine. Il y avait une table libre à banquettes juste à ma gauche et je m'assis. Judas me demanda ce que je souhaitais et je dis une bière histoire d'en rajouter sur le mélodrame. Il alla trouver un serveur et lui parla rapidement (le serveur étant bien foutu, je l'entendis l'accrocher un peu) avant de venir s'installer en face de moi. Croiser les doigts sur la table, s'humecter les lèvres et continuer à m'interroger. « Alors ? C'est bientôt ton anniversaire après demain, tu vas faire quoi ? Tu rentres en France ?

-Non, malheureusement j'ai trop de travaille, tu te doutes des plannings de mangaka. On dort dans l'atelier.

-Ben qu'est-ce que tu fais dehors à une heure pareille ?

-Je m'oxygène… Et toi qu'est-ce que tu fais dehors aussi tard dans le centre ville de L.A ? »

Il sourit, baissa les yeux car il avait repéré mon renvoi de balle. « Ben disons que j'allais retrouver mon ami… T'as trouvé quelqu'un toi ? »

PAF. Le serveur apporta le café pour monsieur et la bière pour mademoiselle qu'il décapsula devant moi et déposa ensuite. Je le remerciai avec un sourire doux et il rougit. Ah, le bonheur que d'être Toréador adorable. Il s'en alla après m'avoir rendu son sourire. Et je reniflai discrètement ma bière. Au moins je pouvais toujours renifler l'odeur et m'ébahir devant les jolies couleurs !

« D'accord… T'as entendu qu'il me plaisait ce gars là non ? Alors j'peux savoir pourquoi tu lui as fait du charme ?

-Hé ?

-Oh c'est bon hein ! Qu'est-ce que j'ai fait encore ?! On se retrouve à peine que tu fais semblant de pas comprendre !

-Ecoute, je lui ai fait un sourire par politesse ! Va pas me dire que tu crains pour ton charme avec moi dans les parages je vais pas te croire !

-Et tu portes du cuir pour quoi faire au juste ? »

Cassée… En vérité j'étais pétrifiée. « Bon, ben ravie de t'avoir revu, je te laisse ça vaudra mieux.

-Ca y'est ! Mademoiselle a encore des reproches à me faire et elle voudrait me faire porter le chapeau ! »

Alors là, trop c'est trop, j'avais les larmes aux yeux mais je les retenais parce que c'était des larmes de sang. « C'est toi qui cherche à me faire culpabiliser ! La dernière fois aussi c'était finalement de ma faute et ça va l'être encore maintenant parce que tu n'acceptes pas que je puisse avoir plus de charme que toi !

-Ah ouais, bien sûr ! Avoir moins de charme c'est compliqué ! »

Là c'était bon. Je portai la main sous mes yeux et me levai pour quitter la banquette. Mais il se leva à son tour. « Attends, attends ! Ca suffit les enfantillages Aurélie ! Tu reste assise et tu m'explique ton comportement !

-Je n'ai rien à t'expliquer, t'es incapable de comprendre quand je le fais…

-Ca c'est encore histoire de faire de moi le méchant, hein ! Alors ça va maintenant ! Reste assise !

-Non. »

J'en étais à passer la porte du café en courant. Et une fois sur le trottoir glissant, à essayer d'aller le plus vite possible. Quelques secondes plus tard il me rattrapait en hurlant à demi mon nom. Il me rattrapa et me saisit par l'épaule pour me tourner vers lui et je lui donnai une claque « fous moi la paix !! »

Il recula en tenant sa joue. Portant sa main à ses yeux et allant d'elle à moi avec un air ahuri. « Tu m'as frappé ?

-Laisse moi tranquille Judas !! Si t'es pas capable d'accepter tes erreurs alors me fais pas porter la faute !! Casse toi ! » Criai-je en retenant à grand peine mes larmes. Comme j'aurais voulu que Nines fût là !

« D'accord, alors il sera pas dit que moi je frappe les gens en tort ! Est-ce que j'ai mérité tes reproches de la dernière fois ? Non ! Mais j'ai fait comme si pour ne pas te faire de peine.

-TU M'AS MENTIE !! »

Là je criais. Et je plaquai mes mains sur mes lèvres toujours en retenant mes larmes. Il avait fermé un œil pour supporter mon hurlement. Et je reculai un peu d'un ou deux pas en arrière. Il soupira et relâcha ses épaules. « Oh et puis merde hein ! J'en ai marre de tes conneries ! » Cracha t-il en se détournant, « quand tu seras calmée tu me feras signe ! »

Et il s'en alla.