Harry avait l'impression de cauchemarder lors de la dernière bataille.
Un bruit terrible:
les râles des mourants mêlés aux sortilèges hurlés les cris de désespoir des vivant en voyant l'un des leurs tomber...
Harry s'était trouvé lâche, sous sa cape d'invisibilité.
Lupin lui avait fixé un but clair et précis: tu te planques et tu tues Voldemort. Ne te préoccupe pas du reste.
Mais le reste hantait Harry. Où était Ron? Ce cri était-il d'Hermione? Ginny s'en sortait-elle?
Où était Neville? Morts? Vivants? Blessés?
Ensuite, il L'avait vu. Le Seigneur des Ténèbres dans toute son horreur, debout, frèle comme un vieillard, chauve. Il puait le malheur et même le mal tout court à des kilomètres.
Il empestait la mort. Il venait de tuer Snape.
Toute la haine d'Harry était dirigée sur Voldemort, toute la rage qu'il avait cherché à augmenter, en détruisant les horcruxes, en se remémorant toutes les morts que Tom Riddle avait causé.
Il avait dégainé sa baguette... Mais il n'avait pas pu.
Il avait essayé. Mais Harry était quelqu'un de foncièrement bon. Incapable de tuer. Il en pleurait.
Il entendit un cri, à quelques centimètres de son oreille:
-Harry! Baisse-toi tout de suite!
Il sentit qu'on le poussait. Qu'il tombait. Qu'il roulait. Sur lui, il vit Draco Malfoy, livide. Sa cape était tombée. Il vit aussi Neville Longbottom , à l'endroit exact où il se tenait la minute précédente, lancer un sortilège impardonnable sur Bellatrix Lestrange et la tuer, du même coup.
Si Draco ne l'avait pas poussé, c'est lui qui aurait été victime du sortilège. Lui qui serait mort.
-De rien Potter. A présent sauve nos vies et tue-le!
Et le blond avait transplané, pour éviter Voldemort et ses colères.
Harry s'était retrouvé debout, baguette à la main, devant Lui.
Il l'avait nargué. Il avait dégainé sa baguette.
-Avada...
Harry avait été incapable de tuer. Mais où était ce putain de "pouvoir de l'amour"? A quoi avait pensé Dumbledore?
Harry avait entendu un hurlement. Ginny venait de transplaner juste devant lui, contre ses lèvres. Il avait senti ces dernières se glacer dès que le sortilège de mort avait touché le corps gracile de la jolie rousse.
La jeune fille était morte dans ses bras. Pour lui. Le Survivant avait hurlé. Et après...?
Le vide.
Le trou de mémoire.
Rien.
Harry avait réouvert les yeux à Saint Mungo.
Il mourrait de mal au crâne. Il n'y avait aucun médicomage. Tout lui était revenu en mémoire, en bouche, il avait eu un goût de sang. Il avait vomi.
Il s'était rendormi.
La seconde fois, une jolie infirmière était près de lui.
-Bonjour Monsieur Potter.
Il avait eu la bouche pâteuse et n'avait su répondre.
-Je me prénome Viviane. Vous êtes à Saint Mungo, vous allez bien. Vous êtes resté dans le coma pendant un mois. Nous sommes heureux de vous ravoir parmi nous.
Il n'avait pu sourire.
-Vous êtes un héros monsieur Potter. C'est à moi de vous l'annoncer: Vous avez gagné la guerre! Il est vaincu! Il est mort!
Harry avait fermé les yeux.
L'infirmière en aurait pleuré. Il était tellement beau, avec ses cheveux de jai en épis, son nez droit, son grand corps aux muscles fins et toniques... Mais il y avait surtout son regard. Ses splendides yeux verts étaient tellement sombres qu'ils en paraissaient noirs, très tristes et mélancoliques.
-Je vous aime, Monsieur Potter, avait-elle ajouté, très troublée.
Il s'était endormi.
Voilà une semaine qu'Harry s'était réveillé. Il avait enfin recouvré la totalité de ses faculté, mais devait encore rester au lit un moment.
Le survivant savait que ça n'avait rien à voir avec les séquelles de son coma. C'était surtout pour lui éviter encore un peu les médias. Les tourbillon. Son retour triomphal.
-Bonjour Harry.
-'Jour.
-Est-ce que ça va?
Harry souria pour la première fois depuis sa victoire.
-Moarf.
-Toujours aussi locace, je vois..., avait ironisé Ron.
-Ron... Ginny?
Le rouquin avait maigri depuis La victoire. Il était devenu terriblement beau, bien plus mature, plus homme, plus fort. Il avait "attrapé" un charisme que même Bill lui aurait envié, si il était encore de ce monde.
Il avait regardé le survivant dans la blanc des yeux; en rougissant des oreilles malgré lui.
-Harry... Elle est morte.
-Je sais. Est-ce que je pourrai encore la voir une dernière fois?
-On.. Ne savait pas quand tu allais te réveiller. Maman a décidé de prendre les devant, elle est enterrée au terrier, comme tous les Weasley morts pendant cette fichue guerre, Harry. Je suis désolé.
Ron n'avait pas pleuré, il avait apris à être fort. Plus fort que la douleur, la peine et la mort. Hermione l'aimait pour ça.
-Je comprends, avait simplement répondu Harry.
Hermione lui avait pris la main, mais le grand brun l'avait vite retiré. Son amie n'insista pas.
-Je... Hermione... Pardon mais.. J'ai besoin de discuter en tête à tête avec Ron. Je suis désolé.
-Ce n'est rien Harry. Je comprends. Si tu as besoin de moi...
-J'ai survécu à tout Mione. Ne t'en fais pas pour moi.
-A bientôt Harry, avait elle murmuré en quittant la chambre blanche, froide et impersonnelle de son ami. Juste après, elle avait pleuré.
-Malfoy?, avait demandé Harry à Ron.
-La fouine s'en est tiré sans casse. Beaucoup l'ont vu te sauver, il doit être quelque part aux Seichelles, maintenant, avec son Ordre de Merlin Première classe.
-Neville?
-Vivant. Bien vivant même. Tuer Bella a été la plus belle chose qui lui soit arrivé... Après Lavande, bien sûr. Ils comptent se marier en mars, et Név te voudrait comme témoin.
-Et toi?
-Oooh... Comme témoin je pensais plutôt à Goyle mais, si tu insistes...
Harry avait encore souri. Il savait que depuis le début de la guerre, Ron et Hermione entretenaient une liaison aussi passionée que secrète, et Ron lui avait confié que, s'ils s'en sortaient, il la demanderait en mariage.
-Crétin.
-Je vais bien Harry. Hermione m'aime. Maman a énormément besoin de moi. La mort de Bill, Percy et Ginny ont été dures pour elle. Très. Papa... est juste amnésique. Notre famille ne s'en est pas trop mal tirée... Je suis plus fier que jamais d'être un Weasley. Et tu es vivant... En cas de guerre, que demander de plus?
-Tu es bien plus fort que "le héros nationnal", tu sais...
-Bien des gens ont perdu dans cette guerre plus que moi. Toi le premier. Si Hermione était morte... Je crois que je me serais pendu. Tu es bien plus fort que moi, il en a toujours été ainsi. Il en sera toujours ainsi.
Les deux amis s'étaient tu, pendant un long moment.
-Qu'est ce qui s'est passé... Pour moi, je veux dire.
-Je ne sais pas Harry. Personne ne sait, personne n'a compris. Il est tombé, mort et toi, tu t'es évanoui.
-Je... suis fatigué, Ron.
-Oui, j'ai compris, je vais te laisser... Courage Harry. Tu n'es pas vivant pour rien.
Ron était parti. Harry avait pleuré en silence, longtemps, très longtemps. Il n'avait plus personne à haïr. Voldemort et Snape morts, Draco qui lui avait sauvé la vie. Personne sur qui passer sa rage d'être vivant.
Personne sur qui se venger de tous ces morts.
De toutes façon, songea Harry, la vengeance a le goût amer de l'inutilité. Voldemort est six pieds sous terre et je ne suis pas soulagé. Tout ça ne servait à rien. A rien.
Trois jours après son "coming back", Harry Potter avait reçu une lettre sibiline, anonymme. Presque... L'écriture de Draco, tellement tortueuse et caractéristique, le survivant l'aurait reconnu entre mille.
"Potter... Arrête de survivre, bordel! VIS.
Le "survivant" est un surnom, pas une philosophie de vie qu'on t'impose.
A quoi auront servi les morts de tes amis, si tu passes le reste de tes jours à te morphondre?
Je ne juge pas. Je constate. Je ne t'aime pas, je te hais.
En espérant que tu ne filtres pas ton courrier, sinon cette lettre ne te parviendra pas.
Te pourrir la vie me manquera..."
Ces quelques mots avaient hanté Harry pendant des mois. Quand il était sur la tombe de Ginny. Quand il parlait avec Molly Weasley. Quand il plaisantait avec Fred. Quand il désirait une fille.
Au mariage de Neville, il avait sauté le pas. Il avait bu. Trop. Il avait dragué une jolie brune. Le lendemain, il s'était retrouvé avec la gueule de bois et une fille nue, dans un appartement qu'il ne conaissait même pas. Il s'était habillé très vite et avait transplané dans son duplex, offert par le ministère de la magie, en récompense.
Il avait vomi.
Depuis ce jour-là, pour combler le vide qu'avait laissé Ginny en lui, il avait passé toutes ses nuits avec des filles différentes, plus belles et désirables les unes que les autres. Une seule nuit par fille, voilà la règle qu'il s'était fixé. Ne pas s'attacher. Prendre. Partir. Vivre.
