Voici donc la nouvelle fic, centrée cette fois-ci sur Crowley Eusford. Notre vampiroux va faire une étonnante découverte, qui changera sa vie. Légers spoils sur les romans portant sur lui.

Bonne lecture ^^


Année 2019 du calendrier des vampires.

Depuis le hublot d'un avion, Mikaela Hyakuya observait le paysage. Trois ans … trois ans déjà qu'il était devenu un vampire. L'un de ceux responsables du massacre de sa famille. Le pire étant que celui qui avait tué devant lui les autres enfants rescapés de la fin du monde, était en quelque sorte son maître. En tant que vampire, son ressentiment s'était beaucoup atténué néanmoins, mieux valait ne pas s'y fier. Le jeune âgé de désormais quinze ans espérait toujours fuir ce monde de vampires, et avec le seul membre de sa famille survivant, Yuuichiro Hyakuya, actuellement chez les humains rescapés. Pour l'heure toutefois, il faisait route vers l'Angleterre en compagnie de Ferid Bathory, Crowley Eusford, Chess Belle et Horn Skuld. Une mission de routine, comme il y en avait parfois.

Ceci, afin de détruire certains groupes d'humains pratiquant des recherches sur le fameux Séraphin de la fin. Dire que lui et Yuu en avaient fait partie. Qu'ils avaient subi des expériences alors qu'ils étaient très jeunes. Des enfants. Mais cela n'avait semble-t-il dérangé personne. Et maintenant, le monde avait sombré à cause de cela. Alors honnêtement, Mika avait de moins en moins de remords à éliminer ces stupides humains. Puis quand il voyait les cobayes … c'était horrible. Il se souvint notamment de la fois précédente, où le sujet l'avait supplié de le tuer. Ce qui avait été fait bien sûr, mais pas de sa main. Les voici donc repartis pour un tour. Pourquoi eux au fait ?

Pourquoi un groupe venant du Japon ? Eh bien, grâce à l'Armée Impériale Japonaise les vampires du cru avaient de l'expérience en la matière. Mika se détourna du hublot. Ce faisant, son regard tomba sur Crowley. Tiens ? Il avait l'air … comment dire … nostalgique. Oui c'était le mot. Voilà qui était surprenant.

« Vu son nom il est possible que l'Angleterre soit son pays d'origine. » songea soudain Mika.

Crowley Eusford, 13ème géniteur de son état était pensif. L'Angleterre … depuis combien de temps n'y avait-il pas mis les pieds ? Très longtemps. Des siècles. Il était rentré chez lui après la catastrophe de la cinquième croisade, de 1217 à 1221. Mais … pour autant il n'avait pas remis les pieds au Manoir Eusford. Il avait élu domicile dans une petite ville où il avait dispensé des cours d'épée aux enfants nobles du coin. Puis … après une sombre affaire qui l'avait vu être transformé en vampire, il avait quitté son pays. Il avait erré de par le monde ensuite. Et voici qu'aujourd'hui Crowley y retournait. Tiens, qu'était-il advenu de sa famille déjà ? Éteinte au cours des siècles, il lui semblait. Et quand bien même, il ne se voyait décemment pas aller leur rendre visite.

Bientôt, les côtes anglaises furent en vue. Lorsque Crowley y porta ses rubis … plusieurs souvenirs remontèrent. Son enfance avec ses frères (tiens il s'en rappelait encore ?), la rencontre puis l'apprentissage avec son maître d'armes avec son meilleur ami à l'époque. S'il ne se rappelait plus de son visage, il se souvenait en revanche de sa personnalité. Et puis … le départ pour la Croisade. À quel point il croyait en Dieu à l'époque, sans le moindre doute. Venait ensuite la cruelle désillusion sur le champ de bataille. Il n'y avait rien eu de Sa part. Pas le plus petit signe, une once d'espoir, une raison à cette boucherie. Silence total. Crowley n'avait pas trouvé Dieu durant la guerre, mais bien le Diable. Car oui, c'était là-bas qu'il avait vu pour la première fois un vampire.

Celui-là en revanche, Crowley ne l'avait jamais oublié. Quand il était encore humain, Crowley avait juré de venger ses camarades morts à cause de lui. Las, une fois vampire le manque quasi total de désir dont faisait preuve cette espèce en avait décidé autrement. Sans compter le rang de ce fameux vampire. L'avion passa enfin au-dessus des terres. La tête du vampire aux mèches rouges se remplit à nouveau de souvenirs. Le séjour promettait d'être un peu pénible. Le jet dans lequel se trouvait le groupe de vampire amorça une descente. Quelques instants plus tard, le groupe sortait. Un des leurs non-noble vint pour les accueillir et les guider à travers la capitale en ruines.

Chemin faisant, Ferid demanda un résumé de la situation.

« Nous ignorons encore où se trouve précisément le laboratoire. Mais nous savons qu'ils y créent des armes anti-vampires. C'est un des scientifiques que nous avons rencontré par hasard qui nous a révélé l'existence de recherches interdites. »

« Et cet humain ne vous a pas révélé l'emplacement du laboratoire ? » questionna Crowley.

« Non. Il nous a simplement menacé avec la conception d'une créature puis est mort durant la rafle de bétail. »


Les vampires furent conduits au domaine de celui qui les avait appelés, le quatrième géniteur Lord Ruthven. Ce dernier les reçut dans son salon. La première chose que pensèrent Mika et Crowley en le voyant, c'est que Ferid devait s'être inspiré de lui. Aristocratique de la tête aux pieds, l'allure d'un noble de l'ancien régime, la peau pâle mais d'une beauté notoire bref ils auraient pu passer pour des frères.

« Soyez les bienvenus en mon humble demeure, chers camarades. » salua-t-il.

Même le ton était emprunté. Mika faillit rouler des yeux. Ce que ces vampires pouvaient être prétentieux. Il les invita d'un geste gracieux et ample à prendre place sur un divan tandis que lui trônait dans un fauteuil luxueux. Une jeune femme d'une vingtaine d'années à l'air morne apporta une carafe emplie de liquide rouge ainsi que des verres. Elle les remplit à la même hauteur chacun, puis passa les servir aux invités. Préférant ne pas froisser leur hôte ou quoi que ce soit d'autre, Mika prit son verre mais se garda d'y toucher. Il avait pris ses précautions et avalé une fiole du sang de Krul Tepes.

« Bien. Je suis confus de vous avoir mandé céans, hélas je n'ai que peu de temps à accorder à cette navrante histoire. Vous a-t-on déjà rendu compte à ce sujet ? » reprit ensuite Lord Ruthven.

« Oui, durant notre trajet. Nous possédons quelque expérience sur les cobayes de laboratoire et la recherche dont ils font l'objet. » répondit Ferid.

« Cela est fort appréciable. J'ai tenté de localisé l'endroit naturellement, mais les humains semblent déterminés à protéger le lieu. Je n'ai qu'une estimation à vous offrir, là où les affrontements sont les plus courants et les plus acharnés. » révéla Ruthven.

Il claqua des doigts, et une autre servante apporta une carte qu'elle déroula sur la table basse séparant les vampires japonais du lord anglais. Le coin en question était entouré d'un cercle. Chacun se pencha un instant. Crowley nota que l'endroit ne lui était guère familier. Aussi reprit-il sa position initiale et reprit-il une gorgée de sang. Il écouta ensuite à peine Ferid discutailler avec Ruthven, ses yeux se promenant sur la décoration de la pièce. Des tableaux anciens, des tentures rouges, une bibliothèque, bref un peu comme chez la plupart des nobles de haut rang. Finalement, la discussion s'acheva enfin. Les nouveaux arrivants seraient logés sur place. Une des domestiques fut désignée pour les conduire à leurs appartements. Le groupe irait ensuite commencer sa mission une heure plus tard.

À l'heure dite, les vampires se trouvaient sur le toit d'un petit immeuble fissuré, observant les humains s'affairant en bas. D'après la carte, le laboratoire était non loin. Ferid suggéra de se séparer. Crowley et ses dames bondirent sur un autre toit. Ils descendirent ensuite dans une ruelle déserte.

« Ce laboratoire doit être gardé. » fit Horn Skuld.

« Exact. Et grand également. » ajouta Crowley.

Ils se mirent donc en quête d'un large bâtiment avec des humains postés devant. Ils trouvèrent ce qu'ils cherchèrent bien plus loin, tout au bout d'une rue. Cependant, il n'y avait aucun garde devant le grand portail en fer.

« Vous croyez que c'est là ? » questionna Chess Belle.

« Peut-être. Il faut avouer que des ardes devant attireraient immédiatement l'attention. » fit Eusford.

Une seule manière d'être sûr : aller vérifier. Les trois vampires cheminèrent vers la clôture métallique qu'ils franchirent d'un bond. Un vaste jardin les séparait de l'entrée. Ils usèrent de leur vitesse pour arriver près de la porte. Crowley écouta. Oui, il y avait bien des personnes là-dedans. Maintenant, était-ce des scientifiques ou simplement des réfugiés … l'homme leva la tête, examinant la bâtisse. Un peu plus loin, il avisa une fenêtre barrée par des planches. Le vampire s'y rendit et les arracha. Ses deux congénères suivirent. Il s'avéra que l'intérieur était entretenu. Le trio progressa dans les couloirs. Crowley intima l'ordre de ne pas être repérés tant qu'ils n'étaient pas sûrs d'être au bon endroit.

La place était certainement un lieu administratif autrefois. Quelques bureaux étaient abandonnés.

« Psst ! J'ai trouvé un escalier. » signala Chess.

Il descendait dans les entrailles du bâtiment. Crowley prit la tête, attentif à une quelconque présence humaine. Il perçut bientôt des bruits d'activité en bas, ainsi que des machines. Oui, ils devaient avoir trouvé ce fameux labo. Une fois en bas, les vampires se dissimulèrent derrière une imposante armoire métallique. Dans un tube en verre se trouvait le cobaye de cette expérience : un humain, dont les bras n'étaient plus que deux pics de chairs. Il n'avait plus de mains, ces dernières ayant fusionné pour se terminer en pointe, comme les pattes d'une mante religieuse.

« Pas de doute, c'est bien ici. Chess, va prévenir Ferid et Mika. Dis-lui aussi que nous commençons le nettoyage. » fit Crowley à voix basse.

« Tout de suite Crowley-sama. »

Chess partit rapidement. Crowley et Skuld se montrèrent. Mais avant que quiconque ne les remarque, ils détectèrent un danger. Un groupe d'humains tomba de l'étage du dessus, et se mit à leur tirer dessus. Les vampires esquivèrent les balles, quoique certaines pénétrèrent la chair dû à la quantité de coups tirés.


Crowley passa à travers une fenêtre, poussant un être humain devant lui. Il sortit son épée.

« Là. Ici nous serons plus à notre aise pour batailler. » lança-t-il à son opposant.

Son adversaire se releva. Des mèches brunes s'échappèrent d'une capuche. L'humain avait le visage masqué jusqu'aux yeux. Malgré cela, le vampire distingua des formes féminines. Lorsque l'humaine donc, eut sorti son épée, Crowley passa à l'attaque. Vif comme seule son espèce peut l'être, il chargea. Les lames entrèrent en contact. Pensant joindre l'utile à l'agréable et ainsi s'amuser un peu, il ne démontra pas son potentiel. Le 13ème géniteur se contenta donc de croiser gentiment le fer, du moins de son point de vue. Cependant … un détail commençait à l'intriguer. Il se mit à observer plus attentivement les mouvements de son opposant. Les sourcils du vampire se froncèrent. Ces attaques, feintes et parades lui étaient anormalement familières.

Soudain, la lame passa à ras de sa tête. Il contre-attaqua, et l'autre leva son épée pour bloquer. Les yeux rubis du vampire accrochèrent soudain une gravure sur la poignée.

« ! »

Une armoirie en or, représentant un cerf saillant aux croissants acculés. Autrement dit, un cerf cabré sur ses pattes arrières avec deux croissants de lune se tournant le dos au-dessus des bois. Les armoiries de sa famille.

« Où as-tu eu cette épée ? » interrogea Crowley.

« Mais en quoi ça vous regarde ? » lui répondit-on.

L'humaine poursuivit son offensive. Le vampire en face décida de tester un peu les connaissances de son opposante. Il lança plusieurs coups pour constater qu'ils étaient parés ou esquivés très exactement de la façon dont il s'y attendait. Ce qui ne manqua pas de piquer davantage son intérêt. Cette humaine connaissait ses techniques. Mais où diable les avait-elle apprises ? De quelqu'un à qui il avait enseigné dans le temps ? Probable.

« Je vais utiliser une botte que seule ma famille connait. C'est mon maître qui nous l'avait enseigné et je ne l'ai apprise à personne d'autre. » songea-t-il.

Crowley reprit le dessus sur l'humaine. Mais elle ne se laissa pas impressionner. Le vampire appliqua alors sa technique. Il se figea quand son adversaire résista. Ils restèrent à se regarder un moment. Elle aussi avait remarqué que ce combat était étrange.

« Toi … qui es-tu ? » questionna Eusford.

« Pourquoi ? T'as l'intention de m'inviter à prendre un verre ? » rétorqua la femme.

« Où as-tu appris ce coup ? Je croyais être le seul à le connaître. » insista le vampire.

« Mais je t'en pose des questions moi ! »

L'humaine se dégagea, puis posa une carte sur son épée, pointe au sol. L'herbe en-dessous se mit à pousser, grandit et forma une liane qui alla ligoter Crowley. Ce dernier poussa un soupir. Il entendit soudain Chess Belle l'appeler. Ah, les renforts arrivaient. Derrière l'humaine, Horn Skuld sortit par la grande porte. Elle aussi était en proie aux humains. Crowley brisa sa liane. Chess accourut à ses côtés et fit mine de s'en prendre à son adversaire.

« Non ! » clama le vampire.

Sa congénère freina son épée.

« Celle-ci … est à moi. » décida le vampire.

Chess observa son maître, qui avait l'air de s'amuser. Haussant les épaules, elle partit aider Horn Skuld.

« Bien, où en étions-nous ? Ah oui, tu peux utiliser l'alchimie je crois. » reprit Crowley, l'épée sur l'épaule.

Sans répondre, la jeune femme utilisa une autre carte qui ressemblait à celles du tarot. Un rayon de flammes en sortit, que le vampire esquiva en bondissant. Voilà qui devenait de plus en plus intéressant. Cependant, il y avait une question en suspens à laquelle il entendait bien obtenir une réponse. Après les flammes vinrent les éclairs, qui touchèrent son épée.

« Aouch ! »

Le choc électrique lui fit lâcher son arme. Sentant l'humaine charger, le vampire leva la main. Il bloqua la lame en la tenant entre les doigts.

« Bon, et si tu me montrais ton visage un peu ? » sourit-il.

Son autre main arracha la capuche et le masque. Crowley passa alors de l'amusement à la surprise. Des mèches rouges comme les siennes cascadèrent autour du visage fin de son adversaire, qui ne devait pas avoir plus de 18 ans. Ses yeux étaient saphir, comme … comme les siens lorsqu'il était humain. Le vampire eut la curieuse impression de se regarder dans un miroir. Les mèches rouges étaient typiques des Eusford, elles avaient commencé avec son arrière-grand-mère. Ses deux frères en avaient hérité aussi, avec une couleur plus ou moins prononcée, et plus ou moins étendue. Ainsi, la jeune fille devant lui n'avait-elle que deux mèches autour du visage, contrairement à lui dont elles formaient toute une frange, et une petite antenne rousse comme lui.

« Mais enfin qui es-tu ? » demanda le vampire.

« Qu'est-ce que ça peut te faire qui je suis ? » riposta la jeune fille.

Crowley afficha des yeux en bille. Était-elle aveugle ou bien stupide ? En attendant, elle dégagea son épée et recula. Le vampire la laissa faire, décidément perplexe. Leur ressemblance n'était pas une coïncidence. Ici en plus, sur sa terre natale. Il n'eut pas le loisir de s'interroger davantage. La jeune humaine attaqua à nouveau. Mais il avait perdu son intérêt pour le combat. D'un geste vif l'épée écarlate déchira les habits au niveau de la gorge. La déchirure et le sursaut que l'offensive engendra révéla un bijou qu'elle portait autour du cou. Une croix rouge qui fit aussitôt remonter des flashs de souvenir devant les yeux du vampire. Il secoua brièvement la tête pour chasser les images du passé.

« La Croix des Templiers. » se dit-il.

Crowley se revit alors recevant ce petit bijou ainsi qu'un chapelet le jour de la cérémonie qui l'avait vu passer d'écuyer à chevalier. Les visages de ses camarades, Victor, son meilleur ami qui s'était entraîné avec lui et avec qui il avait combattu en Égypte. Celui de Gilbert Chartres, un des rares survivants de la Croisade, celui de Gustavo un chevalier plus âgé, Rosso l'écuyer de Crowley à l'époque. L'horreur du champ de bataille. Il les revit tomber un par un. Le vampire entendait presque les sons des épées qui se croisaient férocement, les cris de guerre de l'époque.

Énervé par tout ce passé qui resurgissait tel un bouchon de champagne, Eusford désarma la jeune fille d'un geste rageur. Elle crut bien qu'il allait lui arracher le bras. La créature la saisit ensuite au cou et la souleva de terre.

« Dernière fois que je te le demande. Qui es-tu humaine ? » s'exclama-t-il.

Mais il serrait trop pour qu'elle puisse lui répondre. La petite croix rouge dansa devant les prunelles rubis. Crowley eut l'impression de l'avoir toujours autour du cou. Or il l'avait jeté au sol devant son manoir avec son chapelet, juste après être devenu un vampire.


De ce qu'il remarqua, la croix paraissait ancienne. Une pensée lui traversa l'esprit : était-ce la sienne ? Comment cette gamine avait-elle mis la main dessus ?

« Alors ? » demanda le vampire en la secouant.

Elle rouvrit un œil.

« Pourquoi … veux-tu … le savoir ? Ça changera … quoi ? » articula-t-elle.

Bonne question, songea le vampire, sa colère baissant un peu. Cependant, il n'aimait pas trop que ses interrogations restent sans réponse. Surtout si c'était un de ces stupides humains qui en était la cause.

« Réponds à mes questions et j'envisagerais de te laisser la vie sauve. » reprit Crowley.

« … »

« Où as-tu appris à te battre ainsi ? »

Pas de réponse, en revanche elle pointa la main qui lui serrait le cou. Ah. Le vampire la reposa au sol et desserra sa prise.

« Technique familiale. »

Il fronça les sourcils.

« Et cette croix ? » reprit-il en montrant le bijou des yeux.

« Héritage familial aussi. »

Eusford se demanda un instant s'il avait réellement envie de connaître la suite des réponses. Il prit une inspiration.

« Ton nom ? »

« Et le vôtre alors ? Soyez poli tout de même. » rétorqua-t-elle.

« Crowley Eusford. Satisfaite ? »

Il vit alors la colère quitter le visage de la jeune fille. Ses yeux s'arrondirent de surprise, et il put voir ses pensées défiler dans ses iris bleutées.

« Le Crowley Eusford ? » demanda-t-elle.

Ce fut au tour du vampire d'afficher l'étonnement.

« Quoi ne me dis pas que tu me connais. »

« Si. »

« Oh et par quel moyen je te prie ? » demanda-t-il avec ironie.

« Parce que je m'appelle Eusford. Emily Eusford. Tu es mon ancêtre. »

Enfin la réponse à sa question. Inconsciemment, le vampire relâcha sa captive.

« Ma famille s'est éteinte il y a deux cents ans. » objecta le vampire.

« Non. Juste exilée et disgraciée aussi. »

Oh. Première nouvelle. En tout cas, la jeune fille n'avait pas peur de lui. Crowley baissa son bras, sans savoir comment réagir. Sa descendante … eh bien s'il avait su. En tout cas, voilà qui expliquait leur ressemblance.

« Crowley on décroche ! » appela Ferid.

Les humains repoussaient les vampires à coup d'alchimie. Après un dernier regard à Emily, il rejoignit les autres.

Pendant que Ferid rendait compte de leur échec à Ruthven, Crowley avait regagné sa chambre. Ainsi, sa famille était encore en vie aujourd'hui. Ce qu'il en pensait ? Il n'en savait rien. Honnêtement aucune idée. Il songea juste que son style d'épéiste s'était transmis. Et la croix rouge … une croyance passée aussi sans doute. Tsss, la religion quelle idée débile se dit-il. Venant de quelqu'un qui avait autrefois était si croyant la pensée pouvait surprendre. Le vampire resta un moment le regard rivé sur le paysage qu'il apercevait depuis sa fenêtre. Une heure plus tard, le vampire ouvrit la fenêtre et sauta. Il quitta le domaine du quatrième géniteur. Un peu d'air frais lui ferait du bien. Les mémoires de son passé ne cessaient de tourbillonner dans sa tête et il devenait nerveux.

Ses pas le menèrent là où il avait rencontré Emily. Les humains avaient quitté les lieux visiblement. Crowley continua à avancer. Il entendit des bruits d'activité humaine au loin. Sans qu'il n'y prenne réellement garde, il se tourna en direction de ces sons et s'y rendit. Perché en hauteur, il observa les humains s'activer. Ils paraissaient sur le point de lever le camp. Soudain, des mèches rouges attirèrent son regard. Emily se fit bousculer par un homme qui ne s'excusa même pas. Un autre lui donna un coup d'épaule, et un autre tenta de la faire tomber en l'entravant avec un manche à balai.

« … »

Une boîte de conserve vide vola dans sa direction et lui heurta la tête. La jeune fille ne broncha pas. Les humains continuèrent leur déménagement. Mais une partie d'entre eux seulement quitta les lieux. Crowley crut reconnaître les scientifiques du labo ainsi que quelques soldats. Emily elle, resta sur place.

« Te voilà, Crowley-kun. » entendit-il.

Le concerné se contenta de tourner les yeux. Il informa néanmoins son semblable que leur cible avait plié bagage. De ce qu'il savait, ils n'avaient pas réussi à tuer le cobaye de laboratoire. Ferid lui demanda alors ce qu'il faisait ici.

« Je suis simplement venu voir où ils en étaient. Je me doutais qu'ils ne resteraient pas en place après notre attaque. » répondit Eusford en croisant les bras.

« Mais n'aurait-il pas été plus avisé de suivre ceux qui nous intéressent ? » souleva Ferid.

« Sont partis par là. » répondit Crowley en pointant une direction.

Le septième progéniteur pencha la tête. Il crut remarquer que le regard de son camarade était fixé sur un humain en particulier. Mais avant qu'il ne puisse rajouter un mot, le noble aux mèches rouges fit volte-face et s'en alla.


Durant les trois jours qui suivirent, Crowley se retrouva à venir plusieurs fois au même endroit. Il avait cru pouvoir se détourner des souvenirs qui l'assaillaient, mais en vain. Et à présent, l'image de sa descendante se superposait à ces souvenirs. Ses camarades étaient partis à la poursuite de l'autre groupe des humains.

« Mais enfin qu'est-ce que je fais là ? » se demanda-t-il.

Qu'est-ce qui pouvait bien l'amener ici ? Les vampires n'avaient aucun désir sauf celui du sang. Pourtant, son corps semblait lui commander de venir là. Le vampire ne réfléchissait même pas à ce qu'il faisait, il venait c'est tout. Et il restait là, planté durant de longues minutes à observer. Il observait Emily Eusford. Sa descendante, probablement le seul membre de sa famille encore en vie. Mais pourquoi en revanche … il avait du mal à le définir. Crowley se sentait mal à l'aise depuis qu'il avait posé le pied en Angleterre. Son passé lui revenait en pleine figure et lui laissait une impression d'inachevé. La nuit il rêvait de sa vie d'autrefois. Le vampire rêvait de ses anciens compagnons.

Après huit cents ans de vie, ils lui reprochaient dans ses songes de les avoir laissé tomber. Comment était-ce possible après tout ce temps ? En étant objectif, tout ici lui rappelait sa vie d'humain. Les paysages, les monuments, la langue … et maintenant quelqu'un qui portait son nom. Qui avait appris ses techniques et possédait une croix des Templiers. Le vampire sentait en son cœur comme un poids, presque du remords. Certaines choses pouvaient-elles rester ainsi ancrées dans le cœur ? Il avait vécu des choses particulièrement intenses et douloureuses avant sa transformation. Sa nature de vampire les avait atténuées, mais certes pas effacées. Car il s'en rappelait toujours.

Crowley soupira. Ah, Emily s'éloignait. Le vampire se demanda aussitôt quel goût avait son sang. Le même que sien au passage. Enfin, un petit peu vu l'âge qui les séparait. Ben tiens, il pourrait ainsi goûter à son propre sang d'une certaine manière. L'idée lui plut. Puis au moins, ce serait se débarrasser de cette curieuse habitude qui le poussait à venir. Crowley descendit donc de son perchoir. Il prit la direction de la jeune fille. Il accéléra le pas. Se mettant ensuite à courir, il finit par la rattraper et la plaqua au sol. Les bras aussitôt immobilisés, Emily n'eut pas le temps de comprendre. Tout ce qu'elle vit fut les mèches rouges et des yeux rubis. Eusford plongea aussitôt vers la gorge.

Et … rien. Il resta à un centimètre de la peau, sans pouvoir aller plus loin. Allons bon. Il referma légèrement la bouche, puis réessaya. Mais les canines ne touchèrent pas la chair. Crowley resta la bouche ouverte, se trouvant incapable de mordre. Ben tiens, manquait plus que ça. Il se redressa, perdu. Emily se contenta de le regarder du coin de l'œil. Son cœur battait la chamade. Ancêtre ou pas, il restait un vampire et en général ça mordait ces choses-là. Alors pourquoi celui-là hésitait-il ? Ce n'était pas un débutant tout de même. La jeune fille connaissait son arbre généalogique, et ce vampire-là n'était plus de toute première main. Crowley souleva la brune par le cou, et passa à l'autre côté.

Non plus. Ça marchait pas plus à gauche qu'à droite.

« Que m'as-tu fait ? » demanda-t-il agacé.

« Quand aurais-je eu le temps de faire quoi que ce soit ? » répliqua Emily.

À la connaissance du vampire, il n'existait rien en ce bas monde qui puisse empêcher un vampire de mordre sa victime.

« Je n'ai jamais hésité à mordre qui que ce soit, tu as bien dû faire quelque chose, maudit bétail ! »

« Mais j'en sais rien moi, c'est peut-être l'âge hein ! C'est problème plus courant qu'on ne croit chez les hommes, monsieur le vacher. » rétorqua Emily.

Crowley se mit debout cette fois, tenant sa captive à bout de bras. Il leva une main, aux doigts recourbés dans une posture d'attaque évidente. Au bout d'une minute cependant, il la relâcha. Emily tomba sur les fesses avec un aïe sonore. Lorsqu'elle releva la tête, son ancêtre fichait le camp. La jeune femme resta là un moment à le regarder partir, pensive. Pourquoi diable en effet ne l'avait-il pas mordue ? Ce n'était pas faute d'avoir essayé pourtant. Finalement, ne pouvant avoir de réponse à sa question elle se releva, épousseta ses vêtements et reprit son chemin. Elle avait été envoyée chercher des provisions. La jeune fille fouilla un magasin, puis revint avec un sac de boîtes de conserves ainsi que des pâtes et du riz. Elle aida à la confection du dîner du soir.

Plus tard dans la nuit, Emily quitta le campement. Passant par un chemin à mi-hauteur, entre des gravats et des lampadaires à moitiés couchés, la brune arriva ensuite devant une imposante demeure. Le manoir Eusford.